par H. Rossier
Table des matières :
On a fait remarquer avec justesse que la première épître à Timothée et l’épître à Tite tirent chacune son caractère de la mission dont l’apôtre avait chargé ses deux délégués et compagnons d’oeuvre. Timothée devait veiller sur la saine doctrine (1 Tim. 1:3-4), Tite, sur l’ordre dans la maison de Dieu (Tite 1:5).
Ayant l’intention de nous occuper exclusivement de l’épître à Tite, nous n’insisterons pas sur les contrastes entre ces deux épîtres, et sur ce en quoi elles diffèrent. D’autres l’ont fait beaucoup mieux que nous. Nous nous bornerons plutôt, au courant de cette étude, à présenter leurs points de contact, pour aider selon notre faible mesure à l’explication de cet important sujet.
L’épître à Tite, tout en
insistant beaucoup, comme la première épître à Timothée, sur la doctrine
ou l’enseignement
parmi
les saints (le terme grec est le même pour ces deux mots (*)) , en l’opposant à
l’enseignement des faux docteurs, insiste davantage sur les vérités
fondamentales du christianisme. Elle fait ressortir les fruits de ces vérités
dans la vie pratique des croyants, en sorte qu’un bel ordre puisse caractériser
la maison de Dieu et une belle harmonie exister entre tous ses membres.
(*) Didaskalia ; 1:9 ; 2:1, 3, 7, 10. Voyez 1 Tim. 1:10 ; 2:7 ; 4:6, 13, 16 ; 5:17 ; 6:1, 3.
La « saine doctrine
» comprend tous les principes divins
qui nous sont exposés dans les trois passages capitaux de cette épître. Nous
trouvons, en effet :
dans le premier de ces passages (chap. 1:1-4) , la doctrine du christianisme, résumée dans les grandes vérités qui le caractérisent ;
dans le second (chap. 2:11-14), la somme du christianisme, non plus dans ses vérités caractéristiques, mais dans sa réalisation pratique quant à notre marche et à notre conduite ;
le troisième enfin (chap. 3:4-7), nous renseigne sur
l’oeuvre de Dieu en nous
et sur les
moyens dont il s’est servi pour nous amener à Lui et nous acquérir le salut.
Nous aurons occasion de reprendre et d’expliquer en détail tous ces passages ; mais avant de les aborder une remarque s’impose : Il est de toute importance, dans les jours que nous traversons, d’insister sur la grande vérité que voici :
La pratique de la vie chrétienne est inséparable de la saine doctrine.
En effet, l’on rencontre de plus en plus
aujourd’hui la prétention d’amener les chrétiens à produire des fruits selon
Dieu, en dépit des doctrines malsaines qui altèrent ou ruinent les vérités
souvent les plus essentielles du christianisme. On jette du discrédit sur les
Saintes Écritures, seul et infaillible recueil de ces vérités. En ôtant à la
vie chrétienne sa base absolue qui est la Parole inspirée, on oublie que des
fruits ne peuvent être produits sans l’arbre qui les porte.
En estimant l’homme déchu capable, sans la Révélation, de produire par lui-même des fruits pour Dieu, on oublie qu’un mauvais arbre ne portera jamais de bons fruits. En faisant de la parole de Dieu un guide doué d’une moralité supérieure, mais écrit sous l’influence des erreurs et des préjugés de ses divers auteurs, on oublie qu’un bon arbre, privé de la sève qui l’alimente, par la mutilation de son écorce, est incapable de fournir une récolte suffisante, ou même une récolte quelconque.
La liaison intime entre la doctrine et la vie pratique se retrouve à chaque pas dans les Écritures. Le Psaume 119 nous montre que, par la Parole seule le sentier du juste est tracé et illuminé. Sans l’enseignement de l’Écriture, le croyant confesse avoir été « comme une brebis qui périt ». Les deux épîtres à Timothée sont pleines de cette vérité. En 2 Tim. 3:16, ce sont les Écritures divinement inspirées qui nous enseignent et nous instruisent quant à la justice pratique pour toute notre conduite. Le Chap. 2 de notre épître suffirait à lui seul pour nous convaincre de cette importante vérité, et nous dispenser d’en multiplier à l’infini les exemples. Cependant souvenons-nous encore que, même le chrétien qui a une pleine confiance dans l’autorité absolue de la Parole écrite, verra toujours la saveur de sa vie pratique dépendre de la mesure dont il se nourrit des Écritures, dont il reste en contact avec elles et se soumet à leur enseignement.
« Paul, esclave de Dieu, et apôtre de Jésus Christ selon la foi des élus de Dieu et la connaissance de la vérité qui est selon la piété, dans l’espérance de la vie éternelle que Dieu, qui ne peut mentir, a promise avant les temps des siècles… ; mais il a manifesté, au temps propre, sa Parole, dans la prédication qui m’a été confiée à moi selon le commandement de notre Dieu Sauveur, — à Tite, mon véritable enfant selon la commune foi : Grâce et paix, de la part de Dieu le Père et du Christ Jésus notre Sauveur ! » (v. 1-4).
Tel est le premier passage capital de notre épître. Comme nous l’avons dit, ces quatre versets résument et condensent en quelques mots le sujet inépuisable des grandes vérités du christianisme.
Nous apprenons d’abord que la
source de ces bénédictions se trouve en Dieu lui-même. Il nous est présenté en
premier lieu dans son caractère absolu, comme Dieu
; puis comme
le Dieu vrai
qui ne peut
mentir ; puis comme le Dieu Sauveur,
se révélant comme tel à des êtres perdus ; enfin comme Dieu le Père,
le Dieu d’amour. Mais
c’est en Jésus Christ
, notre
Sauveur,
que nous avons la révélation de tout ce que Dieu est pour nous.
L’apôtre Paul est
l’instrument de cette révélation. Il s’intitule esclave de Dieu.
Ce titre ne se rencontre que deux fois dans les
épîtres (ici et en Jacq. 1:1), et quelquefois dans
l’Apocalypse, tandis que celui d’esclave de Christ est plus fréquent. Être
esclave de Dieu suppose une dépendance absolue, la crainte et le tremblement
dans l’exercice de ses fonctions, le respect de chaque parole sortie de la
bouche de Dieu, le profond sentiment de notre responsabilité. En même temps, le
grand apôtre des Gentils est placé par sa qualité d’esclave dans la position la
plus humble et la plus basse. Cette attitude devait être en exemple à Tite qui
venait d’être appelé à occuper une place d’honneur : Or si l’apôtre
lui-même avait une position si humble et si dépendante, combien plus vrai
encore cela devait-il être de son disciple !
Comme esclave de Dieu, Paul ne s’appartient pas à lui-même. Ce que Dieu attend de son esclave, c’est une obéissance sans réserve, une fidélité scrupuleuse à s’acquitter du message que le Maître auquel il appartient lui a confié. Mais ce message solennel n’a rien d’effrayant et ne contient aucune menace, car celui qui le porte à d’autres est esclave du « Dieu Sauveur » .
C’est pourquoi aussi Paul
s’intitule « apôtre de Jésus Christ
».
Si Dieu a mis la vérité entre ses mains, Christ l’envoie pour la faire
connaître et la répandre. Cette mission place Paul dans une relation
particulière avec Christ, comme son apôtre, envoyé par Lui pour apporter au
monde les vérités que Dieu avait en vue de toute éternité, vérités qui étaient
offertes aux hommes, comme devant être leur part en vertu de l’oeuvre de
Christ. Aussi Paul peut-il dire : « le Christ
Jésus notre Sauveur
» ;
l’auteur du salut qui faisait partie en tout temps des desseins du Dieu
d’amour à notre égard. Ce salut, Paul en parle comme lui appartenant en propre
à lui-même. Il peut dire : Christ n’est pas seulement le
Sauveur, mais il est le mien
et celui de tous ceux qui croient en Lui : notre
Sauveur. Le
salut nous a été acquis par Jésus Christ. Lui-même est devenu esclave de Dieu
pour nous l’acquérir, et notre serviteur pour nous l’appliquer après l’avoir
accompli (Phil. 2:6-8).
Considérons maintenant en quoi consiste le ministère de l’apôtre :
1° Son apostolat n’a rien de
commun avec les principes du judaïsme. Il est entièrement indépendant de la
loi. Il est selon la FOI des élus de
Dieu.
Il ne s’adresse ni à la
chair, ni à la volonté de l’homme, mais à la foi, en contraste avec la loi. En
outre, il exclut entièrement le principe juif d’un peuple établi sur le pied
d’une descendance charnelle. Sans doute, cette descendance était établie à
l’origine sur la foi du seul Abraham, tout en laissant subsister des relations
selon la chair avec le peuple issu de lui. Mais ce peuple dans la chair, appelé
à se soumettre à la loi, a perdu par sa désobéissance tout droit à être reconnu
comme le peuple de Dieu et ne retrouvera plus tard ce titre que sur le pied,
comme nous, de la foi des élus.
L’apostolat de Paul
s’adressait à la foi individuelle
et
non pas à un peuple privilégié, issu d’une descendance terrestre. Ceux qui
recevaient cette foi étaient les élus de
Dieu
qu’Il avait en vue de toute
éternité,
comme devant lui appartenir, et qui, sauvés par la foi,
constituaient désormais par leur réunion un peuple céleste.
Ces deux choses, la foi et l’élection, caractérisent, d’une manière absolue, le christianisme, en contraste avec le judaïsme. L’une et l’autre dépendent exclusivement de la grâce et non de la loi.
2° Le second sujet de
l’apostolat de Paul était « la
connaissance de la vérité qui est selon la piété » .
C’était la vérité,
la vérité tout entière, qu’il donnait à connaître, rien
moins que cela ! Qu’est-ce donc que la vérité ? Elle est, comme nous
l’avons fait remarquer autre part, la pleine révélation de ce que Dieu est
(de sa nature), de ce qu’Il dit
(de sa Parole) et de ce qu’il pense
(de son Esprit) ; en d’autres
termes, la révélation du Père, du Fils et du Saint Esprit.
Ce que Dieu est
nous est révélé en Christ dans
lequel toute la plénitude de la déité habite corporellement (Col. 2:9). C’est
en Christ que nous connaissons Dieu comme Celui qui est lumière et qui est
amour.
La vérité est ensuite ce que
Dieu dit,
c’est-à-dire sa Parole. « Ta
Parole », dit Jésus, « est la vérité » (Jean 17:17). Cette Parole nous est
apportée par Christ. Il est donc à la
fois
ce que Dieu est et ce que Dieu dit. Dans l’Évangile de Jean qui le
présente comme « Fils de Dieu », il dit continuellement : « Je suis ». Quand
les Juifs lui demandent : « Toi qui es
-tu ? » il leur
répond : « Absolument ce qu’aussi je vous dis
». (Jean 8:25).
L’identification absolue en Christ de ces deux côtés de la vérité : ce que
Dieu est, et ce qu’Il dit : Sa nature et Sa Parole, nous est présentée
dans ce passage. C’est en Christ (« en Fils ») que Dieu nous a parlé, en
contraste avec la manière fragmentaire dont il avait parlé autrefois par les
prophètes (Hébr. 1:1), présentant par eux une partie de la vérité, tandis qu’en
Christ qui est la Parole, Dieu la présente maintenant dans sa totalité. Le
christianisme est la suprême et seule complète expression de la vérité, parce
que la vérité nous y parle « en Fils ». Elle est venue par Lui, non par Moise,
parce qu’elle est venue dans une personne qui est la vérité elle-même, telle
que la Parole nous la révèle.
La vérité est enfin la pensée
de Dieu sur toutes choses. Cette pensée est en Christ, et
l’Esprit en rend témoignage, car « l’Esprit est la vérité » (1 Jean 5:6). Il rend
témoignage que la vie éternelle est en Christ et nous est acquise par son
sacrifice.
La vérité trouve donc sa
parfaite expression en Christ, car il est Lui-même la vérité : « Je suis
la vérité
», dit-il (Jean 14:6). Sous le régime de la loi, Dieu ne
révélait point toute sa pensée sur quoi que ce fût. Il ne se faisait pas
connaître comme le Dieu d’amour
: tout au plus, la révélation que
l’Éternel donna, quant à Lui-même, sous la loi fut-elle accompagnée de la
proclamation de sa miséricorde
(Ex. 34:6). Sous la loi, Dieu ne
révélait pas non plus que l’homme est perdu, car la
loi supposait la possibilité pour l’homme d’obtenir la vie en obéissant aux
commandements de Dieu. L’Éternel n’y révélait pas non plus sa pensée sur le
monde, car sous la loi le monde n’était pas encore présenté, comme
définitivement asservi à Satan et condamné — ni sur le ciel, car l’homme étant
pécheur, le ciel lui était fermé et la loi ne pouvait lui promettre qu’une
bénédiction terrestre. Dieu lui-même n’était pas non plus manifesté sous la loi
et restait caché dans une profonde obscurité derrière le voile. Il n’était pas
non plus question, sous la loi, d’un sacrifice qui pût ôter
les péchés et réconcilier, une fois pour toutes, le pécheur
avec Dieu.
En résumé, la connaissance de
la vérité était inconnue sous la loi, sauf d’une manière partielle. Dans sa
plénitude, cette connaissance appartient exclusivement
au christianisme.
Mais notons ici un second
point : cette connaissance de la vérité est selon la piété.
La piété est le maintien de
relations habituelles entre notre âme et Dieu, maintien puisé dans la
connaissance de la vérité. Le « mystère de la piété » en 1 Tim. 3:16, n’est pas
autre chose ; c’est le secret par lequel la piété est produite, par lequel
l’âme est amenée à jouir de ses relations avec Dieu et y est maintenue. La
vérité, comme nous l’avons vu, se résume tout entière en une seule personne, Jésus,
Dieu manifesté en chair. Lui seul nous a fait connaître Dieu et nous met en
relation avec Lui. C’est pourquoi « le mystère de la piété qui est grand » se
résume dans la connaissance de Christ seul
:
« Dieu a été manifesté en chair, a été justifié en Esprit, a été vu des anges, a
été prêché parmi les nations, a été cru au monde, a été élevé dans la gloire »
(1 Tim. 3:16). La connaissance de la vérité, si elle n’avait pas la piété pour
résultat, conduirait l’homme à sa condamnation éternelle, car elle ne le mettrait
jamais en relation avec Dieu : Au lieu de posséder la vérité qui est selon
la piété, on peut « la posséder tout en vivant dans l’iniquité » (Rom. 1:18) , et l’homme qui la possède ainsi sera l’objet de la
colère de Dieu au lieu d’être l’objet de sa faveur.
3° L’apostolat confié à Paul
avait pour base l’espérance de la vie
éternelle.
Cette espérance est une certitude
qui n’a rien de vague ni d’incertain comme l’espérance humaine, car elle
appartient à la foi. La vie éternelle avait été promise par Dieu lui-même, avant que les temps des siècles eussent
commencé ;
et comment Dieu pourrait-il mentir à sa propre promesse
d’éternité ? N’a-t-il pas dit : « Il n’y en a point comme moi,
déclarant dès le commencement ce qui sera à la fin,… en disant : Mon
conseil s’accomplira ? » (És. 46:10). Les « élus
de Dieu » possèdent déjà maintenant cette vie, par la foi en un Christ mort
(Jean 6:54). « Il est le Dieu véritable et la vie éternelle ». Quiconque croit en
Lui a
cette vie, non pas la vie
humaine périssable, mais une vie spirituelle sans fin, la vie de Dieu lui-même,
une vie capable de connaître Dieu, de jouir de Lui, d’avoir communion avec Lui,
le Père, et avec son Fils Jésus Christ. Telle est « la vie éternelle » . Sans doute, aussi longtemps que le chrétien sera ici-bas,
sa jouissance de cette vie sera imparfaite, mais, cette vie, nous en
réaliserons bientôt toute la valeur dans la gloire, quand nous le verrons, Lui,
notre vie, et Lui serons semblables ; quand nous connaîtrons comme nous
avons été connus ; quand nous jouirons des ineffables délices d’une
communion parfaite et ininterrompue avec Lui, l’objet de notre espérance.
Telle est la doctrine chrétienne,
l’essence même du
christianisme. Certes, nous pouvons nous écrier avec l’apôtre : « O
profondeur des richesses et de la sagesse et de la connaissance de Dieu ! »
Oui, quelles richesses infinies ! Quel objet le christianisme nous donne ! Quelle assurance ! Quelle jouissance
actuelle ! Quel bonheur et quelle paix dans nos relations avec Dieu !
Quelle joie accomplie dans sa communion ! Quelle certitude pour
l’avenir ! Y a-t-il une connaissance qui puisse être comparée à celle que
l’Évangile nous apporte ?
4° Mais il a manifesté au temps propre sa Parole.
En contraste avec
« les temps des siècles », il y a « un temps propre ». Ce temps, nous y
sommes ; c’est le jour d’aujourd’hui dans lequel Dieu a pleinement
manifesté tout le conseil de sa grâce, dont nous venons de parler. Ce « temps
propre », Dieu l’avait déterminé d’avance : il est maintenant apparu. Il a
été inauguré par un fait unique dans l’histoire et dont la valeur n’aura pas
plus de terme que l’éternité elle-même : nous voulons parler de la croix
de Christ et de la résurrection du Fils de Dieu d’entre les morts. C’est là que
tout le conseil de Dieu à notre égard a été pleinement manifesté. Le voile qui
nous séparait de Dieu est déchiré, l’accès devant Lui ouvert dans la pleine
lumière, la relation avec Lui, comme notre Père, établie à toujours,
l’héritage, proclamé comme notre part avec Christ dans la gloire — et tout cela
par Lui et en Lui.
Rien de semblable n’avait été
annoncé ni connu auparavant. La Parole
du
Dieu qui ne peut mentir est maintenant manifestée. Les pensées éternelles de
Dieu existaient jusque-là dans le mystère de ses conseils, elles sont
maintenant connues, et la prédication de
cette Parole a été confiée à Paul.
