LE SENTIER DE DIEU DANS LES TEMPS DIFFICILES

Adrien Ladrierre


Les sous-titres ont été ajoutés


Table des matières :

1 - L’état de choses autrefois.

1.1 - Avant la Pentecôte

1.2 - Après la Pentecôte

1.3 - Une église unique

1.4 - Relations entre assemblées locales

1.5 - Déroulement des réunions

1.6 - Cas de désordres

2 - Chapitre 2 — L’état de choses actuel.

2.1 - Ce qu’on appelle profession chrétienne

2.2 - Multiplicité de corps

2.3 - L’église s’appuyant sur l’état et du monde

2.4 - Disparition de la saine doctrine

2.5 - Le clergé — cléricalisme

2.6 - Ordination

2.7 - Culte

2.8 - Reconnaître que l’état actuel de l’église n’est pas celui de la Parole de Dieu

2.9 - Fausses justifications

2.10 - Des œuvres de grande apparence — évangélisation

2.11 - Confusion

3 - Chapitre 3 — Témoignages de la parole de Dieu quant à la ruine.

3.1 - La construction d’origine est saine

3.2 - Ruine de ce qui est laissé à la responsabilité de l’homme

3.3 - Annonce du mal par le Seigneur : paraboles de Matthieu 13

3.4 - Annonce du mal par Paul

3.5 - Annonce du mal par Pierre et autres

3.6 - Début du déclin

3.7 - Constatation et annonce du mal par Jean et Jude

3.8 - Pas de rétablissement

4 - Chapitre 4 — Quel est le sentier de la foi dans un temps de ruine ?

4.1 - La grâce amène encore des âmes

4.2 - Il faut plus que le salut de l’âme

4.3 - Une question : Où se réunir ?

4.4 - Où trouver les ressources ? — La Parole de Dieu

4.5 - 2 Timothée 2 — Responsabilité individuelle

4.6 - Ne pas rester isolé

5 - Que reste-t-il pour la marche collective ?

5.1 - Le seul centre des rassemblement

5.2 - Le Saint Esprit et les dons

5.3 - La Parole de Dieu

5.4 - Le culte

5.5 - La Cène

5.6 - Discipline nécessaire

5.7 - Comment garder l’unité


1 - L’état de choses autrefois.

Le sujet que je désire placer devant le lecteur chrétien est des plus importants. Tout nous annonce que nous sommes aux derniers jours et dans les temps fâcheux que signalent les apôtres (1 Tim. 4:1; 2 Tim. 3:1; 2 Pier. 3:3; 1 Jean 2:18). Je ne parle pas ici des difficultés politiques et sociales : cela regarde le monde ; je parle de ce qui concerne « la foi qui a été une fois enseignée aux saints » (Jude 3), et il importe pour le chrétien de savoir quel est, à l’égard des choses de la foi, le chemin de Dieu dans ces temps difficiles, afin d’y marcher dans l’obéissance. Il est évident que l’on ne peut connaître ce chemin, l’expression de la volonté de Dieu, que dans sa Parole, dans l’Écriture divinement inspirée. Je suppose donc que mon lecteur est pleinement convaincu qu’il a dans les Écritures toute la parole de Dieu, rien que sa parole, et qu’ainsi elle est pour lui l’autorité suprême qui seule fait règle, et à laquelle tout chrétien est tenu de se soumettre.

Tout lecteur attentif des Écritures ne peut qu’être frappé du contraste qui existe entre l’Église, telle que nous la présente le Nouveau Testament, et l’état de la chrétienté de nos jours. C’est la première chose sur laquelle je m’arrêterai et qu’il est nécessaire de bien constater.


1.1 - Avant la Pentecôte

Le Seigneur Jésus, durant sa vie sur la terre, avait rassemblé autour de lui un résidu tiré de la nation juive. C’étaient ses disciples, ceux qui avaient cru en lui et avaient répondu à son appel. C’est d’eux qu’il dit, après avoir été rejeté par les conducteurs des Juifs : « Qui est ma mère, et qui sont mes frères ? Et étendant sa main vers ses disciples, il dit : Voici ma mère et mes frères ; car quiconque fera la volonté de mon Père qui est dans les cieux, celui-là est mon frère, et ma sœur, et ma mère » (Matt. 12:48-50). Jésus ne reconnaissait en Israël que ceux qui, en s’attachant à sa Personne, faisaient la volonté de Dieu ; de tout temps, ce qui caractérise ceux qui plaisent à Dieu et forment un résidu au milieu du mal, c’est l’obéissance.

Plus loin, après la confession de Pierre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant », nous entendons le Seigneur annoncer à ses disciples ce grand fait : « Sur ce roc » — sur la vérité capitale que renferme cette confession — « je bâtirai mon assemblée (*), et les portes du hadès ne prévaudront point contre elle » (Matt. 16:18). L’Assemblée devait remplacer Israël ; elle était une chose encore à venir que Christ devait bâtir, une chose à Lui — « mon assemblée » — et qui, une fois établie, était garantie contre tous les efforts de l’ennemi par la puissance vivante du Fils de Dieu. Telle est la première mention faite de l’Église dans l’Écriture.


(*) Je me servirai indifféremment des mots Église ou Assemblée qui ont le même sens, bien que le premier soit souvent pris dans une acception différente, comme désignant le lieu où l’on s’assemble.

Aussi longtemps que Christ fut sur la terre, l’Église n’existait donc pas. Les pierres vivantes qui devaient la composer étaient bien là dans la personne de Pierre et des autres disciples, mais Christ n’avait pas accompli la rédemption et n’avait pas encore montré, par sa résurrection, sa puissance de vie qui triomphe de la mort et de celui qui avait le pouvoir de la mort (Héb. 2:14). Or c’est sur Christ, « déterminé Fils de Dieu, en puissance, selon l’Esprit de sainteté, par la résurrection des morts » (Rom. 1:4), que l’Église devait être fondée. Une autre chose devait avoir lieu. L’Esprit Saint avait été promis, mais ne pouvait venir avant que Jésus eût été glorifié (Jean 15:26; 7:39). L’Esprit Saint était la puissance qui devait réunir les pierres vivantes et les établir sur le roc, afin que l’édifice s’élevât.


1.2 - Après la Pentecôte

Suite à la promesse du Seigneur, le jour de la Pentecôte, l’Esprit Saint vint sur ceux qui étaient réunis à Jérusalem (Act. 2:1-4), et dès ce moment l’Assemblée, l’Église, exista. À la place du temple, Dieu eut sur la terre « une habitation par l’Esprit » (Éph. 2:22), au milieu de ceux sur qui l’Esprit Saint était descendu, et il n’en eut depuis jamais d’autre.

L’Assemblée, dont le Seigneur avait dit qu’il la bâtirait, avait donc commencé son existence ; elle était composée de ceux qui avaient cru au Seigneur Jésus et avaient été baptisés du Saint Esprit. Aussitôt après ce fait important, ceux que le Seigneur avait appelés, les apôtres, Pierre à leur tête, commencent à prêcher l’Évangile (Act. 2:14). Des foules croient à leur parole, sont sauvées, baptisées, et sont ajoutées… à quoi ? à l’Assemblée (Act. 2:47). Jusqu’alors l’Église n’avait pas franchi les bornes de Jérusalem ; mais bientôt l’œuvre s’étend. Des Juifs, elle passe chez les Samaritains, puis chez les gentils (Act. 8:10), et partout où des âmes sont converties au Seigneur, elles se rassemblent et forment, dans ces divers endroits, des assemblées ou églises locales, qui ne reçoivent dans le Nouveau Testament d’autres désignations que celles d’églises de Dieu ou de Christ, avec l’indication de la ville ou de la contrée où elles se trouvent. Ainsi il est parlé des églises de la Judée, de la Samarie et de la Galilée (Actes 9:31) ; de l’église d’Antioche, de celles de Syrie et de Cilicie, de celles de la Galatie et d’Asie (Act. 13:1; 15:41; Gal. 1:2; 1 Cor. 16:19) ; de l’église de Dieu à Corinthe, de celle des Thessaloniciens en Dieu le Père, des églises du Christ (1 Cor. 1:1; 1 Thes. 1:1; Rom. 16:16). Et ceux qui composent ces assemblées sont « les saints », « les fidèles », « les frères » (Act. 26:10; Éph. 1:1; Act. 11:29. Il serait trop long de citer tous les passages où ces termes se trouvent).


1.3 - Une église unique

Mais bien qu’il y eût des églises locales en divers lieux, un grand fait ressort de l’ensemble des Écritures du Nouveau Testament, c’est que toutes ces églises formaient sur la terre un corps unique — l’Assemblée ou l’Église de Dieu — dont chaque assemblée locale était l’expression dans l’endroit où elle se trouvait.

Ainsi le Seigneur dit : « Je bâtirai mon Assemblée ». Elle est donc une, Paul parle aux anciens de l’église d’Éphèse, de « l’Assemblée (ou l’Église) de Dieu qu’il a acquise par le sang de son propre Fils ». À Timothée, il dit : « La maison de Dieu, qui est l’Assemblée (ou l’Église) du Dieu vivant » ; nous voyons encore ici qu’elle est une. « Nous avons tous été baptisés d’un seul Esprit pour être un seul corps, soit Juifs, soit Grecs, soit esclaves, soit hommes libres ; et nous avons tous été abreuvés pour l’unité d’un seul Esprit », dit le même apôtre. « Il y a un seul corps et un seul Esprit », et ce corps, c’est l’Assemblée, car Paul dit encore : « Dieu a donné Christ pour être chef (ou tête) sur toutes choses à l’Assemblée, qui est son corps » ; « il est le chef (ou la tête) du corps » (Act. 20:28; 1 Tim. 3:15; 1 Cor. 12:13; Éph. 4:4; 1:22, 23; Col. 1:18). Tous ces passages démontrent l’unité de l’Église, et remarquez qu’il s’agit partout de l’Église sur la terre, de sa manifestation ici-bas comme un seul corps et que, dans quelque lieu que ce fût où il y avait des chrétiens rassemblés, ils étaient là tous ensemble l’expression de l’Assemblée universelle de Dieu ou de Christ, sans qu’aucun autre nom les distinguât, sinon peut-être les termes de mépris que leur donnaient leurs adversaires, tels que ceux de « Nazaréens », de « secte que l’on contredit partout », de « la voie » (Act. 24:5; 28:22; 9:2; 24:14).

Il y avait donc, bien qu’en divers lieux, une unique assemblée chrétienne, l’Assemblée de Dieu, nettement distinguée comme corps de tout ce qui l’entourait, Juifs ou gentils, comme le montre le passage suivant : « Ne devenez une cause d’achoppement ni aux Juifs, ni aux Grecs, ni à l’assemblée de Dieu » (1 Cor. 10:32). Il s’en suit que, lorsqu’une âme avait été convertie au Seigneur, elle n’avait pas à chercher à qui se joindre. Il n’y avait dans chaque endroit qu’une assemblée de Dieu, et l’âme qui avait cru, par cela même faisait partie de cette assemblée, y était ajoutée, et faisait ainsi partie du corps, de l’Église de Dieu en tout lieu (*). L’Église était distincte du monde et était une, selon le vœu exprimé par le Sauveur dans sa prière (Jean 17:14, 20, 21). On y entrait, non en adhérant à un credo quelconque, non après une instruction plus ou moins longue, mais par la conversion, « par le lavage de la régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint » (Act. 16:31-34; 2:38, 41 ; Tite 3:5, etc.).


(*) Il résultait aussi du fait que dans chaque endroit il n’y avait qu’une seule assemblée de Dieu, bien qu’il pût y avoir plusieurs lieux de réunion, qu’une lettre adressée à l’assemblée de ce lieu parvenait sûrement à son adresse.

1.4 - Relations entre assemblées locales

Les assemblées locales étaient en communion distincte les unes avec les autres, car tous ceux qui les composaient se considéraient comme membres du même corps (Rom. 12:4-5; 1 Cor. 12:12, 26, 27). Dans une même assemblée locale, cette communion des membres du corps les uns avec les autres trouvait son expression à la table du Seigneur, dans la fraction du pain. L’apôtre dit : « Le pain que nous rompons n’est-il pas la communion du corps de Christ ? Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain » (1 Cor. 10:16, 17). Mais tous les croyants étant membres du corps de Christ — l’Assemblée — la table à laquelle on se trouvait en différents lieux, était une seule et même table du Seigneur en tous ces lieux. Celui qui était à la table du Seigneur à Corinthe et y rompait le pain, était aussi à la table du Seigneur à Rome et pouvait y rompre le pain. L’unité, ainsi que la communion entre les assemblées locales, était ainsi exprimée et gardée. Elle l’était encore autrement. Nous voyons l’assemblée d’Antioche envoyer des secours aux nécessiteux de l’église de Jérusalem (Actes 11:27-30) ; cette même assemblée envoie Paul et Barnabas avec quelques autres à Jérusalem, pour exposer aux apôtres et aux anciens une question relative à l’observation des cérémonies judaïques par les gentils. Devaient-ils les observer ou non ? La décision prise, la communion des églises locales de la Judée et de celles des nations est confirmée (Actes 15:30, 31; 16:4, 5). Un autre fait qui montre cette unité et cette communion, ce sont les lettres de recommandation données aux chrétiens qui se rendaient d’une assemblée dans une autre (Actes 18:27).


