Jacques-André Monard
Table des matières :
1 - Chapitre 1 — Introduction et vue d’ensemble du sujet
1.3 - Crucifiés avec Christ et ressuscités avec lui
1.3.2 - L’appropriation de ces faits, par la foi
1.4 - Différents aspects de notre mort avec Christ
1.4.1 - Ce qui nous sépare du monde
1.4.2 - Ce qui nous délivre du péché
1.4.3 - Ce qui nous délivre de la loi
1.5 - Je suis crucifié avec Christ
1.6 - Liberté chrétienne et déviations
2 - Chapitre 2 — Le croyant et le monde
2.2 - Le jugement de ce monde et de son chef
2.3 - Le monde m’est crucifié, et moi au monde
2.4 - Dans le monde, mais pas du monde
2.5 - Quelques remarques pratiques
2.5.1 - Un monde tolérant et séduisant
2.5.2 - Un témoignage mal supporté par le monde
2.5.4 - L’extérieur et l’intérieur
2.5.5 - Distinctions nécessaires
2.6 - Des témoins de Christ dans le monde
2.7 - L’exemple du Seigneur Jésus, le témoin fidèle
3 - Chapitre 3 — Le croyant et le péché — Romains 6
3.2 - Notre vieil homme crucifié
3.3 - Nous tenir pour morts au péché
4 - Chapitre 4 — La chair et l’Esprit — Galates 5
4.2 - Le combat entre la chair et l’Esprit
4.3 - Les oeuvres de la chair et le fruit de l’Esprit
5 - Chapitre 5 — La chair et le vieil homme
5.1 - Le vieil homme et le nouvel homme
5.2 - Trompeur par-dessus tout et incurable
5.3 - Connaître ce qu’il y a dans notre coeur
5.4 - Confiance en soi-même et confiance en Dieu
6 - Chapitre 6 — Le croyant et la loi — Romains 7
6.1 - Mort à la loi (Rom. 7:1-6)
6.2 - La loi entraîne condamnation et mort (Rom. 7:7-13 et Gal. 2:19, 20)
6.3 - Combat et défaite (Rom. 7:14-25)
6.5 - Une seule personne, avec sa responsabilité devant Dieu
6.6 - Le dernier verset de Romains 7
7 - Chapitre 7 — Le croyant affranchi, conduit par l’Esprit — Romains 8
7.1 - Affranchi de la loi du péché (v. 1-11)
7.2 - La juste exigence de la loi est accomplie
7.3 - Dans la chair ou dans l’Esprit
8 - Chapitre 8 — Le croyant mort et ressuscité avec Christ — Colossiens 2:8 à 3:11
8.1 - Identifiés avec Christ dans sa mort et dans sa résurrection
8.5 - Le nouvel homme renouvelé en connaissance
8.6 - Quelques mots concernant l’épître aux Éphésiens
9 - Chapitre 9 — La vie de Christ dans le croyant
9.2 - La position et la marche
9.3 - La vie de Jésus manifestée en nous
9.3.2 - Un trésor dans des vases de terre
9.3.3 - Porter dans le corps la mort de Jésus…
9.3.4 - …afin que la vie de Jésus soit manifestée
Quatre passages, dans le Nouveau Testament, nous présentent le croyant comme crucifié avec Christ :
« Notre vieil homme a été
crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit annulé, pour que nous ne
servions plus le péché
» (Rom. 6:6).
« Car moi, par la loi, je
suis mort à la loi, afin que je vive à Dieu. Je suis crucifié avec
Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ; — et ce que
je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu,
qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi
» (Gal. 2:19, 20).
« Or ceux qui sont du
Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises
» (Gal. 5:24).
« Qu’il ne m’arrive pas à
moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par
laquelle le monde m’est crucifié, et moi au monde
» (Gal. 6:14).
En plus, la mort du croyant avec Christ — sans mention explicite de la crucifixion — est présentée dans plusieurs autres passages. Cet aspect essentiel de la vérité chrétienne est développé dans les épîtres aux Romains, aux Galates et aux Colossiens. On le trouve occasionnellement ailleurs. Les épîtres aux Galates et aux Colossiens ont été écrites pour corriger des enseignements erronés qui s’introduisaient parmi les chrétiens. L’épître aux Romains, quant à elle, a été écrite dans le but d’instruire ses destinataires et de les affermir dans la vérité.
Tout naturellement, la plus grande partie de notre texte va donc être un exposé des chapitres qui traitent ce sujet, dans les trois épîtres. Nous porterons aussi notre attention sur le sujet qui lui est intimement lié : notre résurrection avec Christ.
L’importance de l’enseignement des épîtres concernant notre mort et notre résurrection avec Christ doit être soulignée. Cet enseignement est un des fondements de la vie chrétienne pratique, dans la liberté et dans la sainteté, sur les traces du Seigneur Jésus. Il conduit à l’affranchissement du croyant — aussi bien à l’affranchissement du joug du péché que de celui du légalisme.
La croix de Christ est au centre de l’histoire du temps et de l’éternité. Elle a toujours été dans les pensées de Dieu : Christ était « l’agneau sans défaut et sans tache, préconnu dès avant la fondation du monde » (1 Pierre 1:19). C’est vers la croix que Dieu avait regardé, dès les premiers holocaustes ; c’est grâce à elle qu’il avait pu pardonner à ceux qui se repentaient, déjà bien avant la venue de Christ sur la terre. Et c’est vers elle que les regards des rachetés seront tournés durant l’éternité (Apoc. 5:6).
Aussi la crucifixion de Jésus
est-elle le thème central de la prédication de l’évangile : « Je n’ai pas
jugé bon de savoir quoi que ce soit parmi vous, sinon Jésus Christ, et Jésus
Christ crucifié
», dit l’apôtre Paul (1 Cor. 2:2). Et si « la parole de la croix est folie pour ceux qui
périssent », pour nous qui obtenons le salut, elle est « la puissance de Dieu et
la sagesse de Dieu » (1 Cor. 1:18,
24).
La croix — l’oeuvre accomplie par Christ à la croix — est le fondement de notre salut ; aucun vrai chrétien ne peut en douter. Mais avons-nous réalisé qu’elle est aussi le fondement de notre vie chrétienne pratique ?
Seigneur, tu courbas la tête :
Tu pris mon faix sur toi ;
Et, pour acquitter ma dette,
Tu te livras pour moi.
Plus de crime
Qui m’opprime ;
Plus de fardeau pour moi !
De courroux la coupe emplie
A débordé pour toi.
Tu la bus jusqu’à la lie ;
Elle est vide pour moi.
Ton calice,
Ton supplice
Sont le salut pour moi !
Ta mort effaça ma peine ;
Je suis mort avec toi.
Vainqueur, tu rompis ma chaîne,
Et je vis avec toi.
Ta venue
Sur la nue,
C’est la gloire avec toi.
(Hymnes et Cantiques, N° 173)
Dans chacun des trois premiers évangiles, nous
assistons au développement progressif de l’hostilité des Juifs contre le
Seigneur Jésus. Le moment arrive où Jésus se met à parler ouvertement à ses
disciples de son rejet par les chefs de la nation, de ses souffrances, de sa
mort et de sa résurrection. Et immédiatement après, dans les trois évangiles,
le Seigneur Jésus parle d’une croix
. Il ne dit pas explicitement qu’il
sera cloué sur une croix, mais il déclare : « Si quelqu’un veut venir après
moi, qu’il se renonce soi-même, et qu’il prenne sa croix,
et me
suive : car quiconque voudra sauver sa vie la perdra ; et quiconque
perdra sa vie pour l’amour de moi, la trouvera » (Matt. 16:24, 25 ; voir aussi Marc 8:34, 35 et Luc 9:23).
Dans le troisième évangile, le Seigneur dit même : « qu’il prenne sa croix chaque
jour
».
Le Seigneur adresse des paroles semblables au
jeune homme riche : « Viens, suis-moi, ayant chargé la croix
» (Marc 10:21). Plus tard, alors que « de
grandes foules allaient avec lui » il se tourne vers elles et leur dit :
« Quiconque ne porte pas sa croix,
et ne vient pas après moi, ne peut
être mon disciple » (Luc 14:27).
Et à une autre occasion encore, nous l’entendons dire : « Celui qui ne
prend pas sa croix
et ne vient pas après moi, n’est pas digne de moi »
(Matt. 10:38).
Ce sont des paroles
extrêmement fortes. Le Seigneur utilise ici un langage figuré, comme souvent
ailleurs. Que veut-il donc nous dire, lorsqu’il nous demande de façon si
pressante de porter notre croix
et de le suivre ? Le monde chrétien
a gravement dévalorisé ces paroles. On entend dire : chacun a sa part de
souffrances, chacun doit porter sa croix ! Mais ce n’est pas du tout ce
que le Seigneur veut dire. Il fait sans aucun doute allusion à la croix qu’il
devra porter et sur laquelle il sera cloué. Nous savons en effet qu’à l’issue
du procès où il a été condamné à mort, « il sortit portant sa croix,
et
s’en alla au lieu appelé lieu du crâne, … où ils le crucifièrent » (Jean 19:17).
Quel spectacle que celui d’un homme portant sa croix ! Celui qui marchait ainsi était publiquement couvert de honte. Voilà un crucifié ! pouvait-on dire. C’était un homme voué à la mort, à la mort honteuse de la croix.
Et le Seigneur nous appelle tous à le suivre dans un tel chemin !
La foi des disciples avait
discerné en Jésus l’envoyé de Dieu, le Messie promis. Leurs pensées étaient
fixées sur le royaume
qu’il allait établir, et sur leur part glorieuse
dans ce royaume. Mais le rejet de Jésus par la nation impliquait qu’avant
l’établissement de son royaume, il y avait maintenant devant lui une croix.
Or il en était de même pour eux. Suivre
Jésus — ce à quoi il ne se lasse
de les appeler et de les encourager — c’était aussi porter sa croix,
la
prendre, la charger
. C’était accepter de perdre sa vie
pour l’amour
de lui, c’était haïr sa propre vie
(Luc 14:26), c’était encore renoncer à tout ce que l’on avait
(Luc 14:33) et se renoncer
soi-même
(Matt. 16:24).
Nous qui avons trouvé en
Jésus notre Sauveur, nous désirons sans doute le servir
. C’est
bien ! Mais il nous dit : « Si quelqu’un me sert
, qu’il me suive !
et où je suis, moi, là aussi sera mon serviteur » (Jean 12:26). Acceptons-nous, au fond de nous-mêmes, la place de rejet
et d’opprobre qui a été la sienne dans ce monde ? Acceptons-nous d’être,
nous aussi, des crucifiés ?
Ce que le Seigneur nous demande dans tous ces passages nous interpelle fortement, même si nous n’en comprenons pas entièrement la portée. Le lecteur attend sans doute une explication plus claire de l’expression « porter sa croix ». Et les pages qui suivent devraient contribuer à éclairer le sujet. Mais comment remplacer les paroles du Seigneur — des paroles d’un tel poids — par d’autres mots, ou par des mots plus simples, sans les affaiblir ? Pour ceux qui les entendaient de la bouche même de Jésus, elles pouvaient aussi paraître énigmatiques. Et pourtant ils devaient sentir tout ce qu’elles avaient d’impérieux.
Bien des enseignements que le Seigneur Jésus a
donnés à ses disciples ne pouvaient leur être complètement expliqués avant sa
mort, sa résurrection, et son ascension dans le ciel. Alors il leur enverrait
le Saint Esprit pour les conduire dans toute la vérité (Jean 16:12, 13). Ce qu’il a exprimé de
façon un peu mystérieuse quand il a parlé de « porter sa croix » va être
abondamment développé dans les épîtres, particulièrement celles de l’apôtre
Paul. C’est le grand sujet de notre mort avec Christ
. Nous en ferons un
survol dans ce chapitre, puis reprendrons les choses plus en détail dans les
chapitres qui suivent.
Il y a d’abord un grand fait
, vrai de
tous ceux qui ont réellement cru au Seigneur Jésus. Ils sont « morts avec Christ
». Ils ont
été « crucifiés avec Christ
».
Ils ont été « identifiés avec Christ
»
dans sa mort sur la croix. Cela implique qu’ils ne sont plus dans la
condition dans laquelle ils étaient par naissance, comme enfants d’Adam. Ils ne
font plus partie de cette race caractérisée de façon irrémédiable par le péché.
Détachés de la race d’Adam, ils sont liés à un autre chef de race, Christ. (Cf.
Rom. 6:5-8 ; Gal. 2:20 ; Col. 2:20.)
Un autre grand fait
,
intimement lié au premier, c’est qu’ils ont été « ressuscités avec Christ
». Ils vivent de la vie de Christ
ressuscité. (Cf. Éph. 2:5 ;
Col. 3:1.)
Les privilèges dont nous
venons de parler appartiennent au chrétien, qu’il les connaisse ou non — qu’il
en éprouve les effets ou non. Ils concernent ce qu’on appelle la position
chrétienne.
Notre mort et notre résurrection avec Christ ne sont pas des vérités théoriques, abstraites. Bien au contraire, saisir cela est à la base d’une vie chrétienne pratique à la suite du Seigneur Jésus.
En Romains 6, après avoir exprimé le fait de
base sous différentes formes — « nous avons été identifiés avec [Christ] dans la
ressemblance de sa mort » (v. 5), « notre vieil homme a été crucifié avec lui »
(v. 6), « nous sommes morts avec Christ » (v. 8) —, l’apôtre ajoute : « De
même vous aussi, tenez-vous vous-mêmes pour morts
au péché, mais pour vivants
à Dieu dans le Christ Jésus » (v. 11). « Tenez-vous… », c’est-à-dire
considérez-vous de cette manière. Dieu vous considère comme morts avec Christ.
Voyez donc les choses comme Dieu les voit. Tenez pour vrai ce que Dieu vous
dit, sans vous occuper de vos propres sentiments, sans faire de raisonnements.
Vous ne voyez pas que votre vieil homme a été crucifié avec Christ ? Vous
ne voyez pas davantage que le sang de Christ a effacé vos péchés ! Alors,
que votre foi se repose simplement sur la parole de Dieu, qui déclare qu’il en
est ainsi !