Quelle importance immense avait donc son
apostolat ! Dès lors la Parole de vérité est complète (Col. 1:25). Sa
prédication était un commandement
et
nous savons comment l’apôtre y a obéi. Mais ce commandement n’avait aucune
ressemblance avec la loi, car c’était, non pas l’Éternel, le Dieu du Sinaï,
mais le Dieu Sauveur
qui se révélait
au temps convenable dans la parole dont la prédication était confiée à
l’apôtre.
Paul adresse son épître à
Tite (v. 4). Celui-ci était le véritable
enfant
de l’apôtre. Il avait été engendré selon la vérité et avait reçu
cette dernière sur le même pied que son père spirituel, sur le pied de la foi.
Cette foi était donc commune
à Paul et à Tite (au juif et au
gentil), mais Paul avait été l’instrument pour la communiquer à ce dernier.
Dieu le Père et le Christ
Jésus notre
Sauveur, l’amour divin et
la grâce divine, s’unissent pour apporter à Tite un heureux message de faveur
et de paix comme bénédictions actuelles, lesquelles étaient sa part, aussi bien
que celle de l’apôtre qui avait le même Sauveur que son disciple.
« Je t’ai laissé en Crète dans ce but, que tu mettes en bon ordre les choses qui restent à régler, et que, dans chaque ville, tu établisses des anciens, suivant que moi je t’ai ordonné : si quelqu’un est irréprochable, mari d’une seule femme, ayant des enfants fidèles, qui ne soient pas accusés de dissipation, ou insubordonnés. Car il faut que le surveillant soit irréprochable comme administrateur de Dieu, non adonné à son sens, non colère, non adonné au vin, non batteur, non avide d’un gain honteux, mais hospitalier, aimant le bien, sage, juste, pieux, continent, tenant ferme la fidèle Parole selon la doctrine, afin qu’il soit capable, tant d’exhorter par un sain enseignement, que de réfuter les contredisants » (v. 5-9).
Nous venons de voir quelles
sont les bases du christianisme : La foi des élus, la vérité selon la
piété, la vie éternelle, la Parole de Dieu, enfin la prédication qui puise ces
choses dans la Parole. Tous ces sujets sont compris dans ce qui est appelé « la
sainte doctrine ». Les versets 5 à 9 que nous venons de citer traitent du bon ordre
dans l’Assemblée, mais le bon
ordre ne peut avoir lieu sans la saine doctrine et l’enseignement qui la
présente. C’est ce que nous avons fait remarquer dès le début de cet écrit.
Cet enseignement est confié à tous ceux auxquels Dieu a donné une responsabilité spéciale dans l’assemblée : à Tite d’abord (2:1), aux anciens (1:9), aux femmes âgées, dans une mesure, il est vrai, très limitée (2:3), aux jeunes hommes (2:7). Enfin l’enseignement a son modèle parfait dans l’enseignement de la grâce qui est apparue en Jésus (2:12).
L’administration confiée à
Tite consistait à établir, régler et maintenir le bon ordre
dans les assemblées de Dieu en Crète, tandis que
l’administration confiée à Timothée dans l’assemblée d’Éphèse consistait à
veiller d’une manière spéciale sur la doctrine, afin qu’elle ne fût pas
falsifiée. L’administration confiée à l’apôtre Paul était infiniment plus
étendue que celle de ses délégués : il avait la gestion du mystère du Christ
dans ce monde (Éph. 3:2, 9 ; 1:10 ; 1 Cor. 9:17), du mystère
caché dès les siècles et dès les générations, mais révélé maintenant par
l’Esprit. Ce mystère était l’union en un seul corps de l’Église avec Christ.
Paul avait à faire connaître à cette dernière sa position et sa vocation, et la
gérance de ce mystère était inséparable d’un travail incessant et d’une
surveillance continuelle, car l’apôtre désirait présenter à Christ son Épouse
comme une « vierge chaste » .
Quant à Tite, il s’agissait
plutôt, mais non pas exclusivement, de maintenir l’ordre extérieur dans les
relations individuelles des chrétiens entre eux. Sous ce rapport, il restait
plusieurs choses à régler, entre autres d’établir
des anciens.
La question des anciens, soulevée tant de fois par ceux qui défendent le clergé dans les églises protestantes, et éclairée à la lumière de la Parole, semble désormais réglée pour quiconque est soumis à l’autorité des Écritures, en sorte qu’il paraît inutile d’en faire une nouvelle exposition, aussi nous bornerons-nous à la résumer.
Les anciens, nom identique à
celui d’évêques ou surveillants, sont soigneusement distingués des dons de
l’Esprit ou des dons accordés par Christ glorifié à son Église.
L’identification de ces dons avec les charges d’évêques (ou surveillants) et de
diacres (ou serviteurs) est une marque de la ruine de l’Église et a très vite
caractérisé cette dernière après l’abandon du premier amour. Les anciens, ainsi
que les diacres, sont des charges locales
(c’est-à-dire ne dépassent pas la circonscription d’une assemblée locale).
Ces charges existaient, non pas officiellement, mais tout aussi réellement,
dans les assemblées sorties du Judaïsme, tandis qu’elles étaient établies dans
les assemblées des nations par l’apôtre ou par ses délégués. Il pourrait y en
avoir eu d’autres, mais deux de ces délégués seulement, Timothée et Tite, sont
mentionnés dans les épîtres comme envoyés par l’apôtre Paul. En tout cas nous
ne sommes autorisés à reconnaître que ceux qui sont mentionnés dans la Parole.
Tite est le délégué dont notre épître nous occupe.
Les dons
existeront jusqu’à la fin (Éph.
4:11-14). Jamais cela n’est dit des charges.
Leur absence actuelle (car nous ne reconnaissons en aucune manière des
anciens institués en contradiction flagrante avec la parole de Dieu), est une
preuve tout aussi palpable de la ruine de l’Église, que leur institution sans
la sanction des Écritures. Où se trouve, en effet, maintenant l’autorité pour
les établir ? Sans doute le Seigneur met au coeur des siens, là où ils
sont réunis selon sa Parole, de répondre au besoin de surveillance qui se fait
sentir au milieu des assemblées, mais tout établissement ou consécration
d’anciens, d’une autre manière que celle qui est enseignée par la Parole est en
contradiction avec la pensée de l’Esprit de Dieu. Les chrétiens soumis à la
Parole s’en tiendront strictement, sur ce point comme sur tout autre, à
l’enseignement qu’elle nous donne.
Le don et la charge locale
peuvent exister chez le même individu, mais ils ne sont jamais confondus
dans l’Écriture. De manière ou
d’autre, tous les anciens étaient censés paître le troupeau, mais il y avait
des anciens qui ne servaient pas dans la Parole. Outre leurs fonctions qui
consistaient à surveiller le troupeau et à en prendre soin, les anciens
devaient être capables
d’enseigner,
de retenir ferme la Parole selon la doctrine, d’exhorter selon elle et de
réfuter les contredisants, mais travailler dans la Parole et dans l’enseignement
n’était pas indispensable
à leur
charge ; de fait, ce n’était pas
leur charge.
Voyez 1 Tim. 5:17 où il est dit : « Spécialement
ceux qui travaillent dans la Parole et dans l’enseignement ».
Nous trouvons donc, dans les
vers. 6-9 les qualités requises des anciens pour que Tite pût les établir. Il
s’agit en premier lieu (v. 6) de qualités que nous appellerons extérieures,
parce qu’elles peuvent être contrôlées par tous. Elles se manifestent, chez
l’ancien, dans la conduite de sa maison et dans la vie de sa famille. Il
fallait que, sous ce rapport, l’ancien fût irréprochable.
Comment aurait-il pu reprendre les autres s’il méritait lui-même des
reproches ? Il devait être marié
et
ne pouvait avoir deux femmes, chose qui n’était pas selon l’ordre divin établi
à la Création, mais chose habituelle parmi les Gentils et commune chez les
Juifs qui renvoyaient une femme qui ne leur plaisait pas pour en prendre une
autre. L’ancien devait gouverner selon Dieu sa propre famille (pour être
ancien, il était nécessaire qu’il eût des enfants) sinon, comment le
gouvernement de l’assemblée pouvait-il lui être confié ? Ses enfants
devaient être fidèles.
La fidélité
suppose la conversion, la foi, la piété. Il ne fallait pas que ses enfants
pussent être accusés de dissipation,
c’est-à-dire
d’abandon de soi-même et d’inconduite. Tel avait été autrefois le cas des fils
d’Héli. Ceux-ci avaient été en piège à leur père qui n’avait pas sévi contre
eux et les « avait honorés plus que l’Éternel » . Aussi
leurs débordements avaient attiré un jugement terrible sur eux et sur leur
père. Les enfants de l’ancien ne devaient pas encourir le reproche d’insubordination,
en ne reconnaissant
pas l’autorité de leur père sur eux. À ces traits le monde pouvait apprendre
qu’un ordre selon Dieu était maintenu dans la famille de l’ancien.
Le v. 7 nous présente
l’Ancien lui-même quant à ses qualités intérieures et personnelles. S’il devait
être irréprochable
dans sa vie de
famille, il devait l’être aussi comme administrateur
de Dieu.
Il n’était responsable, ni envers l’apôtre qui avait ordonné son
établissement, ni envers Tite qui l’avait établi, mais envers Dieu qui lui
confiait l’administration de sa maison. Nous trouvons donc ici trois degrés
dans l’administration : d’abord l’apôtre, puis Tite, son délégué, puis
l’ancien, mais tous ayant leur responsabilité envers Dieu seul
. Combien
cela est important à maintenir ! Quelle que soit
la tâche que Dieu nous a confiée, c’est envers Lui
que nous devons nous
en acquitter. Les administrations, comme nous l’avons vu, sont très
diverses ; un ancien ne pouvait empiéter sur celle de Tite, ni un Tite sur
celle de l’apôtre. En faisant ainsi, l’un ou l’autre aurait fait preuve d’une
suffisance et d’une indépendance des plus coupables, qui aurait amené un désordre
complet dans ces diverses administrations, mais il n’en restait pas moins vrai
que la responsabilité de chacun — ici, celle de l’ancien — était complète et
nullement atténuée vis-à-vis de Dieu, parce qu’il se trouvait dans une position
subordonnée. Ici cette administration était extérieure, sans doute, mais il n’y
a rien d’indifférent quand il s’agit de la maison de Dieu.
Quant aux qualités personnelles nécessaires à l’ancien, l’apôtre signale d’abord cinq qualités négatives.
1° non adonné à son sens
.
L’absence de cette première qualité négative n’est, hélas ! que trop fréquente chez les enfants de Dieu. On ne réussit
jamais à faire revenir certains esprits sur leur propre opinion
. Ce
défaut recouvre beaucoup de satisfaction de soi-même, d’obstination, et au fond
beaucoup d’égoïsme et d’orgueil avec une propre volonté qui ne veut pas se
soumettre aux pensées des autres, oubliant qu’il est dit : « Étant soumis
les uns aux autres dans la crainte de Christ » (Éph.
5:21). À lui seul, ce défaut rend un chrétien incapable d’être un surveillant,
c’est-à-dire d’administrer sagement la maison de Dieu ; aussi vient-il en
premier lieu dans la liste de ce qui disqualifie l’ancien. Une bonne
administration ne va pas sans abnégation de soi-même. 2° non colère
. Un
homme colérique n’a pas le sage et tranquille gouvernement de lui-même, et
comment gouvernerait-il les autres ? 3° non adonné au vin
. Il ne
s’agit pas ici d’un ivrogne, dont il est dit qu’il « n’héritera pas du
royaume de Dieu », mais d’une habitude d’intempérance qui s’allie à la colère et
en est souvent la cause, comme 4° « batteur »
en est la suite. 5° ni avide d’un gain honteux
(*). Il est dit aussi des diacres ou serviteurs en 1
Tim. 3:8 : « Non adonnés à beaucoup de vin, non avides d’un gain honteux ».
La même expression est employée en 1 Pierre 5:2 au sujet des anciens :
« surveillant non point par contrainte, mais volontairement, ni pour un gain
honteux, mais de bon gré ». Il était honteux d’exercer sa charge de surveillant en vue
d’en tirer un profit pécuniaire.
Aimer l’argent pour l’argent est déjà un piège terrible et dispose à en
recevoir de toutes mains et de toute origine.
(*) Ici la honte ne
réside pas proprement dans l’amour de l’argent, convoitise réprouvée chez
l’ancien en 1 Tim. 3:3, mais dans l’amour du gain
auquel l’amour de
l’argent conduit. Ce gain est signalé à juste titre comme honteux
, parce
que des fonctions saintes qui ne devraient avoir pour mobile qu’un dévouement
entièrement désintéressé pour la maison de Dieu, sont employées et mises à
profit pour satisfaire de basses convoitises.
Au vers. 8 nous trouvons sept qualités positives
de l’ancien.
Avant de les énumérer, je ferai remarquer qu’en 1 Tim. 3:2-4, quatorze
qualités sont réclamées des
anciens, mélangées, il est vrai, de qualités négatives. La liste est donc plus
complète qu’ici (deux fois complète, pour ainsi dire), le nombre 7 jouant un
rôle immense dans la parole de Dieu au point de vue moral et même, comme
quelques-uns l’ont remarqué, dans la structure purement extérieure de
l’Écriture sainte. Sept est le nombre complet, le nombre de la plénitude en
rapport avec l’administration divine. En outre, dans l’épître à Timothée, la
dignité de la charge des anciens est rehaussée par le nombre 14, en présence
des fonctions des diacres et des diaconesses qui ne comportent que le nombre 7.
Revenons maintenant aux qualités positives de l’ancien qui sont énumérées dans notre chapitre.
1° hospitalier.
L’hospitalité ne peut jamais s’accorder avec
l’avidité du gain et l’avarice. En Hébr. 13:2, cette hospitalité est
recommandée à tous les saints comme ayant eu parfois pour conséquence
d’héberger des messagers divins porteurs de bénédictions spéciales. Ici le
surveillant ne doit ni chercher ses aises, ni craindre le dérangement de ses
habitudes. Sa maison doit être ouverte à tous ; il doit être accueillant
dans ce petit cercle qui est le modèle du grand domaine de la maison de Dieu
que l’ancien administre localement.
2° aimant
le bien
.
C’est plus que « haïr le mal ». Dans le
dernier cas, le mal occupe les pensées en vue de s’en séparer, dans le premier
c’est le bien qui les occupe, afin d’en jouir. La conséquence immédiate est que
l’on s’attache aux gens de bien et que l’on a communion avec eux. 3° et 4° sage, juste.
Un homme sage et juste est
réfléchi, pondéré, ne se laisse pas aller à la première impression et au
premier mouvement et sait peser équitablement les circonstances dans lesquelles
les autres se trouvent. 5° pieux (hosios)
. Être pieux
c’est être saint dans sa conduite et agréable à Dieu dans ses voies ;
mener une vie dont Dieu est le centre, une vie réglée et nourrie par lui. 6° continent.
De cette manière, les
passions de la chair n’ont pas l’occasion de se manifester et les convoitises
naturelles sont réprimées.
7° tenant ferme la fidèle parole selon la doctrine
. Le devoir de l’ancien était d’être fermement attaché
à la Parole et de la maintenir. Elle était la fidèle parole
, selon
l’enseignement des apôtres, parole certaine, qui ne trompe pas, sur laquelle on
peut absolument compter, parce qu’elle est la parole du Dieu fidèle. Mais
l’ancien ne pouvait être à l’origine « celui qui enseigne » ; il était
enseigné lui-même par la doctrine confiée aux apôtres, par les saines paroles
qu’ils étaient chargés de communiquer et ces paroles n’étaient pas autre chose
que les « Écritures avant la lettre », mises dans la bouche des apôtres, aussi
l’ancien devait-il les tenir ferme. La doctrine n’était donc autre que la
pleine certitude de la Parole, parce qu’elle lui était assimilée. C’était la
Parole, l’enseignement qui la présentait
, non pas la doctrine qui en
provenait
qu’il s’agissait de tenir ferme. — Cet attachement à la Parole
rendait l’ancien capable, tant d’exhorter
(les fidèles) par un sain
enseignement que de réfuter les contredisants
(ceux qui s’opposent à la
doctrine chrétienne). La capacité acquise par l’affection pour la parole de
Dieu était une des choses nécessaires à l’ancien. Quand il s’agit de maintenir
l’ordre dans la maison de Dieu, les qualités morales et de conduite personnelle
ne suffisent pas. Sans doute, si elles étaient absentes, il n’y aurait aucune autorité morale
pour l’administration,
mais de fait, aucune administration n’est possible si elle n’a pas la Parole
pour base et pour règle. — Ces choses n’étaient pas requises des diacres en 1
Tim. 3:8-10, sauf qu’ils avaient à « garder le mystère de la foi dans une
conscience pure ». Dans ce même chapitre on trouve deux mystères, celui de la foi
et celui de la piété.
« Le mystère de la foi » est l’ensemble des vérités,
maintenant révélées, qui appartiennent à la foi. Il fallait donc, pour le
simple service d’un diacre, une familiarité avec les grandes lignes de la
Parole, lignes qui devaient avoir atteint la conscience pour y être gardées.
Cela donnait une saveur particulière au plus humble service, comme servir aux
tables, mais cela préparait le diacre à être « plein de grâce et de puissance »,
comme Étienne, quand il était appelé à rendre un témoignage public devant le
monde.