1.5 - Déroulement des réunions

À cela se rattache encore le libre exercice des dons dans les assemblées. Les ouvriers du Seigneur, sans recevoir d’ordre d’aucun homme, ni d’aucun corps d’hommes, mais conduits uniquement par l’Esprit Saint, vont évangéliser ou se rendent dans les diverses assemblées, pour enseigner ou édifier, selon le don qu’ils ont reçu du Seigneur (Act. 9:20; 8:4, 5, 26, 40; 13:2; 18:24-27; 1 Cor. 16:12, etc.). Nul ne se dit ou n’est appelé pasteur d’une assemblée ; il y a dans chacune plusieurs anciens (nommés parfois évêques ou surveillants), mais on ne trouve aucune trace d’une hiérarchie, ni d’une consécration autre que celle de l’Esprit Saint. Il n’y a point de clergé.

Les saints s’assemblent autour du Seigneur pour rompre le pain en souvenir de sa mort (Act. 20:7; 1 Cor. 11:20-26). Si, dans une réunion, quelqu’un a un psaume, un enseignement, ou quoi que ce soit donné de Dieu pour l’édification de l’assemblée, il agit en toute liberté (1 Cor. 14:26-33). Si un don tel qu’un apôtre, par exemple, se trouve présent, l’assemblée est heureuse de l’entendre. Mais nous ne voyons ni règlements, ni organisation d’aucune sorte, ni constitution. L’Esprit Saint présent dans l’assemblée — cette présence étant reconnue — en était le directeur, et elle avait les enseignements des apôtres.


1.6 - Cas de désordres

Des désordres pouvaient se produire, des erreurs se faire jour. Dans ce cas, la discipline s’exerçait selon les directions données par les apôtres. On ôtait le méchant, on se séparait de l’hérétique (1 Cor. 5:13; Tite 3:10, 11; 2 Jean 9, 10). Mais ces directions étaient jugées suffisantes, car à Corinthe, par exemple, où se trouvaient à la fois le mal moral et le mal doctrinal, l’apôtre ne constitue aucune autorité, ni d’un homme, ni de plusieurs, pour maintenir l’ordre et la doctrine ; c’est l’assemblée elle-même qui doit se purifier du mal, en suivant les exhortations de l’apôtre inspiré dont les paroles sont les commandements du Seigneur (1 Cor. 5:2, 7; 14:37). L’Église, l’Assemblée tout entière, était responsable de se séparer du mal, de maintenir l’ordre, de garder la saine doctrine.

Telle était, en ces temps, l’Église de Dieu sur la terre, visible à tous. Elle était une, sans autre désignation que celle de l’Assemblée de Dieu ou de Christ. On y entrait par la conversion, bien qu’il y eût un signe extérieur de cette entrée dans la profession chrétienne — savoir le baptême. Un ministère libre, selon le don de grâce reçu, s’y exerçait, et la discipline, exercée par l’Église même, excluait le méchant et l’hérétique. L’Assemblée, l’Église, était ainsi à la face du monde un témoignage unique et vivant de la présence de l’Esprit Saint, de la glorification de Christ et de la puissance vivifiante de la grâce.


2 - Chapitre 2 — L’état de choses actuel.

2.1 - Ce qu’on appelle profession chrétienne

Maintenant, en présence de ce qu’était l’Église au commencement, je demande à mon lecteur si ce qu’offre actuellement à nos yeux la chrétienté n’en diffère pas du tout au tout ? La réponse n’est pas difficile pour quiconque ouvre les yeux et ne laisse pas des idées préconçues lui obscurcir la vue. Je n’ai pas à entrer dans l’examen des causes qui ont amené l’état de choses actuel. Je veux simplement le constater. Le paganisme et le judaïsme sont hors de question maintenant : nous naissons dans la chrétienté. Pour la très grande majorité, nous y avons été introduits par le baptême ; ce que nous voyons autour de nous et dans quoi nous sommes, c’est la profession chrétienne. Mais cette chrétienté, cette profession, ce qui est compris sous ce nom, que nous présente-t-il ? Rien que division et confusion.


2.2 - Multiplicité de corps

Au lieu d’un seul corps, l’on voit quantité de corps différents qui se nomment tous église, et qui, pour se distinguer les uns des autres, ajoutent à ce nom une dénomination. Il y a l’église romaine, qui s’intitule église catholique ou universelle, qui réclame pour elle la succession apostolique et prétend être la seule et vraie église. À côté, nous trouvons en Orient l’église grecque, l’église arménienne, l’église copte et l’église abyssinienne ; des sectes diverses et nombreuses existent dans ces différentes églises. En dehors de celles que nous venons de mentionner, on voit les nombreuses églises protestantes, anglicanes, luthériennes, réformées, presbytériennes, congrégationalistes, baptistes, méthodistes, les unes inféodées à l’État, les autres détachées de son joug. On a ainsi les églises nationales et les églises libres de France, du canton de Vaud, de Genève, de Neuchâtel, où se trouvent les églises nationales, indépendantes et libres, sans compter partout d’innombrables sectes diverses, toutes de dénominations différentes, toutes séparées par des divergences souvent profondes, et cependant réclamant pour elles-mêmes la vérité. N’en est-il pas ainsi ? Le tableau est-il exagéré ? Trouvez-vous que cela présente la moindre analogie avec l’Église, telle que nous la voyons dans le Nouveau Testament ? Y a-t-il trace dans l’Écriture d’une sanction donnée à un tel état de choses ? Est-ce là l’unité visible ? Non, c’est la confusion visible. Prenons le cas d’une ville, Genève, par exemple. Combien de corps religieux ou d’églises distinctes nous y verrons, fondées sur des principes différents ! Supposons qu’une lettre apostolique soit adressée « à l’Église de Dieu à Genève » ; où irait-elle ? Et si tous les professants chrétiens se réunissaient pour en prendre connaissance, ne serait-ce pas pour entendre des paroles comme celles-ci : « Je vous exhorte à ce qu’il n’y ait pas de divisions parmi vous, mais que vous soyez parfaitement unis » ? (1 Cor. 1:10). Et encore : « Les œuvres de la chair sont manifestes, lesquelles sont… les divisions, les sectes » (Gal. 5:19-20).


2.3 - L’église s’appuyant sur l’état et du monde

Ce n’est pas tout. Comme je l’ai rappelé, et comme cela était réalisé aux premiers temps, le Seigneur a dit à ses disciples : « Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde » (Jean 17:14). Tel est le caractère de l’Église. Or que voyons-nous ? Ce qui distingue un grand nombre de corps religieux, c’est l’appui qu’ils reçoivent de l’État, et par conséquent la dépendance où ils se trouvent de lui. Est-ce là n’être pas du monde ? L’église romaine élève une prétention plus haute : elle veut dominer les princes, et a autrefois exercé cette autorité. Vouloir une autorité temporelle, est-ce le propre de ceux qui ne sont pas du monde, de ceux qui se réclament du nom de Celui qui n’a pas voulu être roi ici-bas ? (Luc 12:14; Jean 6:15; 18:36). Que dirai-je des pompes mondaines du culte des églises romaine, grecque et anglicane, de leurs hauts fonctionnaires dans les unes et les autres, pape, cardinaux, archevêques, évêques et autres, habitant des palais, s’intitulant princes de l’église, recevant de larges traitements ? Sont-ce là les successeurs des pauvres pêcheurs Pierre et Jean ? Est-ce n’être pas du monde ? Si nous passons aux églises protestantes, nous n’y verrons pas de telles prétentions, ni un tel cérémonial dans le culte, c’est vrai. Mais les unes sont soumises à l’État qui a la haute main sur elles : c’est encore être associé au monde ; les autres sont régies par des constitutions qu’elles se sont faites, les unes selon une forme, les autres d’après une autre, œuvre humaine assurément, et en tout cas accentuant la division. De ces nombreuses congrégations indépendantes de l’État, mais non de l’homme, quelques-unes se sont formées autour d’une doctrine ou d’une forme, d’autres tirent leur nom d’un homme. Encore une fois, je le demande, est-ce cela que nous lisons dans la parole de Dieu ?


2.4 - Disparition de la saine doctrine

Si nous considérons la doctrine, que trouverons-nous ? La parole de Dieu nous dit : « Il y a une seule foi », de même qu’elle dit « Il y a un seul corps » (Éph. 4:4, 5). Est-ce là ce qui existe ? Les églises romaine et grecque retiennent quelques vérités vitales, mais enfouies sous une quantité de traditions et souillées par le contact d’un culte idolâtre. Les églises protestantes ont leurs professions de foi, sur lesquelles on s’accorde si peu que plusieurs sont d’avis qu’il vaudrait mieux n’en avoir point du tout. D’autres les veulent assez larges pour tout embrasser et laissent ainsi lieu à l’équivoque, de sorte que peuvent les signer deux hommes complètement opposés l’un à l’autre sur tel ou tel point de doctrine. Dans les chaires, les écoles de théologie, les livres et les journaux, sont enseignées les doctrines rationalistes à un degré plus ou moins grand, avec plus ou moins de subtilité. L’autorité des Écritures, leur divine inspiration, est battue en brèche, la Personne de Christ, soit dans sa divinité suprême, soit dans son humanité sans tache, est attaquée de diverses manières, et les doctrines du salut par grâce, de l’expiation par le sang de Christ, sont mises de côté. Et s’il en est qui retiennent encore le sain enseignement, au lieu d’obéir à l’injonction de l’Écriture qui dit de se séparer d’un tel mal, ils lui restent associés !


2.5 - Le clergé — cléricalisme

Si nous considérons le ministère, qu’est-il devenu ? Je me hâte de dire que je n’entends point juger les personnes. Il en est plusieurs qui sont des serviteurs de Dieu dévoués. Je m’occupe des principes ! Eh bien ! que voyons-nous dans les différents corps religieux à l’égard du ministère ? D’abord un principe général prévaut partout. On ne peut exercer le ministère sans avoir été consacré par un homme ou un corps d’hommes, qui eux-mêmes doivent l’avoir été. Voilà un clergé établi dans l’Église de Dieu. Dans les églises romaine, grecque et anglicane, ce clergé forme toute une hiérarchie, dont nous ne voyons trace dans l’Écriture, et qui descend de l’archevêque aux simples fonctionnaires ecclésiastiques, sans compter dans l’église romaine celui qui a la triste audace de se mettre à la tête et au-dessus de tous, s’intitulant vicaire de Jésus Christ. Pour n’en être pas venu là, le protestantisme, dans ses différentes dénominations, ne présente pas moins un réel clergé dans des corps de ministres consacrés qui seuls peuvent administrer le baptême et la cène, et qui ne peuvent, quel que soit le don qu’ils aient reçu de Dieu, l’exercer sans de longues années d’études, non de l’Écriture, qui ne tient qu’une assez faible place, mais de sciences plus propres à renverser la foi qu’à l’établir. À la place du ministère dans la puissance de l’Esprit, on a un ministère fait et préparé par l’homme, et qui, au lieu de s’exercer librement, selon le don de grâce reçu, dans la dépendance unique du Chef de l’Église, a besoin du contrôle et de l’approbation de l’homme. Et cela est si vrai que, s’il y avait quelqu’un dans une congrégation qui eût reçu un tel don de grâce, à moins d’être ministre consacré et autorisé, il ne pourrait ouvrir la bouche. N’est-ce pas éteindre l’Esprit ? (1 Thes. 5:19). Est-ce là le principe suivant lequel, dans la Parole, nous voyons agir les ouvriers du Seigneur, et d’après lequel Paul disait de lui-même : « Apôtre (ou envoyé) non de la part des hommes, ni par l’homme, mais par Jésus Christ » ? (Gal. 1:1). Si parfois, dans quelques congrégations, on laisse un peu de liberté, c’est une exception : le principe et la manière de faire générale sont bien ce que j’ai exposé.

Qu’en résulte-t-il ? Tel jeune homme veut se vouer au ministère, comme on dit. Il n’a peut-être aucun don, il n’est peut-être pas même converti, n’importe ; il fera ses études de théologie, il passera des examens, soutiendra une thèse, et converti ou non, sain dans la foi selon l’Écriture ou non, il sera reçu à un grade quelconque, comme dans les sciences humaines et, s’il le demande, sera consacré et obtiendra un poste de pasteur et deviendra ainsi un conducteur d’âmes, ayant à les enseigner et à les nourrir de la saine doctrine qu’il ne possède peut-être pas plus que les dons nécessaires pour sa charge d’âmes. Où est en tout cela la direction de l’Esprit de Dieu ? Où est la soumission aux Écritures ?