Il s’agit donc de s’approprier les déclarations de Dieu concernant les grands faits du christianisme, de les saisir par la foi. Si nous le faisons, la vérité aura toute sa puissance dans nos âmes, et produira des résultats pratiques dans notre vie de tous les jours.
Prendre notre croix, la
charger,
la porter
en
suivant le Seigneur Jésus, c’est
accepter au plus profond de nous-mêmes les conséquences pratiques du fait que nous
sommes crucifiés avec Christ.
C’est le suivre, comme étant nous-mêmes des crucifiés
.
En ce qui concerne les humains, la mort
n’exprime pas l’idée d’une cessation d’existence, mais la pensée d’une séparation
ou de la rupture d’une relation
. La mort dans son sens le plus immédiat,
la « mort physique », est la séparation de l’âme et du corps. Mais l’Écriture
utilise aussi le terme de « mort » dans d’autres sens. Par exemple, l’homme
naturel, totalement éloigné de Dieu, est considéré comme « mort dans ses péchés »
(Éph. 2:1).
La parole de Dieu nous
présente la mort — ou la crucifixion — du croyant avec Christ sous différents
aspects : en rapport avec le monde
, avec le péché
et
avec la loi
.
La croix de Christ constitue une barrière
morale
absolue entre le monde et les chrétiens. Ainsi que le Seigneur l’a
dit : « Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde » (Jean 17:16). Selon les paroles de Paul aux
Galates, il y a deux crucifiés,
le monde et moi : « Qu’il ne
m’arrive pas à moi de me glorifier, sinon en la croix de notre Seigneur Jésus
Christ, par laquelle le monde m’est crucifié
, et moi au monde
»
(Gal. 6:14).
L’homme naturel est esclave, même s’il prône sa liberté et son indépendance de Dieu. Il est esclave du péché et de Satan (Jean 8:34 ; Rom. 6:6, 12, 17 ; Héb. 2:15). Il est asservi à ses propres convoitises, et à travers elles, au diable lui-même. Le salut que Dieu nous offre n’est pas seulement le pardon des péchés que nous avons commis et l’assurance d’une félicité éternelle dans sa présence, c’est la délivrance de l’esclavage actuel du péché.
Cette délivrance est fondée
sur notre mort avec Christ. Ce que nous étions par nature, comme hommes
pécheurs, a été cloué à la croix. Le vieil homme ne méritait pas autre chose
que le jugement de Dieu. Ce jugement ayant été exécuté, nous sommes devant Dieu
dans une toute nouvelle condition : nous sommes en Christ, et ainsi
agréables à Dieu. De plus, la crucifixion du vieil homme nous libère de la
domination du péché. « Notre vieil homme
a été crucifié
avec lui,
afin que le corps du péché soit annulé, pour que nous ne servions plus le
péché » (Rom. 6:6). « Or ceux qui
sont du Christ ont crucifié la chair
avec les passions et les
convoitises » (Gal. 5:24).
Le peuple d’Israël avait reçu la loi de Dieu
donnée par Moïse. Celle-ci était un test de l’homme dans la chair — de l’homme
tel qu’il est par nature. L’homme pourrait-il accomplir les commandements de
Dieu, et marcher d’une manière qui lui plaise ? L’histoire d’Israël, tout
au long de l’Ancien Testament, donne la réponse. La loi n’a fait que stimuler
le péché ; l’interdiction et l’obligation ont stimulé la désobéissance. De
sorte que « nulle chair ne sera justifiée devant [Dieu] par des oeuvres de loi »
(Rom. 3:20). La justification —
dont l’homme a un besoin absolu pour se présenter devant Dieu — c’est la grâce
qui l’apporte.
Il faut donc que l’homme soit
totalement délivré du joug de la loi et placé dans la liberté. Cela était vrai
en particulier pour les Juifs qui étaient sous la loi, et c’est vrai pour
l’homme en général — qui est facilement enclin à se placer lui-même sous un
joug de commandements. Cette libération, c’est la croix de Christ qui l’a
opérée. « Car moi, par la loi, je suis mort à la loi
, afin que je vive à
Dieu » (Gal. 2:19). « Vous avez
été mis à mort à la loi
par le corps du Christ » (Rom. 7:4). « Nous avons été déliés de la
loi, étant morts
dans ce en quoi nous étions tenus » (v. 6). Ainsi, le
chrétien n’est pas sous la loi,
mais sous la grâce
(Rom. 6:15). La loi n’est ni son moyen de
salut, ni sa règle de vie.
« Je suis crucifié
avec Christ ; et je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi ; — et
ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans la foi, la foi au Fils
de Dieu, qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi
» (Gal. 2:20).
La manière dont l’apôtre Paul s’exprime ici est bien remarquable. Ce qu’il dit est vrai en principe de tous les chrétiens, mais il parle comme s’il était concerné lui seul. Nous n’avons pas ici un docteur qui expose des vérités générales, mais un chrétien qui réalise pour lui-même, dans son coeur, la puissance de la vérité qu’il présente.
« Je suis crucifié avec
Christ
». Voilà un homme qui avait chargé sa croix, et qui suivait
Christ ! Son secret, c’est qu’il avait lui-même « été saisi par le Christ »
(Phil. 3:12). L’amour du Seigneur Jésus remplissait son coeur et le faisait
déborder. Il ne parle pas de son amour pour le Seigneur, qui certainement était
très profond et très vivant ; il ne parle que de l’amour du Seigneur pour
lui. Ce que le Seigneur a fait pour lui occupe ses pensées, engage ses
affections, et fait passer son moi
à l’arrière-plan. « Je ne vis plus,
moi, mais Christ vit en moi
».
Quelle place le moi
tient-il dans nos vies ? Nous avons tellement tendance à lui donner de
l’importance, et à en faire le centre de nos pensées, de nos préoccupations, de
nos efforts. Paul s’oubliait lui-même. Christ était l’objet de son coeur. Comme
tout croyant, il possédait la vie de Christ, mais cette vie le remplissait à
tel point qu’il pouvait dire : « Christ vit en moi
». C’était vrai
aussi dans un sens pratique. Si notre moi
est mis en avant, la vie de
Jésus ne peut être vue en nous. Si nos pensées sont orientées vers nous-mêmes,
comment oserions-nous dire : Christ vit en moi ?
« Et ce que je vis
maintenant dans la chair
(*), je le vis dans la foi, la foi au Fils de Dieu
… » La vie de Paul
était une vie de foi, l’objet de sa foi étant le Fils de Dieu qui l’avait aimé
et s’était livré lui-même pour lui. Quel tableau d’un coeur entièrement attaché
à son Sauveur, un coeur non partagé ! Quelle chaleur communicative dans
les paroles de l’apôtre ! Le souvenir de ce qu’il avait été avant sa
conversion était constamment en lui (**). Ce souvenir humiliant entretenait un sentiment profond de l’immense grâce
de Christ envers lui et une absence totale de confiance en lui-même. Il
disait : « Pour moi, vivre, c’est Christ » (Phil. 1:21). Christ était sa
seule raison de vivre.
(*) L’apôtre parle ici simplement de son corps.
(**) Cf. 1 Tim. 1:12-16 ; 1 Cor. 15:9 ; Gal. 1:13 ; Phil. 3:6
Où en sommes-nous
nous-mêmes ? La recherche de nos intérêts terrestres, de notre bien-être,
de notre propre gloire, de notre propre satisfaction — et de tant d’autres
choses qui ne sont pas Christ — nous animent souvent. Même dans le service pour
le Seigneur, notre moi
tend à occuper une place de premier plan.
Oh ! que, dans sa grâce, le Seigneur nous accorde d’être les imitateurs de
ce serviteur qui avait « reçu miséricorde… pour être fidèle » (1 Cor.
7:25) !
Les deux versets qui suivent attirent notre
attention sur deux dangers opposés : « Christ nous a placés dans la liberté
en nous affranchissant ; tenez-vous donc fermes, et ne soyez pas de
nouveau retenus sous un joug de servitude
» (Gal. 5:1). « Car vous, frères, vous avez été appelés à la liberté
;
seulement, n’usez pas de la liberté
comme d’une occasion pour la
chair
» (v. 13).
Satan s’est toujours efforcé
de détourner les croyants d’une juste compréhension de la grâce où l’oeuvre de
Christ les a placés. Tantôt il les a conduits à mêler la loi avec la grâce, et
à se priver ainsi de la vraie liberté chrétienne — c’est le légalisme
.
Tantôt, à l’inverse, il les a incités à abuser de la grâce et à s’abriter
derrière elle pour se permettre une marche selon la chair — c’est le laxisme
.
Diverses déviations sont déjà apparues du temps des apôtres, et leur ont fourni
l’occasion de nous donner, de la part de Dieu, les enseignements correctifs
nécessaires. L’épître aux Galates en est un exemple particulier.
L’épître aux Colossiens a été écrite à des chrétiens qui étaient en danger de se laisser entraîner par des docteurs qui mêlaient au christianisme les enseignements juifs et la philosophie. L’apôtre met ces croyants très sérieusement en garde contre ce mouvement. « Prenez garde que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par de vaines déceptions, selon l’enseignement des hommes, selon les éléments du monde, et non selon Christ » (2:8).
Les dangers de la philosophie
ne sont pas moindres qu’autrefois, au contraire ! La psychologie
,
très en vogue aujourd’hui, a beaucoup pénétré dans les milieux chrétiens. Si,
par l’une ou par l’autre, nous pensons pouvoir enfermer la pensée de Dieu dans
les cadres de la logique humaine, nous nous égarerons à coup sûr.
Une caractéristique de
certains amalgames de psychologie et de christianisme, c’est la valorisation du
moi
. Tout votre comportement,
dit-on, est conditionné par la valeur que vous accordez à votre personne. Et on
prêche l’acceptation de soi-même, l’amour de soi-même, l’estime de soi-même…
Mais ces notions sont anti-bibliques ! S’il est bien vrai que nous devons
accepter les infirmités ou les handicaps physiques qu’il a plu à Dieu de nous
dispenser, il est extrêmement dangereux d’accepter tous nos traits de
caractères — y compris ceux qui déshonorent le Seigneur — comme des choses
inéluctables avec lesquelles il nous faut vivre. Les accepter revient à
renoncer à marcher comme Christ a marché, à renoncer à le suivre. D’un autre
côté, l’estime de soi-même est expressément condamnée dans des passages tels
que Ésaïe 5:21, Romains 12:3 ou Philippiens 2:3-5. Cette estime est très proche
parente de la confiance en soi-même ; or celle-ci, dans toutes les
Écritures, est mise en opposition avec la confiance en Dieu. Nous y reviendrons
à la fin du chapitre 5.
En fait, chaque fois que nous
donnons de l’importance à notre moi
, c’est au détriment de la vie de
Christ en nous. « Je ne vis plus, moi, mais Christ vit en moi », pouvait dire
l’apôtre Paul (Gal. 2:20).
Un certain courant de pensées
a contesté le bien-fondé d’expressions telles que les deux natures
du
croyant, la vieille
et la nouvelle…
Ces expressions appartiennent
pourtant au sain enseignement ! Nous en dirons quelques mots au chapitre
5. On a affirmé que « le vieil homme », puisqu’il est crucifié, n’existe plus. Et
on a voulu introduire une immense différence entre le vieil homme (qui n’existerait
plus) et la chair (qui existe encore) — une différence telle que le principe de
mal dans le croyant en est très fortement atténué. La chair, a-t-on dit, n’est
autre que de vieilles habitudes, de mauvais plis qui datent d’avant notre
conversion.
Les conséquences d’un tel
enseignement sont graves. Lorsque nous avons péché, nous avons à confesser nos
manquements devant Dieu, à nous juger nous-mêmes devant lui. Or pour que ce
jugement soit vraiment réel et profond, il doit porter non seulement sur les
actes commis, mais sur la source dont ils proviennent. Minimiser le caractère
de celle-ci conduit à ne pas se juger soi-même avec le sérieux nécessaire. Il
faut se souvenir que ce n’est jamais un avantage de sous-estimer la force d’un
ennemi. Selon les Écritures, notre ennemi intérieur, la chair,
est
beaucoup plus que de vieilles habitudes. « La pensée de la chair est inimitié
contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le
peut pas » (Rom. 8:7). Aussi
longtemps que nous serons dans nos corps mortels, nous aurons à faire à un tel
ennemi. Bien connaître son caractère pervers et ses ruses nous est
indispensable. Et le salut actuel que Dieu a préparé pour nous contient toutes
les
ressources
dont nous avons besoin pour être des vainqueurs.
Apprenons donc à les connaître et à les utiliser, dans la défiance de
nous-mêmes et dans une entière confiance en Dieu.
Dans la parole de Dieu, le terme monde
a
manifestement plusieurs sens :
la création, la terre :« Il était dans le monde, et le monde fut fait par lui » (Jean 1:10).
l’humanité, tous les hommes :« Dieu a tant aimé le monde, qu’il a donné son Fils unique… » (Jean 3:16). « Le Père a envoyé le Fils pour être le Sauveur du monde » (1 Jean 4:14).
le système constitué par l’humanitésous la domination de Satan, le « chef de ce monde ». C’est de ce monde-là qu’il est dit, par exemple : « N’aimez pas le monde, ni les choses qui sont dans le monde » (1 Jean 2:15). Ce système, structuré et organisé comme nous pouvons le voir autour de nous, a sa propre « sagesse », son « esprit », ses « éléments », ses « principes » (1 Cor. 1:20 ; 2:12 ; Col. 2:8 ; 1 Jean 4:5). Satan lui imprime son caractère. « Le monde entier gît dans le méchant » (1 Jean 5:19). Il y a ainsi le plus grand contraste entre ce qui est « du Père » et ce qui est « du monde » (1 Jean 2:16).
Les caractères fondamentaux du monde sont, au fond, ceux de l’homme naturel lui-même — modelés et accentués par l’effet de masse. Ainsi, « tout ce qui est dans le monde » se résume dans ces trois traits de l’homme naturel : « la convoitise de la chair, et la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie » (1 Jean 2:16).
