H. Rossier — Courtes méditations — n°32 [28 bis]
ME 1923 p. 77-80
Aussi longtemps qu’il est
dans ce monde, le chrétien a trois demeures
fixes et inébranlables. Nous disons « fixes », parce que ce qui caractérise
son pèlerinage, c’est une tente
,
dressée jour après jour, dans le désert. Dans ce sens, la tente nous
suffit, comme aux patriarches. Nous savons qu’elle n’est pas durable, qu’elle
peut-être détruite d’un moment à l’autre, mais nous savons aussi que déjà notre
domicile éternel est préparé dans les cieux, dans la personne d’un Homme
ressuscité et assis, comme tel, à la droite de Dieu.
Les trois demeures dont nous
parlons sont tout autre chose. Pendant qu’il traverse le monde, le chrétien a
un lieu de refuge
, un lieu de repos
, un lieu
de
délices
, lieux entièrement
en dehors des limites de cette création, et par conséquent célestes ; or
c’est de ces demeures-là que nous désirons dire quelques mots.
Le Psaume 71 nous parle de la
première. Comme le croyant dans ce Psaume, nous, chrétiens, nous sommes
menacés, pendant le voyage, de dangers de toute espèce, dangers suscités par
Satan, et dont il cherche à faire usage pour nous perdre. Ces dangers sont une
menace de chaque instant pour notre vie spirituelle. Au dehors, les ennemis
nous environnent, prompts à nous assaillir : la haine, la tribulation, les
obstacles ; — au dedans, d’autres ennemis nous assaillent, par le moyen
des convoitises que le monde nous offre pour nous faire succomber, si nous
prêtons l’oreille à ses appels. Ces ennemis sont de tous les instants. Comment
leur échapper ? « Viens, mon peuple, dit le Seigneur ; entre dans tes
chambres et ferme tes portes sur toi ; cache-toi pour un petit moment »
(És. 26:20). Il nous faut avoir un refuge assuré contre le danger. C’est ce que
nous voyons dans ce Psaume 71. Ce refuge
est Dieu lui-même
: « Sois
pour moi un rocher d’habitation, afin que j’y entre
continuellement ; tu as donné commandement de me sauver, car tu es mon
rocher et mon lieu fort ». Quelle sécurité ! Du moment que nous nous
réfugions dans cette forteresse, nous pouvons être certains d’y trouver une consigne
absolue donnée en notre faveur,
une délivrance, un salut inébranlable. Ce rocher nous offre une
habitation ; il nous faut y « entrer continuellement
». Dès
qu’un danger surgît, il nous faut courir à Dieu lui-même, notre
refuge. Il garde toujours la même valeur, depuis notre naissance spirituelle, à
travers toute notre jeunesse et jusqu’aux cheveux blancs (v. 5-6, 17-18).
Il y a sans doute, outre un
refuge à chercher, un combat à livrer à ciel ouvert, et pour lequel nous avons
à revêtir l’armure complète de Dieu ; mais ce dont nous parlons ici, c’est
des ennemis embusqués, nous guettant pour nous faire tomber dans la fosse, et
non pas du combat en rase campagne. Résistons
à l’ennemi quand il se démasque ; fuyons
devant les ennemis
embusqués, pour nous réfugier en Dieu dans la forteresse qui nous offre une
sécurité absolue. Le danger passé, nous pourrons en sortir pour vaquer à
d’autres devoirs, mais le moment d’après il nous faudra peut-être en reprendre
le chemin. Ne nous est-il pas dit : « afin
que j’y entre continuellement
» ?
Cette entrée est pour nous la confiance, la prière, un recours continuel
à Celui qui est notre gardien et notre force.
Le refuge nous offre ainsi
une sécurité
de chaque instant.
Au Psaume 84 notre trouvons
la seconde demeure. Ce n’est plus la forteresse ; c’est le
temple
qui n’est pas un lieu de refuge,
mais un lieu de repos,
après lequel
soupire une pauvre âme craintive et que le moindre souffle agite. Dans le
temple, dans ces parvis de Dieu, le croyant trouve une double source de
repos : D’abord le repos fondé sur la personne du Fils du Dieu vivant qui,
après avoir achevé son oeuvre en notre faveur, nous a devancés et s’est assis à
la droite de Dieu — ensuite le repos fondé sur l’oeuvre elle-même, sur le
sacrifice de Christ, sur les autels de Dieu. À cette oeuvre il ne reste rien à
ajouter, puisque Dieu lui-même y a trouvé Son repos.
Le résultat de l’habitation
dans ces aimables demeures et du repos dont l’âme y jouit, c’est l’adoration ou
le Culte
: « Bienheureux ceux qui
habitent dans ta maison ; ils te
loueront
sans cesse ! » (v. 4).
Au Psaume 27, nous trouvons
la troisième demeure. Ce n’est plus le temple et ses sacrifices, mais le lieu
secret du temple, la « loge » de la maison de l’Éternel, le lieu très saint
. C’est une
demeure beaucoup plus intime que les « parvis » de l’Éternel : une
merveilleuse habitation ! Le croyant ne demande qu’une seule chose, c’est
d’y habiter tous les jours de sa vie, et non pas de s’y réfugier à l’occasion.
Il veut y contempler « la beauté de l’Éternel » et « s’enquérir diligemment de Lui
dans son temple ». Il faut pour cela un travail soigneux et continuel, une étude
heureuse, une activité spirituelle constante, mais qui n’a rien de difficile ni
de décourageant. L’âme est abreuvée au fleuve des délices de Dieu qui est
Christ.
C’est plus que le repos,
c’est la communion
, un état dans lequel l’âme est pleinement à l’unisson
de tous les sentiments, de tous les désirs, de toutes les joies du Père et du
Fils. Rien n’est plus élevé dans la vie chrétienne. Nous en avons parlé
longuement ailleurs (*).
(*) Communion et Psaumes de communion, par H.R. — Bibliquest : voir index des études bibliques sur l’Ancien Testament, à Psaumes
Remarquez que, lorsque vous
avez la Communion, vous avez aussi tout le reste. La communion nous donne un refuge
assuré contre toutes les entreprises de l’ennemi : « Car, au mauvais jour,
il me mettra à couvert dans sa loge, il me tiendra caché dans le secret de sa
tente, il m’élèvera sur un rocher. Et maintenant ma tête sera élevée par-dessus
mes ennemis qui sont à l’entour de moi » (v. 6). — De même la communion est à la
base du culte et de l’adoration
: « Et je sacrifierai dans sa tente
des sacrifices de cris de réjouissance ; je chanterai et je psalmodierai à
l’Éternel » (v. 6).
Les ennemis, les dangers de la route, ne pourront jamais abattre celui qui est en communion avec le Seigneur et demeure dans le lieu secret de son tabernacle — son repos ne pourra jamais être troublé et son culte sera digne de son Objet !