Ce que je viens d’avancer n’est-il pas vrai ? N’est-il pas vrai aussi que, dans plus d’une chaire, le pasteur qui l’occupe et doit édifier le troupeau, est un incrédule, ne croit pas à l’inspiration des Écritures, rejette la divinité de Christ, et que, dans d’autres cas, s’il est plus orthodoxe, il est cependant inconverti ? Ils sont peu nombreux, dans les églises, ceux qui maintiennent absolument la saine doctrine, « nourris », comme dit Paul à Timothée, « dans les paroles de la foi et de la bonne doctrine » (1 Tim. 4:6). Et qui peut nier que le mal n’aille en croissant ? Et n’est-ce pas triste de voir ceux qui sont demeurés fidèles, rester associés à ceux qui renversent la foi ?


2.6 - Ordination

Un autre fait bien frappant et qui se rapporte au ministère est celui-ci. Un homme est établi par un archevêque, par un synode, ou telle autre autorité humaine, pour être le pasteur d’une église. Dès lors il dit : « Mon église », « mon troupeau ». Est-ce là ce que Paul disait aux anciens d’Éphèse ? Écoutons-le : « Prenez garde à vous-mêmes, et à tout le troupeau, au milieu duquel l’Esprit Saint vous a établis surveillants » (Actes 20:28). Ils sont plusieurs et non un seul, établis par l’Esprit Saint, et non par l’homme. Et nulle part dans l’Écriture, il n’est dit l’église ou le troupeau de Mr Untel. Et ce seul homme établi sur le troupeau doit tout faire, être évangéliste, docteur, pasteur, surveillant, etc., quand peut-être n’a-t-il qu’un de ces dons ou pas un seul ! La séparation ou plutôt la division entre les diverses dénominations est si distincte que, si même un ministre d’une autre église vient — bien moins encore un simple chrétien, un laïque, comme on dit — il ne pourra parler dans l’assemblée sans une autorisation expresse.

Autrefois, lorsqu’une âme avait été vraiment convertie au Seigneur, elle était ajoutée à l’Assemblée par ce fait même et avait sa place à la table du Seigneur qui était une. Aujourd’hui, on naît catholique ou protestant, et si on ne veut pas demeurer dans l’établissement national, on donne son adhésion verbale ou par écrit à une profession de foi, et l’on devient membre de telle ou telle église, appellation inexacte, car l’Écriture ne parle que des membres de Christ (1 Cor. 12:27). Et s’il s’agit de la Cène, la plupart du temps pour y être admis on doit avoir passé par une instruction religieuse, après laquelle, converti ou non, on est admis à communier, ne discernant pas, le plus souvent, le corps du Seigneur (1 Cor. 11:29).


2.7 - Culte

Je pourrais encore m’étendre sur le culte ou ce que l’on entend par ce nom. Chez les catholiques grecs ou romains, il n’est qu’une suite d’actes d’idolâtrie ; chez les anglicans, un vain ritualisme ; chez la très grande majorité des protestants de diverses dénominations, on nomme ainsi la prédication accompagnée de quelques prières liturgiques. Où est le culte en esprit et en vérité, culte par l’Esprit, caractérisant le chrétien, sacrifices spirituels de louanges et d’adoration, agréables à Dieu par Jésus Christ, offerts par l’ensemble de la sainte sacrificature, tous les croyants réunis autour de la table du Seigneur ? (Phil. 3:3; 1 Pier. 2:5; Héb. 13:15; Jean 4:23). Une prédication, si excellente soit-elle, et bien qu’elle ait sa place au milieu des chrétiens, n’est pas le culte.

J’ai parlé de la table et de la Cène du Seigneur. Quelle confusion encore à cet égard ! L’acte le plus doux pour le cœur du chrétien, — se souvenir de la mort du Seigneur jusqu’à ce qu’il vienne, — bien qu’en même temps solennel assurément, devient chez les catholiques une idolâtrie et une iniquité sans nom. Chez bien des protestants, on l’entoure de terreur, on le détourne de sa vraie signification, on en fait un moyen de grâce. Les uns, même qui se disent être de vrais chrétiens, n’y attachent aucune importance ; d’autres le spiritualisent ; quelques-uns estiment que communier une fois l’an suffit. Dans certaines églises, c’est quatre fois l’an, aux fêtes, comme on les appelle, bien qu’il n’en soit pas question dans le Nouveau Testament. D’autres églises estiment qu’il est bon de prendre la Cène tous les mois. Dans un grand nombre de dénominations, il n’y a pas de discipline à l’égard de la Cène. Convertis ou non, incrédules ou croyants, tous y sont admis sous leur propre responsabilité, comme si l’Église n’en avait pas une. Que fait-on des indications de l’Écriture ? Et ce n’est pas tout. Une question encore plus sérieuse et pressante se pose. Au milieu de cette confusion et de ces divisions, où est vraiment la table du Seigneur ? Peut-elle être dans chacune de ces églises, dénominations et sectes divergentes ?


2.8 - Reconnaître que l’état actuel de l’église n’est pas celui de la Parole de Dieu

On le voit donc, sous tous les rapports, l’état de choses actuel, dans la chrétienté, diffère du tout au tout de ce qui existait au commencement, et est en complet désaccord avec les principes que nous trouvons dans la parole de Dieu, notre seule règle, notre unique, mais souveraine autorité. Désaccord quant à l’unité, quant à la doctrine, quant au culte et au ministère. Que devons-nous en conclure ? C’est que, par des causes que je ne veux pas exposer ici, l’Église, comme corps responsable sur la terre, a manqué au témoignage qu’elle devait rendre, qu’elle est déchue de sa position primitive, qu’elle s’est écartée du chemin du Seigneur, et qu’elle est tombée en ruines. C’est là un fait, cher lecteur, un fait palpable et évident. Au lieu de chercher à le pallier, à l’excuser, ne vaut-il pas infiniment mieux, n’est-il pas selon Dieu, de le reconnaître avec douleur et humiliation de cœur, comme autrefois Daniel reconnaissait et confessait la ruine de son peuple ? (Dan. 9:4-8). Cet état n’est-il pas un mal, comme toute déviation à ce que Dieu a établi ?

Je prie mon lecteur de remarquer qu’en tout ce que j’ai dit, je n’ai point parlé des personnes. Il y a dans cette chrétienté déchue et ruinée beaucoup de chers et bien-aimés enfants de Dieu, car le Seigneur, au milieu de la confusion qui existe, poursuit son dessein de grâce de sauver des âmes et d’amener plusieurs fils à la gloire (Héb. 2:10). Mais ces enfants de Dieu, que l’on trouve dans tous les systèmes humains du christianisme, ne sont pas un, comme Jésus l’a demandé. Il y en a, sans doute, qui sentent le besoin de réaliser cette unité, de là des tentatives comme l’alliance évangélique, où, pendant quelques jours de l’année, on dépose en quelque sorte sa couleur particulière ; mais chacun retournant ensuite dans son système, reprenant sa bannière, on ne fait qu’affirmer la division, au détriment de la gloire du Seigneur. Non, la ruine existe, et quelque effort que l’on fasse, alliance évangélique, ou fédération d’églises, on n’y parera pas, d’autant que, dans ces associations, on laisse toujours de côté de grands corps religieux qui font partie de la chrétienté.


2.9 - Fausses justifications

On a cherché à justifier les divisions qui existent dans la chrétienté ; on a dit que le Nouveau Testament ne nous présente pas de règle à suivre, et que, par conséquent, le Seigneur laisse aux chrétiens le soin de s’organiser suivant les temps, les lieux et les circonstances, et que l’on a cependant l’unité dans la diversité. C’est se tromper singulièrement que de dire que nous n’avons rien dans le Nouveau Testament pour nous diriger. Que fait-on de tout l’enseignement de Paul relativement à l’ordre dans l’assemblée : « ainsi j’en ordonne dans toutes les assemblées » ; « selon que j’enseigne partout dans chaque assemblée » ? (1 Cor. 7:17; 4:17). L’Esprit Saint n’était-il pas là pour distribuer selon qu’il lui plaisait ? Y avait-il alors des organisations diverses ? Le Saint Esprit rassemblait les âmes autour du Seigneur, il agissait dans l’assemblée, le Dieu d’ordre s’y trouvait et les directions des apôtres étaient là pour guider ; était-ce laisser à chacun la liberté de s’organiser comme bon lui semblait ? Y a-t-il dans l’Écriture un seul passage qui nous autorise à penser qu’il y aurait quelque chose de meilleur que ce qui était au commencement, que l’œuvre de l’homme vaudrait mieux que celle de Dieu ? Non ; soit l’effort d’affirmer son unité quand, en fait, les divisions subsistent, soit la tentative de justifier ces divisions, ne font que nous dire : « L’Église n’est plus ce qu’elle a été, ce qu’elle aurait dû toujours être ; elle a failli ». Nous sommes au milieu de ce qui est l’œuvre de l’homme, et ce qu’il fait est un mal, puisque cela tend à renverser l’œuvre de Dieu. Dans l’édifice chrétien, l’homme a introduit du bois, du foin et du chaume, et le résultat est la ruine. Croyez-vous que cela puisse être indifférent au Seigneur ?


2.10 - Des œuvres de grande apparence — évangélisation

Mais, dira-t-on, ne voyons-nous pas des œuvres magnifiques opérées de nos jours ? L’Évangile n’est-il pas prêché sur une échelle plus vaste qu’il ne l’a peut-être jamais été, et la parole de Dieu répandue à profusion ? Béni soit Dieu, il en est ainsi. La méchanceté du cœur naturel de l’homme, le fait qu’il gâte tout ce qui lui est confié, n’entrave pas, comme je l’ai dit, la grâce de Dieu qui, dans ce temps où elle règne encore, veut sauver les âmes, et agit pour cela par son Esprit. Mais cela n’infirme en rien le fait de la confusion, du désordre et de la ruine dans l’Église, le fait qu’elle n’a pas répondu à la prière de Jésus : « Afin qu’ils soient un, et que le monde croie que toi tu m’as envoyé » (Jean 17:21), de sorte que ce n’est plus son témoignage à la face du monde qui glorifie Jésus et le Père, et que, s’il y a des âmes sauvées, c’est malgré l’absence de ce témoignage, et par un effet de la souveraine grâce de Dieu. Et que l’on ne dise pas : « Qu’importe, si après tout des âmes sont sauvées ». Ce serait singulièrement méconnaître ce qui tient à la gloire du Seigneur. La manière dont il juge le mal dans les églises (Apoc. 2, 3), nous montre assez qu’il n’y est point indifférent.


Oui, béni soit Dieu, il y a une prédication de l’Évangile et des âmes sauvées, mais combien plus puissante serait l’évangélisation dans le monde, si elle était appuyée sur le témoignage de l’Église ! Mais aussi quelle différence dans la manière d’annoncer l’Évangile autrefois et aujourd’hui ! Alors, on présentait simplement Christ et son œuvre, et les âmes touchées de componction venaient à Christ et étaient sauvées. Maintenant, on cherche à agir surtout sur les sentiments, et, nous le savons, souvent par des moyens tout humains et absolument en dehors des Écritures, ou bien on vise à un résultat purement philanthropique plus qu’au salut des âmes et à la gloire de Christ.


2.11 - Confusion

Un autre trait frappant de la confusion qui règne, de l’état de ruine où nous sommes, du mal qui a envahi la chrétienté, est le suivant. Une âme a été sauvée ; elle est sérieuse devant Dieu, et se demande : « Où irai-je pour rendre culte à Dieu ? À qui me joindrai-je ? » Elle se trouve en face de trente-six dénominations différentes entre lesquelles il faut choisir, et si elle les examine avec droiture à la lumière des Écritures, elle trouve que toutes, après tout, ne sont que des institutions humaines, où souvent les principes divins sont sacrifiés. Quelle ruine ! Il faut s’associer avec le mal, semble-t-il, pour ne pas rester seul.


J’ai cherché à placer devant mon lecteur ce qui était au commencement, quand l’Église marchait dans les voies du Seigneur, et ce qui existe maintenant. Plus d’une fois la conclusion s’est imposée. C’est un état de ruine, c’est la désobéissance, c’est le mal. La question qui se poserait maintenant est : « Qu’avons-nous à faire dans un tel état de choses pour marcher selon Dieu ? » Mais avant d’essayer de la résoudre, je voudrais montrer que cette ruine de l’Église avait été annoncée d’avance dans la parole de Dieu. Cela confirmera la vérité de ce que nous avons dit, et en même temps nous aidera à trouver les ressources que Dieu a mises en réserve pour celui qui désire marcher fidèlement et en obéissance à Dieu au milieu de l’état de choses actuel.


3 - Chapitre 3 — Témoignages de la parole de Dieu quant à la ruine.