Le Fils de Dieu est venu dans ce monde comme
l’envoyé de son Père. Il a fait briller la lumière divine dans les ténèbres
morales du monde, et a révélé l’amour de Dieu pour les hommes. Il n’était pas
venu pour juger le monde, mais pour le sauver
(Jean 3:17 ; 12:47). De façon générale, « le monde ne l’a pas connu » (1:10). « Mais à tous ceux qui l’ont
reçu, il leur a donné le droit d’être enfants de Dieu, savoir à ceux qui
croient en son nom » (1:12).
Le jugement de Dieu — la
perdition éternelle — est la part que tous les hommes ont devant eux en raison
de leur culpabilité. Ceux qui croient en Jésus échappent à ce jugement ;
ils reçoivent la vie éternelle et sont amenés dans la faveur de Dieu. « Celui
qui entend ma parole, et qui croit celui qui m’a envoyé, a la vie éternelle et
ne vient pas en jugement
; mais il est passé de la mort à la vie »
(Jean 5:24). Quant aux
autres : « celui qui ne croit pas est déjà jugé, parce qu’il n’a pas cru au
nom du Fils unique de Dieu » (Jean 3:18).
« Il est déjà jugé
» — son
jugement est prononcé. Sa condamnation est fondée sur le fait qu’il a rejeté la
grâce de Dieu offerte en Jésus Christ. Cependant, aussi longtemps que dure le
jour de la grâce et que lui-même est en vie, il peut encore se repentir,
accepter le Sauveur, et échapper ainsi au jugement.
Très près de la fin de sa vie
sur la terre, le Seigneur dit : « Maintenant
est le jugement de ce monde ; maintenant le chef de ce monde sera jeté
dehors. Et moi, si je suis élevé de la terre, j’attirerai tous les hommes à
moi-même. Or il disait cela pour indiquer de quelle mort il allait mourir
»
(Jean 12:31-33). Il parle donc
de la croix sur laquelle il va être « élevé » (*). Dans cette position, rejeté de la terre, il va attirer tous les hommes à
lui-même. Ceux qui croient en lui sont détachés de la terre et attirés vers
lui, vers le ciel où il sera dorénavant. Ainsi, le rejet ou l’acceptation de
Jésus partage l’humanité en deux classes absolument distinctes : ceux qui
sont « du monde » et ceux qui n’en sont plus.
(*) L’évangile de Jean rapporte encore deux autres occasions où le Seigneur Jésus emploie le mot « élevé » pour désigner sa crucifixion. « Comme Moïse éleva le serpent dans le désert, ainsi il faut que le Fils de l’homme soit élevé » (3:14). Et « Quand vous aurez élevé le Fils de l’homme » (8:28)
Remarquons les deux mots « maintenant
» de ce
passage :
Maintenant est le jugement de ce monde ».C’est à la croix que le monde a été jugé. Le monde continue son existence, hostile à Christ et aux chrétiens — comme l’Écriture nous le montre et comme nous le voyons de nos yeux. Mais son jugement est prononcé, un jugement sans appel. S’il y a de l’espoir pour les individus, il n’y en a plus aucun pour le monde comme système. Par la crucifixion de Jésus, il a montré son véritable caractère. Il a fourni à Dieu la preuve évidente de sa méchanceté et de son assujettissement à Satan. Pour Dieu, il est déjà jugé. L’exécution de ce jugement est réservée pour un jour futur, et elle s’accomplira de la manière décrite dans les livres prophétiques, l’Apocalypse en particulier. Voir également 2 Pierre 3.
Maintenant le chef de ce monde sera jeté dehors ».À la croix, Satan, le chef de ce monde, a subi une défaite complète. Selon la prophétie la plus ancienne de l’Écriture, c’est à la croix que « le serpent » devait avoir la tête « brisée » par Christ, « la semence de la femme » (Gen. 3:15). Dans l’épître aux Hébreux, nous voyons que Jésus est devenu homme « afin que, par la mort, il rendît
impuissantcelui qui avait le pouvoir de la mort, c’est-à-dire le diable » (Héb. 2:14). En apparence, la croix était la victoire de Satan sur Christ ; en réalité, elle est la victoire de Christ sur Satan.
Malgré cela, Satan continue à séduire les hommes et à exercer tant qu’il peut son activité malfaisante. Son jugement effectif et complet aura lieu plus tard, en plusieurs étapes : il sera chassé du ciel (Apoc. 12:7-12), puis lié durant le Millénium (20:1-3) et finalement jeté dans l’étang de feu (20:10). Mais la foi peut véritablement le considérer comme un ennemi vaincu.
La victoire de Christ sur Satan est le fondement sur lequel nous nous tenons pour être nous-mêmes des vainqueurs. « Résistez au diable, et il s’enfuira de vous » (Jacq. 4:7). « Résistez-lui, étant fermes dans la foi » (1 Pierre 5:9). Il en est de même quant à ce monde : « C’est ici la victoire qui a vaincu le monde, savoir notre foi » (1 Jean 5:4).
Bien souvent, dans les Écritures, Dieu nous présente les choses telles qu’elles seront dans leur état final, lorsqu’elles auront trouvé leur juste place selon ses décrets éternels, et selon les pleins résultats de l’oeuvre de Christ. Que Dieu nous accorde d’élever davantage les regards de notre foi, pour voir les choses dans cette perspective, et pour actualiser ce qu’il va bientôt réaliser !
« Qu’il ne m’arrive pas à moi de me glorifier,
sinon en la croix de notre Seigneur Jésus Christ, par laquelle le monde
m’est crucifié, et moi au monde
»
(Gal. 6:14). Ici, l’apôtre Paul
prend acte de ce qui s’est passé à la croix de Christ. Il en voit le vrai
caractère, et en tire les conséquences.
Ce qu’il dit est vrai en principe pour tous les chrétiens. Mais cette façon personnelle de s’exprimer nous montre comment sa foi s’appropriait la vérité, et lui en faisait réaliser la puissance. La croix de Christ constituait une barrière absolue entre lui et le monde.
Tout d’abord, dit-il, « le monde m’est crucifié
». Les
pensées de Paul sont à l’unisson du jugement que Dieu a prononcé. C’est à la
croix que le monde a été jugé, que sa condamnation définitive et sans appel a
été prononcée par Dieu. Le monde, pour lui, est donc « crucifié ».
Il ajoute : « et moi au monde
»,
c’est-à-dire : pour le monde, je suis un crucifié. Ce monde a rejeté et
crucifié Christ, voilà aussi ma place !
C’est de cette manière que
l’apôtre réalisait ce que signifie porter sa croix
et suivre Jésus.
La croix mettait une distance morale infinie entre lui et le monde.
Dans sa prière du chapitre 17 de l’évangile de Jean, le Seigneur
dit à deux reprises, en parlant des siens : « Ils ne sont pas du monde, comme moi je ne suis pas du monde
»
(v. 14 et 16).
Au cours de ses derniers entretiens avec ses disciples, dans les chapitres précédents, le Seigneur leur montre que leur position par rapport au monde découle de sa position à lui. « Si le monde vous hait, sachez qu’il m’a haï avant vous. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui serait sien ; mais parce que vous n’êtes pas du monde, mais que moi je vous ai choisis du monde, à cause de cela le monde vous hait » (15:18, 19). À la suite de leur Maître, les disciples de Jésus vont être comme des corps étrangers dans ce monde, et ils auront à y souffrir. Mais le Seigneur les encourage en leur disant : « Vous avez de la tribulation dans le monde ; mais ayez bon courage, moi j’ai vaincu le monde » (16:33).
Au début de l’épître aux
Galates, l’apôtre Paul parle de « notre Seigneur Jésus Christ, qui s’est donné
lui-même pour nos péchés, en sorte qu’il nous retirât du présent siècle
mauvais
» (1:4). Cela complète l’enseignement du
Seigneur résumé par les mots : dans le monde, mais pas du monde
.
Nous sommes bien « dans le monde » physiquement, quant à nos corps. Mais
moralement, nous en avons été « retirés » par l’oeuvre de Christ à la croix. Le
Seigneur s’est donné lui-même pour cela. Comme croyants, nous appartenons
maintenant à une autre sphère. Et pour cette raison, nous sommes des étrangers
dans le monde : « Bien-aimés, je vous exhorte, comme forains et
étrangers
, à vous abstenir des convoitises charnelles, lesquelles font la
guerre à l’âme » (1 Pierre 2:11).
En résumé, on peut dire qu’il y a deux raisons fondamentales à la séparation du chrétien d’avec le monde :
1° Les caractères moraux de ce monde — les convoitises et l’orgueil — sont, dans leur essence même, opposés à Dieu. Ceci était vrai déjà avant la venue de Christ sur la terre, et cette venue l’a mis en évidence.
2° Le rejet du Fils de Dieu venu en grâce, et sa crucifixion, ont comblé la mesure et ont entraîné définitivement le jugement de ce monde.
Dans les temps de persécution qui ont précédé notre époque, les conditions de vie rappelaient sans cesse aux chrétiens qu’ils étaient des « étrangers », des « crucifiés » dans ce monde. « Nous sommes devenus comme les balayures du monde et le rebut de tous », dit l’apôtre Paul (1 Cor. 4:13). À l’époque à laquelle nous vivons aujourd’hui, dans nos pays, la situation est souvent bien différente. La tolérance est à l’ordre du jour. Le monde n’est, en général, plus agressif à l’égard des chrétiens. Il est plutôt souriant et aimable. Il séduit par ses attraits.
En fait, c’est une autre forme d’agression ! Le monde, avec ses principes et ses convoitises, cherche à s’infiltrer dans nos maisons, dans nos esprits et dans nos coeurs. Les médias, présents presque partout, y contribuent puissamment. En face de ces séductions, nous avons un grand besoin de l’exhortation de Jacques : « Ne savez-vous pas que l’amitié du monde est inimitié contre Dieu ? Quiconque donc voudra être ami du monde se constitue ennemi de Dieu » (Jacq. 4:4).
Aujourd’hui, l’hostilité du monde se manifeste
plutôt sous forme de mépris et de moquerie, dans la mesure où nous sommes
fidèles dans notre témoignage. Celui-ci comporte deux parties d’égale
importance : notre conduite et nos paroles. Notre conduite différente de
celle des gens du monde les étonne (cf. 1 Pierre 4:4). Nos paroles aussi étonnent facilement. Le chrétien fidèle
ne peut pas être tolérant
, comme le sont en général les gens du monde, à
l’égard de toutes les idées, de toutes les conceptions religieuses et de tous
les comportements immoraux que condamne l’Écriture. Celui qui annonce
l’évangile, même dans le cadre restreint d’un contact personnel, ne peut pas
confondre le bien et le mal, comme le fait le monde. Si on invite des pécheurs
à la repentance, on ne peut évidemment pas rayer le mot péché
de son
vocabulaire. Le croyant, s’il est fidèle, doit donc s’attendre à être considéré
comme un intolérant
.
Notre vie de chrétiens dans ce monde — même si
nous en avons été moralement « retirés » — nous expose à un très haut risque de
« contamination ». Le mot peut paraître fort, mais l’idée qu’il exprime est bien
biblique. Le livre des Proverbes nous avertit : « Qui marche avec les sages
devient sage, mais le compagnon des sots s’en trouvera mal » (13:20). « Ne sois
pas l’ami de l’homme colère, et n’entre pas chez l’homme violent ; de
peur que tu n’apprennes ses sentiers
, et que tu n’emportes un piège dans
ton âme » (22:24, 25) (*). Et le Nouveau
Testament confirme : « Ne soyez pas séduits : les mauvaises compagnies
corrompent les bonnes moeurs » (1 Cor. 15:33).
(*) Israël, avant son entrée dans le pays promis, était solennellement mis en garde contre le danger d’adopter les principes et les mœurs des peuples du pays de Canaan. Les mariages entre Israélites et Cananéens, en particulier, devaient avoir les conséquences les plus désastreuses (Deut. 7:3, 4 ; Juges 3:5-7).
À cause de notre travail, nous avons des contacts obligés et abondants avec le monde. À l’école déjà, les enfants sont placés dans l’atmosphère du monde et instruits selon ses principes. Ce sont des choses inévitables, mais qui constituent un grand danger pour nous. Le Seigneur le sait, et il peut nous garder, nous et nos enfants, de subir la mauvaise influence du monde. Que la parole de Dieu — lue, méditée, étudiée, gardée soigneusement dans nos coeurs — exerce sur nous son influence préventive et corrective, pour nous préserver d’être contaminés par les manières et les principes de ce monde ! Le Seigneur Jésus allait s’asseoir à table avec « des publicains et des pécheurs », mais il y allait comme un « médecin » qui se rend auprès des malades (Matt. 9:10-13).
À quoi servirait-il de nous fixer des règles pour notre comportement extérieur — par exemple une liste de lieux et d’activités à éviter — si les mêmes éléments mondains que nous paraissons fuir sont entretenus dans notre vie privée ou dans le secret de nos coeurs, peut-être sous des formes légèrement différentes ?
« La convoitise de la chair, et la convoitise des yeux, et l’orgueil de la vie » (1 Jean 2:16), « l’amour de l’argent » (1 Tim. 6:9, 10), le désir d’avoir « une belle apparence dans la chair » (Gal. 6:12), la tendance à vouloir « être grand » ou à « être le premier » (Matt. 20:27 ; 3 Jean 9), la volonté de « dominer » (1 Pierre 5:3) — toutes ces choses caractérisent le coeur de l’homme, et non seulement le monde. Ne les laissons pas prospérer en secret au-dedans de nous, alors que nous donnons l’impression de nous en garder dans notre vie pratique.
Il importe de ne pas confondre les choses de la
terre
avec les choses du monde
.
S’il est bien vrai que nos sujets de joie les plus réels et les plus
profonds sont « dans le Seigneur » (Phil. 4:4),
il est vrai aussi qu’il y a des joies terrestres que le chrétien peut goûter en
communion avec Dieu. Par exemple, celle qu’une femme trouve dans son enfant
nouveau-né (Jean 16:21). Ou
bien « la joie que le fiancé a de sa fiancée » ; joie qui est même l’image
de celle que l’Éternel trouvera dans son peuple Israël restauré (És. 62:5). (*)
(*) De même, il convient de ne pas confondre le corps et la chair. Nous devons prendre soin de nos corps et ne pas prendre soin de la chair (Éph. 5:28, 29 ; Rom. 13:14).