La responsabilité de l’ancien est beaucoup plus étendue que celle des diacres ou serviteurs qui, du reste, ne sont pas en vue dans l’épître à Tite, circonstance bien explicable, puisque c’était l’assemblée qui choisissait les diacres, établis, seulement ensuite, par les apôtres pour un service particulier (Actes 6:3-5). — Pour surveiller ou maintenir l’ordre, il faut souvent pouvoir exhorter, ou réfuter les contredisants. Or la base de l’exhortation elle-même est le sain enseignement et nous avons ici l’occasion de constater ce que nous disions au début, que la sainteté pratique et une marche droite et pieuse sont inséparables de la saine doctrine, et, quoique les hommes en pensent, ne peuvent exister sans elle. C’est aussi par elle que les récalcitrants peuvent être réduits au silence et empêchés de contaminer l’assemblée en faisant opposition à la vérité.
On voit donc quelle importance est attachée à la fonction de surveillant, quand même la sphère de son exercice est limitée à l’assemblée locale. Cette charge doit être par conséquent adaptée aux circonstances locales de l’assemblée où elle s’exerce. Il en était ainsi, comme nous allons le voir, dans les assemblées de la Crète. C’est pourquoi aussi les qualités requises des anciens n’étaient pas absolument les mêmes quand il s’agissait de l’assemblée d’Éphèse dans la première épître à Timothée.
Les anciens n’étaient pas des
dons
du Saint Esprit caractérisés par l’universalité
de leur
action, mais leur activité ordinaire était le résultat pratique d’une vie
sainte, pieuse, dévouée, fermement attachée à la Parole. Cependant la charge
d’ancien n’excluait pas plus le don, que celle de diacre. C’est ce que nous
voyons lors de la merveilleuse prédication d’Étienne en Actes 7. C’est ce que
nous trouvons aussi en 1 Tim. 5:17. On voit dans ce passage que tous les
anciens ne travaillaient pas « dans la parole et dans l’enseignement » . Leur travail dans ce domaine est signalé comme une exception
excellente
et digne d’un double honneur quant à l’aide, de quelque nature
qu’elle fût, qui devait leur être donnée.
« Car il y a beaucoup d’insubordonnés vains discoureurs et séducteurs, principalement ceux qui sont de la circoncision, auxquels il faut fermer la bouche, qui renversent des maisons entières, enseignant ce qui ne convient pas, pour un gain honteux. Quelqu’un d’entre eux, leur propre prophète, a dit : « Les Crétois sont toujours menteurs, de méchantes bêtes, des ventres paresseux ». Ce témoignage est vrai ; c’est pourquoi reprends-les vertement, afin qu’ils soient sains dans la foi, ne s’attachant pas aux fables judaïques et aux commandements des hommes qui se détournent de la vérité. Toutes choses sont pures pour ceux qui sont purs ; mais, pour ceux qui sont souillés et incrédules, rien n’est pur, mais leur entendement et leur conscience sont souillés. Ils professent de connaître Dieu, mais par leurs oeuvres ils le renient, étant abominables et désobéissants, et, à l’égard de toute bonne oeuvre, réprouvés » (v. 10-16).
Les versets 10 à 11 décrivent
les contredisants
du vers. 9, véritable plaie des assemblées de la
Crète. Ils ont trois caractères : 1° insubordonnés
. Ne souffrant
pas d’autorité établie sur eux, ils s’y opposent et s’élèvent contre toute
surveillance instituée par Dieu pour maintenir l’ordre dans sa maison ; 2°
vains discoureurs
. Il suffit souvent d’une certaine faconde qui recouvre
et cache la nullité spirituelle et morale de ces hommes, pour attirer des
chrétiens ignorants, légers ou mondains, incapables, de ce fait, de discerner
le but de ces discoureurs. 3° séducteurs
. Ils sont en réalité des
instruments de Satan, le Séducteur par excellence, et des organes de l’Ennemi
pour ruiner et détruire l’oeuvre de Dieu. Ces agents se recrutaient surtout
parmi ceux qui sont de la circoncision
. Rien ne séduit davantage le
monde religieux qu’un système légal
basé sur la capacité de l’homme pour
faire le bien. La doctrine de l’incapacité absolue de l’homme pécheur ne peut
aller à ces opposants. Il faut leur fermer la bouche
, ne pas permettre
qu’ils attaquent et détruisent la doctrine de la grâce et de la foi dans
l’assemblée. Leur action renverse des maisons entières
. On sait combien
l’autorité du chef de famille est dangereuse quand il se laisse entraîner
lui-même et cède, au lieu de résister, aux faux docteurs et aux séditieux. On a
pu voir des familles entières abandonner en corps la saine doctrine de l’assemblée
de Dieu, pour retourner à l’enseignement légal et devenir ainsi de nouveaux
agents de ruine au lieu de contribuer à l’édification du corps de Christ.
Ces gens enseignaient ce
qui ne convient pas
, en opposition avec le « sain enseignement » des anciens,
et avec celui de Tite lui-même qui est exhorté (2:1) à annoncer les choses
qui conviennent au sain enseignement
. « Ce qui ne convient pas » était ce qui
nuisait nécessairement à la santé morale des chrétiens et les détournait de
Christ et de la vérité. Mais il y avait à discerner leurs motifs : ils
enseignaient pour un gain honteux
. Voilà pourquoi il était si nécessaire
de leur opposer des anciens, choisis selon Dieu et qui n’étaient pas « avides
d’un gain honteux » (v. 7). Ces hommes savaient que leur marchandise frelatée
serait du goût de plusieurs ; ils en tiraient du profit pour eux-mêmes, de
quelque côté que leur vînt l’argent qu’ils convoitaient. Abraham aurait fait un
gain honteux s’il avait accepté les dons du roi de Sodome ; Pierre aussi,
s’il avait reçu l’argent de Simon le magicien.
v. 12-14. Ces discoureurs
, et parmi eux les
membres du peuple juif, étaient Crétois d’origine. Les Crétois avaient, eux
aussi, comme d’autres nations, leur propre prophète, poète et moraliste, qui
dans ses oeuvres montrait un profond mépris pour ses
concitoyens. C’est ce qui arrive d’habitude, dans le monde, aux moralistes
clairvoyants qui se sont donné pour tâche de connaître les hommes. Ils les ont,
au bout du compte, en fort petite estime, mais ne vont jamais jusqu’au mépris
d’eux-mêmes, ne s’étant jamais trouvés devant Dieu pour dire comme Job :
« J’ai horreur de moi ». Épiménide donc, philosophe et
homme d’État, leur propre prophète, dans le seul fragment qui, sauf erreur,
nous reste de lui, jugeait ainsi ses concitoyens, 600 ans avant Jésus Christ
« Les Crétois sont toujours menteurs, de méchantes bêtes, des ventres
paresseux ».
Le mensonge, la
méchanceté bestiale et la gloutonnerie, des appétits qui cherchent à se
satisfaire sans travail et sans peine, tel était le
portrait des Crétois ; tels peut-être, sont-ils encore. Ce témoignage est vrai,
dit l’apôtre.
Quant au jugement de ses concitoyens, cet homme avait parlé selon Dieu, il
« possédait la vérité » (Rom. 1:18) ; il était un témoin, reconnu de Dieu,
de la corruption des Crétois. Qu’y avait-il à faire à l’égard de ces
hommes ? « Reprends-les vertement »
,
dit l’apôtre à son fidèle délégué. Nous trouvons ce même mot grec en 2 Cor.
13:10, où Paul parle d’user « de sévérité,
selon l’autorité que le Seigneur lui a donnée pour l’édification et non pas
pour la destruction ». Il s’agissait donc d’user envers les « séducteurs » de
sévérité, avec autorité,
fonction qui
n’était pas confiée aux anciens, mais à Tite, désigné par l’apôtre, lequel
lui-même avait reçu directement cette autorité du Seigneur. C’était aussi ce
que Paul avait fait plus d’une fois, même à l’égard de Pierre, apôtre comme
lui, quand la foi était en danger et la saine doctrine en péril. Mais la
répréhension même, adressée à ces vains
discoureurs et séducteurs
avait l’amour pour mobile. Son but n’était pas de
rejeter ces hommes encombrants et dangereux, mais de les amener à être sains dans
la foi. Il fallait ce
déploiement d’autorité spirituelle pour leur faire reconnaître les vérités
reçues par la foi (*). Il va sans dire que
cette autorité s’exerçait par l’usage de la Parole, dans la puissance de
l’Esprit.
(*) Tel est ici, comme
en beaucoup d’autres passages, le sens précis du mot foi
tandis qu’il
est plus fréquemment employé, comme au chap. 1:1, pour désigner l’état du coeur.
v. 14. « Ne s’attachant pas aux fables judaïques
». Les « fables » sont mentionnées dans la première épître
à Timothée (1:4) où elles sont distinctes des « généalogies interminables », tout
en leur étant associées dans ce passage. Ces « généalogies » n’ont, comme on
serait tenté de le supposer, aucun rapport avec les généalogies de l’Ancien
Testament, et sont le mélange avec le christianisme de spéculations juives
spirites et philosophiques, adoptées ensuite par le paganisme à son déclin. Les
fables judaïques, qualifiées en 1 Tim. 4:7 de « fables profanes » qui ne sont que
des histoires de vieilles femmes sont le produit de l’imagination orientale qui
s’exerce sur les Écritures et qui, sous prétexte d’orner la vérité, la dépare
et même l’anéantit. L’apôtre Pierre les appelle « des fables ingénieusement
imaginées » (2 Pierre 1:16) (*).
(*) Les généalogies
interminables
sont des conceptions fabuleuses sur l’origine et l’émanation
des êtres spirituels. Elles sont le produit de la superstition juive associée à
la philosophie païenne. La Cabale
ou tradition juive sur l’interprétation
de l’Ancien Testament contient beaucoup d’affirmations fabuleuses quant à ces
« émanations ». Il y a, selon la Cabale
dix
« Sephiroth » ou émanations provenant de Dieu. Elles semblent avoir suggéré les Eons
des Gnostiques. Sur cette théorie se greffait un système de Magique
consistant surtout dans l’usage
de mots
de l’Écriture pour produire des effets surnaturels.
Les fables judaïques sont
distinctes, dans notre passage, des « commandements
des hommes
», quoique les
unes et les autres proviennent de « ceux qui sont de la circoncision ». Les
commandements dont il est question ici ne sont pas les commandements de la loi
qui étaient donnés de Dieu, mais des prescriptions légales inventées par les
hommes et passées à l’état de tradition, lesquelles abondent dans le judaïsme.
On les rencontre à chaque instant dans les évangiles, comme par exemple le
lavage des coupes et des plats et « beaucoup d’autres choses semblables » . Par ces choses, de tels hommes se détournaient de la vérité
.
Ils étaient en opposition complète avec l’apostolat de Paul, basé sur
« la connaissance de la vérité » (1:1).
v. 15. « Toutes choses sont pures pour ceux qui sont
purs ».
Le chrétien est pur, non
pas en lui-même, mais devant Dieu, en vertu de l’oeuvre de Christ et sous
l’action du Saint Esprit. (1 Cor. 6:11). Comme tel il ne peut être contaminé
par la souillure et c’était précisément ce que niaient ces judaïsants par leurs
« commandements d’hommes », tandis que la parole de Dieu engage le nouvel homme à
marcher sur les traces de Jésus. Jamais le Seigneur ne put être contaminé par
la souillure de la lèpre, ni par aucune autre souillure. Une pécheresse, une
adultère, pouvaient être purifiées par Lui, jamais lui souillé par elles. Par
contre, « les souillés et les incrédules » ne sont influencés par aucune pureté,
car c’est le dedans, c’est-à-dire « leur entendement et leur conscience » qui
sont souillés.
Au v. 16, le caractère de ces
hommes souillés nous est décrit : Ils ont pour profession
de connaître Dieu, tandis que leurs oeuvres
sont le contraire de leur profession ; par elles, ils renient Dieu.
Leurs oeuvres nous font
connaître s’ils connaissent Dieu, comme ils le prétendent ; et si leurs
oeuvres sont mauvaises, nous sommes fixés sur cette question. On ne peut
attendre d’eux aucune bonne ouvre
. Ils sont « réprouvés », entièrement
rejetés de Dieu à cet égard ; ils sont « abominables et désobéissants ».
Cela
nous amène à considérer le caractère des
bonnes oeuvres
. Elles sont
mentionnées six fois dans cette courte épître (1:16 ; 2:7, 14 ; 3:1,
8, 14).
Une doctrine qui ne conduit
pas aux bonnes oeuvres n’est pas la « saine doctrine » et ce point est de toute
importance à considérer. Il n’existe pas d’activité pratique agréable à Dieu,
si elle n’a pas pour base le « sain enseignement » de la Parole. La première
épître à Timothée, qui nous parle du maintien de la « saine doctrine » dans la
maison de Dieu nous parle tout aussi souvent des bonnes oeuvres (2:10 ;
3:1 ; 5:10, 25 ; 6:18). Dans un passage capital, la seconde épître à
Timothée nous montre (2:21) que, se retirer du mal dans la maison de Dieu,
c’est être « préparé
pour toute bonne oeuvre » .
Or cette vérité est très peu comprise par les chers enfants de Dieu. Ils
parlent à tout propos de bonnes oeuvres sans avoir jamais fait ce qui seul peut
les y préparer : se purifier des vases à déshonneur. Les bonnes oeuvres
ont pour caractère, d’être le produit de la sainteté
et de l’amour
.
Jésus, le « saint
serviteur de Dieu » qui avait été « oint de l’Esprit
saint » , passait de lieu en lieu faisant du bien
(Actes 10:38). Il n’y avait pas une
des « bonnes oeuvres qu’il faisait voir aux hommes de la part de son Père » qui
ne fût une oeuvre d’amour
. Il en était de même de ses disciples. Dorcas
était « pleine de ces bonnes oeuvres ». L’amour était le mobile intérieur de
toute son activité. En Hébr. 10:24, les bonnes oeuvres découlent de l’amour et
en sont inséparables. De même aussi celles des saintes veuves en 1 Tim. 5:10.
En Éph. 2:10, le chrétien est créé dans le Christ Jésus pour les bonnes oeuvres, mais non pour les choisir à sa convenance, car Dieu lui-même les a « préparées à l’avance pour nous », et nous n’avons qu’à y marcher. Elles ont pour but, en Hébr. 13:21, de faire sa volonté et de lui être agréable.
Ces bonnes oeuvres, préparées
par Dieu et non par nous, ce qui leur ôterait toute valeur, ont pour caractère
d’être faites au nom de Christ
(Actes 4:9-10). Elles ont pour objet
d’être faites envers Christ
(Marc 14:6) , envers
les saints
(Actes 9:36) et envers
tous les hommes
(Gal. 6:10), mais toujours
d’être faites pour
Christ
.
Le monde ne peut rien
comprendre aux bonnes oeuvres faites pour Christ
, car non seulement il
ne connaît pas le Seigneur, mais il est son ennemi. Le parfum de Marie est
folie à ses yeux ; l’amour divin qui porte le coeur du croyant, vers les
saints d’un côté, vers le monde de l’autre, est lettre morte pour l’homme
naturel.
Opposées aux bonnes oeuvres, les mauvaises oeuvres ont le mal pour origine et pour but. Un chrétien, même le plus éminent, est en danger de ce côté-là et a besoin d’être délivré de toute mauvaise oeuvre (2 Tim. 4:18). Les mauvaises oeuvres caractérisent en général les ennemis de Dieu. (Col. 1:21).
Les oeuvres mortes
sont l’opposé des oeuvres vivantes. Elles n’ont pas pour origine la vie divine.
Elles ne sont pas appelées des « mauvaises oeuvres », mais elles n’ont aucune
valeur pour Dieu, et comme elles ont la nature pécheresse pour point de départ,
il faut qu’on en soit purifié (Hébr. 6:1 ; 9:14). Aussi bien que les
mauvaises oeuvres, elles seront l’objet du jugement prononcé sur les hommes
devant le grand trône blanc.
Quand il s’agit du bon ordre dans la maison de Dieu, on le reconnaît aux bonnes oeuvres de ceux qui font partie de cette maison, et non à leur profession. La profession n’empêchait pas les personnes mentionnées au vers. 16 de notre chapitre, d’être « abominables et réprouvées ». Non seulement Dieu ne tenait pas compte de leur profession, mais les rejetait loin de Lui.
« Mais toi, annonce les choses qui conviennent au sain enseignement : que les vieillards soient sobres, graves, sages, sains dans la foi, dans l’amour, dans la patience. De même, que les femmes âgées soient, dans toute leur manière d’être, comme il convient à de saintes femmes — ni médisantes, ni asservies à beaucoup de vin, enseignant de bonnes choses, afin qu’elles instruisent les jeunes femmes à aimer leurs maris, à aimer leurs enfants, à être sages, pures, occupées des soins de la maison, bonnes, soumises à leurs propres maris, afin que la parole de Dieu ne soit pas blasphémée. Exhorte de même les jeunes hommes à être sobres, te montrant toi-même, en toutes choses, un modèle de bonnes oeuvres, faisant preuve, dans l’enseignement, de pureté de doctrine, de gravité, de parole saine qu’on ne peut condamner, afin que celui qui s’oppose ait honte, n’ayant rien de mauvais à dire de nous. Exhorte les esclaves à être soumis à leurs propres maîtres, à leur complaire en toutes choses, n’étant pas contredisants ; ne détournant rien, mais montrant toute bonne fidélité, afin qu’ils ornent en toutes choses l’enseignement qui est de notre Dieu Sauveur » (v. 1-10).
« Mais toi, annonce les
choses qui conviennent au sain enseignement
» (ou doctrine).
Comme nous l’avons déjà fait remarquer, tout l’ordre de la maison de Dieu, tous les rapports chrétiens des membres de cette maison entre eux, sont basés sur la « saine doctrine », enseignée et maintenue dans l’Église et sans laquelle il ne peut y avoir que confusion et désordre. N’est-ce pas ce qui explique en grande partie les aberrations de la chrétienté dans les choses qui sont spécialement exposées dans l’épître à Tite quant aux dons et aux charges, quant au rôle des vieillards et à la place des femmes âgées ou jeunes, quant aux relations des domestiques envers leurs maîtres ?