3.1 - La construction d’origine est saine

Le Seigneur, et après lui les apôtres, n’avait pas laissé ignorer que le mal s’introduirait dans le nouvel ordre de choses qui allait s’établir et qui devait, pour un temps, remplacer Israël comme témoignage à Dieu sur la terre. Rien d’aussi grand, rien d’aussi précieux aux yeux et pour le cœur du Seigneur que l’Église ou l’Assemblée selon les conseils éternels de Dieu. Elle est le temple saint qui s’élève, composé de pierres vivantes, et fondé sur le Fils de Dieu ; elle est le corps de Christ, la plénitude de Celui qui remplit tout en tous ; elle est la perle de grand prix : il a tout laissé, il s’est donné lui-même pour l’acquérir ; elle est son Épouse qu’il chérit, nourrit, sanctifie, et se présentera à lui-même sans tache. Tout cela existe déjà en tant que l’on envisage les vrais croyants, et aura bientôt sa complète et parfaite réalisation dans la gloire.


3.2 - Ruine de ce qui est laissé à la responsabilité de l’homme

Mais si nous considérons l’Église dans son existence et sa marche ici-bas, l’administration en a été confiée à l’homme et à sa responsabilité, comme cela a toujours été le cas dans les différentes dispensations de Dieu sur la terre. Or il est un fait douloureux à constater, mais tout à fait évident, c’est que l’homme a toujours manqué, lorsque Dieu a remis quelque chose à sa responsabilité. Le premier homme, qui devait garder le jardin d’Éden, se laisse séduire. Noé, épargné pour être la nouvelle souche de la race humaine, après que les hommes impies eurent été engloutis par le déluge, Noé, à qui Dieu confie les rênes du gouvernement, s’enivre et tombe. Israël, peuple choisi de l’Éternel pour maintenir la vérité de l’unité de Dieu au milieu des nations idolâtres, se laisse aller à adorer le veau d’or. La sacrificature, établie pour le maintien des relations entre Dieu et le peuple, tombe dans la personne d’Abihu et de Nadab qui offrent un feu étranger. La royauté qui devait conduire le peuple dans des voies de justice, l’entraîne au contraire dans le culte des fausses divinités. Et l’Église, responsable de faire briller sur la terre la lumière de Christ et d’y manifester sa vie, — une vie céleste, — manque à son tour à sa haute vocation, et devient la chose corrompue entre toutes, d’autant plus coupable qu’elle a joui de plus de privilèges.


3.3 - Annonce du mal par le Seigneur : paraboles de Matthieu 13

Cette introduction du mal, le Seigneur l’avait déjà annoncée dans les paraboles du royaume des cieux, que nous lisons en Matt. 13. Jésus avait été formellement rejeté par la nation juive représentée par ses chefs (Matt. 12:14, 24). Il rompt avec elle, et ne reconnaît plus pour siens que ceux qui font la volonté de son Père en s’attachant à Lui (v. 46-50; Jean 6:29). Il se présente alors, dans le chapitre suivant, comme semant la parole de Dieu dans les cœurs et montre les différents résultats produits par cette œuvre selon l’état de l’âme et la manière dont elle reçoit la Parole. Ensuite, dans les trois paraboles suivantes, le Seigneur nous fait connaître l’aspect extérieur que prendra le royaume des cieux en l’absence du Roi qui a été rejeté, et la manière dont il s’établira. La parabole de l’ivraie nous apprend que dans le champ, qui est le monde, le Seigneur n’avait semé que du bon grain — les fils du royaume, ceux qui Lui appartiennent en réalité. Mais de son côté, l’ennemi, le diable, a semé l’ivraie, les fils du méchant, parmi le bon grain, en profitant de la négligence des serviteurs. Et ces fils du méchant ne sont ni les païens, ni les Juifs qui se trouvaient déjà là lors de l’établissement du royaume. L’ivraie représente un mal introduit par Satan au milieu des chrétiens. L’ennemi l’a semée après que le bon grain l’était déjà, et ils se trouvent mêlés ensemble. Les judaïsants, les faux docteurs, les hérétiques, ont bientôt surgi et ont répandu les mauvaises doctrines, tout en professant le christianisme. Tel est l’aspect du royaume sur la terre, témoignage de l’incapacité de l’homme à garder pur ce qui lui est confié, et cet état de mélange du bien et du mal, nous pouvons aisément le constater. Peut-on porter remède au mal ? Non, le Seigneur enseigne que les choses restent telles jusqu’au temps final de la moisson. Le jugement sera alors exécuté sur les méchants, et le bon grain assemblé dans le grenier.


Les deux paraboles qui suivent présentent aussi l’aspect extérieur du royaume. Dans la première, on le voit sous la figure d’un grand arbre provenant d’une très petite semence. En effet, les commencements bien faibles du christianisme, comme on le sait, furent suivis d’un accroissement rapide et surprenant en grandeur et en étendue. En moins de trois siècles, il avait dépassé les bornes mêmes du vaste empire romain, et il n’a cessé de se répandre. Il est devenu une grande puissance sur la terre, ce que désigne toujours un grand arbre, dans le langage figuré de l’Écriture (Voyez Dan. 4:20-22; Ézé. 31:3-6). Mais cet arbre abrite les oiseaux du ciel. C’est un mélange aussi, et il est à remarquer qu’en général les oiseaux sont envisagés comme des symboles du mal. « Un vol d’oiseaux de proie » vient s’abattre sur le sacrifice offert par Abraham, et le patriarche doit les chasser (Gen. 15:11). « Comme une cage est remplie d’oiseaux », dit Jérémie, « ainsi leurs maisons sont pleines de fraude » (5:27). Et dans la parabole du semeur, ils sont l’image du méchant qui enlève du cœur la parole. Ainsi le christianisme, devenu une grande puissance sur la terre, abrite toute espèce d’hérésies, d’erreurs et d’hommes qui les soutiennent, et quantité de non-croyants.


La parabole suivante est celle du levain qui étend son action dans toute la pâte pure. Or le levain n’est pas l’Évangile remplissant le monde ; car d’une part, le monde corrompu n’est pas ce que la farine — une chose pure — représente, et, d’un autre côté, le levain dans l’Écriture est toujours le symbole d’une chose mauvaise (Matt. 16:11, 12; 1 Cor. 5:6, 8; Gal. 5:9), ce n’est donc pas l’Évangile. La pâte sans levain est ce que Dieu a établi, et le levain est ce que l’homme y a introduit et qui vient tout gâter.


Le Seigneur, dans ces trois paraboles, nous fait donc connaître que le mal, par l’action de l’ennemi et la négligence des serviteurs, s’introduirait dans le royaume qui allait s’établir sur la terre en l’absence du Roi, et que ce mal s’étendrait et ne prendra fin que par le jugement.


3.4 - Annonce du mal par Paul

L’apôtre Paul est aussi très clair et positif sur ce sujet. Prenant congé des anciens de l’assemblée d’Éphèse, mais embrassant dans sa pensée l’Église entière, il annonce qu’après son départ, quand son autorité apostolique et son énergie par l’Esprit ne seront plus là pour refréner le mal, ce mal s’introduira sous une double forme. « Je sais », dit-il, « qu’après mon départ il entrera parmi vous des loups redoutables qui n’épargneront pas le troupeau ; et il se lèvera d’entre vous-mêmes des hommes qui annonceront des doctrines perverses pour attirer les disciples après eux » (Actes 20:29, 30). C’était donc à la fois du dehors et du dedans que viendraient ceux qui corrompraient l’Église. Et c’est d’entre ceux-là mêmes, dont la charge était de paître et de garder le troupeau, que devaient sortir les faux docteurs ! N’est-ce pas là ce qui est arrivé et ce que nous voyons dans la chrétienté ?


En 1 Cor. 3:9-17, l’apôtre nous montre la construction de l’édifice de Dieu confiée à l’instrumentalité de l’homme. Lui comme un sage architecte a posé le vrai et seul fondement qui puisse être posé, savoir Jésus Christ. D’autres édifient sur ce fondement, mais chacun a à considérer quels matériaux il apporte dans la structure de l’édifice. Il en est qui apportent de bons matériaux, d’autres qui introduisent des matériaux sans solidité et sans valeur, d’autres encore qui corrompent le temple de Dieu. C’est en effet ce qui a eu lieu et ce qui a causé la ruine de l’édifice.


Si nous prenons 1 Tim. 4:1-3, nous y verrons annoncé l’abandon de la foi par quelques-uns. Séduits par l’ennemi dont ils auront écouté la voix, ils laisseront les vérités qui sont les objets de la foi, et y substitueront leurs propres enseignements ; enseignements contraires à ce que Dieu a établi, et introduits sous le prétexte et la prétention d’arriver à une sainteté plus grande. Qui ne voit là les erreurs de Rome à l’égard du célibat et de l’ascétisme ?


2 Tim. 3:1-5, révèle un mal plus général qui devait caractériser les derniers jours. Remarquons qu’il ne s’agit pas ici des païens, comme dans Rom. 1, mais bien de ceux qui professent le christianisme et chez lesquels on retrouve les mêmes traits de corruption. Ainsi, de même que le levain doctrinal, le levain moral devait se répandre et corrompre la pâte pure. N’est-ce pas ce que nous voyons autour de nous ? À part un certain nombre qui rejettent ouvertement le christianisme, la masse ne le professe-t-elle pas, « ayant la forme de la piété, mais en ayant renié la puissance » ? Et ne croyons pas qu’il y ait à ce mal une amélioration possible ; l’apôtre dit plus loin : « Les hommes méchants et les imposteurs iront de mal en pis, séduisant et étant séduits » (2 Tim. 3:13).


Le commencement du chap. 4 de la même épître vient ajouter un trait à ce tableau. « Il y aura », dit Paul, « un temps où les hommes ne supporteront pas le sain enseignement ; mais, ayant des oreilles qui leur démangent, ils s’amasseront des docteurs selon leurs propres convoitises, et ils détourneront leurs oreilles de la vérité, et se tourneront vers les fables » (v. 3, 4). D’une manière générale, où est de nos jours le sain enseignement ? N’est-il pas vrai que l’on préfère des discours qui flattent agréablement les oreilles et qui intéressent l’intelligence naturelle et l’imagination, sans se mettre en souci si le fond en est Christ et la vérité ? Que demande-t-on d’abord en parlant d’un prédicateur ? Est-ce : « Prêche-t-il d’une manière scripturaire ? » ou bien : « Prêche-t-il bien », c’est-à-dire agréablement ?


3.5 - Annonce du mal par Pierre et autres

Aux paroles de Paul, ajoutons celles de l’apôtre Pierre dans sa seconde épître : « Or il y a eu aussi de faux prophètes parmi le peuple, comme aussi il y aura parmi vous de faux docteurs, qui introduiront furtivement des sectes de perdition… et plusieurs suivront leurs excès » (Chap. 2:1, 2).


De tous ces passages, nous pouvons conclure que la ruine de l’Église, que nous avons constatée par des faits, était une chose prévue et annoncée par le Seigneur et ses apôtres, de même qu’autrefois l’apostasie d’Israël l’avait été par les prophètes.


D’autres passages du Nouveau Testament nous font connaître un fait non moins important, c’est que le mal tendait à s’introduire déjà du temps des apôtres, contenu et réprimé toutefois par leur active énergie. C’est ainsi que Dieu a pourvu à ce que nous ayons les directions et les exhortations qui peuvent nous guider dans le temps présent, dans ces « temps fâcheux », « cette dernière heure », où nous nous trouvons.


3.6 - Début du déclin

La première indication du commencement du déclin et de la ruine au temps des apôtres, se trouve dans la seconde épître aux Thessaloniciens. C’est une des premières lettres que l’apôtre ait écrites. Elle date de l’an 52 environ. En parlant à cette église de l’avènement du Seigneur, de « l’apparition de sa venue », comme il le nomme, Paul dit que cet événement n’aura point lieu avant que l’apostasie ne soit arrivée, et que l’homme de péché n’ait paru ; puis il ajoute : « Le mystère d’iniquité opère déjà » (2 Thes. 2:7). Ce à quoi nous devons nous attendre n’est donc pas à l’Église rétablie dans sa pureté primitive, mais à un état de choses qui ira en empirant et aboutira à l’apostasie et à l’Antichrist. Déjà se montraient les germes de ce mal affreux, et l’œil vigilant de l’apôtre les discernait.


Toutes sortes de désordres se manifestaient dans l’église de Corinthe, divisions, mal moral toléré et fausses doctrines (1 Cor. 1 ; 5 ; 15). À Rome, il fallait avoir l’œil sur ceux qui causaient des divisions par des choses qui n’étaient pas selon la doctrine qu’avaient apprise les chrétiens (Rom. 16:17). Les Galates se détournaient de l’Évangile pour suivre les docteurs judaïsants (voyez toute l’épître) ; parmi les Philippiens, il y en avait qui étaient ennemis de la croix du Christ (Phil. 3:18, 19) ; les Colossiens étaient en danger de ne pas tenir ferme le chef et de se laisser entraîner par la philosophie et l’enseignement des hommes (Col. 2:4, 8, 19). L’apôtre combat toutes ces choses avec énergie, il avertit et réprimande les saints en leur donnant de sages et précieuses instructions qui demeurent pour nous ; mais les principes du mal étaient là et n’attendaient que l’occasion de se développer. Comme nous l’avons vu, l’avertissement de Paul aux anciens d’Éphèse montre que c’était d’entre eux-mêmes que sortiraient les faux docteurs.