Une difficulté résulte du fait
que dans le langage humain, et même dans le langage biblique, les mots peuvent
avoir des sens variables. On peut trouver le mot monde
pour désigner la terre
,
ou inversement. Nous avons besoin de discernement spirituel pour bien voir le
caractère moral des choses. Celles qui nous permettent de demeurer en communion
avec Dieu, et pour lesquelles nous pouvons lui rendre grâces, sont bonnes.
C’est d’elles qu’il est écrit que « Dieu… nous donne toutes choses richement
pour en jouir » (1 Tim. 6:17).
Reçues avec reconnaissance, de telles choses ne stimulent ni nos convoitises ni
notre orgueil. Elles ne nous font pas respirer l’atmosphère du monde.
La vraie frontière entre le monde et le chrétien
se trace dans le coeur. Nos coeurs sont-ils attachés à Christ ou aux choses du
monde ? Sommes-nous disposés à porter notre croix
et à suivre
le
Seigneur ? Si les paroles de l’apôtre : « le monde m’est crucifié, et
moi au monde » — étaient mieux gravées dans nos coeurs, bien des problèmes
pratiques seraient d’emblée résolus.
Nous nous sommes arrêtés surtout sur l’aspect négatif de notre relation avec le monde : la séparation. N’oublions pas qu’il y a un aspect positif.
Dans sa prière au Père, le
Seigneur Jésus dit : « Comme tu m’as envoyé dans le monde, moi aussi je les
ai envoyés dans le monde » (Jean 17:18).
Et il dit à ses disciples réunis le soir même du jour de sa résurrection :
« Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » (Jean 20:21). Pesons ces paroles. Être
envoyés par le Seigneur dans le monde comme
lui-même y a été envoyé par
son Père ! Quelle dignité dans cette mission ! Le témoignage qu’il a
rendu est le modèle de notre témoignage.
« La grâce et la vérité vinrent par Jésus Christ » (Jean 1:17). Nous avons à manifester dans ce monde les caractères de notre Sauveur. Il a été ici-bas la révélation de Dieu : « Celui qui m’a vu a vu le Père », pouvait-il dire (Jean 14:9). Ce monde peut-il discerner en nous quelque chose de Christ ? Peut-il nous reconnaître « pour avoir été avec Jésus » ? (Act. 4:13). Répandons-nous autour de nous « la bonne odeur de Christ » ? (2 Cor. 2:15). Bien sûr, il y aura toujours une immense distance entre lui et nous. En lui, tout était parfait, tout était à la mesure divine ; alors qu’il y a en nous beaucoup de faiblesse et d’infirmités. Mais malgré cela, cette glorieuse mission nous a été confiée.
S’il n’y a plus aucun espoir pour le monde, il y en a encore un pour les hommes de ce monde. Notre témoignage, s’il est fidèle, peut être utilisé par Dieu pour arracher des âmes à la perdition.
Dans l’accomplissement de
notre mission, nous ne devons pas nous attendre à être mieux traités que notre
Maître. Ceux qui ont reçu ses paroles ont été en petit nombre, et il n’en sera
pas autrement pour ses disciples. Il était « la vraie lumière
… celle qui,
venant dans le monde, éclaire tout homme » (Jean 1:9). « La lumière est venue dans le monde, et… les hommes ont
mieux aimé les ténèbres que la lumière, car leurs oeuvres étaient
mauvaises ; car quiconque fait des choses mauvaises hait la lumière, et ne
vient pas à la lumière, de peur que ses oeuvres ne soient reprises » (Jean 3:19, 20). Le même principe est vrai
pour ceux qui sont appelés à être comme de petites lumières
dans ce
monde. « Faites toutes choses sans murmures et sans raisonnements, afin que vous
soyez sans reproche et purs, des enfants de Dieu irréprochables, au milieu
d’une génération tortue et perverse, parmi laquelle vous reluisez comme des
luminaires
dans le monde, présentant la parole de vie » (Phil. 2:14-16).
Pour conclure ce chapitre, arrêtons-nous sur l’exemple que nous donne le Seigneur Jésus dans le chapitre 7 de Jean. « La fête des Juifs, celle des tabernacles, était proche » (v. 2). « Ses frères » — de ses proches qui n’avaient pas cru en lui — lui suggèrent de monter à Jérusalem pour y déployer la puissance miraculeuse qu’il avait montrée en Galilée : « Si tu fais ces choses, montre-toi au monde toi-même » (v. 4). Le Seigneur refuse. Il ne cherche pas la gloire et les honneurs de ce monde. « Vous, montez à cette fête ; moi, je ne monte pas à cette fête » (v. 8). Et il demeure en Galilée.
« Mais lorsque ses frères furent montés, alors lui aussi monta à la fête, non pas publiquement, mais comme en secret » (v. 10). Il n’avait aucune communion avec cette fête, mais il avait un témoignage à rendre en ce lieu, aux hommes qui s’y trouvaient à ce moment.
« Comme on était déjà au milieu de la fête », Jésus se montre publiquement. Il monte au temple et il y enseigne (v. 14). Et même, « Jésus… criait dans le temple » (v. 28). Mais ses paroles irritent ses adversaires. « Ils cherchaient donc à le prendre ; et personne ne mit la main sur lui, parce que son heure n’était pas encore venue » (v. 30).
« Et en la dernière journée, la grande journée de la fête, Jésus se tint là et cria, disant : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive. Celui qui croit en moi, selon ce qu’a dit l’Écriture, des fleuves d’eau vive couleront de son ventre » (v. 37, 38).
Si nous sommes de ces
bienheureux qui sont venus
à lui, qui ont cru
en lui et qui ont
été désaltérés
par l’eau qu’il donne, suivons son exemple dans nos
rapports avec le monde. C’est ainsi seulement que des fleuves d’eau vive
pourront jaillir vers des âmes assoiffées.
Lors de notre nouvelle naissance, nous
saisissons par la foi que Jésus Christ est mort pour nos péchés.
« Christ
est mort pour nos péchés
, selon les Écritures » (1 Cor. 15:3). « Lui-même a porté nos péchés
en son corps sur le bois » (1 Pierre 2:24).
« Christ a souffert une fois pour les péchés,
le juste pour les injustes,
afin qu’il nous amenât à Dieu » (3:18).
Par son sacrifice, nous sommes délivrés de notre culpabilité
devant
Dieu, nous sommes « justifiés », nous avons « la paix avec Dieu » et nous sommes
amenés dans sa « faveur » (Rom. 5:1,
2). C’est un premier aspect, essentiel, de l’oeuvre de Christ. La connaissance
de cela, par la foi, fait le bonheur de ceux qui ont reçu Jésus comme leur
Sauveur.
Toutefois, l’Écriture nous
apprend que l’oeuvre de Christ à la croix n’a pas seulement réglé la question des
péchés ;
elle a réglé aussi celle du péché
. Dans plusieurs
passages, le mot « péché », au singulier, désigne le principe de mal qui se
trouve dans l’homme depuis la chute. C’est la source qui produit « les péchés ».
Le figuier produit des figues, l’olivier des olives, et « le péché » « des
péchés ». L’épître aux Romains, jusqu’au milieu du chapitre 5, traite des péchés.
Depuis
là jusqu’à la fin du chapitre 8, elle
s’occupe du péché
(voir note Rom.
5:12).
Comment Dieu a-t-il réglé la
question du péché ? « Celui qui
n’a pas connu le péché
» — c’est de Christ qu’il s’agit, bien
sûr ! — « il l’a fait péché
pour nous, afin que nous devenions justice de Dieu en lui
» (2 Cor. 5:21). Mystère profond ! Cette
chose abjecte qu’est le péché… Christ l’a aussi prise sur lui à la croix. Il a
été « fait péché », traité par Dieu comme le péché. Et qu’est-ce que le Dieu
saint devait faire de ce péché ? Le juger sans miséricorde ! Il a
« condamné le péché dans la chair
» (Rom. 8:3). D’un côté, la crucifixion de Christ était l’acte par
lequel l’homme manifestait son état irrémédiable de révolte contre Dieu. Et
d’un autre côté, c’est à la croix que Dieu a jugé le péché comme il devait
l’être, dans la personne de notre Substitut, c’est-à-dire de Celui qui avait
pris notre place. Dieu a dû abandonner, durant les trois heures de ténèbres,
Celui qui portait nos péchés,
et qui était fait péché
pour nous.
À cause de la position qu’il prenait alors, toute la colère de Dieu a été sur
lui, bien qu’il ait été le Saint et le Juste.
Oui, ton divin amour, dans ses plans adorables,
Pour nous soustraire à notre sort
Abandonna ton Fils aux coups inexorables
Du jugement et de la mort.
Jamais oeil ne verra chose plus merveilleuse
Que la croix, où fut attaché
Le Prince de la vie, à l’heure ténébreuse
Où Dieu condamna le péché.
(Hymnes et Cantiques, N° 172)
Nous allons maintenant parcourir le chapitre 6 de l’épître aux Romains.
Le point de départ de
l’enseignement de l’apôtre dans ce chapitre, c’est un mauvais usage que l’on
pouvait faire de la grâce qu’il annonçait. En écrivant, comme il venait de le
faire : « là où le péché abondait, la grâce a surabondé » (5:20), encourageait-il le
péché ? Il pose donc la question : « Demeurerions-nous dans le péché
afin que la grâce abonde ? » (v. 1), et il la répète sous une autre forme
un peu plus loin : « Quoi donc ! pécherions-nous, parce que nous ne
sommes pas sous la loi, mais sous la grâce ? » (v. 15). Voici sa
réponse : « Nous qui sommes morts au péché, comment vivrons-nous encore
dans le péché ? » (v. 2). Ici apparaît une expression d’une importance
capitale : nous sommes morts au péché.
La croix de Christ a opéré
une rupture totale entre nous et le péché. Quelle contradiction ce serait, si
nous marchions encore dans le péché !
« Morts
au péché…
» — Nous voici devant
une expression difficile à comprendre. Et nous avons grand besoin de
l’opération de Dieu dans nos coeurs et dans nos esprits pour y entrer quelque peu,
et toujours davantage. Mais la suite du chapitre va nous aider.
« Nous avons été identifiés
avec lui dans la ressemblance de sa mort » (v. 5). Cette identification
constitue la base de l’enseignement que nous avons ici. Christ est mort ;
il est mort « au péché
»
(v. 10). Parce que nous sommes liés à lui, nous sommes morts au péché. Le
baptême est le signe de cette mort : « Ignorez-vous que nous tous qui avons
été baptisés pour le Christ Jésus, nous avons été baptisés pour sa
mort ?
» (v. 3).
Le fait que Christ soit mort,
non seulement « pour nos péchés », mais aussi en étant « fait péché » pour nous, a
une portée immense. Si d’une part nos péchés
ont été effacés, d’autre
part, ce que nous étions par naissance, notre vieil homme, a été crucifié
avec Christ.
Dieu le considère comme mort, cloué à la croix, jugé
entièrement et définitivement :
« Notre
vieil homme a été crucifié avec lui, afin que le corps du péché soit annulé,
pour que nous ne servions plus le péché
» (v. 6).
La grande vérité présentée ici, c’est que le croyant n’est plus devant Dieu dans la condition où il était avant sa conversion. L’homme pécheur qu’il était alors a été condamné à la croix, crucifié avec Christ.
L’Ancien Testament nous montre l’homme mis à l’épreuve de différentes façons, sans loi, sous la loi, objet des soins et de la bonté de Dieu, ou sous sa discipline. Le résultat invariable de cette épreuve, confirmé de façon définitive par le rejet de Christ, c’est que l’homme est irrémédiablement mauvais. En conséquence, Dieu l’a condamné et mis de côté. Ceci a eu lieu à la croix, mais le prophète Ésaïe l’avait déjà annoncé : « Finissez-en avec l’homme, dont le souffle est dans ses narines, car quel cas doit-on faire de lui ? » (És. 2:22).
Lorsque nous avons passé par la nouvelle naissance, nous n’avons peut-être pas saisi tous les aspects du changement qui a eu lieu. Devant Dieu, notre vie d’enfants d’Adam a pris fin. Nous avons reçu une nouvelle vie, ayant été engendrés par Dieu lui-même. Un nouvel homme a été créé. C’est dans cette nouvelle condition que nous nous trouvons devant lui.
Le « corps du péché
» (v. 6) n’est pas notre corps physique.
C’est un corps moral
dont les membres sont moraux
. Nous trouvons
ceux-ci en Colossiens 3:5, dans
une liste non exhaustive : « la fornication, l’impureté, les affections
déréglées, la mauvaise convoitise, et la cupidité ». Ce passage, en effet, nous
présente ces choses comme étant nos « membres qui sont sur la terre ». « Notre
vieil homme », donc, « a été crucifié avec Christ, afin que le corps du péché soit
annulé
».
Notre identification à Christ
dans sa mort a un but pratique : c’est « pour que nous ne servions plus
le péché
».
« Le péché » — la source qui produit les péchés — est présenté dans ce chapitre 6 comme un tyran auquel nous étions asservis : « Vous étiez esclaves du péché » (v. 17 et 20). Le Seigneur avait déjà dit : « Quiconque pratique le péché est esclave du péché » (Jean 8:34). Mais par la mort de Christ, cet esclavage, cette obligation de servir le péché, a pris fin. « Le péché ne dominera pas sur vous, parce que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce » (v. 14).
La mort de Christ, qui
entraîne avec elle la crucifixion du vieil homme, nous introduit donc dans la
liberté.
Nous avons « été affranchis du péché » (v. 18 et 22).
L’affranchissement, c’est le terme même qui décrit la libération de la
condition d’esclave. « Christ nous a placés dans la liberté en nous
affranchissant » (Gal. 5:1).