Il y a des choses qui ne conviennent
pas
au sain enseignement et jamais
ces choses ne pourront être
trouvées dans la parole de Dieu. Un enseignement, quelque élevé qu’il soit
selon l’homme, ne serait pas sain
s’il ne poussait les chrétiens à une
vie de sainteté et de justice pratiques qui honore le Seigneur. Cet
enseignement atteint toutes les classes de la famille de Dieu, mais nous devons
avant tout l’appliquer à nous-mêmes pour notre vie, notre conduite et notre
espérance.
La santé du corps est toujours liée à l’équilibre de ses diverses parties ; aussi les choses que Tite devait annoncer concernaient toutes les classes de ceux qui appartenaient au corps de Christ et à la maison de Dieu.
Comme de juste, l’apôtre
commence par les vieillards
, par ceux qui occupent une position
vénérable et par conséquent particulièrement responsable de donner l’exemple
dans la famille de Dieu : « Que les
vieillards soient sobres, graves, sages, sains dans la foi, dans l’amour, dans
la patience
» (v. 2). Sobres
(néphalios)
a généralement trait aux boissons ou à d’autres aliments. Ainsi, sur ses vieux
jours, Isaac manquait de sobriété, ce qui, ajouté aux infirmités de son âge,
troublait sa vue spirituelle ; mais ici, comme en 1 Timothée, il s’agit
plutôt de sobriété au sens figuré, d’un esprit qui ne se laisse pas enivrer par
la passion, parce qu’il a le sentiment de la présence de Dieu. Sains dans la foi
: Leur santé
morale devait se montrer dans l’intelligence des objets de la foi qu’un sain
enseignement leur avait présentés, car la foi n’est pas ici la réception du
témoignage divin dans l’âme, mais les vérités
que la parole de Dieu présente à la foi. La santé
suppose, comme nous l’avons dit, un heureux équilibre en
toutes choses. Le chrétien expérimenté doit avoir soin de ne pas donner dans
l’enseignement une place hors de proportion à certaines choses parmi celles qui
constituent la foi. Pour ne mentionner que des choses capitales, on pourrait,
par exemple, mettre tout l’accent sur la position céleste du chrétien, sans
insister sur sa marche et sur sa conduite, ou vice-versa.
Sains dans l’amour.
Ce même
équilibre moral doit se montrer dans l’amour fraternel. Faire des distinctions
ou accorder des préférences à tel membre de la maison de Dieu au préjudice des
autres (car il ne s’agit pas ici de l’amour pour Christ qui certes ne souffre
pas de mesure), c’est ne pas être sain dans l’amour.
Sains dans la patience
. Ici le manque de santé pourrait se trahir par une certaine indifférence dans l’épreuve,
— chose commune chez les vieillards — ou par des sens émoussés quant à la
prochaine venue du Seigneur.
Tout cela, joint à la gravité
et à la sagesse
(*) donne une impression
de grande pondération à la vie pratique des vieillards et ne pourrait être
réalisé sans la sobriété qui doit être à la base de toute leur conduite. Ils
deviennent ainsi des hommes d’expérience que l’on consulte et qui contribuent à
la santé et au bon ordre de toute la famille de Dieu.
(*) L’expression rendue au v. 2 et au v. 5 par sage ;
au v. 6 et au v. 12 par sobre, sobrement
(sophronéo),
pourrait être
traduite par modération et
possession de soi-même.
« De même, que les femmes âgées soient, dans toute leur manière d’être,
comme il convient à de saintes femmes ».
Elles doivent avoir en toutes
choses, dans leur abord, dans leur accueil, dans leur extérieur, une tenue
convenable, parure particulière de la femme, mais il faut que cette tenue soit
le reflet de leur caractère intérieur de sainteté.
Cette recommandation correspond à ce qui nous est dit de la femme
chrétienne en 1 Tim. 2:9-10 et 1 Pierre 3:2-5. L’absence de toute influence
mondaine doit les caractériser en premier lieu.
Ni médisantes
. Elles doivent tenir leur langue en bride, éviter
de mal parler du prochain, piège particulièrement dangereux pour leur sexe.
Pas asservies
à beaucoup de vin
. C’est un
danger positif pour les femmes âgées qui ont recours à ce moyen en vue de leur
santé qui décline, et qui, n’ayant pas assez veillé sur elles-mêmes, tombent
dans cette servitude dont l’Ennemi usera pour leur ruine morale et pour les
empêcher d’exercer autour d’elles une influence salutaire. Ce cas est d’autant
plus dangereux pour la femme, que sa conscience lui montrant l’impropriété de
telles habitudes, elle cherchera à s’en cacher à d’autres et tombera ainsi dans
l’hypocrisie.
Il y a une légère différence
entre être asservi
et être adonné
comme cela est dit des anciens
et des diacres en 1 Tim. 3:3, 8. Adonné dénote peut-être un penchant dont on ne
songe pas à se cacher, bien différent de s’enivrer
(Éph.
5:18), qui est une dégradation. En 1 Tim. 3:8, le petit mot « beaucoup », omis
pour les anciens au v. 3, est ajouté pour les diacres. Ce petit mot nous
apprend que plus les fonctions dans la maison de Dieu sont importantes, plus la
responsabilité est grande d’éviter tout obstacle à une saine appréciation de
tout ce qui concerne le gouvernement de la maison de Dieu.
Enseignant de bonnes
choses, afin qu’elles instruisent les jeunes femmes
… Ce sont maintenant les femmes âgées qui ont à enseigner
.
Elles enseignent dans le seul domaine où la femme puisse le faire : celui
de la maison
. Elles doivent enseigner de bonnes choses, des choses
honorables, mais non point aux hommes. Leur cercle d’action dans la maison est
beaucoup plus varié que l’enseignement, car il peut s’adresser à tous, hommes,
vieillards, femmes et enfants, infirmes, pauvres, déshérités, mais, quand il
s’agit d’enseignement, il est restreint aux femmes. « Je ne permets pas à la
femme d’enseigner », dit l’apôtre, « ni d’user d’autorité sur l’homme, mais elle
doit demeurer dans le silence » (1 Tim. 2:12). L’enseignement des femmes âgées a
pour but d’amener les jeunes femmes à rendre dans leur vie un témoignage complet
à l’enseignement de la Parole. Par ce mot « complet », nous faisons allusion aux sept
choses qui sont recommandées aux jeunes femmes. Le nombre sept revient
continuellement dans cette épître, et nous nous en sommes déjà expliqués. Il
signifie toujours dans la Parole quelque chose de complet, soit en bien, soit
en mal, dans le domaine spirituel.
Les jeunes femmes doivent
donc être instruites à aimer leurs maris, à aimer leurs enfants, à être
sages, pures, occupées des soins de la maison, bonnes, soumises à leurs propres
maris, afin que la parole de Dieu ne soit pas blasphémée
. L’enseignement
aux jeunes femmes recommande en premier lieu l’amour, amour qui s’exerce
d’abord dans le cercle restreint de la famille immédiate. Le mari a la première
place dans l’affection légitime de la femme. Il peut arriver, dans le ménage
chrétien, que l’affection de la femme pour ses enfants prime et parfois
supprime celle qu’elle doit à son mari. Le sain enseignement met toute chose à
sa place.
À être sages
. Ce mot signifie la modération, la retenue, la
discrétion, la possession de soi-même. En effet, il pourrait y avoir manque de
retenue dans les affections les plus légitimes, et cela pourrait compromettre
le caractère selon Dieu des affections de famille. Pures
: La
pureté est l’accompagnement nécessaire, ou plutôt la conséquence de la retenue,
car il s’agit ici des relations de la jeune femme dans son cercle intime. La
passion charnelle n’y a pas de place vis-à-vis du mari ; et, vis-à-vis des
enfants, une stricte surveillance doit être exercée sur eux pour qu’aucune
tendance impure ne soit tolérée.
Occupées des soins de la
maison
. La maison est, avons-nous
dit, le domaine assigné à la femme. Ce domaine est infiniment varié, mais
interdit absolument à la femme chrétienne d’empiéter sur le domaine public.
Elle perdrait ainsi (et combien, hélas ! la chose est fréquente
aujourd’hui) son caractère propre, selon les principes du gouvernement de Dieu.
Partout donc où il s’agit de la maison, dans la plus vaste acception de ce
terme, la femme y a sa place : soins temporels et spirituels, prière,
lecture, exhortation, évangélisation, enseignement même s’il ne sort pas de ses
limites, ordre matériel et moral, bienfaisance, souci des vieillards, des
enfants, des malades, et combien d’autres choses encore, tout cela est du
domaine de la femme. Dans notre passage, il s’agit avant tout, pour la jeune femme,
des soins de sa propre maison. Son cercle s’élargira avec l’âge, de même que le
cercle du jeune homme. Nous en avons un exemple dans les saintes femmes qui
suivaient le Seigneur et l’assistaient de leurs biens (Luc 8:1-3). Les « soins
de la maison » sont ici les soins matériels, et nous venons de voir qu’ils ne
priment pas tous les autres ; mais, au point de vue chrétien, ils sont
bien loin d’être indifférents. L’ordre dans la maison de Dieu ne comporte pas
le désordre dans la maison de ses enfants. Il y a une règle selon Dieu à
laquelle sous la direction de la femme, enfants et serviteurs doivent se
soumettre ; il y a à maintenir, à distribuer, à réparer les vêtements, à
pourvoir à la nourriture de tous et aux divers besoins de ce diminutif de la
maison de Dieu. En toutes ces choses, la femme vertueuse des Proverbes nous est
donnée comme exemple (Prov. 31:10-31).
Bonnes
. La bonté, faite de compassion, de dévouement aux
autres, de pensées secourables est citée ici comme correctif de l’égoïsme que
pourrait engendrer le soin de sa propre maison. La bonté, en effet, s’adresse
indistinctement à tous et s’ingénie à les soulager.
Soumises à leurs propres
maris
. La soumission vient en
dernier lieu comme couronnement des qualités de la jeune femme. Ce bel équilibre
en toutes choses ne peut subsister sans le renoncement à soi-même et la
dépendance de l’autorité à laquelle la femme est soumise de la part de Dieu.
C’est, pour ainsi dire, par l’intermédiaire du mari qui est le chef de la
femme, la soumission à Dieu auquel il est soumis lui-même. Toutes ces choses
réunies empêchent la femme de donner la prépondérance à l’une d’entre elles au
détriment de la vie chrétienne, comme dans le cas de Marthe qui était
« distraite par beaucoup
de soins dans
la maison » et qui négligeait ainsi la communion avec le Seigneur et avec sa
parole, en un mot, c’est ce qui donne à la femme la force de maintenir
l’équilibre dans toutes les parties de son témoignage.
Afin que la parole de Dieu ne soit pas blasphémée
. Tout cet ordre, même matériel, fait partie, comme on le
voit ici, du témoignage chrétien
. Le monde qui en est le spectateur
ne trouve pas, dans le désordre de la maison chrétienne, une occasion de
blasphémer la parole de Dieu en rendant celle-ci responsable du mal. L’autorité
de cette Parole ne peut être mise en doute quand on en constate les fruits.
Ainsi nous voyons constamment reparaître dans ce chapitre cette grande vérité
que la saine doctrine est à la base de toute la pratique de la vie chrétienne.
Exhorte de même les jeunes hommes à être sobres
. L’exhortation aux jeunes hommes n’est pas du tout le fait des
femmes âgées, mais est confiée à Tite. La seule chose, recommandée aux jeunes
hommes (en contraste avec la septuple recommandation aux jeunes femmes) est la
sobriété, c’est-à-dire la modération et la libre possession d’eux-mêmes (voyez
la note au v. 2) , parce que, comme nous allons le
voir, ils avaient pour toutes choses un modèle en Tite et dans sa conduite au
milieu d’eux. C’est pourquoi il est dit de lui : Te montrant toi-même en toutes choses un modèle de bonnes œuvres.
Il fallait que rien ne manquât, et
c’était beaucoup dire, à la vie pratique du délégué de Paul. Nous nous sommes déjà étendus sur ce que « les bonnes oeuvres »
signifient. Elles sont la manifestation extérieure de la foi et de l’amour,
comme nous le voyons en 1 Thess. 1:3. L’exhortation
de Tite, jeune lui-même, aux jeunes gens, devait être accompagnée de l’exemple
donné par lui, sans lequel elle aurait été nulle. Mais, outre cet exemple, il
était appelé à enseigner :
Faisant preuve dans l’enseignement, de pureté de doctrine, de gravité, de
parole saine qu’on ne peut condamner, afin que celui qui s’oppose ait honte,
n’ayant rien de mauvais à dire de nous.
L’enseignement de Tite devait
avoir trois caractères : 1° La
pureté de la doctrine
. Il est
important que la doctrine ne soit pas mélangée d’éléments douteux ou étrangers,
dont la mauvaise qualité pourrait porter les auditeurs soit à en rejeter les
parties saines, soit à recevoir le tout sans discernement et à devenir
eux-mêmes les propagateurs de l’erreur. Ce dernier danger est d’autant plus
grave que l’autorité de celui qui enseigne est moins contestée. 2°
L’enseignement doit être grave.
Cette
qualité manque souvent aujourd’hui dans la prédication où, pour attirer
l’attention, on cherche à produire de l’effet, à parler à l’imagination, à
éveiller la curiosité. De telles pratiques, paroles légères ou déplacées,
détruisent l’effet salutaire de la vérité, lui ôtent son caractère divin,
disqualifient enfin celui qui s’en sert et qui perd ainsi le droit d’être un
« oracle de Dieu » pour les auditeurs. 3° Parole
saine qu’on ne peut condamner.
Celui qui enseigne rencontrera toujours, et
fréquemment dans les rangs de frères en vue, des adversaires qui épient ses
paroles pour les accuser d’être contraires à la saine doctrine. Le « docteur » ne
doit pas donner occasion à l’opposition. Telle parole, mal pondérée et pas
suffisamment étayée, provient souvent du désir de présenter des nouveautés qui
mettent en relief celui qui parle. Elle devient, au contraire, une arme dans la
main des malintentionnés pour combattre et compromettre celui qui enseigne. Si
sa parole est « saine », elle porte sa vertu avec elle ; on ne condamne pas
un remède qui apporte la santé à ceux que le prennent. Celui qui attaque nos
discours est alors obligé de se retirer avec honte, sans avoir trouvé un
prétexte plausible à son opposition.
« Exhorte les esclaves à être soumis à leurs propres maîtres, à leur complaire en toutes choses, n’étant pas contredisants ; ne détournant rien, mais montrant toute bonne fidélité, afin qu’ils ornent en toutes choses l’enseignement qui est de notre Dieu Sauveur » (v. 9-10).
Outre les jeunes hommes, Tite
avait encore à exhorter les esclaves
. Il ne lui était pas ordonné
d’exhorter les vieillards et les femmes âgées. Remarquons combien la Parole
observe les convenances dans les moindres détails. La conduite des esclaves
avait pour but d’orner en toutes choses
l’enseignement de notre Dieu Sauveur
.
Celui qui a conscience d’avoir été sauvé (et à quel prix !) par
Dieu lui-même, celui qui connaît un tel Dieu, n’a qu’un désir, c’est d’être
enseigné par Lui et de porter des fruits qui soient en rapport avec la doctrine
reçue. Il fallait qu’on pût dire, en voyant la conduite de ces esclaves :
Ils servent d’illustration à ce qu’ils ont appris de leur excellent
Maître ; on voit à leur conduite quelle école ils ont fréquentée ; en
toutes choses, ils font honneur à cet enseignement. La « doctrine du Dieu
Sauveur », reçue dans le coeur, a, pour les esclaves, quatre résultats :
1° La soumission à leurs propres maîtres
. Il y a quelque différence entre la soumission et l’obéissance,
et il est important de ne pas l’oublier quand il s’agit des autorités.
L’obéissance est en rapport
avec des ordres donnés ; elle est attribuée aussi bien aux enfants qu’aux
esclaves. La soumission est plutôt l’acceptation d’une autorité supérieure sous
laquelle on est tenu de se courber. C’est, d’une manière exclusive, l’attitude
recommandée à la femme, tandis que l’esclave unit l’obéissance à la soumission.
2° À leur
complaire en toutes choses
. À
l’école du Dieu Sauveur on apprend à ne pas se complaire à soi-même. Le
Seigneur n’a-t-il pas suivi personnellement le même chemin vis-à-vis de son
Dieu ? L’esclave doit toujours être en éveil pour découvrir les choses par
lesquelles il peut plaire à son maître.
3° N’étant
pas contredisants
. Ce serait quitter sa
position subordonnée que de chercher à faire valoir son opinion et de l’opposer
à la pensée ou aux ordres d’un maître qui a pouvoir sur son serviteur.
4° Ne
détournant rien
. Ce danger est lié à la
condition servile qui est accompagnée d’une certaine contrainte et de certaines
restrictions, souvent injustifiées, et dont la condition de fils est exempte.
On voit, dans le cas d’Onésime (Philém.
18) cette infidélité chez un esclave inconverti, abusant de la confiance de son
maître. L’esclave chrétien avait, au contraire, à montrer toute bonne fidélité,
une fidélité scrupuleuse dans ce qui
lui était confié.
Remarquons ici combien de fois
Dieu nous est présenté dans cette épître comme le Dieu Sauveur
. Le chap. 1:4
nous a déjà présenté « le commandement
de notre Dieu Sauveur
», et dans
le même verset nous lisons : « le Christ
Jésus notre Sauveur
». Dans
le verset que nous venons de considérer (2:10), « l’enseignement
est de notre Dieu Sauveur
». Le v. 13 de ce même chapitre nous
parle de « l’apparition
… de notre
grand Dieu et Sauveur Jésus Christ
» . Au chap.