En 1 Tim. 5:15, on voit que le mal se développait ; mais c’est surtout la seconde épître, dernier écrit de Paul, qui nous en atteste les funestes progrès et l’état où était tombée l’Église. L’épître entière en porte l’empreinte. Autrefois toute l’Asie avait entendu, de la bouche de Paul, l’Évangile, et les preuves de la puissance de l’Esprit pour la conversion et la marche fidèle des âmes avaient été manifestes (Actes 19:10, etc.). Aussi pouvait-il dire avec bonheur : « Les assemblées de l’Asie vous saluent » (1 Cor. 16:19). On voit, en Actes 20:37, 38, la vive affection que les anciens d’Éphèse, la principale de ces assemblées, témoignent à l’apôtre. Quelques années ont passé (12 ans environ), et combien les choses ont changé. Paul, prisonnier à Rome, écrit à Timothée : « Tous ceux qui sont en Asie se sont détournés de moi » (2 Tim. 1:15). Ils se sont détournés de l’apôtre, le héraut de la vérité, le serviteur dévoué du Seigneur, par le ministère duquel ils avaient reçu tant de grâces ! Combien n’en est-il pas de nos jours qui se détournent de la doctrine du saint apôtre, disant qu’il s’est trompé, qu’il se laisse influencer par ses préjugés rabbiniques !


Dans la première épître, l’Église est encore vue en ordre, comme la maison de Dieu, la colonne et le soutien de la vérité. L’apôtre y parle encore de surveillants et de serviteurs (évêques et diacres), comme charges qu’il reconnaît dans l’Église. Il donne des règles relatives à l’ordre à garder (1 Tim. 3; 5). Dans la seconde épître, il n’en est plus question. L’apôtre recommande à Timothée de commettre à des hommes fidèles le saint dépôt des saines paroles (2 Tim. 2:2). Il n’y est plus parlé de la maison de Dieu ; l’état de choses est comparé à « une grande maison », où il n’y a pas seulement des vases purs et précieux comme il conviendrait à un temple de Dieu, vases propres uniquement pour le service du Maître, mais où, comme dans une habitation d’hommes, il y a un mélange confus de vases vils avec les autres (2 Tim. 2:20, 21). N’est-ce pas là ce que nous voyons pleinement manifesté ? L’ivraie avait crû, elle paraissait distinctement, mêlée au bon grain. On se livrait à des discussions stériles ; l’esprit de spéculation engendrait l’erreur qui se propageait : Hyménée et Philète enseignaient que la résurrection était déjà arrivée (v. 14-18). D’un autre côte, tel était l’abandon où l’apôtre était laissé, tel le refroidissement de l’affection chrétienne, tel le manque de zèle et la crainte du monde, que personne à Rome n’avait assisté Paul dans son témoignage (Chap. 4:10, 16).


3.7 - Constatation et annonce du mal par Jean et Jude

Jean, plusieurs années après Paul, nous montre que le triste et fâcheux état de choses dans l’Église avait plutôt empiré : « Maintenant aussi », dit-il, « il y a plusieurs antichrists… ils sont sortis du milieu de nous » (1 Jean 2:18, 19). Dans sa seconde épître, il avertit la dame élue, contre ces séducteurs (v. 7), et, dans la troisième, nous voyons un Diotrèphe usurpant l’autorité dans une assemblée et l’obtenant assez grande pour pouvoir rejeter l’apôtre et exclure de l’assemblée ceux qui étaient en communion avec celui-ci (v. 9, 10). Les épîtres du Seigneur aux sept assemblées de l’Apocalypse, à part leur caractère prophétique, témoignent aussi de la ruine qui allait s’accentuant toujours plus. Éphèse avait perdu son premier amour ; à Pergame, l’Église était mêlée au monde, siège de Satan, et laissait agir des gens qui tenaient la doctrine de Balaam ou celle des Nicolaïtes ; Thyatire tolérait la fausse prophétesse Jésabel ; Sardes avait le bruit de vivre, mais était mort, et Laodicée, à cause de son indifférence pour Christ, allait être vomie de la bouche du Seigneur (Apoc. 2, 3).

Enfin Pierre, dans sa seconde épître, de même que Jude, dans la sienne, nous font connaître l’affreux mélange qui existait dans les assemblées ; des méchants qui, sous le nom de chrétiens, s’adonnaient à toutes sortes d’iniquités, et que les fidèles toléraient au milieu d’eux (2 Pierre 2:10-14; Jude 4, 8-13).


3.8 - Pas de rétablissement

Ainsi l’état de choses où nous nous trouvons, avait été annoncé et avait déjà commencé au temps des apôtres, et il continuera jusqu’à la fin. Bien que Dieu ait agi d’une manière merveilleuse, quand les hommes qu’il suscita au temps de la Réformation, remirent en lumière sa Parole et les grandes vérités du salut par la foi, il n’y a pas eu de restauration de l’Église et il n’y en a pas à attendre. Ce fut comme lorsque les Juifs revinrent de la captivité de Babylone. Ils ne furent pas rétablis dans leur position première. Deux tribus seulement étaient de retour, et encore demeuraient-elles sous la domination des gentils, et la gloire de l’Éternel n’était pas revenue habiter dans le temple. Pour l’Église, la fin est l’apostasie finale et le jugement, comme nous l’avons vu d’après 2 Thes. 2. L’apôtre Paul, dans l’épître aux Romains, chap. 11:16-24, fait pressentir clairement ce jugement, lorsqu’il parle de l’avenir pour les Juifs. Sur l’olivier franc, dont les branches naturelles, les Juifs, ont été arrachées pour cause d’incrédulité, Dieu, par sa grâce, a enté des branches de l’olivier sauvage, les nations. Mais « tu es debout par la foi », dit l’apôtre. Dieu a agi, dans sa bonté souveraine, en amenant les nations à la foi, mais si elles ne persévèrent pas dans la bonté de Dieu, la sentence porte : « Toi aussi, tu seras coupé ». Or, comme nous l’avons vu, la chrétienté n’a pas persévéré dans la foi et la bonté de Dieu, et elle sera coupée, tout comme le figuier stérile qui représente Israël (Luc 13:6-9). C’est ce qui ressort de l’épître de Jude et des paroles du Seigneur à l’assemblée de Laodicée. On voit dans Jude le jugement fondre, à la venue du Seigneur, sur les impies dont il a parlé et qui de son temps se glissaient au milieu des fidèles (v. 14, 15), et Laodicée, l’église professante de la fin, est vomie de la bouche du Seigneur.

N’ayant pas à nous attendre à un relèvement, à une restauration de l’Église comme telle, qu’avons-nous à faire ? Nous enquérir s’il y a un chemin de Dieu à suivre au milieu de la ruine, et quel il est. On pourrait objecter à ce que nous avons dit, les paroles du Seigneur Jésus à propos de l’Assemblée : « Je bâtirai mon assemblée, et les portes du hadès ne prévaudront pas contre elle » (Matt. 16:18). Béni soit Dieu, il en est ainsi. « Le solide fondement demeure ». Dieu agit toujours par son Esprit et rassemble les membres du corps de Christ, les pierres vivantes qui seules entrent dans la structure du temple saint qui ne cesse pas de s’élever (Éph. 2:21). Ce que Christ bâtit, ce qui dépend de Lui est parfait et sera manifesté tel dans la gloire ; les desseins de Dieu se poursuivent et auront leur plein accomplissement, mais ce qui dépendait de l’action de l’homme, ce qui lui a été confié, l’Église comme vase du témoignage de Dieu sur la terre, tout cela est ruiné, et notre responsabilité actuelle est de chercher comment marcher selon Dieu au milieu de cet état de choses. Nous essaierons de montrer ce que l’Écriture nous enseigne à cet égard.


4 - Chapitre 4 — Quel est le sentier de la foi dans un temps de ruine ?

4.1 - La grâce amène encore des âmes

Bien que l’état de l’Église soit déplorable, comme nous l’avons montré, et que la ruine et la confusion se fassent voir de toutes parts et s’accentuent toujours plus, nous ne devons pas fermer les yeux à ce que Dieu opère dans sa grâce souveraine, même en un temps tel que celui où nous sommes. Outre la Réformation, il y a eu à différentes époques et de nos jours aussi, des réveils où bien des âmes ont trouvé le salut. Actuellement, il y a une grande activité déployée pour l’évangélisation. Il serait sans doute désirable que cette œuvre se poursuivît d’une manière qui fût en général plus en harmonie avec la parole de Dieu et les exemples qu’elle présente. Trop souvent on fait appel aux sentiments plus qu’à la conscience, de là peu de profondeur et de réalité dans les résultats. Souvent encore, on recherche plutôt une amélioration dans la conduite extérieure, de sorte que l’évangélisation devient une œuvre philanthropique. Mais, quoi qu’il en soit, il y a des conversions, Dieu en soit béni, car l’Esprit Saint, descendu sur la terre au jour de la Pentecôte (Actes 2), agit souverainement, et, pour la gloire de Christ, sauve les âmes en les amenant à Lui, en dépit des manquements des hommes et au milieu de la ruine de l’Église.


4.2 - Il faut plus que le salut de l’âme

Mais être sauvé, est-ce tout ? Non ; lorsqu’une âme a été convertie au Seigneur, il reste pour elle la question de sa marche. Elle n’est plus à elle-même, mais à Celui qui, pour elle, est mort et a été ressuscité ; elle n’a donc plus à vivre pour elle-même, mais pour Lui (2 Cor. 5:15). Tout chrétien sérieux comprend que, né de Dieu, il a à mener comme individu une vie sainte, dévouée à son Sauveur, dans l’obéissance à sa Parole. Mais ce n’est pas tout ; l’obéissance ne comprend pas uniquement la séparation de ce qui n’est pas selon Dieu et l’accomplissement de ce qui Lui est agréable dans la vie individuelle. Il y a une autre partie de la marche du chrétien qui n’importe pas moins. Il n’est pas appelé à rester seul. Il est enfant de Dieu, et fait ainsi partie d’une famille ; il est membre du corps de Christ ; il est constitué adorateur de Dieu, pour Lui rendre culte en esprit et en vérité avec les autres adorateurs ; il fait partie de la maison spirituelle, de la sainte sacrificature, pour offrir à Dieu des sacrifices spirituels (1 Jean 3:1; Rom. 12:5; Jean 4:23, 24; 1 Pierre 2:5). La question qui se pose donc, ou qui devrait se poser, pour tout nouveau converti et pour tout chrétien est celle-ci : « Avec qui me réunirai-je pour rendre culte à Dieu ? Où est actuellement le rassemblement selon Dieu et la pensée de Christ ? » Et cela n’est pas, soyons-en sûrs, une chose indifférente à Dieu, ni au bien et au progrès de l’âme.


4.3 - Une question : Où se réunir ?

Au commencement, la question ne se posait même pas. Il n’y avait que les Juifs, les païens et l’Assemblée de Dieu (1 Cor. 10:32). Un converti d’entre les Juifs ou les païens se trouvait nécessairement faire partie de l’Assemblée ou Église. Il se réunissait donc avec les chrétiens de la localité où il se trouvait, rendait culte avec eux, prenait place avec eux à la table du Seigneur qui était une. De nos jours, dans la ruine et la confusion universelles de la chrétienté, il en est tout autrement. Une âme est convertie et désire servir le Seigneur, où ira-t-elle ? Avec qui se réunira-t-elle ? Je le demande encore : Est-ce une chose de peu d’importance aux yeux du Seigneur ? En sommes-nous réduits, pour résoudre une telle question, à examiner et à peser les arguments que chaque église ou secte présente, ne nous donnant après tout à choisir qu’entre des opinions humaines ? Ou bien faudrait-il aller indifféremment avec tous, comme si la vérité se trouvait partout, ou plutôt nulle part ?

Non ; béni soit Dieu ! Il ne nous a pas plus laissés pour cette question que pour celle du salut, à nous diriger d’après nos propres lumières. Il importe à sa gloire, comme il convient à sa sagesse et à son amour, que nous marchions à tous égards dans le sentier qu’il a tracé pour nous. Je demande donc instamment à chacun de mes lecteurs, de chercher à se rendre bien compte de ce qu’il a à faire pour obéir à Dieu relativement à ce point important. Ce que nous avons dit de la confusion qui règne dans la chrétienté, montre la nécessité d’être au clair à cet égard. La naissance, les circonstances, l’attachement à celui qui a été le moyen de notre conversion ou à des chrétiens que nous estimons, ou bien encore certain penchant pour telles ou telles formes, ont pu faire que nous nous soyons joints à une dénomination chrétienne quelconque, mais notre responsabilité devant Dieu est de nous demander : « Suis-je où Dieu me veut ? Est-ce là le rassemblement selon Lui ? En y étant ou en m’y joignant, est-ce sa Parole que j’ai suivie ? »

Pour répondre à ces questions, il faut d’abord résoudre celle-ci — « Quelle est la règle de la vérité ? Où se trouve la pierre de touche divine ? Comment connaîtrai-je avec certitude la pensée de Dieu ? » Eh bien, cher lecteur, il en est de même que pour la question de votre salut, c’est la parole de Dieu qui vous fait connaître sa pensée, et qui est la règle de la vérité. C’est elle qui est l’autorité suprême pour nous conduire, l’Esprit Saint nous la faisant comprendre et l’appliquant à nos âmes. L’unique pierre de touche pour savoir si ma marche est ce que Dieu veut qu’elle soit, c’est sa Parole.