Concrètement, cela signifie que le chrétien n’est jamais obligé de pécher. Si le vieil homme prétend réclamer des droits, souvenons-nous qu’il n’en a aucun. Il pourrait nous arriver de considérer avec indulgence, comme quelque chose d’inévitable, certaines manifestations du péché qui habite en nous : ce serait nier dans la pratique l’enseignement qui nous est donné ici. L’Écriture reconnaît bien que nous pouvons nous « laisser surprendre par quelque faute », que « nous faillissons tous à plusieurs égards », et elle nous indique le chemin à suivre lorsqu’il en a été ainsi : confesser à Dieu nos manquements (Gal. 6:1 ; Jacq. 3:2 ; 1 Jean 1:9). Mais jamais nous ne sommes dans l’obligation de pécher.
Dans les onze premiers
versets du chapitre 6, on
trouve six ou sept fois, sous différentes formes, la mention de notre mort
avec Christ.
Au verset 6, il y a la déclaration : « notre vieil homme a
été crucifié avec lui ». Mais celle-ci n’implique en aucune façon que le vieil
homme n’existe plus. S’il en était ainsi, il faudrait aussi conclure, puisque « nous
sommes morts avec Christ », que nous
n’existons plus !
Notre mort avec Christ est un fait accompli. Cela a eu lieu entièrement en dehors de nous, à la croix de Christ, et nous avons à le recevoir par la foi, de la même manière que nous avons cru le témoignage de Dieu concernant le pardon de nos péchés. Dieu nous dit ce qu’il a fait de nous et nous avons à l’accepter. C’est pourquoi l’apôtre dit ici :
« Tenez-vous
vous-mêmes pour morts au péché, mais pour vivants à Dieu dans le Christ Jésus
» (v. 11).
J’ai donc à me tenir pour mort, sans me demander si je le sens ou si je le vois.
Ce verset 11 introduit aussi
une autre pensée, une pensée qui tient une place importante dans ce
chapitre : celle de la vie. Christ est mort, mais il a été « ressuscité
d’entre les morts par la gloire du Père » (v. 4). Et s’il y a une identification
« avec lui dans la ressemblance de sa mort », il y en a aussi une « dans la
ressemblance de sa résurrection » (v. 5). Et cela, afin que « nous marchions en
nouveauté de vie ». Nous participons à la vie de Christ ressuscité. Délivrés de
l’esclavage du péché, nous pouvons vivre pour Dieu, nos vies entières étant
pour ainsi dire orientées vers lui. Nous pouvons suivre en cela les traces de
notre Sauveur : « Car en ce qu’il est mort, il est mort
une fois
pour toutes au péché ;
mais en ce qu’il vit, il vit à Dieu
(v. 10).
On remarque ici l’expression
« mort au
péché », utilisée déjà au verset 2, et qui peut être rapprochée
des expressions « mort à
la loi » ou « mort au
monde ». Elle est à
peu près équivalente à : mort relativement au
péché. Christ est
venu « pour le péché » (8:3). Il
avait une oeuvre à accomplir à l’égard du péché, une oeuvre qui nécessitait sa
mort, et il l’a accomplie une fois pour toutes. Ainsi il est mort au péché.
Maintenant qu’il est ressuscité, il n’a plus rien à faire avec le péché, et « il
vit à Dieu » c’est-à-dire pour Dieu. Qu’il en soit ainsi de nous aussi !
L’exhortation « Tenez-vous vous-mêmes pour morts au péché » n’aurait pas sa raison d’être si ce que nous avons à tenir pour mort ne tendait pas à montrer des signes d’activité. Cette exhortation met donc en évidence le double aspect du vieil homme : d’une part crucifié et d’autre part toujours prêt à se manifester.
Il est essentiel de bien voir
que ce qui tend à produire le mal chez le croyant n’est rien d’autre que ce que
Dieu a condamné et crucifié. Notre foi
en cette « crucifixion » est ce qui
nous permet de porter un jugement juste sur le mal qui peut germer en
nous-mêmes — un jugement impitoyable, à l’unisson de celui que Dieu a prononcé.
De plus, cela ouvre la voie à une vie pratique dans laquelle le vieil homme est
tenu dans la mort.
« Ne livrez pas vos
membres au péché comme instruments d’iniquité, mais livrez-vous vous-mêmes à
Dieu, comme d’entre les morts étant faits vivants, — et vos membres à Dieu,
comme instruments de justice
» (v. 13).
Après l’exhortation « Tenez-vous vous-mêmes…
»,
voici l’exhortation « Livrez-vous
vous-mêmes…
». La possibilité de nous livrer nous-mêmes suppose que
nous sommes dans une position de liberté, et il en est bien ainsi puisque nous
avons été « affranchis ». C’est la liberté de la grâce dans laquelle nous sommes,
car « nous ne sommes pas sous la loi, mais sous la grâce » (v. 15 ; cf. v.
14). « Cette grâce dans laquelle vous êtes est la vraie grâce de Dieu » (1 Pierre
5:12).
L’homme sous la loi était contraint
d’accomplir la volonté de Dieu, de se plier à une volonté contre laquelle les
tendances de sa nature s’élevaient toujours. Le chrétien, étant placé sous la
grâce, dans la liberté, est encouragé
à se livrer à Dieu, à se mettre à
la disposition de Dieu, pour le servir. C’est l’exhortation de base que nous
retrouvons au début de la partie pratique de l’épître, au chapitre 12: « Je vous exhorte donc, frères,
par les compassions de Dieu, à présenter vos corps
en sacrifice vivant,
saint, agréable à Dieu, ce qui est votre service intelligent » (v. 1). Ne
songeons pas à servir Dieu en travaillant beaucoup pour lui selon nos propres
idées et selon notre propre volonté. Mais mettons à sa disposition nos membres,
nos facultés, nos corps, nous-mêmes, dans un esprit d’obéissance
(v.
16). Dans la mesure où nous nous tiendrons pour morts au péché et vivants à
Dieu, il pourra employer utilement ce que nous lui avons livré.
Ce chapitre 6 de l’épître aux Romains nous
présente donc les grands faits sur la base desquels le croyant peut marcher
en nouveauté de vie.
Mais il ne mentionne pas la puissance qui nous est
absolument indispensable pour réaliser une telle marche : celle du Saint
Esprit. Ce sujet sera présenté au chapitre 8 de l’épître, dont nous nous occuperons plus loin.
Les Galates avaient reçu l’évangile par le
ministère de l’apôtre Paul lui-même (4:13-15).
Puis, des docteurs étaient venus les troubler — des gens qui voulaient
« pervertir l’évangile du Christ » (1:7).
Ces gens s’efforçaient d’amener, ou de ramener, les chrétiens « aux faibles et
misérables éléments » du judaïsme (*) (4:9-11). En grande
perplexité à leur sujet, l’apôtre leur écrit la lettre solennelle que nous
possédons. Il leur montre qu’en se plaçant sous la loi, ils se séparaient « de
tout le bénéfice qu’il y a dans le Christ », ils étaient « déchus de la grâce » (5:4). Aujourd’hui encore, bien des
chrétiens, hélas ! se placent sous ce même joug, celui du légalisme
.
(*) Le judaïsme, c’est le système juif (cf. Gal. 1:13, 14).
« Christ nous a placés dans
la liberté en nous affranchissant ; tenez-vous donc fermes, et ne soyez
pas de nouveau retenus sous un joug de servitude
» (5:1). L’homme qui n’a
pas passé par la nouvelle naissance est esclave du péché. Les Juifs, en outre,
étaient dans la servitude de la loi donnée autrefois par Moïse. De l’un et de
l’autre de ces esclavages, la mort de Christ affranchit
tous ceux qui
ont cru en lui.
Christ, donc, « nous a placés
dans la liberté en nous affranchissant », en nous libérant de toute servitude
(5:1). Mais il y a un autre danger que celui du légalisme. Notre chair serait
bien disposée à prendre occasion de la liberté pour faire ce qui lui plaît. « Vous
avez été appelés à la liberté ; seulement n’usez pas de la liberté comme
d’une occasion pour la chair
» (v. 13). Prenons garde ! Si nous la
laissons agir, elle suivra ses désirs et se manifestera, à notre honte.
Dans quelques passages, le mot chair
désigne simplement le corps humain,
sans aucun sens péjoratif. Par
exemple : « Dieu a été manifesté en chair » (1 Tim. 3:16) ou « Ce que je vis maintenant dans la chair, je le vis dans
la foi » (Gal. 2:20).
Mais, dans la plupart des
passages du Nouveau Testament où ce mot est employé, la chair
est le
terme spécifique qui évoque l’homme dans son caractère naturel de faiblesse et
de péché.
L’Écriture nous présente la
chair comme quelque chose d’actif,
même dans le croyant. Elle convoite
(Gal. 5:17), elle a des pensées
(Rom. 8:6, 7 ; Col. 2:18), elle a une volonté (Éph. 2:3). Mais va-t-elle dominer la vie
de celui que Christ a racheté ?
Il y a dans le croyant une
autre source de désirs et d’activité, une source de bien ; c’est le Saint
Esprit dont il a été scellé (Éph. 1:13)
et qui habite en lui (Rom. 8,
11). L’apôtre Paul nous exhorte : « Soyez remplis de l’Esprit » (Éph. 5:18). Posséder le Saint Esprit comme
un hôte qui habite en nous est une chose, en être remplis
en est une
autre. La première est la part de tous les vrais chrétiens ; la seconde
est l’heureux état de ceux qui le laissent agir et manifester sa puissance.
L’action du Saint Esprit dans un croyant n’est pas indépendante de son état
spirituel. Par l’état de notre coeur, nous pouvons attrister cet hôte divin et
l’empêcher d’agir. D’où l’exhortation : « N’attristez pas le Saint Esprit
de Dieu, par lequel vous avez été scellés pour le jour de la rédemption » (Éph. 4:30). Etienne est un bel exemple
d’un homme plein de l’Esprit Saint (Act. 6:5,
10 ; 7:55).
« Marchez par l’Esprit, et vous
n’accomplirez point la convoitise de la chair
» (Gal. 5:16). « Si nous vivons par l’Esprit, marchons
aussi par l’Esprit
» (v. 25). Sans aucun doute, le Saint Esprit a
toute la puissance divine, et il peut agir souverainement quand il le veut et
comme il le veut. Mais son action est liée à notre responsabilité de croyants,
puisqu’il est dit ici : « Marchez…
»,
« marchons…
». Lorsque
nous laissons le Saint Esprit agir, les convoitises de la chair sont tenues en
échec.
« Si
vous êtes conduits par l’Esprit, vous n’êtes pas sous la loi
» (v. 18). C’est un très grand privilège de pouvoir
être conduit par l’Esprit. Les désirs du coeur sont en accord avec la volonté
de Dieu et c’est une joie d’accomplir le bien. « C’est une joie pour le juste de
pratiquer ce qui est droit » (Prov. 21:15).
La motivation est tout autre que d’accomplir la loi.
« La
chair convoite contre l’Esprit, et l’Esprit contre la chair ; et ces
choses sont opposées l’une à l’autre, afin que vous ne pratiquiez pas les
choses que vous voudriez
» (v.
17). Ce passage, avec les versets qui suivent, nous présente très distinctement
deux sources de pensées, d’actions ou de sentiments dans le croyant : la
chair et l’Esprit. Ces deux sources « convoitent » l’une contre l’autre, ce qui
amène nécessairement un combat intérieur. L’issue de ce combat, qui se livrera
aussi longtemps que le croyant est sur la terre, n’a pourtant rien d’incertain.
Si nous nous tenons dans la présence de Dieu, dans le jugement de nous-mêmes et
dans la défiance de ce que peut produire notre coeur, nous profitons des
ressources pleinement suffisantes que Dieu nous a données, et nous sommes
vainqueurs. Si nous ne vivons pas près de Dieu, si nous faisons taire notre
conscience, si nous comptons sur nos propres forces, nous allons à grands pas
vers la chute. Remarquons bien que, selon ce verset 17, le but de l’action de
l’Esprit en nous est que nous ne pratiquions pas les choses que nous voudrions,
c’est-à-dire que notre chair voudrait. La puissance du Saint Esprit en nous est
plus que suffisante pour tenir la chair en bride. Laissons-le donc agir !
Les versets suivants décrivent ce que produisent ces deux sources qui sont en nous.
« Or
les oeuvres de la chair sont manifestes, lesquelles sont la fornication,
l’impureté, l’impudicité, l’idolâtrie, la magie, les inimitiés, les querelles,
les jalousies, les colères, les intrigues, les divisions, les sectes, les
envies, les meurtres, les ivrogneries, les orgies, et les choses semblables à
celles-là
» (v. 19-21).
Voilà ce dont la chair est capable, même chez le croyant ! Elle est une source active tendant à produire les choses les plus abominables. Savoir cela devrait nous tenir dans la crainte et dans l’humilité.
La chair n’est pas simplement, comme certains l’ont pensé, d’anciennes habitudes qui datent d’avant notre conversion. Les oeuvres mentionnées dans le verset ci-dessus (fornication, meurtres, idolâtrie, etc.), montrent à l’évidence que la chair n’est pas cela. Comment parler d’anciennes habitudes alors qu’il est manifeste qu’un croyant peut tomber dans des péchés qu’il n’avait jamais commis avant d’être converti ?
En merveilleux contraste avec
ces mauvaises oeuvres, la Parole nous décrit ce que l’Esprit produit dans le
croyant lorsqu’il est libre d’agir. « Mais
le fruit de l’Esprit est l’amour, la joie, la paix, la longanimité, la
bienveillance, la bonté, la fidélité, la douceur, la tempérance : contre
de telles choses, il n’y a pas de loi
» (v. 22). Devant une vie qui
manifeste de tels caractères, la loi n’a plus aucune objection à formuler. Elle
n’a exercé aucune contrainte, mais elle est entièrement satisfaite. Comme en
Romains 8:4, « la juste exigence
de la loi » est « accomplie en nous, qui ne marchons pas selon la chair mais
selon l’Esprit ».
En termes d’une simplicité admirable, le Seigneur avait déjà parlé de ce fruit, et de la condition indispensable pour qu’il soit porté. « Moi, je suis le cep, vous, les sarments. Celui qui demeure en moi, et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit ; car, séparés de moi, vous ne pouvez rien faire » (Jean 15:5).