3:4, « la bonté et la philanthropie
de notre Dieu Sauveur sont apparues
»
pour nous sauver. Enfin, au v. 6 de ce même chapitre, « l’Esprit Saint
est répandu… sur nous par Jésus Christ,
notre Sauveur
».
C’est ainsi que, dans l’oeuvre du salut, Jésus Christ n’est jamais séparé de Dieu lui-même et reste toujours en union divine et parfaite avec lui. Dieu commande, enseigne, apparaîtra comme grand Dieu dans la personne de Christ. C’est dans cette même personne que son amour est apparu et qu’il nous a sauvés. Nous attendons encore de voir apparaître sa gloire dans cette même personne. En attendant, nous possédons l’Esprit Saint, répandu sur nous par ce même Jésus Christ, notre Sauveur. En un mot, le salut acquis, l’Esprit donné, la gloire future, tout cela dépend du Christ Sauveur, image du Dieu invisible, notre Sauveur. Et, en attendant cette gloire, la grâce nous enseigne (v. 11).
La différence entre l’épître
à Tite et les deux épîtres à Timothée est très remarquable sous beaucoup de
rapports dont je ne veux relever que le suivant. La première épître à Timothée
nous parle plutôt du Dieu Créateur et Conservateur ; la seconde qui nous
présente la ruine de la maison de Dieu et le chemin du fidèle au milieu de ses
décombres, insiste tout particulièrement sur la seigneurie
de Christ. Le Seigneur,
tel est le titre dominant que Jésus Christ prend dans cette seconde épître.
(1:2, 8, 16, 18 ; 2:7, 14, 19, 22, 24 ; 3:11 ; 4:8, 14, 17, 18,
22). La méconnaissance des droits absolus du Seigneur sur nous est, en effet,
ce qui caractérise les hommes aux derniers jours. Parlant de cette même période,
l’apôtre Pierre dit : « Reniant le Maître
qui les a achetés » (2
Pierre 2:1). Or nous, chrétiens, qui traversons les temps de la fin, nous
sommes appelés à proclamer la soumission à cette autorité. Elle ne peut être
prouvée autrement que par la soumission absolue à Sa Parole. Il est remarquable
que, dans l’épître à Tite, où le chrétien nous est montré comme placé à chaque
pas sous l’enseignement de cette Parole
et
en réalise l’autorité sur lui, le nom de Seigneur
ne se présente pas une seule fois.
Nous arrivons maintenant au second grand sujet de l’épître. Nous l’avons signalé dans notre Introduction en le définissant ainsi : « L’enseignement de la grâce quant à notre marche et à notre conduite dans ce monde ».
« Car la grâce de Dieu qui apporte le salut est apparue à tous les hommes, nous enseignant que, reniant l’impiété et les convoitises mondaines, nous vivions dans le présent siècle sobrement, et justement, et pieusement, attendant la bienheureuse espérance, et l’apparition de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ, qui s’est donné lui-même pour nous, afin qu’il nous rachetât de toute iniquité et qu’il purifiât pour lui-même un peuple acquis, zélé pour les bonnes oeuvres » (v. 11-14).
Nous trouvons dans ce merveilleux passage :
1° Ce qu’est la grâce. 2° Ce qu’elle apporte. 3° À qui elle s’adresse. 4° Ce qu’elle enseigne.
En rapport avec tout le
contenu de cette épître, c’est sur ce dernier point, sur l’enseignement
(*) de la grâce que
ce passage insiste tout particulièrement. Il est du reste d’une telle richesse,
qu’il nous sera difficile, non de l’épuiser, car la Parole est inépuisable,
mais même d’en présenter les grandes lignes, sans nous exposer à d’importantes
omissions. Bornons-nous donc à présenter humblement ce que l’Esprit de Dieu
apporte à nos coeurs quant aux paroles que nous venons de citer.
(*) Le mot employé ici
pour « enseigner » (paideuo
au lieu de didasko
et didaskalia
« enseignement ou
doctrine » que l’on rencontre partout dans le reste de l’épître), nous paraît
signifier plutôt un enseignement pratique
et non doctrinal, tel qu’il est donné aux enfants : question de bonne
tenue, de bonnes manières, d’obéissance et de respect dus aux parents,
d’assiduité à l’étude, en vue d’un résultat à venir.
La mention du Dieu Sauveur
(v. 10) , si remarquable dans cette épître, amène
nécessairement avec elle la mention de la
grâce
et lui donne la première place.
La grâce
n’est pas la bonté
de Dieu, ni même son amour ; elle est cet amour, s’abaissant jusqu’à des
pécheurs perdus pour les sauver. La grâce est ici une personne (comme en Jean
1, la Parole faite chair), une personne pleine de grâce. Elle n’est ni un
principe, ni une abstraction ; elle est le Dieu Sauveur dans la personne
d’un homme, apparaissant
de telle
manière que tout homme a pu la voir et la recevoir. Elle n’est pas apparue pour
exiger quelque chose de l’homme, mais pour lui apporter
une chose
inestimable, le salut
! Ce qui donne à la grâce cette
valeur, c’est qu’elle est la grâce de
Dieu.
Elle est donc souveraine et parfaite ; une grâce inférieure à
celle de Dieu, ne pouvant être qu’imparfaite et temporaire. La grâce de Dieu
est éternelle comme Lui. La grâce de Dieu apporte
le salut. Elle ne demande ni n’exige rien de l’homme pour le sauver, comme
fait la loi ; elle lui apporte, sans rien lui demander en échange. Et que
lui apporte-t-elle ? Le salut.
Avant de considérer ce qu’est
le salut, ce « grand salut », notons que ce passage nous parle de deux apparitions
: D’abord de l’apparition de la grâce,
descendue
ici-bas pour apporter le salut ; ensuite de l’apparition de la gloire
de notre grand Dieu et Sauveur Jésus
Christ. La première apparition nous apporte le salut en grâce, la seconde le
salut en gloire. Le salut en grâce a été parfaitement accompli dans le passé,
le salut en gloire le sera parfaitement dans un avenir si prochain qu’il est
déjà comme présent pour la foi (Phil. 3:20-21).
Le caractère de la grâce est
absolu. Il n’est pas dit qu’elle apportera, ni même qu’elle a apporté, mais
qu’elle apporte.
Cela fait du salut,
parfaitement accompli, une chose actuelle, immuable, qui ne peut être changée
ni révoquée. Mais de plus, elle est apparue
à tous les hommes.
Sa portée est universelle
et personne n’en est exclu.
Cette gratuité du salut contredit toutes les pensées de l’homme depuis la chute. Jamais son orgueil ne voudra accepter que le don de Dieu ne lui coûte rien. Il acceptera facilement un Dieu Sauveur qui lui commanderait de conquérir le salut, ou lui offrirait son aide pour l’obtenir, ou enfin lui enseignerait les divers moyens de l’acquérir. Il comprendra un salut, résultat de son zèle pour les bonnes oeuvres, mais jamais un salut entièrement gratuit. L’homme voudrait offrir quelque chose, ne fût-ce que très peu, afin de l’obtenir et de pouvoir s’en vanter ensuite. En effet, où est l’homme qui, ayant acheté à bas prix quelque chose de très précieux, ne s’en vante ?
Mais revenons au salut
lui-même. Nous l’avons dit, c’est
une chose immense
dont nous ne
pouvons prendre la mesure ici-bas : il nous faudra l’éternité bienheureuse
pour en parcourir l’étendue.
Pour le croyant, le salut
n’est pas seulement le pardon
des
péchés qu’il a commis. Dans leur immense majorité, les chrétiens s’arrêtent à
cette vérité première et passent leur vie sans avoir connu la véritable
délivrance. Cette dernière est, non pas le pardon des péchés,
mais l’absolue délivrance du péché,
de la racine même qui est en nous, qui s’appelle aussi la
chair et le vieil homme, et qui porte tous ces mauvais fruits : les
péchés. Cette délivrance est opérée en ce que Christ, ayant été fait péché à
notre place, notre vieille nature, « le péché dans la chair » a été condamnée et
crucifiée dans sa personne. Nous pouvons donc désormais nous tenir pour morts
au péché et « il n’y a maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le
Christ Jésus ». Et de ce fait, toutes les conséquences du péché
:
l’esclavage de Satan, la mort et le jugement, ont été réduits à néant pour
toujours !
Mais, quelque grande que soit
cette délivrance, le salut est encore bien plus que cela. Il n’est pas
seulement la délivrance du péché et de toutes ses conséquences passées,
présentes et futures ; il est l’introduction
actuelle
du croyant dans la présence de Dieu, sa réception, selon l’entière
acceptation de Christ, en vertu de son oeuvre, par Dieu lui-même — acceptation
publiquement déclarée en ce que Dieu a ressuscité Jésus d’entre les morts et
l’a fait asseoir à sa droite. Les résultats de cette introduction du croyant
devant Dieu nous sont décrits dans des passages tels que Jean 20:17 ; Rom.
5:1-2 ; Éph. 1:2-6, etc.
Enfin le salut est l’introduction encore future
dans la
jouissance parfaite et ininterrompue de toutes les choses que nous ne possédons
encore qu’en espérance et qui vont être manifestées dans la gloire (Phil.
3:20-21).
Tel est le salut que la grâce nous apporte. N’avons-nous pas raison de dire qu’il est sans limites ?
Nous enseignant
(*). La grâce a
commencé par apporter le salut à tous les hommes ; elle nous
enseigne ensuite. Le croyant se trouve désormais, non pas comme Israël sous
l’enseignement de la loi, mais sous celui de la grâce. La grâce étant apparue
en Christ a remplacé le premier conducteur ou instituteur qui est mis de côté
(Gal. 3:24). Ce nouvel instituteur n’est en aucune manière donné au monde. Il
faut d’abord que les hommes soient sauvés par la foi et ce n’est qu’alors
qu’ils peuvent être enseignés. Ceux qui ont été sauvés forment désormais une
nouvelle famille qui a besoin d’éducation. La grâce s’en charge ; aussi
nous trouvons ici ce petit mot : nous
enseignant, qui est de toute
importance. Dieu n’enseigne pas le monde, mais les justes. Sans doute il
« enseigne le chemin aux pécheurs » (Ps. 25:8), c’est-à-dire à ceux qui,
reconnaissant leurs transgressions font appel à sa grâce et à son pardon.
Lorsque, dans cette qualité, ils s’approchent de Dieu et mettent leur confiance
en Lui, il les compte parmi les « débonnaires » (v. 9 du même Psaume).
(*) Voyez la note précedente
Jamais il ne pourra exister
un terrain d’entente entre le péché et la grâce, car ils sont entièrement
opposés l’un à l’autre. La grâce n’améliore pas
le pécheur, elle le sauve
.
Le péché sépare
l’homme de Dieu, la grâce l’amène
à Dieu. Le
péché asservit
l’homme à
Satan, la grâce le libère
de cet esclavage. Le péché produit la mort
,
la grâce donne la vie éternelle
. Le péché conduit l’homme au jugement,
la grâce lui apporte la justice.
Le péché a pour conséquence la condamnation,
la grâce ôte cette dernière pour toujours.
Voyons maintenant en quoi consiste l’enseignement de la grâce :
Elle nous enseigne quant au
passé, quant au présent, quant à l’avenir : quant au passé,
à renier l’impiété et les convoitises mondaines ; quant
au présent,
à vivre dans le présent
siècle sobrement, et justement, et pieusement ; quant à l’avenir
à attendre la bienheureuse
espérance.
Cet enseignement de la grâce
est, comme on le voit, entièrement pratique,
ce qui, du reste, caractérise toute la « doctrine ou enseignement » de cette
épître. Il y a des enseignements qui placent devant nous notre position céleste
et les richesses insondables de Christ, sujets si souvent appelés « la foi »,
mais nous trouvons ici ce que la grâce nous enseigne quant à notre conduite
ici-bas.
Considérons de plus près les trois objets de cet enseignement :
1° Reniant l’impiété et les convoitises mondaines
. Renier
, c’est déclarer ne plus connaître
une personne ou un objet que l’on connaissait autrefois. Pierre reniant Jésus
en est un exemple. Pratiquement, le chrétien, instruit par la grâce, a rompu
avec ces choses du passé, avec le mépris qu’il montrait envers Christ et
l’indifférence au sujet de ses relations avec Dieu. L’impiété est sans Dieu
dans ce monde ; les convoitises — celle des yeux, celle de la chair, et
l’orgueil de la vie — appartiennent au monde et non à la nouvelle nature. La
croix de Christ, aussi bien que la gloire de Christ, sont incompatibles avec
ces choses. Or toute la marche chrétienne, enseignée par la grâce, se trouve
comprise entre le point de départ du croyant — la croix, et son point d’arrivée
— la gloire. Cette marche est désormais étrangère à tout ce qui avait caractérisé
notre conduite loin de Dieu.
2° Nous
vivions dans le présent siècle sobrement, et justement, et pieusement.
Dans le présent siècle.
Nous
avons été « retirés du présent siècle mauvais » par le fait que Christ est « mort
pour nos péchés » (Gal. 1:4). Nous n’appartenons donc plus au monde, car nous
sommes du ciel, une nouvelle création. Les choses vieilles sont passées, mais
comme chrétiens nous sommes toujours en danger de nous conformer
au présent siècle (Rom. 12:2) ,
même, hélas ! de l’aimer
et d’abandonner ainsi, comme Démas,
le témoignage de Christ (2 Tim. 4:10). Cela ne veut pas dire que nous n’ayons
pas à « vivre dans le présent siècle » , mais, tout lien moral avec le monde
étant rompu, nous y sommes laissés pour montrer, par notre conduite comme rachetés,
que nous avons désormais de tout autres principes de marche et de conduite que
lui.
Sobrement, justement et pieusement
: Sobrement quant à nous-mêmes, justement quant à notre prochain, pieusement quant à
Dieu. C’est ce qui doit caractériser toute notre vie, en tant qu’elle se
déroule dans le présent siècle, jusqu’à ce qu’elle ait son plein épanouissement
dans le siècle à venir.
Les trois choses que la grâce
nous enseigne ici, caractérisent au fond la vie pratique de toutes les classes
de croyants dont cette épître nous entretient. Sobrement.
La sobriété ou sagesse, la modération en toutes choses,
la retenue et la possession de soi-même, caractérisent, rien que dans notre
chapitre, les vieillards, les femmes âgées, les jeunes femmes, les jeunes
hommes (v. 2, 5, 6) ; en un mot tous ceux qui forment l’ensemble de la
maison de Dieu. Justement
: Si la justice pratique consiste
d’abord à ne pas laisser le péché s’introduire dans nos coeurs et dans nos
voies, en un mot, si elle nous rend impitoyables à l’égard de nous-mêmes, nous
devons aussi rendre par elle à chacun ce qui lui est dû. La justice doit régler
nos rapports, soit avec nos frères, soit avec le monde, et c’est ici, je pense,
la signification essentielle du mot « justement ». Il en est de même en tout
point dans cette épître. Le soin des autres, absent de tout égoïsme, l’honneur
rendu à chacun, est ce qui garantit l’ordre dans toutes les relations des
membres de la maison de Dieu entre eux.
Pieusement
. Nous avons déjà vu, au
premier verset de cette épître ce qu’est la piété, et comment elle est
inséparable de la connaissance de la vérité. Ici la piété est le plus élevé de ces trois points. Vivre pieusement, c’est maintenir
les relations habituelles de notre âme avec Dieu, dans l’amour, la déférence,
l’obéissance, la crainte de Lui déplaire. Ces choses ont de tout temps
caractérisé les fidèles. Combien de fois la piété n’est-elle pas recommandée
dans les épîtres à Timothée ; combien de fois les avantages et les
bénédictions qui s’y rattachent n’y sont-ils pas mis en lumière ! (Voyez 1
Tim. 2:2 ; 3:16 ; 4:7, 8 ; 5:4 ; 6:3, 5, 6, 11 ; 2
Tim. 3:5, 12).
3° Attendant la bienheureuse espérance et l’apparition de la gloire de
notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ.
Cela aussi fait partie de
l’enseignement de la grâce. Elle nous apprend à attendre la venue du Seigneur
pour nous enlever auprès de Lui. Comment ne pas appeler bienheureuse
cette espérance ? Elle est sans aucun mélange de
crainte ni d’appréhension ; aucun nuage ne la traverse ; elle est
pour le racheté le triomphe et le couronnement de la grâce. Mais cette
espérance ne se sépare pas de l’apparition de la gloire, pour celui qui est
enseigné par la grâce. Toutes deux, quoique séparées comme deux actes, quant à
leur époque, appartiennent à un même événement, la Venue,
mais l’une est la venue du Seigneur en grâce, l’autre sa
venue en gloire ; l’une sa venue pour les saints, l’autre sa venue avec
les saints ; l’une sa venue visible aux yeux des rachetés, l’autre sa
venue visible aux yeux du monde ; l’une sa venue pour la bénédiction
ineffable des siens, l’autre sa venue pour le jugement sans miséricorde du
monde ; l’une sa venue pour nous introduire dans les demeures célestes,
l’autre sa venue pour établir sur la terre son règne de justice et de paix ;
l’une sa venue pour nous prendre auprès de Lui, l’autre pour nous manifester
dans la même gloire que Lui.
L’apparition
est celle
« de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ » Notre grand Dieu
! De
quelle dignité suprême, de quelle majesté Jésus sera revêtu, lors de son
apparition !
Le monde se lamentera et se
frappera la poitrine en le voyant venir avec les nuées, mais nos coeurs seront
remplis d’une joie ineffable, car nous dirons : Ce grand Dieu est notre Dieu,
ce grand Dieu est notre Sauveur
Jésus Christ ! (*)
(*) Notez qu’il y a sept
sujets dans l’enseignement de la grâce. C’est la plénitude de l’enseignement
pour la vie pratique et la conduite des rachetés dans ce monde.