4.4 - Où trouver les ressources ? — La Parole de Dieu

Les passages mêmes qui nous avertissent du mal qui tendait à s’introduire ou s’était déjà introduit dans l’Église, nous font connaître cette ressource unique et pleinement suffisante. Que dit Paul aux anciens d’Éphèse, après les avoir avertis des dangers qui menaçaient l’Église ? Pour conjurer ces dangers, les renvoie-t-il à un pape ou à un concile infaillibles ? Leur dit-il de faire une constitution avec une confession de foi, ou d’élire un synode ou un presbytère ? Non, voici ce qu’il leur présente comme unique ressource et sauvegarde pour tous les temps et toutes les circonstances : « Je vous recommande à Dieu et à la parole de sa grâce, qui a la puissance d’édifier » (Actes 20:32). Dieu, agissant par son Esprit ; sa Parole comme guide au milieu des difficultés (Héb. 4:12), et comme arme contre les artifices de l’ennemi (Éph. 6:17), n’est-ce pas assez ?

Nous trouvons la même chose dans la seconde épître à Timothée. La ruine était déjà commencée, et devait grandir encore. À quoi le serviteur dévoué du Seigneur ramène-t-il les fidèles, afin qu’ils soient gardés des séductions du mal ? À l’autorité suprême et à l’entière suffisance de la parole de Dieu. Écoutons-le : « Les hommes méchants et les imposteurs », dit-il, « iront de mal en pis, séduisant et étant séduits », et cela dans la chrétienté, car il ne s’agit ni des Juifs, ni du monde païen. Que faire en de telles circonstances ? Voici la réponse : « Toi, demeure dans les choses que tu as apprises et dont tu as été pleinement convaincu, sachant de qui tu les as apprises, et que, dès l’enfance, tu connais les saintes lettres, qui peuvent te rendre sage à salut par la foi qui est dans le Christ Jésus » (2 Tim. 3:13-17). Or les choses que Timothée avait apprises, il les tenait de Paul, l’apôtre du Seigneur, et nous, nous avons les écrits inspirés de Paul qui maintenant font partie des saintes lettres, des Écritures dont il parle à Timothée (Voyez 2 Pierre 3:15, 16). L’attachement aux Écritures est donc la sauvegarde contre l’erreur, et elles sont la règle pour le chrétien. Leur autorité est suprême, car elles sont inspirées de Dieu, et propres pour enseigner et instruire dans la justice, afin que l’homme de Dieu soit accompli.

Pierre, dans sa seconde épître, où il parle aussi des faux docteurs et du mal qui s’introduisait au milieu des fidèles, dirige de même leurs regards vers la parole prophétique, et les exhorte à se souvenir des paroles des prophètes et de ce que le Seigneur et Sauveur a dit par les apôtres (2 Pier. 1:19; 3:1, 2). Jude parle de la même manière (v. 17) ; or ces paroles des apôtres, nous les avons dans le Nouveau Testament.

Notre guide pour nous faire connaître le sentier de Dieu au travers de l’état de choses où nous sommes, ce n’est donc pas les traditions, les ordonnances d’hommes, les arrangements humains, quelque sages qu’ils puissent paraître, mais c’est la parole infaillible de Dieu. Lecteurs, croyez-vous que le Nouveau Testament, de même que l’Ancien, est la parole inspirée de Dieu ? Croyez-vous que vous lui devez une entière et implicite obéissance ? Alors, c’est elle seule que vous avez à suivre dans la question qui nous occupe, et elle vous donne pour cela toutes les directions nécessaires. Le tout est d’ouvrir les yeux à ce qu’elle dit et d’obéir simplement, sans se laisser arrêter par des préjugés, des idées préconçues, et des habitudes et des liens formés peut-être depuis longtemps. Il faut être décidé, coûte que coûte, à tenir pour Dieu et sa Parole.


4.5 - 2 Timothée 2 — Responsabilité individuelle

Cela posé, quel est le sentier tracé à la foi par la parole de Dieu ? Pour le voir, reprenons le passage 2 Tim. 2:17-22, dont nous avons parlé à propos du mal que prédisait l’apôtre et qui commençait déjà de son temps. Quelles que soient la ruine et la confusion, « le solide fondement de Dieu » demeure inébranlable. Son sceau a deux faces et deux devises. D’une part, « le Seigneur connaît ceux qui sont siens ». Il les discerne au milieu de l’infidélité générale. Cela, c’est le côté de Dieu. Mais il y en a un autre : celui de la responsabilité individuelle au milieu du mal. Et voici, à cet égard, le principe de toute importance pour chaque chrétien désireux d’obéir à Dieu : « Qu’il se retire de l’iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur ». Ainsi quiconque se réclame du nom du Seigneur ; en d’autres termes, quiconque se dit chrétien, est tenu de se retirer de tout ce qui n’est pas en harmonie avec la volonté de Dieu exprimée par sa Parole. Il importe de bien saisir la portée de cette injonction : « Qu’il se retire de l’iniquité ».

Remarquons d’abord que l’église extérieure, l’ensemble de la profession chrétienne, est envisagée comme une grande maison — une habitation humaine, où se trouvent mélangés des vases à honneur et des vases à déshonneur. Comme nous l’avons déjà fait observer, ce n’est plus « la maison de Dieu », le temple où ne doivent se trouver que des vases saints. Or le chrétien, j’entends celui qui l’est, non pas de nom seulement, mais en réalité, se trouve de fait dans cette grande maison ; mais s’il est fidèle, s’il veut être, lui, un vase à honneur, sanctifié, utile au Maître, sa responsabilité est d’obéir à la Parole qui lui prescrit de se retirer de l’iniquité, de se purifier en se séparant des vases à déshonneur. Ici encore, cherchons à bien comprendre. Ce n’est pas seulement qu’on a à se séparer du mal moral et à marcher dans la pureté, ni qu’on doit rompre les relations avec ceux qui mènent une conduite mondaine ou scandaleuse. L’apôtre a en vue un autre mal. C’est celui venant d’hommes qui, en suivant leurs propres pensées, se sont écartés de la vérité. « L’iniquité » est, en effet, tout ce qui découle de la volonté propre de l’homme, sans tenir compte de celle de Dieu. Se retirer de l’iniquité est donc se séparer, se mettre à part, de tout ce que l’homme a établi de son chef dans la grande maison, systèmes et ordonnances.


Au temps des réformateurs, ceux qui étaient éclairés par la parole de Dieu se retirèrent du vaste système d’iniquité qui avait envahi l’Église. Sous ce rapport, ils obéirent à l’injonction de l’apôtre. Pourquoi rétablir ensuite d’autres systèmes sous le nom d’églises réformées, luthériennes, nationales, libres, indépendantes, etc. ? Il est vrai qu’elles ne renferment pas les abominations de Rome, mais elles n’en sont pas moins le fruit de la volonté de l’homme et n’ont fait qu’introduire la confusion dans l’Église. Trouvons-nous trace d’un tel ordre de choses dans l’Écriture ? De nos jours, comme nous l’avons vu, que n’abritent-elles pas, ces dénominations diverses du protestantisme ? Rationalisme, incrédulité, négation des vérités capitales du christianisme, faux docteurs, hommes semblables à Hyménée et Philète qui renversent la foi, sans compter toutes sortes d’aberrations. N’est-ce pas l’iniquité ? Est-ce à l’honneur du Seigneur, cette manifestation de la volonté de l’homme qui prétend régler et organiser là où Dieu n’a rien dit, ou qui se place en juge de sa Parole pour agir à son gré ? Qu’ai-je donc à faire, sinon de me purifier, de me séparer de ces choses ? C’est ma responsabilité devant Dieu, si je veux être obéissant. Je puis reconnaître les vrais chrétiens qui se trouvent dans tous ces systèmes et sectes, mais si dévoués soient-ils, je n’ai pas à les suivre dans leur position antiscripturaire. J’ai à me séparer de tout ce qui n’est pas établi de Dieu, de tout ce que sa Parole ne sanctionne pas ; combien plus quand un mal positif s’y est attaché. C’est l’iniquité (*), et je ne pourrais m’y joindre ou y rester attaché sans y participer. Puisse tout chrétien sérieux qui lit ces lignes se demander : « Suis-je bien sûr d’avoir la sanction de la parole de Dieu en restant attaché à tel ou tel système religieux ? »


(*) Une organisation humaine renfermât-elle beaucoup de vrais chrétiens, fût-elle même composée uniquement de vrais chrétiens, ce serait désobéir à Dieu que d’y rester sous ce prétexte. Le fait seul qu’elle n’est pas établie de Dieu me fait une obligation de m’en séparer.


Ainsi le premier pas dans le sentier de Dieu est de se retirer de l’iniquité, de ce que la parole de Dieu n’établit pas, de ce qui est le résultat des pensées et de la volonté de l’homme. Et nous avons à le faire, dussions-nous être aussi solitaires qu’Élie croyait l’être, quand il disait : « Je suis resté seul ». Que voulons-nous suivre ? Nos pensées, nos goûts et nos sentiments, ou bien la volonté de Dieu ?


Quelques-uns voient bien le mal qui se trouve dans les systèmes religieux, mais ils disent : « Il nous faut rester où nous sommes et user de toute notre influence pour essayer de réformer les abus et protester contre l’erreur ». Ceux-là verront bientôt avec douleur qu’ils sont impuissants à enrayer les progrès du mal. Protester au sein du mal en y restant de fait associé, est une protestation sans force et inconséquente. La vraie protestation est de sortir du mal, et par-dessus tout c’est l’ordre de Dieu, qui ne peut accepter des compromis avec l’iniquité : « Sortez du milieu d’eux, et soyez séparés, dit le Seigneur, et ne touchez pas à ce qui est impur, et moi, je vous recevrai » (2 Cor. 6:17). Précieuse promesse, n’est-il pas vrai ? « Sortons donc vers Jésus, hors du camp, portant son opprobre » (Héb. 13:13). Le camp était un système d’ordonnances et de cérémonies établi sur le principe que Dieu et l’homme pécheur peuvent habiter ensemble. C’est ce qui existait en Israël. Ce système a pris fin, quand l’homme a chassé Dieu hors du camp, quand Christ a été crucifié. Il fallait en sortir pour être avec Jésus. La position chrétienne était hors du camp. Si l’homme refait des « camps », en établissant, dans le christianisme, selon sa volonté et sa propre sagesse, des systèmes religieux consistant en ordonnances et règlements, l’injonction de la Parole subsiste : « Sortons vers Jésus », afin de nous trouver dans la position normale qui convient au chrétien.


4.6 - Ne pas rester isolé

Je suppose maintenant qu’une âme ait été amenée à obéir à la parole de Dieu, et qu’elle soit entrée dans le sentier de la foi en se séparant des organisations religieuses établies par les hommes, ne se sentira-t-elle pas dans un étrange isolement ? Que fera-t-elle ?


La parole de Dieu qui l’a conduite à faire le premier pas, lui en montre un second dans ces paroles. « Fuis les convoitises de la jeunesse, et poursuis la justice, la foi, l’amour, la paix, avec ceux qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur » (2 Tim. 2:22). Fuir les convoitises (voir 1 Jean 2:16), poursuivre la justice, la foi, l’amour, la paix, est certes ce qui incombe à chaque chrétien individuellement. C’est ce qui convient à la présence de Dieu, et l’activité de la vie de Dieu dans l’âme par le Saint Esprit portera ce fruit. Chacun de nous doit voir s’il réalise dans sa marche cette exhortation de l’apôtre. Mais la pensée de Dieu va plus loin. Au milieu de la masse des professants qui remplissent la grande maison et se réclament du nom de chrétiens, il y a des âmes « qui invoquent le Seigneur d’un cœur pur » (*). Un cœur pur suit l’injonction de la Parole : « Qu’il se retire de l’iniquité, quiconque prononce le nom du Seigneur ». C’est un cœur qui, sans mélange, désire servir le Seigneur, et rejeter tout ce qui déshonore son nom. C’est un cœur qui, s’étant séparé du mal, marche dans la crainte et la communion de Dieu. Si donc une âme a été amenée à invoquer ainsi le nom du Seigneur, et qu’elle en rencontre d’autres marchant dans le même sentier, sa place n’est pas de rester seule, mais de poursuivre avec elles la justice, la foi, l’amour, la paix. Il y aurait aussi peu d’obéissance à vouloir rester seul dans ce cas, qu’à ne pas se séparer du mal une fois reconnu. Il est évident que, si je ne rencontre pas de telles personnes, j’ai à attendre que Dieu m’en fasse trouver ; mais, dans aucun cas, sous aucun prétexte, je ne dois m’associer de nouveau à ce que j’ai jugé et condamné. Ce serait réédifier ce que j’ai renversé et me constituer transgresseur (**) (Gal. 2:18). S’attendre à Dieu, compter sur Lui, est toujours et en tout, la voie sûre.