« Or ceux qui sont
du Christ ont crucifié la chair avec les passions et les convoitises
» (v. 24). Voilà l’état normal de ceux qui sont « du Christ », c’est-à-dire
des vrais chrétiens. Ils ont reçu par la foi ce grand fait qu’ils ont été
crucifiés avec Christ. Ils ont accepté le témoignage que Dieu a rendu à leur
sujet et le jugement que Dieu a prononcé sur la chair : « ils ont crucifié
la chair ». Ils la tiennent pour morte. Ils lui donnent la place que Dieu lui a
donnée : la mort.
Ce verset 24 nous donne en substance le même enseignement que Romains 6:11 : « Tenez-vous vous-mêmes pour morts au péché ».
Si nous avons « crucifié la chair », cela signifie aussi que nous ne la ménageons pas, que nous ne prenons pas soin d’elle. « Revêtez le Seigneur Jésus Christ, et ne prenez pas soin de la chair pour satisfaire à ses convoitises » (Rom. 13:14). Nous devons prendre soin de nos corps physiques, mais non de cet être moral, la chair, caractérisé par les passions et les convoitises et dont les désirs et la volonté sont toujours opposés à Dieu. Souvenons-nous sans cesse que « la pensée de la chair est inimitié contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi de Dieu, car aussi elle ne le peut pas » (Rom. 8:7).
« Mais vous n’avez
pas ainsi appris le Christ… c’est-à-dire, en ce qui concerne votre première
manière de vivre, d’avoir dépouillé le vieil homme qui se corrompt selon les
convoitises trompeuses, et d’être renouvelés dans l’esprit de votre
entendement, et d’avoir revêtu le nouvel homme, créé selon Dieu, en justice et
sainteté de la vérité
» (Éph. 4:20-24). « Ne mentez point l’un à l’autre, ayant dépouillé le vieil homme
avec ses actions et ayant revêtu le nouvel homme qui est renouvelé en
connaissance, selon l’image de celui qui l’a créé
» (Col. 3:9, 10).
L’expression « le vieil homme »
ne se trouve que trois fois dans les Écritures : en Romains 6:6, « notre vieil homme a été crucifié avec Christ
» — passage
sur lequel nous nous sommes déjà arrêtés —, et dans les deux versets ci-dessus,
où il est question d’avoir « dépouillé
le vieil homme
».
La parole de Dieu met
l’accent sur le fait que le salut n’est pas une amélioration du vieil homme,
mais la création d’un nouvel homme : « Si quelqu’un est en Christ, c’est
une nouvelle création
»
(2 Cor. 5:17). Le « nouvel homme
», dans les deux
versets cités plus haut, les seuls passages où l’expression est utilisée, est créé.
Il est « créé selon Dieu », et il est « selon l’image de celui qui l’a créé ». Le
christianisme introduit donc « une nouvelle création », dont Christ et les siens
font partie. C’est la raison pour laquelle ils sont des étrangers dans le
monde.
Les épîtres aux Éphésiens et
aux Colossiens nous présentent le chrétien comme quelqu’un qui a dépouillé le
vieil homme et revêtu le nouvel homme. Les termes employés sont ceux qu’on
utiliserait pour un vêtement, et l’action est considérée comme faite : « … en ce qui concerne votre première
manière de vivre, d’avoir dépouillé le vieil homme… et d’avoir revêtu le nouvel
homme
».
Le vêtement est le symbole de ce qui se voit, du témoignage pratique. Les croyants auxquels l’apôtre s’adresse avaient eu une première manière de vivre qui manifestait le vieil homme. Convertis, ils avaient revêtu le nouvel homme. Mais ils devaient marcher d’une manière qui montre ce nouvel homme. Ils avaient à mettre les détails de leur vie en accord avec le changement qui s’était opéré en eux. « Ayant dépouillé le mensonge, parlez la vérité chacun à son prochain ;… que celui qui dérobait ne dérobe plus… » (Éph. 4:25, 28).
À propos de « revêtir », citons
encore deux passages qui, en d’autres termes, expriment la même vérité :
« Car vous tous qui avez été baptisés pour Christ, vous avez revêtu
Christ » (Gal. 3:27). « Mais revêtez
le Seigneur Jésus Christ » (Rom. 13:14).
Les deux expressions « vous avez
revêtu
» et « revêtez
»
ne s’opposent pas, elles se complètent. Il y a premièrement un état de fait,
vrai pour tout chrétien : « vous avez revêtu Christ ». C’est ainsi que nous
sommes devant Dieu. Secondement, il y a la manifestation pratique de cette
position, dans la vie de tous les jours : « revêtez le Seigneur Jésus
Christ ». Ces passages font ressortir le lien étroit qu’il y a entre notre vie
nouvelle et Christ. Revêtir le nouvel homme, ce n’est rien d’autre, en fait,
que revêtir Christ.
Y a-t-il une différence entre
« le vieil homme » et « la chair » ? Il vaudrait mieux parler de nuance
que de différence
. Tout d’abord, les choses qui nous sont dites de l’un
et de l’autre sont très proches :
convoitises(Éph. 4:22 ; Gal. 5:16).
crucifiéavec Christ » (Rom. 6:6) et « ceux qui sont du Christ ont
crucifiéla chair » (Gal. 5:24). Dans les deux cas, c’est une chose faite.
Cela étant, les expressions
« le vieil homme » et « le nouvel homme » paraissent évoquer — et mettre en contraste
— l’homme que j’étais, fils d’Adam, sans Christ,
et l’homme que je suis
devenu maintenant en Christ,
né de nouveau, né de l’Esprit. « La chair »
est le terme habituel désignant la source active des convoitises. C’est cet
irréductible rebelle à la volonté de Dieu, cet ennemi de Dieu, qui se trouve en
moi (Rom. 8:7). Ce terme de
chair
est utilisé aussi bien pour caractériser notre conduite d’autrefois
sans Christ (Éph. 2:3), que
pour nous mettre en garde contre une conduite de chrétien qui ne différerait pas
de celle de l’inconverti.
Mais la chair comme le vieil homme évoquent la nature humaine marquée par le péché, de sorte qu’on ne peut faire de différence substantielle entre ces termes.
Le coeur est trompeur par-dessus tout, et
incurable ; qui le connaît ? Moi, l’Éternel, je sonde le coeur,
j’éprouve les reins
» (Jér. 17:9, 10).
Il n’est pas flatteur, le
tableau que Dieu trace du coeur de l’homme. Il est pénible à contempler. Il
serait même déprimant si Dieu ne nous avait pas donné simultanément le tableau
de sa grâce. Mais soyons bien assurés que si Dieu nous donne dans sa Parole la
description humiliante de ce que sont nos coeurs, c’est parce que cela nous est
indispensable.
Quelqu’un dira peut-être : C’est le coeur de l’homme naturel qui est si mauvais, pas celui du croyant ! Celui qui a cru au Seigneur Jésus n’a-t-il pas le coeur purifié ? (Act. 15:9 ; 1 Jean 1:7 ; etc.) Dieu n’a-t-il pas « rendu parfaits à perpétuité ceux qui sont sanctifiés » (Héb. 10:14) ? Dieu soit béni, il en est bien ainsi ! C’est là notre position devant Dieu, comme résultat de l’oeuvre parfaite de Christ à la croix.
Le Seigneur Jésus introduira
dans la maison de son Père des hommes qui étaient des pécheurs souillés, mais
que son sang a lavés de tous leurs péchés, et que son oeuvre glorieuse a rendus
« saints et irréprochables » (Éph. 1:4).
Mais bien que nous soyons, déjà maintenant, saints
quant à notre
position devant Dieu, la parole de Dieu nous exhorte à être « saints
dans
toute notre conduite » (1 Pierre 1:15).
Nous devons marcher « comme il convient à des saints » (Éph. 5:3). Ces exhortations montrent — et
notre expérience confirme, hélas ! — que notre état pratique n’est pas
automatiquement le reflet de ce que nous sommes devant Dieu quant à notre
position.
Nous sommes frappés, en lisant les épîtres, d’y trouver des mises en garde contre les péchés les plus grossiers. Qu’est-ce que cela signifie, sinon que nous sommes exposés à les commettre ?
Le Seigneur lui-même met à nu
le fond de notre nature quand il dit : « Ce qui sort de l’homme, c’est là ce qui souille l’homme ; car
du dedans, du coeur des hommes, sortent les mauvaises pensées, les adultères,
les fornications, les meurtres, les vols, la cupidité, les méchancetés, la
fraude, l’impudicité, l’oeil méchant, les injures, l’orgueil, la folie
»
(Marc 7:20-22).
Peut-être pensons-nous avoir été gardés des choses les plus grossières mentionnées ici, ou dans la liste de Galates 5:19-21. Mais justement parce que notre coeur est trompeur, nous pouvons être victimes de manquements que Dieu seul voit, dont nous n’avons peut-être guère conscience, et qui sont pourtant abominables à ses yeux. « Le péché… nous enveloppe si aisément » (Héb. 12:1). Pensons par exemple à l’orgueil, avec ses multiples formes : confiance en soi, obstination, désir de paraître, volonté de dominer, etc. Pierre, dans l’ardeur de son amour et de son zèle pour le Seigneur, pensait que même si tous étaient scandalisés, lui ne le serait point. Nous savons comment il a honteusement renié son Maître.
L’apôtre Paul, un des chrétiens les plus fidèles de tous les temps, a été l’objet de soins particuliers du Seigneur, afin qu’il ne s’enorgueillisse pas. Les privilèges extraordinaires qu’il avait reçus, les révélations qui lui avaient été faites lorsqu’il avait été ravi au troisième ciel, l’exposaient à s’élever dans son coeur. Aussi le Seigneur lui envoya une « écharde pour la chair », afin de le garder dans l’humilité (2 Cor. 12:7). Si ce fidèle serviteur de Christ était exposé à compromettre son témoignage et à jeter du discrédit sur son enseignement par l’orgueil, que devons-nous penser de nous-mêmes ?
La chair ne subit aucune amélioration par la nouvelle naissance. Elle conserve chez le croyant les germes de tous les péchés que peuvent commettre les incrédules.
La parole de Dieu rend un témoignage remarquable
à la fidélité du roi Ézéchias : « Il mit sa confiance en l’Éternel, le Dieu
d’Israël ; et après lui, il n’y en eut point de semblable à lui parmi tous
les rois de Juda, non plus que parmi ceux qui avaient été avant lui » (2 Rois 18:5). Il avait montré les beaux
fruits de la vie divine en lui, lors d’épreuves d’une extrême intensité. Mais
dans une circonstance, « Dieu
l’abandonna pour l’éprouver, afin qu’il connût tout ce qui était dans son coeur
».
Et alors « son coeur s’éleva
»
(2 Chron. 32:31, 25).
Gardons-nous bien de lui jeter la pierre, mais retenons l’enseignement que nous
donne ce récit. Des années de fidélité ne sont pas une garantie pour la suite.
Nous avons sans cesse besoin d’être gardés par la puissance de Dieu. Le mal —
n’importe quel mal ! — peut germer dans nos coeurs à n’importe quel
moment. L’expérience faite par Ézéchias est humiliante, mais elle est
bénéfique. Oh ! si seulement nous apprenions à connaître ce qu’il y a dans
notre coeur par la lecture et la méditation de la parole de Dieu, dans la
communion avec le Seigneur, sans que des chutes soient nécessaires !
Le patriarche Job, sans aucun
doute, avait lui aussi la vie divine. Cet homme « parfait et droit, craignant
Dieu et se retirant du mal » (Job 1:1)
manifestait les fruits de cette vie. Mais il entretenait dans son coeur une
secrète satisfaction de lui-même. Vint l’épreuve, le dépouillement d’abord, la
maladie ensuite, et finalement les insinuations injustes des « amis » qui étaient
venus « le consoler ». Ils laissaient entendre qu’il récoltait ce qu’il avait
semé. Et Job perdit patience. Dans un flot de paroles irréfléchies (chap. 29 et 31), il proclama ses bonnes oeuvres et sa perfection. Alors Dieu
se révéla à lui, d’abord par la bouche d’un messager fidèle, Elihu (chap. 32 à 37), puis directement. Et dans ce contact avec Dieu, Job apprit
non seulement à connaître Dieu
de plus près, mais à se connaître
lui-même.
Écoutons ses dernières paroles : « Mon oreille avait entendu parler de toi, maintenant mon oeil t’a
vu : C’est pourquoi j’ai horreur de moi, et je me repens dans la poussière
et dans la cendre
» (42:5,
6).
Avons-nous aussi appris à dire : « Je sais qu’en moi, c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de bien » (Rom. 7:18) ? L’expérience de ce chapitre 7 de l’épître aux Romains pourra être nécessaire pour nous amener à comprendre véritablement cela.
Dans ce monde, la confiance en soi-même est généralement considérée comme une qualité de caractère, et même comme une nécessité pour faire son chemin dans la vie. Par exemple, dans beaucoup de domaines professionnels, on veut des hommes et des femmes sûrs d’eux-mêmes, conscients de leurs capacités et de leur valeur, et qui sachent s’imposer. Ce sont les normes du monde.
Les normes de l’Écriture sont
bien différentes. « Ainsi dit
l’Éternel : Maudit l’homme qui se confie en l’homme, et qui fait de la
chair son bras, et dont le coeur se retire de l’Éternel !… Béni l’homme
qui se confie en l’Éternel, et de qui l’Éternel est la confiance !…
»
(Jér. 17:5 et 7). Cette
déclaration du prophète a encore toute sa valeur aujourd’hui. Se confier en
la chair
, se confier en
l’homme,
que ce soit en soi-même ou en quelqu’un d’autre, conduit
nécessairement à laisser Dieu de côté. C’est le chemin de la malédiction (v.
6). Au contraire, mettre sa confiance en Dieu, c’est le chemin de la
bénédiction (v. 8).
« Qui se confie en son
propre coeur est un sot
»
(Prov. 28:26). Et se confier en
ses biens
, en ses richesses
, en son intelligence
, en sa beauté
,
en son arc
, en son épée
… conduit également à la ruine (cf. Ps. 44:6 ; 49:6 ; Prov. 3:5 ;
11:28 ; Ézéch. 16:15).