Dès qu’il a prononcé ce nom de Sauveur, l’apôtre se trouve transporté en présence des souffrances de Christ et considère le but pratique de l’oeuvre qu’il a accomplie :
Qui s’est donné lui-même
pour nous, afin qu’il nous rachetât de toute iniquité et qu’il purifiât pour
lui-même un
peuple acquis, zélé pour les bonnes oeuvres
« Il s’est donné lui-même
pour nous ! » Voilà
bien ce qu’est notre Sauveur et où l’a conduit son amour ! Il n’est pas
seulement vrai que Dieu a donné son Fils unique, qu’il l’a livré
pour nous tous, mais Jésus s’est donné, donné tout entier,
donné Lui-même, pour nous.
Sa mort et
ses souffrances ont encore d’autres buts, comme nous allons le voir ; mais
ici, c’est nous
qui sommes le but.
Merveilleux amour, pour celui qui a sondé devant Dieu la profondeur de sa
dégradation ! C’est l’histoire du trésor et de la perle de grand prix (Matth. 13). Jésus a estimé que nous acquérir valait
sa propre vie ; aussi nous
a-t-il vus, non pas selon ce que nous étions, mais selon les perfections dont
son amour voulait nous revêtir.
Énumérons quelques autres passages sur le but de son sacrifice :
1° Gal. 2:20. « Le Fils de
Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré
lui-même
pour moi
».
Ce passage est peut-être,
avec celui de Tite 2:14, l’un des plus précieux pour nos coeurs : Il s’est
livré pour acquérir qui ? Moi
, un individu. J’aurais été seul
au monde qu’il se serait dévoué jusqu’à subir la mort pour moi seul ! En
Tite 2, c’est pour nous,
l’ensemble
de ses rachetés. Il veut avoir ici-bas un peuple
qui soit à Lui. Romains
5:8 montre qu’il est mort pour nous, lorsque nous
étions encore
pécheurs. Comme ce fait
exalte la grandeur de son amour ! Quand nous n’étions pas autre chose que
pécheurs, il voyait en nous les résultats de l’oeuvre qu’il allait accomplir.
Il nous considérait à la lumière de la rédemption, mais son amour a trouvé, dans
le péché même, un motif de donner toute sa mesure.
2° 1 Cor. 15:3. « Christ est
mort pour nos péchés
, selon les
Écritures ». Ce mot résume tout l’Évangile Tel est le premier grand objet de la
mort de Christ. Pour nous posséder, il lui fallait régler la question de nos
péchés.
3° Gal. 3:13. Il est mort
pour nous « racheter de la malédiction de la loi, étant devenu malédiction
pour nous ». Pouvons-nous
concevoir le Saint et le Juste s’identifiant à un tel point, dans son amour,
avec des êtres maudits ?
4° Gal. 1:4. « Il s’est donné
lui-même pour nos péchés, en sorte qu’il nous retirât du présent siècle mauvais
». Les chrétiens, je le demande,
ont-ils suffisamment conscience que le but de Christ en mourant pour expier nos
péchés était de nous séparer du monde, et réalisent-ils ce but dans toute leur
conduite ?
5° Jean 11:52. « Jésus allait
mourir… non pas seulement pour la nation, mais aussi pour rassembler en un les enfants de Dieu
dispersés
». Voici un autre
but de sa mort. Il voulait rassembler les siens dans l’unité
de la famille
de Dieu ici-bas. Nous disons « la famille » parce que Jean ne parle pas de
l’Église à laquelle ce passage peut, du reste, tout aussi bien s’appliquer.
Ici, nous le remarquons encore : les chrétiens n’apprécient pas davantage
le but de Christ en mourant, qu’ils n’apprécient son but au premier chapitre
des Galates.
6° 1 Pierre 3:18. « Car Christ
a souffert une fois pour les péchés… afin qu’il
nous amenât à Dieu ».
Résultat immense de son sacrifice ! « Je vous ai
portés sur des ailes d’aigle, dit l’Éternel, et vous ai amenés à moi
». Et
encore : « Nul ne vient au Père que par moi » (Ex. 19:4, Jean 14:6).
7° 2 Cor. 5:15. « Il est mort
pour tous, afin que ceux qui vivent ne
vivent plus pour eux-mêmes,
mais pour Celui qui pour eux est mort et a été
ressuscité ». L’appréciation de la mort de Christ détruit en nous l’égoïsme qui
fait toujours de l’homme son propre centre, l’objet pour lequel il agit et
auquel il rapporte tout. Toutes les choses dont parlent
les n° 3 à 7 ne pourront être réalisées que si nous avons continuellement
devant les yeux la mort et les souffrances de Celui qui s’est donné Lui-même
pour nous.
8° Éph.
5:25-27. « Le Christ a aimé l’Assemblée
et
s’est livré lui-même pour elle ». Il a accompli ce sacrifice d’amour, afin
d’acquérir son Épouse, l’objet le plus cher à son coeur ; et après l’avoir
acquise, il la purifie pendant le voyage du désert, afin qu’elle soit digne de
Lui, à son entrée dans la gloire. Les chrétiens songent-ils à aimer, non pas
leurs misérables sectes, mais l’Église l’Assemblée, parce que Christ
l’aime ?
Revenons maintenant à notre passage.
En se donnant lui-même pour nous, le Sauveur avait trois buts :
Le premier, de nous racheter de toute iniquité ;
résultat
qui nous est acquis pour toujours, par la Rédemption, tandis que l’oeuvre de la
purification journalière, destinée à rétablir avec Dieu la communion perdue, se
répète tout le long de notre marche ici-bas : « Si nous confessons nos
péchés, il est fidèle et juste pour nous pardonner nos péchés et nous purifier
de toute iniquité ».
Le second but est de purifier pour lui-même un peuple acquis.
L’acquisition
de ce peuple a eu lieu par Son sacrifice, la purification dont il est question
ici a lieu une fois pour toutes par Sa parole, mais ce peuple acquis, pour
lequel il s’est donné Lui-même
, il le veut pour Lui-même,
tel que son oeuvre l’a fait et tel que sa sainteté
le désire. Toute cette oeuvre a lieu en vue de former ici-bas, comme ce passage
nous le montre, une famille, un peuple pour Dieu, une Épouse pour Christ.
Son troisième but est que ce
peuple acquis soit zélé pour les bonnes
oeuvres
. Nous avons déjà
traité le sujet des bonnes oeuvres et nous aurons encore l’occasion d’y
revenir, mais ce qui ressort de ce passage, c’est que l’intention du Seigneur
dans la Rédemption est de voir du zèle, de l’activité, dans la vie pratique de
ses bien-aimés. Notre zèle a-t-il répondu au désir de son coeur, et le Seigneur
n’est-il pas plutôt obligé de nous dire, comme à Laodicée : « Aie du
zèle et repens-toi
»
« Annonce ces choses, exhorte et reprends, avec toute autorité de commander. Que personne ne te méprise » (v. 15).
Nous trouvons dans ce dernier
verset de notre chapitre, le résumé du ministère de Tite. Il avait à annoncer
ces choses (cf. 2:1) , à exhorter,
(cf.
2:6) , à reprendre
(cf. 1:13). L’autorité de commander
devait
caractériser son ministère au milieu de cette race de Crétois, méchants,
menteurs et paresseux. Il y a des cas où un acte d’autorité selon Dieu, fait
par ceux que le Seigneur a désignés pour maintenir l’ordre dans sa maison, est
seul capable d’endiguer le torrent du mal. Cela ne veut pas dire que
« commander » soit la chose principale. La douceur, la grâce, le support, l’amour
gagnent les coeurs, l’acte d’autorité réprime le mal. Le Seigneur lui-même
parlait avec autorité aux vagues révoltées de la mer, commandait avec autorité
aux esprits immondes, mais ce n’était pas le côté essentiel de son activité, et
pas davantage celui du ministère de Tite, délégué de l’apôtre. Je suis doux et
humble de coeur, dit le Seigneur. Son caractère, comme vrai serviteur, n’est
pas seulement de « dessécher la mer par sa réprimande », mais de « soutenir par
une parole celui qui est las » (És. 50:2, 4). Quant au
cas de Tite, il était non seulement spécial à cause du milieu dans lequel il
était appelé à agir, mais à cause de son âge. Comme Timothée, il était
probablement jeune encore, et comme tel, il était important qu’il se conduisît
de manière à ne pas être exposé au mépris, lequel aurait rejailli sur la parole
de Dieu qui lui était confiée. C’est pourquoi l’apôtre ajoute : Que
personne ne te méprise
(Cf. 1 Tim.
4:12).
« Rappelle-leur d’être soumis aux principautés et aux autorités, d’être obéissants, d’être prêts à toute bonne oeuvre, de n’injurier personne, de n’être pas querelleurs, mais modérés, montrant toute douceur envers tous les hommes » (v. 1-2).
Rappelle-leur d’être
soumis aux principautés et aux autorités
. Les « principautés et les autorités » sont souvent mentionnées dans les
épîtres. En Éph. 1:21, nous voyons le Seigneur
ressuscité, assis à la droite de Dieu » au-dessus de toute principauté et
autorité, et puissance, et domination », quelles qu’elles soient, dans le siècle
présent et dans le siècle à venir.
Ces principautés et ces
autorités se divisent en trois classes, comme faisant partie des êtres célestes,
terrestres et infernaux
de Phil. 2:10.
Éph. 3:10 nous parle des principautés et autorités célestes.
Éph. 6:12 des principautés et autorités sataniques.
Col. 1:16 des principautés et autorités célestes et terrestres instituées de Dieu.
Col. 2:10 des principautés et autorités célestes.
Col. 2:15 des principautés et autorités sataniques.
Notre passage enfin des principautés et autorités terrestres. Il arrivera un jour où toutes ces puissances ploieront le genou devant Lui, comme faisant partie de tous les êtres qui appartiennent à la sphère céleste, ou terrestre ou infernale.
Résumons en quelques mots
tous les passages que nous venons de citer. Il y a des principautés et
autorités ou des hiérarchies célestes
et terrestres
par lesquelles
Dieu exerce son gouvernement. Elles ont toutes été créées par Christ. Il est et
restera éternellement au-dessus de toutes. Une partie des principautés et
autorités célestes est tombée sous la puissance de Satan lors de sa révolte
contre Dieu. Il la dirige. En outre, comme prince de ce monde, il se sert des
principautés terrestres pour faire la guerre à Christ. Les autorités célestes
ou angéliques qui ne sont pas tombées et que Dieu a maintenues dans leur pureté
primitive, sont à l’abri de ses entreprises, mais le Seigneur se sert même des
autorités sataniques et de Satan lui-même pour accomplir Ses propres
desseins ; ainsi dans le cas de Job. De la même manière le Seigneur garde
la haute main sur toutes les décisions des principautés et autorités terrestres
qu’Il a instituées, et s’en sert, comme Il le fait de Satan, pour
l’accomplissement de Sa volonté. Déjà maintenant Satan et les puissances
sataniques dans les lieux célestes ont été vaincus et dépouillés à la croix, et
le chrétien peut considérer le Diable comme un ennemi qui n’a plus pouvoir sur
lui et auquel il n’a qu’à résister pour qu’il s’enfuie. Le temps est encore à
venir, quoique très proche, où Satan sera chassé des lieux célestes et précipité sur la terre (Apoc.
12:9). Enfin le Dieu de paix le brisera sous nos pieds.
Dans notre passage (3:1), les
principautés et autorités sont les puissances auxquelles le Seigneur a confié
le gouvernement sur la terre.
Elles
sont tombées sous le pouvoir de Satan qui s’en sert pour faire la guerre à
Christ, mais le chrétien est appelé à les reconnaître comme établies de Dieu
dans leur caractère primitif, car c’est par elles que le Seigneur, dans son
gouvernement, retient encore le plein développement du mal (2 Thess. 2:6). Quelque mauvais que soit leur caractère, quelque
asservies qu’elles soient à Satan, le chrétien voit Dieu dans l’autorité et se
soumet aux principautés et puissances terrestres comme provenant de Dieu, alors
même que leur exercice serait entre les mains les plus abjectes et les plus
hostiles.
Dans ces versets 1 à 2, Tite
avait à rappeler diverses choses aux chrétiens de la Crète. Elles étaient au
nombre de sept ; de même aussi, au vers. 3, les choses qui les
caractérisaient avant leur conversion avaient un nombre égal. Le nombre sept,
comme nous l’avons déjà remarqué,
indique la plénitude spirituelle, soit en bien, soit en mal.
1° La première chose que Tite
devait leur rappeler était la soumission
aux
autorités instituées par Dieu dans ce monde. La soumission est mentionnée
plusieurs fois dans cette épître, et très souvent ailleurs. La soumission à
l’autorité consiste à ne pas nous soustraire à son joug et à reconnaître ses
droits sur nous, comme lui étant donnés de Dieu. C’est ainsi que le Seigneur
dit à Pilate : « Tu n’aurais aucun pouvoir contre moi, s’il ne t’était
donné de Dieu ». Il accepte d’être livré au magistrat et au pouvoir du
gouverneur. Aux chap. 4 et 5 des Actes, ses disciples suivent le même chemin
que lui. Ils rendent témoignage, devant les principaux, de leur foi au Seigneur
Jésus, mais ne protestent pas contre l’autorité qui les a injustement saisis. —
Que l’autorité soit juste ou injuste, nous devons toujours garder, vis-à-vis
d’elle, le même caractère. Avant toutes choses, nous devons être soumis à Celui
qui est élevé à la droite de Dieu et auquel anges, autorités et puissances sont
soumis (1 Pierre 3:22). Quant à nous, nous devons être « soumis
à tout
ordre humain pour l’amour du Seigneur, soit au roi, comme étant au-dessus de
tous, soit aux gouverneurs comme à ceux qui sont envoyés de sa part pour punir
ceux qui font le mal et pour louer ceux qui font le bien » (1 Pierre 2:13-14).
Dans cette épître de Pierre, comme dans la nôtre, la soumission est recommandée
aux domestiques (2:18), aux femmes (3:1, 5), aux jeunes gens vis-à-vis des anciens
(5:5). Enfin les chrétiens doivent être « soumis les uns aux autres » (Éph. 5:21).
2° D’être obéissants.
L’obéissance diffère de la soumission. Cette
dernière est passive, la première active. Elle a affaire à des commandements, à
des ordres positifs. Cette injonction a en vue toute autorité qui, ayant le
droit de commander afin d’établir l’ordre
parmi les hommes,
doit être écoutée et obéie (*).
Ici le mot : « être obéissants » ne fait pas allusion aux magistrats plus
qu’à toute autre autorité ; c’est plutôt un caractère que toute notre
conduite doit porter, sans qu’il se rapporte à aucune autorité ou à aucun de
ses actes particuliers. Ainsi l’on dit des enfants qu’ils sont obéissants sans
en avoir sous les yeux une preuve spéciale. Il faut qu’il soit manifeste à tous
que nous sommes prêts à répondre à tout ordre de Dieu, par quelque
intermédiaire qu’il lui plaise de nous le faire parvenir.
(*) Peitharcheo. C’est le même mot qu’en Actes
5:29, 32 : « Obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » et « Ceux qui lui obéissent »
(à Dieu). Et encore Actes 27:21 : « Vous auriez dû m’écouter
». Ce
sont, avec notre verset, les seuls passages où ce terme se trouve.
L’on a souvent confondu la soumission avec l’obéissance au grand détriment des âmes pendant le terrible conflit qui a ensanglanté le monde. De tels passages n’impliquent nullement l’obéissance du chrétien aux autorités militaires pour user d’armes meurtrières à la guerre. Sous ce rapport, le chrétien est responsable vis-à-vis de Dieu. « Il lui faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes ». L’idée que le soldat qui tue n’est responsable que vis-à-vis de son chef et que ce dernier seul est responsable vis-à-vis de Dieu, est un misérable subterfuge par lequel on cherche à éviter un commandement positif du Seigneur. « Jugez s’il est juste devant Dieu de vous écouter plutôt que Dieu » (Actes 4:19).
3° d’être
prêts à toute bonne oeuvre
. C’est Dieu
(non pas nous) qui prépare à l’avance les bonnes oeuvres pour que nous y
marchions ; mais la part du croyant est d’être prêt
à les faire, quelles qu’elles soient,
quand Dieu les lui présente. Il ne doit pas être pris au dépourvu, en étant
occupé de choses qui l’empêcheraient de les faire immédiatement.
4° de
n’injurier personne.
Cette
recommandation est d’une grande importance. L’injure peut être proférée aussi
bien en l’absence qu’en la présence de la personne injuriée. Il est parlé dans
l’épître de Jude des rêveurs de la fin qui « injurient les dignités ». C’est le
caractère de l’anarchie moderne qui blasphème les dignités reconnues de Dieu.
L’apôtre va plus loin encore et dit : personne.
Dans les jours que nous traversons, où des coupables se sont livrés à toute
sorte d’actes de fausseté et de violence, l’indignation pourrait facilement se
faire jour, chez les chrétiens, par l’injure. Jamais la haine
contre le mal, ni une indignation légitime, ne doit dégénérer ainsi. Une
colère selon Dieu n’avait d’autre effet, chez notre Sauveur bien-aimé, que
d’ouvrir les écluses de sa grâce (Matth. 17:17-18).
5° de
n’être pas querelleurs
. Cette qualité est négative
comme la précédente. Les Proverbes sont remplis de recommandations à cet égard.
Nous y voyons que la méchanceté, la haine, l’orgueil, la colère, la moquerie produisent les querelles. Ce n’est pas seulement dans le
monde, mais dans la famille de Dieu que les esprits agités, parce que dépourvus
de communion avec le Seigneur, recherchent les querelles. Combien il est donc
important pour nous, d’éviter tout conflit qui pourrait réveiller cette
tendance naturelle des coeurs !
6° (mais)
modérés.