(*) Il est évident que ce « cœur pur » ne veut point dire que celui qui le possède n’a plus de péché en lui, comme plusieurs le prétendent de nos jours. L’Écriture dit : « Si nous disons que nous n’avons point de péché, nous nous séduisons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous » (1 Jean 1:8)

(**) Je prie les âmes qui se sont séparées des systèmes humains de bien peser cela. On peut se trouver, par suite de circonstances, séparé de ceux avec qui l’on marche en communion. Ce n’est jamais une raison pour aller chercher dans un système humain une édification que Dieu, si nous nous attendons à Lui, nous donnera plus pure et plus réelle par sa Parole seule.


L’obéissance individuelle amènera ainsi dans le sentier de la foi, des âmes qui y marcheront ensemble. De cette manière, il se formera, sous la main de Dieu, un résidu, tel que nous en voyons un au milieu de la ruine à la fin de chaque dispensation. En Ézéchiel, alors que la destruction de Jérusalem était imminente, l’Éternel dit à son messager : « Passe au milieu de la ville, au milieu de Jérusalem, et fais une marque sur les fronts des hommes qui soupirent et gémissent à cause de toutes les abominations qui se commettent au-dedans d’elle » (Ézé. 9:4). Ceux qui désirent être fidèles à Dieu, en ce jour de ruine, ne passent point d’un cœur léger par-dessus ce triste état de choses. Mieux ils le connaissent, et plus leurs cœurs le sentent et s’en affligent. Écoutons un autre prophète, annoncer aussi, quelque temps avant Ézéchiel, aux jours de Josias, le jugement qui fondra sur Juda : « Et je laisserai au milieu de toi un peuple affligé et abaissé, et ils se confieront au nom de l’Éternel. Le résidu d’Israël ne pratiquera pas l’iniquité, et ne dira pas de mensonge, et une langue trompeuse ne se trouvera pas dans leur bouche ; car ils paîtront et se coucheront, et il n’y aura personne qui les effraye » (Soph. 3:12, 13). Le caractère du résidu n’est pas la grandeur qui frappe les yeux du monde. Il est faible et méprisé, aussi est-il tranquille et sans crainte, et il marche dans des voies de vérité et de justice. Le dernier des prophètes, quand ceux qui avaient été ramenés de la captivité tombaient dans un froid formalisme, nous montre aussi un résidu fidèle, dont nous avons plus tard l’expression dans les Zacharie, les Siméon, les Anne, des deux premiers chapitres de Luc. « Alors ceux qui craignent l’Éternel ont parlé l’un à l’autre, et l’Éternel a été attentif et a entendu » (Mal. 3:16). Nous retrouvons ici la marche collective de témoins qui, en faisant ainsi, sont approuvés de l’Éternel.

Nous voyons enfin, dans le Nouveau Testament, les caractères d’un vrai résidu chez les saints à Philadelphie (Apoc. 3:7-13). C’est aussi la fin d’une dispensation : le Seigneur annonce sa venue prochaine, et, comme le disent les versets suivants, Laodicée, l’église professante, va être vomie de la bouche du Seigneur. Les fidèles de Philadelphie sont en présence, d’une part, de prétentions religieuses, d’un système fondé sur des traditions et des ordonnances — ceux qui se disent Juifs, et ils ne le sont pas ; et d’un autre côté, se trouvent « ceux qui habitent sur la terre », le monde, attaché à la terre, y ayant ses intérêts et ses jouissances. Au milieu de cet état de choses qui provoquent le jugement de Dieu, les saints, bien qu’ils aient peu de force, se sont attachés à Christ seul — ils ont gardé sa parole et n’ont pas renié son nom. Ils se trouvent ainsi séparés d’une religion humaine et du monde, et associés à Christ personnellement, gardant la parole de sa patience. Je prie mon lecteur de peser devant Dieu avec sérieux et prière cette portion de la Parole où sont tracés les caractères d’une marche fidèle et patiente de dévouement à Christ, et où Christ lui-même est présenté sous les traits que les fidèles ont à reproduire comme associés à sa personne — le Saint et le Véritable.


5 - Que reste-t-il pour la marche collective ?

Une question importante se pose maintenant pour ceux qui sont entrés dans le sentier de la foi et désirent y servir Dieu. Ayant laissé les formes, les ordonnances et les organisations humaines, qu’auront-ils quand ils se rassembleront ? Que leur restera-t-il pour leur marche collective ?


5.1 - Le seul centre des rassemblement

Ils auront tous les principes divins, d’après lesquels les chrétiens se rassemblaient au commencement. Ainsi ils auront le fondement, l’unique, mais sûr fondement sur lequel ils sont édifiés comme des pierres vivantes, savoir Jésus Christ, le même hier, aujourd’hui et éternellement (1 Pier. 2:5-8; Éph. 2:20-22; Héb. 13:8). Ils auront Jésus Christ, la Tête du corps dont ils sont les membres, étant unis à Lui par l’Esprit Saint dont ils ont été baptisés (Col. 1:18; 1 Cor. 12:12, 13).


Ensuite, s’étant séparés de l’iniquité par fidélité au Seigneur dont ils invoquent le nom, étant, selon l’exhortation de l’apôtre, sortis hors du camp vers Jésus, et non l’un vers l’autre, ils se trouveront rassemblés en ce nom, unique centre que le Seigneur lui-même indique, et vers lequel l’Esprit Saint les aura conduits. Réunis en ce nom, si petit d’ailleurs que soit leur nombre, ils auront Jésus au milieu d’eux, selon sa promesse : « Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis là au milieu d’eux » (Matt. 18:20).


5.2 - Le Saint Esprit et les dons

De plus, ils auront le Saint Esprit, non une influence, mais une Personne divine, le Consolateur promis pour demeurer avec nous éternellement (Jean 14:16, 17). Quel que soit l’état de choses dans la chrétienté, nous savons que l’Esprit Saint venu sur la terre le jour de la Pentecôte (Actes 2), selon la promesse du Seigneur, est toujours là, agissant dans les âmes partout où l’Évangile est annoncé. Dans l’église professante, sa présence est en général oubliée et sa personnalité souvent niée. L’exhortation de l’apôtre : « N’attristez pas le Saint Esprit de Dieu », et celle non moins importante : « N’éteignez pas l’Esprit » (Éph. 4:30; 1 Thes. 5:19), sont mal comprises et très peu prises en considération. L’Esprit n’est-il pas attristé par la confusion qui règne dans la chrétienté ? N’est-ce pas éteindre l’Esprit chez ceux qui ont reçu des dons de grâce par l’Esprit, de n’en pas permettre l’exercice, à moins qu’ils ne fassent partie d’un ministère établi et consacré par l’homme ? Mais ceux qui se trouveront réunis au nom de Jésus, reconnaîtront la présence et l’action de l’Esprit Saint et laisseront les dons de grâce s’exercer librement au milieu d’eux.


Ils auront, en effet, et reconnaîtront les dons que Christ, le Seigneur, donne pour le ministère, selon qu’ils nous sont montrés en Éph. 4:8-13; Rom. 12:6-8; 1 Cor. 12:28. Dans le premier et le dernier de ces passages, les dons sont les personnes mêmes qui possèdent les divers dons de grâce. Les dons d’apôtres et prophètes ne subsistent sans doute plus maintenant, dans le même sens qu’ils avaient au commencement — mais ceux d’évangélistes, de docteurs et de pasteurs, restent pour l’édification du corps de Christ. Nous ne voulons pas dire que, dans les divers systèmes humains, il n’y ait de ces dons, car Dieu agit en grâce souveraine ; mais ils ne sont pas à leur place, et d’ailleurs nous indiquons simplement ici ce qu’auront ceux qui se sont séparés des organisations d’hommes. Il leur restera tout ce qui est de Dieu et en particulier le ministère des dons que Christ dispense.


5.3 - La Parole de Dieu

Et enfin, ceux qui, par la grâce de Dieu, seront entrés dans le sentier de séparation, auront la parole de Dieu pour les édifier, les instruire et les guider dans ce sentier. L’Esprit Saint et son action, le Seigneur et ses dons, la parole de Dieu et ses directions, tout cela n’est-il pas pleinement suffisant ? Les premiers chrétiens avaient-ils autre chose ? Comme croyants, ils avaient reçu le Saint Esprit, « et », nous est-il dit, « ils persévéraient dans la doctrine et la communion des apôtres, dans la fraction du pain et les prières » (Actes 2:38, 41, 42). Ayant reçu le même Esprit quand nous avons cru, ne pouvons-nous pas faire comme eux ? Ils avaient les apôtres, direz-vous. Et nous avons « les paroles des apôtres », dont l’un écrivait : « Ce que nous avons vu et entendu, nous vous l’annonçons, afin que vous aussi vous ayez communion avec nous » (1 Jean 1:3).

La doctrine des apôtres, nous l’avons dans la Parole divinement inspirée. Voudrions-nous y ajouter quelque chose, sous prétexte que Dieu ne nous a pas dit tout ce qu’il fallait pour nous diriger, et qu’ainsi il nous laisse la liberté de nous organiser comme nous l’entendons ? Où est-ce que cette liberté nous est laissée ? Où Dieu l’a-t-il dit ? Toutes choses doivent être éprouvées par cette Parole. À ce qu’elle prescrit, nous avons à nous soumettre ; ce qu’elle n’autorise pas, il faut le laisser ; ce qu’elle condamne doit être rejeté. Voulons-nous être plus sages que Dieu ? L’obéissance en tout n’est-elle pas ce qui nous convient ? Pouvons-nous supposer que si telle chose établie par les hommes eût été dans sa pensée, il ne nous l’aurait pas dit, Lui qui, pour Israël, son peuple terrestre, indiqua jusqu’au nombre des agrafes des rideaux du tabernacle ?


5.4 - Le culte

Nous venons de voir que ceux qui, par obéissance à Dieu, se séparent des systèmes humains, ont tout ce qui leur est nécessaire pour leur rassemblement et leur marche selon Dieu. Que l’obligation de se réunir existe pour eux, l’exhortation contenue dans Héb. 10:25, nous le montre clairement, ainsi que les exemples donnés par les disciples (Actes 20:7), et les indications fournies par les épîtres (1 Cor. 11:18). Mais lorsque ceux qui désirent réaliser un rassemblement selon Dieu se réuniront, quel sera leur objet ? Évidemment, leur premier et grand but, comme aussi leur plus précieux privilège, sera de rendre culte à Dieu. Or le culte ne consiste pas en un discours précédé et suivi de prières, suivant des liturgies et des formulaires dressés à l’avance, lus ou récités, ou même improvisés, mais il est l’adoration en esprit et en vérité (Jean 4:23, 24), s’exprimant par les louanges et les actions de grâce, selon la direction de l’Esprit et la vérité de la Parole, et provenant de cœurs remplis de la présence de Dieu et de la jouissance de ses bénédictions. « Nous rendons culte par l’Esprit de Dieu », dit l’apôtre (Phil. 3:3), caractérisant ainsi les chrétiens. Pour rendre à Dieu ce culte, pour Lui offrir ces sacrifices spirituels qui Lui sont agréables par Jésus Christ, tous les chrétiens sont sacrificateurs (1 Pier. 2:5). L’exercice des dons n’a donc pas sa place dans le culte ; celui à qui Dieu le donne est l’organe de l’assemblée pour s’adresser à Lui. Mais les croyants se réuniront aussi pour être édifiés, enseignés et exhortés, et c’est là que les dons de grâce s’exerceront pour le service de Dieu en vue de la perfection des saints (Éph. 4:12).


5.5 - La Cène

Les croyants ont, dans la Cène du Seigneur établie « jusqu’à ce qu’il vienne » (1 Cor. 11:26), le fondement du culte chrétien. Elle rappelle les souffrances et la mort du Seigneur, et nous parle ainsi de l’immensité de l’amour de Dieu qui nous a donné son Fils, du dévouement de Christ qui s’est livré pour nous ; elle nous dit notre délivrance parfaite par sa mort, et par suite notre séparation d’avec un monde pécheur. La Cène, en présentant au croyant des choses si grandes, exerce ses affections, élève ses pensées vers Dieu — ce qu’il est et a fait pour nous — et ainsi produit l’adoration, les louanges et les actions de grâces. Elle est donc bien le centre du culte chrétien. Mais, en même temps, elle est le centre de communion pour les croyants. Ils affirment là qu’en communion avec Christ, ils sont en communion les uns avec les autres, comme membres d’un seul corps, selon ce que dit l’apôtre : « La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas la communion du sang du Christ ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas la communion du corps du Christ ? Car nous qui sommes plusieurs, sommes un seul pain, un seul corps, car nous participons tous à un seul et même pain » (1 Cor. 10:16-17). Ils se trouvent ainsi sur le terrain de l’unité du corps de Christ, vérité précieuse, mais oubliée, et qui, bien comprise, ferait disparaître les sectes. La Cène est donc l’ordonnance précieuse établie par Christ lui-même (1 Cor. 11:28), et qu’auront comme centre de leur culte ceux qui se réuniront au nom de Jésus.