Pour les hommes qui ne connaissent pas Dieu, cette confiance-là peut avoir quelque valeur pendant un certain temps. Mais pas pour un chrétien.
L’histoire de David et Goliath éclaire admirablement le sujet (1 Sam. 17). Elle nous enseigne que si, dans le monde, la confiance en soi fait des champions, dans le domaine de la foi, c’est la confiance en Dieu qui fait des vainqueurs. Le géant Goliath, très conscient de sa force, défie quiconque de se mesurer à lui dans une lutte en duel. Le jeune David, humblement, se confie en Dieu. Et il s’approche courageusement. Nous le voyons montrer autant d’assurance que Goliath, mais son assurance est fondée sur Dieu. Il a bien sa fronde à la main, mais ce n’est pas en elle qu’il se confie. « Tu viens à moi avec une épée, et avec une lance, et avec un javelot — dit-il — et moi, je viens à toi au nom de l’Éternel… En ce jour, l’Éternel te livrera en ma main ; et je te frapperai, et j’ôterai ta tête de dessus toi… et toute la terre saura qu’il y a un Dieu pour Israël ; et toute cette congrégation saura que ce n’est ni par l’épée, ni par la lance, que l’Éternel sauve » (v. 45-47).
Quelqu’un dira peut-être : — D’accord ! il ne faut pas se confier en soi-même, mais n’est-il pas juste de s’appuyer sur ce que Dieu nous a donné ? L’histoire d’Ozias tranche la question. Ce roi qui craignait Dieu « fut merveilleusement aidé jusqu’à ce qu’il devint fort. Mais quand il fut devenu fort, son coeur s’éleva jusqu’à le perdre » (2 Chron. 26:15, 16). L’ensemble de l’histoire vaut la peine d’être relue. Expérimenter le secours de Dieu ne nous met pas à l’abri de l’orgueil. Avoir été aidé par Dieu, même « merveilleusement », nous expose à nous confier en nos propres forces. Pauvre coeur humain !
Dans l’épître aux Philippiens, l’apôtre Paul donne une description résumée du chrétien (Phil. 3:3) :
— »nous rendons culte par l’Esprit de Dieu »,
— »nous nous glorifions dans le Christ Jésus »,
— »nous n’avons pas
confiance en la chair
».
L’apôtre lui-même souffrait d’infirmités qui, à un moment donné, lui avaient semblé être des handicaps pour son service. Mais il avait appris qu’elles lui étaient indispensables pour que la puissance de Christ demeure sur lui. Et ainsi, il les acceptait joyeusement (2 Cor. 12:7-10).
Nous allons trouver dans ce passage un autre effet de la mort de Christ pour nous. Ici encore, la mort exprime une rupture complète et définitive.
« C’est
pourquoi, mes frères, vous aussi, vous avez été mis à mort à la loi par le
corps du Christ, pour être à un autre, à celui qui est ressuscité d’entre les
morts, afin que nous portions du fruit pour Dieu
» (Rom. 7:4).
Au début du chapitre,
l’apôtre traite de la relation de l’homme avec la loi,
ce qui, dans son
sens premier, concerne Israël et la loi de Moïse. Mais le principe s’étend à
n’importe quel système d’ordonnances, à toute époque. L’alliance de Sinaï avait
mis le peuple d’Israël en relation avec Dieu sur la base de la loi des dix
commandements. Transgressée sur toute la ligne, cette loi n’a pu que prononcer
la condamnation irrévocable de tous ceux qui étaient sous son autorité. « Tous
ceux qui sont sur le principe des oeuvres de loi sont sous malédiction », dit
l’épître aux Galates, mais « Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi,
étant devenu malédiction pour nous » (Gal. 3:10, 13).
Comment nous en a-t-il
rachetés ? Comment avons-nous été déliés de la contrainte pesante et
irréalisable de la loi ? Par la mort
de Christ. « Vous avez été
mis à mort
à la loi par le corps du Christ… » (Rom. 7:4). L’enseignement de l’apôtre se base sur le fait que nous
avons été identifiés à Christ dans sa mort. Sa mort devient la nôtre. Nous
sommes morts à la loi
, c’est-à-dire
relativement à elle
.
Dans les premiers versets du
chapitre, l’apôtre donne une comparaison pour faire comprendre la pensée
essentielle qu’il veut enseigner. Il utilise la relation conjugale comme image
de la position de quelqu’un sous la loi. La femme mariée est liée à son mari
tant qu’il vit. S’il meurt, elle est « déliée de la loi du mari », et peut se
marier à un autre homme. La mort brise le lien conjugal. De la même manière,
ceux qui étaient sous l’autorité de la loi ne pouvaient en être retirés que par
la mort. Dans cette comparaison, la loi correspond au premier mari, et ceux qui
étaient sous son autorité correspondent à la femme. Cependant la loi ne saurait
mourir. Aussi, la mort nécessaire à la rupture du lien conjugal est placée de
notre côté. Christ est mort, et quant à vous, « vous avez été mis à mort à la loi par le corps du Christ…
».
Et dans quel but ? — « pour
être à un autre, à celui qui est ressuscité d’entre les morts
». Vous êtes liés à Christ dans sa
mort — ce qui vous délie de la loi — et vous êtes aussi liés à lui dans sa
résurrection. Relativement à la loi, vous êtes morts, mais relativement à
Christ, vous êtes vivants. Vous lui appartenez.
L’épître aux Colossiens exprime la même vérité d’une manière légèrement différente : « Il vous a vivifiés ensemble avec lui,… ayant effacé l’obligation qui était contre nous, laquelle consistait en ordonnances et qui nous était contraire, et il l’a ôtée en la clouant à la croix » (2:13, 14). Ce qui est cloué à la croix, ce n’est pas la loi elle-même, mais c’est « l’obligation qui était contre nous », c’est-à-dire l’assujettissement à la loi. Le principe est le même qu’en Romains 7 : c’est la mort de Christ qui rompt ce lien de servitude.
Quelle libération ! Quel
affranchissement ! Mais cette liberté dans laquelle nous sommes placés n’a
pas pour but de faire abonder les péchés. Au contraire, c’est « afin que nous portions du fruit pour
Dieu
».
On pourrait s’étonner. Les bonnes règles de la loi divine ne sont-elles pas propres à réfréner les mauvaises tendances de l’homme, et même du chrétien, de manière à le faire marcher droit ? Hélas non ! La loi indique le chemin, mais elle ne donne aucune force pour y marcher. Elle a pour effet de stimuler le péché et de faire abonder les transgressions (Rom. 5:20 ; 7:9).
Pour porter « du fruit pour Dieu », la puissance du Saint Esprit nous est indispensable. Le chapitre 8 de l’épître, qui montre l’effet de sa présence et de son activité dans le croyant, nous parle de « ce qui était impossible à la loi, en ce qu’elle était faible par la chair ». Ce qui était impossible à la loi, c’était de nous faire porter du fruit pour Dieu. Mais ce résultat, Dieu lui-même l’opère dans les croyants par la puissance de son Esprit, « afin que la juste exigence de la loi » soit « accomplie en nous, qui ne marchons pas selon la chair, mais selon l’Esprit » (8:3, 4).
Les commandements de Dieu étaient tels que « s’il
les pratique, un homme vivra » (Lév. 18:5),
mais l’homme s’étant montré incapable de les pratiquer, la loi n’a pu amener
que sa condamnation à mort. « Le commandement qui était pour la vie, a été
trouvé lui-même pour moi pour la mort.
Car le péché, ayant trouvé une
occasion par le commandement, me séduisit, et par lui me tua
» (Rom. 7:10, 11).
Les expressions « moi je mourus
» (v. 9), « il me tua
» (v. 11), ou « le
péché… m’a causé la mort
par ce qui est bon » (v. 13) signifient que le
péché, en raison des justes exigences de la loi, inscrit sur moi la sentence
de mort.
Un homme sous la loi, c’est un condamné à mort !
L’apôtre prend soin de montrer que si la loi divine a amené ce triste résultat, ce n’est pas qu’elle soit mauvaise. Au contraire, « la loi… est sainte, et le commandement est saint, et juste, et bon » (v. 12). Ce résultat vient de ce que l’homme, dans le fond de sa nature, est mauvais. Il y a une source corrompue liée au coeur de l’homme, que l’apôtre appelle ici « le péché ». C’est la source qui produit « les péchés ». « Mais le péché, afin qu’il parût péché, m’a causé la mort par ce qui est bon (la loi), afin que le péché devînt par le commandement excessivement pécheur » (v. 13). La loi a manifesté le vrai caractère de la nature de l’homme, son état de corruption irrémédiable.
Les six premiers versets du
chapitre nous ont montré que la mort de Christ nous a déliés de la loi :
par cette mort, nous sommes morts à la loi
. Et dans les versets 7 à 13,
nous avons vu l’effet de la loi appliquée à l’homme pécheur : en raison de
la justice de Dieu, d’une part, en raison de l’état de l’homme, d’autre part,
la loi ne peut que condamner à mort
.
Ces deux pensées sont
rassemblées dans le court verset de l’épître aux Galates : « Car moi, par la loi, je suis mort à la
loi, afin que je vive à Dieu
» (Gal. 2:19). La déclaration : « je
suis mort à la loi » exprime l’appropriation personnelle de la vérité
libératrice présentée dans les premiers versets de Romains 7. Et la déclaration : « par la
loi, je suis mort » correspond à ce qui est développé dans les versets 7 à 13.
Dans ce passage de Galates 2, sur lequel nous nous sommes déjà arrêtés dans notre premier chapitre, l’apôtre s’exprime de façon personnelle. Il réalise dans sa conscience toute la force de la loi, et l’incapacité dans laquelle il est d’y satisfaire. Mais il se repose sur Celui qui a pris sa place sous la malédiction de la loi, et a subi la mort comme jugement de Dieu — « le Fils de Dieu qui m’a aimé et qui s’est livré lui-même pour moi » (v. 20).
Il dit encore, dans le verset
19, « afin que je vive à Dieu
».
Je suis mort… afin que je vive ! Le choc de ces mots ne peut que nous
impressionner. « Mort à la loi », « vivant à Dieu » ! Totalement délivré de la
condamnation et de l’emprise de la loi, parce que Christ a été mon substitut
sur la croix et a subi la condamnation à ma place, je suis placé dans une
nouvelle condition devant Dieu. Du côté de la loi, la rupture est totale. Et je
possède maintenant une nouvelle vie, consacrée à Dieu — une vie dont Dieu est la
source, le but, la puissance.
À partir du verset 14, ce chapitre présente une lutte intérieure désespérée aboutissant à un cri de détresse. Ce tableau peut rappeler à plus d’un chrétien un état qu’il a connu pendant un certain temps de sa vie, ou même à plusieurs reprises. Pour quelques-uns, il peut aussi être la description d’un état actuel, dans lequel la joie chrétienne est assombrie, pour ne pas dire totalement étouffée. Les expériences par lesquelles Dieu nous fait passer sont diverses. Celles de ce chapitre, tout comme la conversion, peuvent revêtir des formes différentes pour l’un et pour l’autre.
Ce qu’il faut remarquer
d’emblée, c’est que celui qui parle ici est un croyant, puisqu’il peut
dire : « je prends plaisir à la loi de Dieu selon l’homme intérieur » (v.
22) ; mais c’est un croyant malheureux. Instruit par la loi de Dieu, il
sait comment il devrait marcher, mais il n’a aucune force pour le faire. « Car ce n’est pas ce que je veux, que je
fais, mais ce que je hais, je le pratique
» (v. 15). « Car le bien que je veux, je ne le
pratique pas ; mais le mal que je ne veux pas, je le fais
» (v.
19). Il voit dans ses membres « une autre loi » — comme une force intérieure —
« qui combat contre la loi de son entendement », c’est-à-dire contre les désirs
du nouvel homme (v. 23).
Fort heureusement, il ne
prend pas son parti de cet état. Il en souffre, et il continue à lutter. Il se
sent esclave, « vendu au péché
»
(v. 14), « captif de la loi du péché
qui existe dans ses membres
» (v. 23). Remarquons combien cet état
est loin de celui que Dieu veut pour les siens. Il est explicitement contraire
à celui qui a été présenté au chapitre 6,
par exemple au verset 14 : « Car le péché ne dominera pas sur vous, parce
que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce », ou aux versets 18 et
22 : « ayant été affranchis du péché… ».
Pour comprendre cette
contradiction, pensons à un esclavage entre hommes. Un esclave peut être
affranchi en fait
ou en pratique.
Il est affranchi en fait
au moment où, par exemple, un bienfaiteur l’achète et le rend libre. Il est
affranchi en pratique
au moment où il cesse de servir son ancien maître.
La première étape est le fondement indispensable de la seconde.
Par la mort de Christ, nous avons été affranchis aussi bien de l’esclavage du péché que de celui de la loi. Nous sommes « morts au péché » et « morts à la loi ». Cet affranchissement a eu lieu lorsque Christ a donné sa vie pour nous. C’est le prix qu’il a payé pour cela. Et nous devenons participants de cette immense bénédiction au moment où nous recevons la vie nouvelle. Mais tout en étant réellement des affranchis, nous pouvons vivre comme des esclaves.
Le croyant qui parle dans ce
chapitre se place encore sous la loi. Il prend plaisir à la loi de Dieu (v.
22), et il veut
l’accomplir. Mais il doit constater qu’il n’en est pas
capable. En fait, l’esclavage de la loi conduit à l’esclavage du péché. Tant
que nous sommes « sous la loi », le péché domine sur nous (6:14).
Mais que manque-t-il donc pour être effectivement et pratiquement soustrait à cet esclavage ?
Il nous faut apprendre, et c’est une des leçons les plus pénibles qui soit, que nous n’avons aucune force en nous-mêmes. Le nouvel homme que nous sommes depuis notre nouvelle naissance est parfait, mais il n’a pas de force. Ceci nous oblige à être constamment dépendants du Seigneur. Selon l’image de la vigne, en Jean 15, les sarments ne peuvent produire de fruit par eux-mêmes. La sève, l’énergie nourricière, provient du cep, et le fruit n’est produit que si les sarments demeurent dans le cep. « Séparés de moi », a dit le Seigneur, « vous ne pouvez rien faire » (v. 5).