Ce mot et son substantif
(epieikès, epieikeia) (*), signifie le caractère d’un homme doux et humble
qui ne revendique pas ses droits. Le Seigneur Jésus n’a-t-il pas manifesté
cette vertu dans la perfection quand « il était comme une brebis muette devant
ceux qui la tondent », devant ceux qui le dépouillaient de tous ses droits et de
toutes ses dignités, en sorte qu’il a été « retranché n’ayant rien
» (Dan. 9:26).
Ce caractère était aussi celui d’Abraham vis-à-vis de Lot, après que le
patriarche eut fait en Égypte une amère expérience de lui-même. C’est alors
qu’il abandonna tous ses droits plutôt que de faire un choix qui fût au
détriment de son frère. Cette même douceur est recommandée aux anciens en 1
Tim. 3:3, unie comme ici à l’absence d’un esprit querelleur. En effet, rien
n’engendre plus de querelles que l’insistance des hommes sur leurs droits.
Cette même modération appartient en Jacq. 3:17 à la
« sagesse d’en haut » qui présente sept traits caractéristiques, comme notre
passage. En 1 Pierre 2:18, cette qualité est attribuée (et combien elle est
nécessaire !) aux maîtres vis-à-vis de leurs serviteurs.
(*) Traduit aussi, dans la Version Pau-Vevey, par « douceur », « clémence » , « modération », « débonnaireté ». (Phil. 4:5 ; 2 Cor. 10:1 ; Actes 24:4 ; 1 Tim. 3:3 ; Jacq. 3:17 ; 1 Pierre 2:18).
7° montrant toute douceur
(*), envers tous les hommes.
Le caractère
dont il est fait ici mention diffère du précédent. Il s’agit de cette douceur
aimable, parce qu’elle est humble et débonnaire (**),
le contraire d’une sévérité rigide ou d’une dureté qui repousse au lieu de
redresser, qui tient à distance au lieu d’attirer. Cette douceur est un des
attributs de la grâce qui, dans la personne de Christ, « est apparue à tous les
hommes » pour les attirer à Lui. Ne disait-il pas lui-même : « Apprenez de
moi, car je suis débonnaire (ou doux, praos)
et humble de coeur » ! (Matth. 11:29).
(*) Praotès, traduit par « douceur » dans tous les passages.
(**) Voyez en 2 Cor. 10:1, ces deux vertus réunies en Christ : praotès, la douceur, et epieikeia, la débonnaireté.
« Car nous étions, nous aussi, autrefois, insensés, désobéissants, égarés, asservis à diverses convoitises et voluptés, vivant dans la malice et dans l’envie, haïssables, nous haïssant l’un l’autre » (v. 3).
Nous trouvons ici la
contrepartie des choses que Tite avait à rappeler aux chrétiens de la Crète.
Nous n’avons pas la description des traits moraux du paganisme, comme en Rom.
1:29-31, ni celle des traits moraux de la chrétienté aux derniers jours (2 Tim.
3:1-5) ; mais la description de ce que nous étions autrefois. Nous
,
dit l’apôtre, sans distinguer les Juifs d’avec les nations, nous n’étions pas
autrefois différents de « tous les hommes ». Ce fait rend les chrétiens capables
de montrer toute douceur envers tous. Nous pouvons leur dire : Ce que vous
êtes, nous l’étions. La grâce qui nous a appelés et sauvés vous appelle
aujourd’hui pour vous sauver de la même manière. Elle est accessible à tous.
C’est la philanthropie de Dieu ; vous pouvez être sauvés de la même
manière que nous.
Ce verset 3 est un tableau complet de l’état de tous les hommes, et par conséquent du nôtre dans le passé. Aussi est-il résumé sous sept chefs, de même que, plus haut, notre état produit par l’enseignement de la grâce.
1° Insensés.
Ce mot décrit tout premièrement l’état de l’homme devant
Dieu. Il dit dans son coeur : « Il n’y a point de Dieu ». Ce caractère de
l’homme pécheur est si manifeste que deux Psaumes (Ps. 14 et 53) reviennent à
le mentionner. Ce n’est pas la bouche de l’homme, mais son coeur,
qui parle ainsi. Toutes ses actions prouvent que Dieu est
banni de sa vie, sinon, comment pourrait-il ne pas avoir peur de les
commettre ? Cela rend les hommes
2°
désobéissants.
Quand on ne tient
pas compte de Dieu, ses ordres et ses commandements n’ont aucune prise sur le
coeur et la conscience reste indifférente devant l’expression positive de la
pensée de Dieu contenue dans la Parole.
3° égarés.
(Hébr. 3:10). C’est sortir des voies de Dieu ou les
ignorer, et la désobéissance y conduit. La brebis perdue ne peut retrouver son
chemin ; il n’y a pour elle d’autre possibilité que d’être retrouvée par
Celui même qu’elle a abandonné.
4° Asservis
à diverses convoitises et voluptés.
Livrée à elle-même, l’âme égarée qui avait cru jouir de sa liberté loin de Dieu, ayant perdu Dieu et tout lien moral avec Lui, devient l’esclave de ce que Satan lui suggère, des convoitises qui revêtent parfois des formes plus ou moins élevées, et des voluptés dont le caractère principal est la satisfaction des désirs de la chair (2 Tim. 3:4).
5° vivant
dans la malice et dans l’envie.
Le
coeur du pécheur trouve une satisfaction à suivre ses méchants instincts. Il y vit
; c’est une de ses raisons d’être.
L’envie qu’il porte à d’autres quand ils réussissent mieux que lui, et
l’entravent en l’empêchant de les devancer, le pousse à exercer sa méchanceté à
leur égard.
6°
haïssables.
Non seulement
haïssables pour Dieu, comme en Rom. 1:30, mais, d’une manière générale, dignes
d’être haïs. C’est une race qu’il est impossible d’aimer, et cependant c’est à
elle que nous devons montrer toute douceur, car autrefois nous étions
nous-mêmes comme eux.
7° nous
haïssant l’un l’autre
. Ici la haine est mutuelle.
L’homme naturel ne hait pas par sentiment d’honnêteté et de justice ; il
ne connaît pas la « parfaite haine » du croyant à l’égard de ceux qui s’élèvent
contre Christ (Ps. 139:21-22), car le Seigneur lui est étranger. Voyant le mal
chez les autres, il est aveuglé sur le mal de son propre coeur. Aussi son
prochain le hait avec la même intensité que lui.
« Mais, quand la bonté de notre Dieu Sauveur et son amour envers les hommes (sa philanthropie) sont apparus, il nous sauva, non sur le principe d’oeuvres accomplies en justice, que nous, nous eussions faites, mais selon sa propre miséricorde, par le lavage de la régénération et le renouvellement de l’Esprit Saint, qu’il a répandu richement sur nous par Jésus Christ, notre Sauveur, afin qu’ayant été justifiés par sa grâce, nous devinssions héritiers, selon l’espérance de la vie éternelle » (v. 4-7).
La conclusion du v. 3, c’est
que nous étions perdus.
Comment donc
sommes-nous arrivés à un état où nous n’avons plus besoin, comme aux vers. 1-2,
que d’être exhortés à reproduire en toutes choses le caractère de Christ ?
C’est en vertu du salut,
comme nous
l’avons vu au chap. 2:11-14, et comme ce passage nous le répète : Il nous sauva
(v. 5). Le chap. 2 nous a entretenus de la grâce
inconditionnelle qui apporte le salut et qui est apparue
dans la personne de Christ ; ici c’est la bonté et la
philanthropie de Dieu qui sont apparues.
Le Dieu de bonté et d’amour a eu pitié d’êtres haïssables
et perdus, tels que nous et ces deux caractères de Dieu sont apparus dans une
personne, le Dieu Sauveur. Ce Dieu Sauveur est Jésus Christ, appelé « notre
grand Dieu et Sauveur Jésus Christ » (2:13), pour bien marquer que cet homme en
qui la grâce est apparue à salut, n’est rien moins que Dieu, le grand Dieu.
Remarquez que l’apôtre l’appelle toujours « notre
Dieu Sauveur ». Ceux qui
sont au bénéfice de son oeuvre peuvent seuls l’appeler notre
. Il est le
Dieu Sauveur pour tous ; il « veut que tous les hommes soient sauvés », mais
personne, si ce n’est les sauvés eux-mêmes, ne peut l’appeler notre Dieu
Sauveur. Question sérieuse qui s’adresse à tous les lecteurs de ces
lignes ! Pouvez-vous dire : Mon
Dieu ? Si vous ne le pouvez,
vous lui êtes encore étranger. L’apparition
est le fait qu’un objet, invisible jusque-là, est rendu visible. Ainsi la
bonté, l’amour de Dieu envers les hommes, ne sont apparus que lorsque l’homme,
Christ Jésus, est venu ici-bas.
Les hommes parlent beaucoup
de philanthropie.
Un philanthrope
estime toujours les hommes susceptibles de bonté, malheureux sans doute,
coupables souvent, mais pouvant être relevés moralement et améliorés,
comme ils peuvent l’être matériellement. Ce dont
néanmoins le philanthrope ne doutera jamais un instant, c’est de sa propre
bonté, et l’estime qu’il a pour lui-même le soutient dans l’oeuvre qu’il a
entreprise. Souvent toutefois, voyant ses essais infructueux, il finit par
prendre l’humanité en dégoût, sans modifier en rien, cela va sans dire, son
opinion de lui-même. Mais s’il lisait notre vers. 3, cet homme verrait que Dieu
ne souffre pas d’exceptions et qu’il nous présente, peint par Lui-même, le
tableau de tous
les hommes, se
haïssant, et non pas s’aimant, l’un l’autre. Les philanthropes sont aussi du
nombre. Pour ne plus être haïssable et haïr, il faut, comme nous allons le
voir, être sauvé et avoir reçu, par la nouvelle naissance, la nature de Dieu. Alors
on peut aimer, mais même en
possédant la nature divine, le croyant a besoin des exhortations de la grâce,
telles qu’elles sont formulées dans les vers. 1-2. Enfin il est capable de
montrer « toute
douceur envers tous
les hommes ». Si les
philanthropes se soumettaient à la parole de Dieu, y trouveraient-ils le
tableau de ce qu’ils prétendent pratiquer ? Dieu dit : « Il n’y en a
aucun qui exerce la bonté, non, pas même
un seul
» (Rom. 3:12). La
conclusion est qu’il n’y a pas d’homme inconverti qui soit philanthrope aux
yeux de Dieu (*).
(*) Il va sans dire qu’en disant ces choses nous n’excluons nullement les sentiments naturels de pitié, de compassion pour les souffrances d’autrui, que l’on rencontre même là où le christianisme n’a jamais pu exercer son influence bienfaisante. C’est ainsi qu’en Actes 28:2 il nous est parlé de « l’humanité (philanthropie) peu ordinaire » dont les barbares usèrent envers Paul et ses compagnons.
Et cependant il existe un
philanthrope : Dieu lui-même ! Quand
la bonté de notre Dieu Sauveur et son amour envers les hommes
(sa
philanthropie) sont apparus, il nous
sauva.
Dieu a été de toute éternité
le Dieu d’amour, mais, à un moment donné, cet amour est apparu, a été
manifesté. Comme la grâce est apparue dans la personne
de Christ (2:11), l’amour de Dieu envers les hommes est
apparu dans le don
de Christ. Qui
étaient donc les hommes dont il parle ici ? Relisons une seconde fois le
v. 3 : « Asservis à diverses convoitises et voluptés, vivant dans la malice
et dans l’envie, haïssables, nous haïssant l’un l’autre ». Envers de tels
hommes, Dieu a usé de « bonté » et c’est à son école que ceux qui sont nés de lui
ont appris à montrer ce même amour envers les hommes. Ils ne peuvent plus les
haïr, parce qu’ils ont reconnu, lors de leur conversion, qu’ils étaient encore plus
haïssables que les autres. « J’ai horreur de moi », ont-ils dit comme Job, « et je
me repens dans la poussière et dans la cendre ». Jamais le plus grand
philanthrope du monde ne pourra avoir de tels sentiments à l’égard de lui-même,
car, chose concluante, il n’a pas besoin d’être sauvé pour être philanthrope.
Par contre, la philanthropie de Dieu s’est montrée par le salut
qu’il a opéré pour nous.
Au v. 5, nous trouvons le
moyen que Dieu a employé pour nous sauver, mais il le fait précéder par
l’indication du moyen qu’en dépit de toutes les pensées de l’homme, Dieu
n’emploiera jamais pour son salut :
Non sur le principe d’oeuvres accomplies en justice, que nous, nous eussions
faites.
Les « oeuvres de justice » sont celles que l’homme accomplit pour obtenir
le salut, tandis que les « bonnes
oeuvres » sont la conséquence du salut obtenu.
Les premières n’ont jamais procuré aux hommes ce que la grâce seule peut
leur obtenir ; ils prétendent pouvoir
les faire, tandis que l’oeuvre de Dieu est celle que Dieu a faite.
Nos oeuvres étant exclues, ce
qui est l’un des grands sujets des épîtres aux Romains et aux Galates, il ne
nous reste pour seule ressource que l’oeuvre de Dieu. Or, dans ce passage, nous
trouvons, non l’aspect de cette oeuvre opérée en dehors de nous, mais celle que
Dieu opère en nous
pour nous sauver.
C’est en quelque mesure la différence entre la parabole du fils prodigue et les
deux paraboles qui la précèdent au 15° chapitre de Luc.
Selon sa propre miséricorde, par le lavage de la régénération et le
renouvellement de l’Esprit Saint.
Le salut
est donc sur le principe d’une seule chose : sa propre
miséricorde ; mais Dieu emploie deux choses indispensables pour nous le
procurer : le lavage de la régénération et le renouvellement de l’Esprit
Saint.
1° Le lavage de la régénération.
Voyons ce que ce terme signifie.
Le lavage
(Loutron) est l’eau du bain dans laquelle on est plongé. Ce
lavage, tel que divers types de l’Écriture nous le présentent, signifie la mort
par laquelle on est purifié du péché et délivré du vieil homme : ainsi le
Jourdain où Naaman est purifié de sa lèpre ;
ainsi le baptême, où « nous avons été baptisés pour la mort de Christ ». C’est,
en effet, dans sa mort, que le vieil homme prend fin et que nous sommes « morts
au péché ». Ce en quoi le pécheur existait, ce qui le qualifiait, ses habitudes,
ses pensées, tout cela a pris fin aux yeux de Dieu dans la mort de Christ. Dieu
nous a sauvés en nous purifiant de ces choses. On ne peut entrer en relation
avec Lui sans cette purification et c’est ce que Dieu a fait à notre égard en
nous plongeant, pour ainsi dire, dans la mort de Christ. Ce même mot, « le
lavage » (Loutron) est employé en Éph.
5:27 pour la purification de l’Assemblée que Christ « a aimée, se livrant
Lui-même pour elle, afin qu’il la sanctifiât en la purifiant par le lavage d’eau,
par la parole ».
Le bain de la purification a lieu une fois pour toutes et ne se renouvellera jamais : « Celui qui a tout le corps lavé n’a besoin que de se laver les pieds (quant à la purification journalière), mais il est tout net ». Le lavage dont nous parlons a pour antitype l’eau ou le bain de la cuve d’airain.
Il y a une différence entre la cuve d’airain et l’eau qu’elle contient. L’airain représente la capacité de Christ de s’occuper du péché : soit pour l’expier par le sacrifice, comme à l’autel d’airain ; soit pour l’abolir dans la mort, comme dans le bain de la cuve d’airain. Dans ce dernier cas, l’homme est placé devant Dieu, par la mort de Christ, dans un état de pureté qui correspond à la sainteté de Sa nature.
La cuve d’airain était
construite avec les miroirs
d’airain
des femmes qui s’attroupaient à l’entrée de la tente d’assignation (Ex.
38:8). Par là ces femmes reconnaissaient, en type, leur péché et la capacité
de Christ seul d’en porter la responsabilité. Elles se dépouillaient de ce qui
avait servi à leur vanité. (L’or
de
leurs parures avait été employé pour faire le veau d’or (Ex. 32:2-3)).
Maintenant elles étaient humiliées et ne pouvaient plus désormais se complaire
à elles-mêmes en considérant leurs faces naturelles. Elles avaient devant leurs
yeux un objet composé de tous ces miroirs fondus en un, et seul capable de les
porter réunis. C’est ainsi que tous les croyants reconnaissent leur vie de
vanité et de convoitises portée par Celui qui seul en a pris la responsabilité.
Mais ils trouvent en même temps en Lui l’eau de leur purification, sortie du
côté d’un Christ mort.
Ce lavage, comme nous l’avons
dit, a lieu une fois pour toutes par la Parole qui nous présente la mort de
Christ comme mettant fin à notre état d’hommes pécheurs et souillés. Mais, pour
la marche et pour tout acte de service sacerdotal, il est besoin, outre la
purification initiale, d’une purification journalière. C’est le lavage des pieds
dont notre passage ne
parle pas, parce qu’il ne traite que du salut.
Considérons maintenant ce que
signifie ce terme : le lavage de la
régénération.
La régénération est le passage de notre ancien état à un état
nouveau, de notre vie dans la chair à une vie de résurrection, de l’état de
Christ mort, à l’état de Christ ressuscité, de l’ancienne création à la
création nouvelle. La régénération n’est pas une nouvelle nature communiquée
(nous allons la voir dans le « renouvellement de l’Esprit ») comme cela a lieu
dans la nouvelle naissance où l’on est « né d’eau et de l’Esprit ». La
régénération est une position
de
bénédiction dans laquelle nous sommes amenés maintenant par la puissance divine
en Christ et dans laquelle nous serons établis publiquement quand le Seigneur
viendra en gloire. Cette position nous la saisissons maintenant par la foi
. Nous sommes délivrés du pouvoir des ténèbres et « transportés
dans le royaume du Fils de son amour ». C’est en cela que consiste la
régénération, mais elle n’aura sa pleine manifestation que dans la gloire.