Arrêtons-nous encore un moment sur cet acte si important, la Cène du Seigneur. En premier lieu, quant à sa célébration, nous ne voyons rien dans la Parole qui nous autorise à penser qu’il y ait une classe de personnes consacrées et désignées par un synode ou telle autre autorité ecclésiastique, et à qui soit dévolue la fonction de rendre grâces pour la Cène et de la distribuer. Cependant que voyons-nous dans la presque totalité des systèmes religieux ? Je mets de côté le papisme ; nous savons dans quelles monstrueuses aberrations il est tombé relativement à la Cène, qui est devenue la messe, un acte d’idolâtrie. Mais, dans les diverses fractions du protestantisme, la charge de rendre grâces et de distribuer la Cène appartient exclusivement — comme le baptême — à des hommes établis pour cela, à des ministres consacrés, comme l’on dit. Est-il question de cela quelque part dans l’Écriture ? Non ; l’épître aux Corinthiens nous apprend que des désordres s’étaient introduits dans l’assemblée à l’occasion de la Cène. On avait oublié sa signification et sa portée. L’apôtre réprimande-t-il un ministre ou des ministres qui auraient oublié d’accomplir fidèlement leur charge ? Ou bien établit-il une autorité quelconque pour maintenir l’ordre ? Non ; c’est l’assemblée à laquelle il s’adresse et qu’il rend responsable pour ce qui concerne la Cène, comme aussi pour l’ordre à garder en tout (Voyez 1 Cor. 11:17-34; 14:26-40).


À qui donc appartient-il de rendre grâces et de distribuer la Cène ? À ceux à qui Dieu, par son Esprit, le met au cœur, et qui deviennent dans cette occasion la bouche de l’assemblée, de sorte qu’elle dira « Amen » à leur action de grâces. On a peut-être compris jusqu’à un certain point, dans quelques congrégations, ce que nous venons de dire, et, cédant à l’évidence de la Parole, on permettra à un ancien — de ceux élus par la congrégation — de bénir et de distribuer la Cène, mais c’est encore un membre du presbytère, du clergé pour dire le mot, et où voyons-nous cela dans l’Écriture ?


Je dirai aussi un mot du jour où il convient de rompre le pain. Dans bien des « églises », on prend la Cène quatre ou cinq fois l’an — aux grandes fêtes, comme on les nomme sans aucune sanction dans l’Écriture pour les établir. En d’autres congrégations, ce sera tous les mois. Mais c’est aussi un arrangement humain, tandis qu’une simple lecture de la Parole nous montre que c’était une chose établie de rompre le pain le premier jour de la semaine, le jour de la résurrection du Sauveur. On voit même que c’était le but du rassemblement des disciples (Actes 20:7).


Ceux donc qui désirent entrer dans le sentier de séparation où l’Écriture appelle les croyants, auront aussi pour eux ce qui leur rappelle le lien étroit qui les unit à Christ présent au milieu d’eux ; ils auront le mémorial de ses souffrances et de sa mort.


5.6 - Discipline nécessaire

Mais à la table du Seigneur se rattache une autre chose qui engage la responsabilité de l’assemblée. C’est la discipline. Il est évident que les vrais croyants seuls ont leur place à la table du Seigneur, parce que seuls ils sont rachetés par son sang et membres de son corps. Supposons donc la table du Seigneur dressée au milieu de ceux qui se sont séparés des vases à déshonneur. Si triste et humiliant qu’il soit de le reconnaître, un chrétien peut, par manque de vigilance, tomber dans le péché. Que doit faire l’assemblée ? Se purifier d’un mal qui la souillerait toute entière, si une fois reconnu, elle le tolérait. Nous trouvons à cet égard un enseignement clair et positif dans 1 Cor. 5, chapitre qui se termine par ces paroles : « Ôtez le méchant du milieu de vous-mêmes ». Exclu de l’assemblée, il l’est nécessairement aussi de la Cène, qui est l’expression de la communion les uns avec les autres. Dans ce chapitre des Corinthiens, il est question du mal moral ; que dirons-nous du mal doctrinal, de l’erreur qui porte atteinte à Christ et à sa parole ? L’Écriture n’est pas moins claire, puisqu’il faut rejeter l’homme hérétique ou sectaire, après une première et une seconde admonestation (Tite 3:10, 11), et qu’il ne faut ni recevoir dans sa maison, ni même saluer celui qui n’apporte pas la doctrine de Christ (2 Jean 10).


Or à l’égard de la discipline, que voyons-nous dans la plupart des dénominations chrétiennes ? Chacun prend la Cène sous sa propre responsabilité, et la table du Seigneur, ou ce qui est appelé de ce nom, est ouverte à des incrédules ou à des hommes qui professent des erreurs antichrétiennes !


J’ai essayé de montrer, d’après l’Écriture, ce que possèdent ceux qui désirent marcher dans le sentier de la foi et de l’obéissance, en se séparant du mal qui a envahi la chrétienté ; en même temps, nous avons pu voir la simplicité des ordonnances et des directions données dans la Parole pour l’ordre à garder dans un rassemblement formé au nom de Jésus. J’ajouterai que, si tous ces points que nous avons passés en revue ont leur sanction dans la Parole de Dieu, tous les chrétiens vraiment désireux d’obéir au Seigneur ont leur place avec ceux qui se trouvent sur ce terrain. Il est assez large pour eux tous. D’un autre côté, nul chrétien n’a le droit d’insister pour faire accepter ce qui n’est pas clairement établi dans l’Écriture et le poser comme condition de communion. Tel serait le cas, par exemple, si l’on voulait imposer le baptême des adultes. On irait au-delà de ce que la Parole nous dit. Il en serait de même, si on laissait de côté quoi que ce soit que l’Écriture établit. Ainsi, je le répète, le terrain est assez large pour recevoir tous ceux qui désirent sincèrement marcher dans l’obéissance au Seigneur.


5.7 - Comment garder l’unité

Il y a plus. L’unité qui caractérisait autrefois les croyants d’une manière visible, n’existe plus actuellement de cette manière ; toutefois le principe de cette unité retrouvera sa manifestation pratique par l’obéissance à la parole de Dieu. Supposons, en effet, qu’en différents endroits se soient formés des rassemblements de croyants réunis sur les mêmes principes — acceptant tout ce que la parole de Dieu prescrit et rien d’autre. Ces différents rassemblements ne seront-ils pas en communion les uns avec les autres, quelle que soit la distance qui les sépare, à quelque pays qu’ils appartiennent ? Évidemment. Et comme ils seront réunis autour d’un même centre, Jésus, et qu’ils ont le même Esprit qui les unit à Lui et qui les conduit, ils se trouveront aussi à une seule et même table, la table du Seigneur. Les dons aussi qui seront parmi eux auront leur libre exercice dans tous ces rassemblements où qu’ils se trouvent, et la discipline exercée par une assemblée ne pourra qu’être acceptée par toutes. C’est ainsi que l’unité sera pratiquement gardée.


Je désire aller au-devant d’une objection que l’on pourrait faire. On dira : « Vous affirmez que la chrétienté est divisée en sectes, et que c’est un grand mal ; mais en voulant se rassembler de la manière que vous dites, ne formerait-on pas une nouvelle secte à ajouter à toutes les autres ? » Nullement, et j’espère le montrer. D’abord, qu’est-ce que c’est qu’une secte ? N’est-ce pas un ensemble de personnes réunies par les mêmes vues sur un point, ou des points particuliers ? Cela posé, que voyons-nous dans la chrétienté, sinon quantité d’églises séparées les unes des autres par des différences d’organisation, de doctrine ou de discipline ? Et ce sont ces vues particulières qui distinguent chaque église, qui forment le lien d’union entre les membres qui la composent. Ainsi, les églises presbytériennes sont celles dont les membres pensent que la meilleure forme de gouvernement pour une église est celle où le gouvernement de l’Église s’exerce par le corps des anciens ou presbytère. C’est ce point de vue particulier qui les sépare des autres chrétiens. Les églises indépendantes ou libres sont fondées sur le principe de l’affranchissement du contrôle de l’État quant au salaire du clergé et au gouvernement de l’Église. C’est bien ; mais est-ce là ce qui doit être le lien d’union ? C’est une vue particulière. Si l’on dit : Nous le faisons par obéissance à Christ, le Chef de l’Église, je répondrai : Obéissez donc à Christ en tout, et qu’il soit, Lui, votre centre d’union. Supposons maintenant une église baptiste. C’est un corps de personnes réunies par cette vue particulière, que le vrai mode de baptême est celui des adultes par immersion. Nous pourrions passer en revue toutes les autres dénominations du protestantisme, et nous verrions qu’il en est de même chez toutes, et qu’ainsi, comme du reste beaucoup le reconnaissent, elles sont des sectes. Mais peut-on appeler de ce nom ceux qui rejettent toute vue particulière pour se réunir au nom de Jésus seul, en s’attachant uniquement à ce que la parole de Dieu enseigne clairement ? Il nous est dit, comme je l’ai déjà rappelé : « Sortons donc hors du camp vers Lui », c’est là ce que les chrétiens ont tous à faire, et non à former des camps séparés chacun sous une bannière particulière.


Il est vrai que chez beaucoup de chrétiens s’est fait sentir un besoin d’union. On a parlé, on parle encore des moyens d’arriver à y satisfaire. Supposons un moment que des membres des diverses dénominations ou systèmes religieux se réunissent pour examiner comment ils pourraient la réaliser. N’est-il pas vrai qu’il faudrait tout d’abord que chacun mît de côté ce qui caractérise son système ? Et s’ils allaient jusqu’au bout, et qu’ayant abandonné chacun les points de vue qui les séparent, ils convenaient de ne suivre que ce qui est selon la Parole et rien d’autre, ne se trouveraient-ils pas nécessairement sur le terrain que nous avons indiqué ?


On dira peut-être : « C’est ce qu’on réalise dans l’Alliance évangélique ; on se réunit pour prier ensemble, et chacun met de côté ses vues particulières pour être là seulement comme chrétien ». C’est bien, mais que fait-on après ces jours de réunion ? Chacun retourne dans son système et y continue. La confusion a été ainsi mise d’autant plus en évidence. S’il a été bon de dépouiller pendant un jour ou huit jours son caractère de secte, pourquoi ne pas le dépouiller pour toujours ? Si l’on se réunissait en mettant vraiment de côté ce qui distingue et sépare les diverses dénominations, les noms qu’elles prennent deviendraient inutiles ; il n’y aurait plus que le nom de Christ, et on se dirait uniquement chrétiens frères dans le Seigneur, comme aux premiers temps.


Qu’il me soit permis de faire encore une supposition. Si le Seigneur Jésus revenait parmi nous, pour mettre les choses en ordre selon la Parole et rétablir l’unité de l’Église, pensez-vous qu’il irait prendre sa place dans telle ou telle dénomination, à l’exclusion des autres ? Non ; mais comme autrefois Moïse qui planta hors du camp la tente d’assignation ou du rendez-vous (Ex. 33:7), le Seigneur, en dehors de tout système, appellerait à Lui tous ceux qui l’aiment d’un cœur pur. Ils laisseraient là leurs diverses organisations pour sortir vers Lui, et se trouveraient rassemblés en son nom, lui-même et son Esprit au milieu d’eux. Il distribuerait des dons de grâce différents, selon qu’il Lui plairait, et ils auraient aussi sa Parole pour les diriger dans ce qu’ils auraient à faire. Or si le Seigneur n’est pas corporellement au milieu de nous, le principe de sa présence est posé dans la Parole. Il l’a dit : Si nous nous réunissons en son nom — en son nom seulement — il est au milieu de nous. Nous avons donc à agir en conséquence. Il est évident que si tous les vrais chrétiens sortaient ainsi vers Jésus et se réunissaient en son nom, il y aurait comme une nouvelle manifestation de l’Église comme un seul corps, n’ayant d’autre nom que celui de Christ, d’autre centre et d’autre Chef que Lui, d’autre règle que sa Parole, d’autre ministère que les dons directement donnés de Lui et agissant dans la liberté et la puissance de l’Esprit.


Or, mon cher lecteur, nous n’avons pas à attendre que d’autres ou que tous suivent ce sentier pour nous y engager nous-mêmes. Chacun personnellement est tenu d’obéir au Seigneur, quelles qu’en soient les conséquences et dût-il être seul dans ce sentier. Si vous reconnaissez que les choses que j’ai essayé de placer sous vos yeux sont selon la Parole, vous n’avez, pour être fidèle, qu’un seul chemin à suivre — celui de la séparation et de l’obéissance.