C’est pourquoi le Seigneur dit à ses disciples : « Dans la régénération,
quand le Fils de l’homme
sera assis sur le trône de sa gloire, vous aussi, vous serez assis sur douze
trônes, jugeant les douze tribus d’Israël » (Matth.
19:28). C’est par le lavage de la régénération que nous sommes sauvés (1 Pierre
3:20). On peut être converti ou vivifié
, comme Corneille, avant d’être
sauvé : c’est-à-dire amené à l’état chrétien, tel qu’il nous est révélé
dans le Nouveau Testament.
Le lavage est donc le lavage de la régénération. Il a trait à ma vie ancienne qui a trouvé son terme dans la mort de Christ.
2° Le renouvellement de l’Esprit Saint
a trait à ma vie nouvelle. Le
croyant est renouvelé, acquiert cette vie nouvelle, par le Saint Esprit. Cette
puissance divine produit en lui des pensées, des habitudes et des désirs
nouveaux, en contraste avec tout ce qui appartenait à son vieil homme, à
l’homme dans la chair, à l’homme pécheur et perdu.
(Qu’il a répandu richement sur nous par Jésus Christ notre Sauveur).
Cette phrase forme, comme nous le marquons ici, une petite parenthèse. Les mots qui suivent « afin qu’ayant été justifiés par sa grâce » se rapportent, non pas à « Jésus Christ notre Sauveur », mais à « notre Dieu Sauveur » du v. 4.
L’Esprit Saint ne s’est pas
borné à nous communiquer une vie nouvelle, car Dieu l’a répandu richement
sur nous, et Jésus Christ,
notre Sauveur, est Celui duquel nous le tenons directement. C’est Lui qui,
« ayant reçu de la part du Père l’Esprit Saint promis, a répandu » , dit l’apôtre, « ce que vous voyez et entendez » (Actes
2:33). Il est répandu richement,
sans
compter, car « Dieu ne donne pas l’Esprit par mesure » (Jean 3:34) , et nous avons maintenant « la vie en abondance » (Jean
10:10).
Afin qu’ayant été justifiés par Sa grâce nous devinssions héritiers selon
l’espérance de la vie éternelle.
Le mot afin
se rapporte à la fois au « lavage » et au « renouvellement », et
en est la conséquence. C’est par ces deux choses : la purification et le
don du Saint Esprit que nous devenons héritiers
selon l’espérance de la vie éternelle. Ayant été justifiés par la grâce du
Dieu Sauveur (non par des oeuvres de justice), et possédant la vie éternelle,
en vertu du salut qu’il nous a acquis par le lavage et le renouvellement, nous
sommes héritiers selon l’espérance de cette vie éternelle dont l’apôtre a parlé
au chap. 1:2. — Il faut mourir en Christ pour avoir part au royaume du Dieu
Sauveur, et c’est à quoi correspond le lavage de la régénération ; mais il
faut avoir reçu la puissance d’une vie nouvelle pour être héritier selon
l’espérance de cette vie, et c’est à quoi correspond le renouvellement de
l’Esprit Saint. Le lavage de la mort en Christ nous sépare entièrement de notre
ancienne position ; la résurrection avec Christ et la vie nouvelle que
nous possédons en Lui, nous introduisent dans une position nouvelle comme
héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ.
Nous venons, dans les vers. 5 à 7 de passer en revue les sept caractères qui appartiennent au salut, tandis que dans les v. 1 à 2 nous avions passé en revue les sept traits caractéristiques des enfants de Dieu et au v. 3 les sept traits par lesquels le monde se distingue. Les sept caractères du salut sont donc les suivants : 1° Les oeuvres de justice en sont exclues. 2° Il dépend de la miséricorde du Dieu Sauveur. 3° Il a lieu par le lavage de la régénération, et 4° par le renouvellement de l’Esprit Saint. 5° Cet Esprit a été répandu richement sur nous. 6° Nous sommes justifiés par la grâce du Dieu Sauveur. 7° Nous sommes devenus héritiers de la vie éternelle. Tant il est vrai que dans cette épître, pour ne parler que d’elle, le chiffre 7 est le chiffre des choses complètes auxquelles il est impossible de rien ajouter !
« Cette parole est certaine, et je veux que tu insistes sur ces choses, afin que ceux qui ont cru Dieu s’appliquent à être les premiers dans les bonnes oeuvres ; ces choses sont bonnes et utiles aux hommes ». (v. 8).
Cette parole est certaine
: c’est-à-dire la parole de la miséricorde de Dieu qui sauve et justifie,
et qui donne à ceux qui ont cru la vie éternelle comme héritage : la
jouissance de ses pleins résultats dans la gloire.
La parole de la loi a été ferme
: elle a toujours pour résultat « une juste rétribution » (Hébr.
2:2) ; la parole de la grâce est certaine.
Lorsque ce terme est employé, il est toujours
question de la grâce, et les « paroles certaines » sont très fréquentes dans
les épîtres à Timothée et à Tite.
En 1 Tim. 1:15, la « parole certaine
et digne de toute acceptation »
est que Christ est venu dans ce monde pour sauver des pécheurs.
Au chap. 3:1, de cette même
épître, c’est « une parole certaine
» que celui qui « aspire à la
surveillance désire une oeuvre bonne ». Aspirer à cette charge, c’est désirer
être soi-même irréprochable (v. 2) pour conduire les autres dans le même
chemin, à la gloire de Dieu, fonction qui, certes, n’est pas indifférente, mais
a une haute valeur, puisqu’il s’agit de tout le témoignage pratique de la
maison de Dieu ici-bas. Aussi cette fonction est-elle appelée « une bonne
oeuvre ».
Au chap. 4:8, l’apôtre dit
que « la piété est utile à toutes choses, ayant la promesse de la vie présente
et de la vie qui est à venir », et il ajoute : « Cette parole est certaine
et digne de toute acceptation ».
Il accentue ainsi, comme au chap. 1:15, la certitude de la parole qui engage à
la piété,
selon l’enseignement divin.
L’apôtre ajoute qu’il travaillait et supportait l’opprobre en vue de cela. Pour
enseigner la piété aux autres, il faut être soi-même un modèle de piété, en
espérant dans le Dieu vivant qui est le Conservateur de tous les hommes,
spécialement des fidèles.
En 2 Tim. 2:10-12, nous
trouvons une « parole certaine
»
qui embrasse toute l’oeuvre de la rédemption : « le salut qui est
dans le Christ Jésus, avec la gloire éternelle » ; la mort et la vie avec
Lui ; les souffrances et le règne avec Lui. N’est-ce pas un programme
complet de certitude ?
Ici, en Tite 3:8, la « parole certaine » a beaucoup de rapport avec celle de 2 Tim. 2:11, car il s’agit du salut, de l’oeuvre par laquelle il nous est acquis, du don de l’Esprit, de la vie, et de l’héritage éternels. Cela aussi est un programme complet.
Et je veux que tu insistes sur ces choses.
L’enseignement de Tite devait insister
particulièrement et revenir sans cesse sur les choses qui sont le fondement
même du salut. Au chap. 2:15, il devait annoncer
les choses enseignées par la grâce qui apporte le salut. Ces choses avaient
trait à toute la vie pratique du chrétien. Tite devait reproduire cet
enseignement. Il en est à peu près de même ici : Tite devait insister sur
le fondement même du salut qui a pour origine l’amour de Dieu et sa miséricorde
en Christ, ainsi que sur l’oeuvre qu’Il accomplit dans le coeur des croyants.
Le résultat de cet
enseignement était que ceux qui avaient
cru Dieu devaient s’appliquer à être les premiers dans les bonnes ouvres,
résultat
pratique au premier chef, et sur lequel nous ne pouvons assez insister, en
considérant dans cette courte épître les fruits pratiques de la bonne doctrine
et du sain enseignement dans la maison de Dieu. Tel, du reste, devrait toujours
être le christianisme. Nous ne sommes pas créés de nouveau, justifiés par grâce,
héritiers selon l’espérance de la vie éternelle, pour jouir simplement de ces
privilèges, mais pour qu’ils exercent une influence bénie et puissante sur
notre marche et sur les moindres détails de notre conduite dans ce monde. La
connaissance de ces choses doit nous faire marcher
en tête
dans les bonnes oeuvres, soit en la présence de nos frères, soit
devant le monde. Plus la connaissance de l’oeuvre de la grâce est grande, plus
brillant doit être le témoignage, et plus intense l’activité chrétienne.
Puissent tous les enfants de Dieu qui sont à l’école de la grâce répondre à
cette obligation !
Nous
ne reviendrons pas sur la question des bonnes
oeuvres
déjà traitée en détail. La quantité de passages qui les mentionnent
dans le Nouveau Testament, montre quelle en est l’importance (*). Remarquons seulement qu’une vie chrétienne sans
bonnes oeuvres est une vie inutile pour Christ. Quel réveil pour les chrétiens,
lesquels n’ont pas compris que celui qui vit de la vie de Christ ne peut plus
« vivre pour lui-même » (2 Cor. 5:15) , quand ils
découvriront le rôle insignifiant que leur Seigneur et Sauveur, et l’activité pour Lui
, ont joué dans leur
existence !
(*) Nous citons tous ces passages pour les chrétiens qui désirent en faire l’étude : Matth. 5:16 ; 26:10 ; Marc 14:6 ; Jean 10:32 ; Actes 9:36 ; Rom. 2:7 ; 13:3 ; 2 Cor. 9:8 ; Éph. 2:10 ; Phil. 1:6 ; Col. 1:10 ; 2 Thess. 2:17 ; 1 Tim. 2:10 ; 3:1 ; 5:10, 25 ; 6:18 ; 2 Tim. 2:21 ; 3:17 ; Tite 1:16 ; 2:7, 14 ; 3:1, 8, 14 ; Héb. 10:24 ; 13:21 ; 1 Pierre 2:12.
Ces choses sont bonnes et utiles aux hommes.
Elles sont bonnes aux yeux de Christ et aux yeux des fidèles, mais de plus elles sont « utiles aux hommes ». L’oeuvre de Christ est utile aux hommes, puisque sa grâce est apparue à tous les hommes, ainsi que l’amour de Dieu envers eux (2:11 ; 3:4), mais maintenant nous avons à continuer cette oeuvre de grâce par notre conduite au milieu des hommes, afin de leur en démontrer la valeur. L’oeuvre de l’évangélisation dans ce monde, l’annonce de l’amour de Dieu envers les pécheurs est d’une importance illimitée, mais la conduite des chrétiens est souvent une évangélisation beaucoup plus puissante que les paroles qu’ils pourraient prononcer. (Voyer 1 Thess. 1:8). Voilà ce que Tite devait rechercher, mais il avait aussi des choses à éviter :
« Mais évite les folles questions et les généalogies, et les contestations, et les disputes sur la loi, car elles sont inutiles et vaines » (v. 9).
Si les premières choses
étaient utiles,
celles-ci étaient inutiles.
Les généalogies
(*), se rapportent à des doctrines judaeo-platoniciennes qui de bonne heure avaient envahi le
christianisme (1 Tim. 1:4). Dans cette même catégorie rentraient les folles questions
soulevées par des gens
à propre volonté qui ne souffraient pas d’être contredits par d’autres (2 Tim.
2:23). Les contestations
en étaient
la suite. Les disputes sur la loi
sont ces minuties, jeux de l’intelligence rabbinique, qui traitait la loi comme
matière à discussion, au lieu de l’appliquer à la conscience. Ces disputes sont
inutiles et vaines
; le résultat pour les âmes est nul,
car toute vérité qui n’amène pas les hommes à la connaissance de Dieu et à une
vie de sainteté, est sans valeur. Ce n’est que « vain babil » (1 Tim. 1:6).
(*) Voyez note à 1:14, page 31.
« Rejette l’homme sectaire après une première et une seconde admonestation, sachant qu’un tel homme est perverti et pèche, étant condamné par lui-même » (v. 10-11).
Toutes les choses qui
précèdent, Tite devait les éviter, sans y voir -- quelque blâmables qu’elles
fussent, et pour le moins inutiles et vaines — des cas d’exclusion. Il
suffisait de se tenir à part des « folles questions » et d’y rester étranger pour
voir tarir ce courant malsain qui cherchait à s’infiltrer parmi les saints. Il
y avait cependant des cas où Tite, auquel l’apôtre avait conféré l’autorité
pour mettre « en bon ordre » le fonctionnement de l’assemblée, devait user de
cette autorité pour empêcher les sectes.
Les divisions
pouvaient être occasionnées au sein de l’Assemblée par
les choses mentionnées au v. 9 : « contestations, disputes sur la loi »,
etc., sans que l’unité du corps de Christ en fût attaquée (1 Cor. 1:10 ;
11:18). Les sectes
séparaient les
frères de l’assemblée elle-même, et l’homme qui les produisait devait être
traité sans ménagement. Il cherchait à grouper autour de lui
un certain nombre de fidèles, se constituant lui-même
comme centre de rassemblement. Il reniait ainsi pratiquement l’unité du corps
de Christ et le seul centre de cette unité qui est Jésus lui-même. Les
doctrines d’un tel homme pouvaient fort bien n’être pas des doctrines antiscripturaires, auxquelles on a l’habitude de donner le
nom d’hérésies. Il suffisait de sortir une vérité de sa place en lui donnant un
rôle exagéré dans l’ensemble des doctrines scripturaires, et de réunir les chrétiens
autour de ce principe, qu’il fût vrai ou faux, et autour de l’homme qui
l’incarnait, pour créer une secte, qui se séparait de l’Assemblée de Christ.
Celui qui prend cette place et qui devient par là le chef d’un parti, ou d’une
« église » de sa façon, doit être rejeté sans ménagement, car il a rompu l’unité
et fait outrage à Christ, Chef du corps ; mais il ne doit pas être rejeté
sans une admonestation préalable, ayant pour but de le retirer de sa mauvaise
voie et de prévenir une rupture dans l’Assemblée. Il faut aussi que
l’admonestation ne soit pas faite précipitamment. La première doit être suivie
d’une seconde. Elles doivent être bien distinctes l’une de l’autre, et
solennelles. Tite savait (v. 11) en agissant avec autorité, mais avec mesure,
qu’un tel homme était perverti
; son âme était détournée du bien
vers le mal, et s’il ne se repentait pas à la première répréhension, c’est
qu’il péchait,
le sachant et le
voulant ; or le péché, la propre volonté, est la condamnation de l’homme par lui-même.
« Quand j’enverrai Artémas auprès de toi ou Tychique, empresse-toi de venir auprès de moi à Nicopolis, car j’ai résolu d’y passer l’hiver. Accompagne avec soin Zénas, le docteur de la loi, et Apollos, afin que rien ne leur manque ; et que les nôtres aussi apprennent à être les premiers dans les bonnes oeuvres pour les choses nécessaires, afin qu’ils ne soient pas sans fruit.
Tous ceux qui sont avec moi te saluent. Salue ceux qui nous aiment dans la foi. Que la grâce soit avec vous tous » (v. 12-15).
Chaque parole de l’Écriture sainte a de l’importance. Après en avoir donné tant de preuves dans cette Étude, nous en avons un dernier exemple dans les quelques versets qui terminent cette épître.
Nous y voyons d’abord que les fonctions de Tite en Crète, contrairement aux assertions des théologiens, n’avaient aucun caractère permanent. Sa mission achevée, et quand Artémas ou Tychique seraient venus auprès de lui, Tite devait se hâter de rejoindre, à Nicopolis, l’apôtre qui avait résolu d’y passer l’hiver. Peut-être est-il fait allusion à ce voyage de Tite en 2 Tim. 4:10, mais dans ce cas en l’absence de l’apôtre qui, de nouveau prisonnier à Rome, savait que le temps de son départ était arrivé.
Quant à Tychique,
il est toujours représenté comme envoyé par Paul pour renseigner les assemblées
au sujet de ses propres circonstances et rapporter à l’apôtre des nouvelles de
leur état. Zénas, le docteur de la loi (*), et Apollos sont annoncés comme étant sur le
point de visiter la Crète. Or Tite n’avait pas à se confiner à sa mission
spéciale, mais à prendre soin d’eux, en sorte que rien ne leur manquât. Paul
montre ici une sollicitude particulière pour ceux qui n’étaient pas
spécialement associés avec lui dans l’oeuvre. Mais si Tite devait montrer ce
zèle pour les frères étrangers qui ne faisaient pas partie de l’entourage de
l’apôtre, « les nôtres
» aussi, dit-il, c’est-à-dire tous
les saints en Crète, devaient apprendre (et comment ne l’auraient-ils pas
appris, ayant un tel exemple sous les yeux) (voyez aussi 2:6-7), à être les premiers dans les bonnes oeuvres pour
les choses nécessaires.
Ces « choses nécessaires » n’étaient pas seulement de
pourvoir aux besoins des pauvres, mais aux besoins des fidèles serviteurs de
Christ, dont il est dit autre part qu’ils étaient « étrangers » et qu’ils étaient
« sortis pour le Nom » (3 Jean 7). Ces bonnes oeuvres étaient une fonction qui
incombait à tous
les fidèles et sans
laquelle ils auraient été sans fruit.
(*) Probablement « le jurisconsulte » plutôt que « le docteur de la loi mosaïque ».
On voit au v. 15 que l’apôtre
était encore entouré, à ce moment-là, des frères qui étaient son cortège
habituel, tandis que, dans la deuxième épître à Timothée, tous l’avaient
abandonné, sauf Luc, son fidèle compagnon et serviteur (2 Tim. 1:15 ;
4:10). L’apôtre lui-même salue ceux qui l’aiment, dans cette foi commune qui
lie les chrétiens entre eux, ainsi qu’avec Dieu et avec Christ. Son dernier
souhait, qui devrait être continuellement le nôtre, est que la grâce
soit avec tous
les saints.