Cette dernière partie de
Romains 7 est frappante par
l’abondance des « moi » et des « je ». (Comme aussi les chapitres 29 et 31 de Job.) Celui qui parle est tourné vers lui-même. Il se
débat avec lui-même, et s’enfonce toujours plus. Finalement, n’en pouvant plus,
il regarde en dehors de lui et appelle au secours : « Misérable homme que je suis, qui me
délivrera de ce corps de mort ?
» (v. 24). Et c’est alors qu’il
trouve la délivrance. Notre Sauveur nous suit toujours des yeux, et il est prêt
à nous délivrer dès que nous crions à lui. C’est pourquoi le cri de détresse
est suivi immédiatement d’une expression de reconnaissance : « Je rends grâces à Dieu par Jésus Christ
notre Seigneur
» (v. 25). La délivrance est goûtée sans transition
parce qu’elle résulte de l’oeuvre de Christ, qui est déjà accomplie.
Nous avons une illustration de ceci dans le récit de Pierre marchant sur la mer (Matt. 14:24-33). Tant qu’il regarde à Jésus, se confiant en lui, tout va bien. Il est comme soustrait à la loi naturelle de la pesanteur. Mais quand il regarde au vent et aux vagues, il s’enfonce. Alors, dans sa détresse, il crie à Jésus. Il renonce à ses efforts inutiles. Et aussitôt Jésus étend sa main pour le délivrer.
Dans le chapitre qui suit
celui dont nous nous occupons, l’élément dominant sera « l’Esprit », non plus le
« moi » et le « je ». Et celui qui vient de s’avouer captif de la loi du péché
qui existe en lui (7:23) va se
déclarer affranchi de la loi du péché
(8:2).
Le croyant dont nous venons de voir les luttes
s’écrie : « Or si ce que je ne
veux pas, moi, — je le pratique, ce n’est plus moi qui l’accomplis, mais c’est
le péché qui habite en moi
» (Rom. 7:20), constat qui ne donne d’ailleurs aucun soulagement à son
trouble intérieur. Arrêtons-nous un peu sur cette déclaration.
Celui qui l’exprime prend en
quelque sorte ses distances vis-à-vis du péché
qui habite en lui et qui
le domine. Ce péché
, c’est
le tyran déjà rencontré au chapitre 6 (v.
12, 13,…), et aussi appelé là « notre vieil homme » (v. 6). Mais, tandis qu’il y
était présenté comme un maître dépouillé de son autorité — « vous étiez
esclaves du péché » (v. 17, 20) ; vous avez « été affranchis du péché » (v.
18, 22) — nous le voyons ici dominant sur le croyant ! Alors que « notre
vieil homme » était déclaré « crucifié avec Christ, afin que le corps du péché
soit annulé » (v. 6), nous le voyons ici en activité et imposant sa volonté.
Le croyant qui vit cette lutte a parfaitement raison sur un point. Il ne reconnaît pas son vieil homme comme étant son « moi ». Il s’identifie à son nouvel homme, qui définit sa véritable position devant Dieu. Il attribue le mal qu’il commet à un hôte indésirable qui habite en lui. Il se met en quelque sorte du côté de Dieu contre le vieil homme.
Son erreur, c’est que par
ses propres efforts
il cherche à réduire à l’impuissance cet être
essentiellement insoumis. Rien ni personne ne peut faire plier le vieil homme.
Celui qui dit : « ce
n’est plus moi… mais c’est le péché qui habite en moi » (7:20) se distance donc de son vieil homme. Il ne reconnaît pas
comme venant de lui ce que le péché produit en lui : « ce que je fais, je
ne le reconnais pas, car ce n’est pas ce que je veux, que je fais, mais ce que
je hais je le pratique » (v. 15). Dans ces versets, « je » et « moi » désignent
incontestablement le croyant lui-même. Mais au verset 18, quand il dit :
« Car je sais qu’en moi,
c’est-à-dire en ma chair, il n’habite point de
bien », le mot « moi » désigne manifestement la chair. On pourrait trouver bien
d’autres exemples analogues. On voit que « je » ou « moi » ne désignent pas
toujours la même chose. Cela peut être le croyant lui-même, le vieil homme ou
le nouvel homme. En Galates 2:20 : « Je
suis crucifié avec
Christ » — c’est le vieil homme. « Ce que je
vis maintenant dans la chair,
je
le vis dans la foi » — c’est le nouvel homme, auquel Paul s’identifie.
« Ainsi donc moi-même, de l’entendement je sers la loi de Dieu ; mais de la
chair, la loi du péché » (Rom. 7:25).
Qui sert la loi de Dieu ? Le nouvel homme. Et qui sert la loi du
péché ? Le vieil homme.
L’existence simultanée du
vieil homme et du nouvel homme dans le croyant ne signifie en aucune façon
qu’il soit deux personnes. Mais il est un être complexe : il participe de
la nature
d’Adam par son corps et par la chair qui lui est
indissolublement attachée, et il participe « de la nature
divine » (2
Pierre 1:4) par le nouvel homme
créé par Dieu lors de sa nouvelle naissance.
C’est pourquoi, en parlant du vieil homme et du
nouvel homme, les commentateurs ont fréquemment employé des expressions comme
la vieille
et la nouvelle nature
. Ces expressions sont en plein accord avec l’Écriture (cf. Éph.
2:3 et 2 Pierre 1:4). C’est bien à deux natures que
fait allusion le Seigneur, dans son entretien avec Nicodème au sujet de la
nouvelle naissance, lorsqu’il dit : « Ce qui est né de la chair est
chair ; et ce qui est né de l’Esprit est esprit » (Jean 3:6). Celui qui est engendré a la
nature de celui qui l’a engendré. Descendants d’Adam, nous possédons sa nature.
Engendrés de Dieu, nous participons de sa nature.
Mais, encore une fois, le fait que le croyant
possède ces deux natures n’empêche nullement qu’il soit une seule personne. Et
cette remarque n’est pas sans importance en ce qui concerne sa
responsabilité devant Dieu.
En effet, quelqu’un pourrait demander, en
pensant à Romains 7:20 :
Si le mal que je fais vient d’un autre, qui n’est plus moi, puis-je en être
rendu responsable ? La réponse sans équivoque est oui.
Pourquoi ?
Premièrement, souvenons-nous que Dieu a mis à notre disposition tout ce qu’il faut pour être des vainqueurs. Il nous a donné la vie même de Christ ressuscité, et il a mis en nous son Esprit. Il nous a déliés de notre assujettissement au péché qui habite en nous, en nous identifiant avec Christ dans sa mort. Il nous a montré le chemin de la victoire sur nos ennemis extérieurs et intérieurs. Nous sommes responsables de saisir par la foi ce qu’il nous a donné.
Deuxièmement, la parole de Dieu entière rend témoignage au fait que tout homme rendra compte à Dieu. Assurément, celui qui a la vie éternelle « ne vient pas en jugement », comme le Seigneur l’a affirmé (Jean 5:24). C’est-à-dire qu’aucune condamnation ne saurait intervenir pour lui. Il n’en demeure pas moins qu’ »il faut que nous soyons tous manifestés devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive les choses accomplies dans le corps, selon ce qu’il aura fait, soit bien, soit mal » (2 Cor. 5:10). En ce jour-là, personne ne songera à dire : ce n’était pas moi, mais le péché qui habitait en moi ! Et dans l’épître aux Romains même, il est écrit : « Nous comparaîtrons tous devant le tribunal de Dieu… Ainsi donc, chacun de nous rendra compte pour lui-même à Dieu » (14:10, 12).
Troisièmement, le gouvernement de Dieu sur la terre existe, tout mystérieux qu’il soit. Même si, pour les croyants, il a la forme douce d’une discipline paternelle ! C’est à des chrétiens qu’il est écrit : « Ce qu’un homme sème, cela aussi il le moissonnera. Car celui qui sème pour sa propre chair moissonnera de la chair la corruption » (Gal. 6:7, 8). Ainsi, je demeure responsable de mes actes, même si c’est la chair qui les a produits.
Je n’oublie pas que lorsque
j’étais pécheur, mort dans mes péchés, haïssable, le Fils de Dieu m’a aimé et
s’est livré lui-même pour moi
(Éph. 2:5 ; Tite 3:3 ;
Gal. 2:20). C’est moi
qu’il a aimé, et non pas le vieil homme — ni le nouvel homme, qui alors
n’existait pas. Dans sa grâce, Dieu m’a pardonné toutes mes fautes, m’a vivifié,
m’a justifié (Col. 2:13 ;
Rom. 5:1). Il m’a lié fermement
à Christ, m’a placé en Christ, m’a rendu agréable dans le Bien-aimé (2 Cor. 1:21 ; Rom. 8:1 ; Éph. 1:6). Bientôt il m’introduira
irréprochable devant sa gloire avec abondance de joie (Jude 24). Dans ce
parcours extraordinaire, qui commence si bas et qui aboutit si haut, c’est
toujours moi
— une seule et même personne — qui suis le bénéficiaire des
« immenses richesses de la grâce » de Dieu, « à la louange de sa gloire ».
« Ainsi donc
moi-même, de l’entendement je sers la loi de Dieu ; mais de la chair, la
loi du péché
» (Rom. 7:25).
Au sujet de ce verset, quelqu’un a écrit : « Cette dernière phrase du chapitre a embarrassé bien des chrétiens ; ils pensaient qu’après la joie de la délivrance qui vient de s’exprimer en actions de grâces, il ne devrait plus être question de servir encore la loi du péché. Or c’est précisément dans cette conclusion finale, paisiblement énoncée après la délivrance, que se trouve la clé de l’enseignement de ce chapitre. Je ne dois pas me faire d’illusions sur moi-même, comme si j’étais devenu meilleur, ou capable de le devenir après avoir cru. Il y a en moi deux natures dont le caractère est clairement établi :
— la nouvelle, par l’entendement
(l’intelligence renouvelée), sert
la loi de Dieu ; elle a la volonté de faire ce qui Lui est agréable ;
— l’ancienne, la
chair,
sert la loi du péché et ne peut faire autrement.
Maintenant que je le sais, je
fais mon compte avec cela ; je l’accepte ainsi et c’est un gain. Je ne
suis pas meilleur qu’avant, mais je le sais et la chair est désormais jugée. Je
peux maintenant dire avec Paul : Nous n’avons pas confiance en la chair
»
(Phil. 3:3).
Ainsi que nous l’avons déjà constaté, la seconde moitié de Romains 7 montre un croyant dont l’état pratique contredit la position dans laquelle Dieu l’a placé, position décrite au chapitre 6. Tandis que son « vieil homme a été crucifié avec Christ » (6:6), et que par là il a « été affranchi du péché » (v. 18, 22), il doit confesser au chapitre 7 que, sur un plan pratique, il se laisse dominer par le péché. Il dit : « Je suis… vendu au péché », « captif de la loi du péché qui existe dans mes membres » (v. 14, 23).
Il se débat ainsi avec lui-même jusqu’au moment où il crie au secours (v. 24). C’est alors que tout change, et qu’il peut rendre grâces à Dieu (v. 25). Le détail et les motifs de la délivrance sont donnés au chapitre 8. Arrêtons-nous sur quelques versets du début de ce chapitre.
« Il
n’y a donc maintenant aucune condamnation pour ceux qui sont dans le Christ
Jésus
» (v. 1). La position des
croyants est définie par l’expression : ils sont dans
le Christ
Jésus, ou, selon d’autres passages, il sont en
Christ. Comme des
sarments dans un cep, comme des membres dans un corps ! (Jean 15:5 ; 1 Cor. 6:15). « Celui qui nous lie
fermement
avec vous à Christ,
… c’est Dieu » (2 Cor. 1:21). Ce sont différents aspects de
ce fait merveilleux que nous sommes « unis au Seigneur, un seul esprit avec lui »
(1 Cor. 6:17). Le Seigneur
Jésus en avait déjà parlé à ses disciples, juste avant sa mort, quand il leur
disait : « En ce jour-là, vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous
en moi
et moi en vous » (Jean 14:20).
Cela étant, comment pourrait-on imaginer que ceux qui sont dans le Christ Jésus puissent subir une condamnation quelconque ? Il faudrait que Christ lui-même soit condamné !
Voici maintenant une
déclaration en rapport direct avec le dilemme du chapitre précédent : « La loi de l’Esprit de vie dans le Christ
Jésus, m’a affranchi de la loi du péché et de la mort
» (v. 2). Nous
retrouvons la loi du péché
du chapitre 7 (v. 23) — non plus pour constater avec douleur notre
asservissement à cette loi, mais pour constater avec joie que nous en sommes
affranchis. L’état pratique du croyant est maintenant en accord — et non plus
en contradiction — avec les grands faits exposés au chapitre 6.
Mais qu’est-ce qui a opéré ce changement ? La loi de l’Esprit de vie. C’est-à-dire la puissance du Saint Esprit agissant dans l’âme du croyant. Au chapitre 7, ce qui était en activité, c’était le croyant lui-même, ses bonnes intentions, sa bonne volonté, ses efforts. Maintenant, le moi passe à l’arrière-plan.
« Ce qui était
impossible à la loi, en ce qu’elle était faible par la chair…
» (v. 3). La chair étant ce qu’elle est — foncièrement mauvaise et insoumise
— la loi ne pouvait rien produire de bon : elle était « faible », faible à
cause de la chair. Qu’est-ce qui était impossible à la loi ? Selon le
chapitre 7, deux choses :
1° libérer un homme pécheur de l’esclavage du péché, 2° lui faire
porter du fruit pour Dieu. Mais ce que la loi ne pouvait faire, Dieu l’a fait. « …Dieu, ayant envoyé son propre Fils en
ressemblance de chair de péché, et pour le péché, a condamné le péché dans la
chair
» (v. 3). Ceci se rapporte à la première chose. Lorsque Christ
a été crucifié, « notre vieil homme a été crucifié avec lui » (6:6). Alors, le péché dans la chair a
été jugé, condamné. Ce grand fait est la base d’une marche où le vieil homme
est effectivement mis de côté, parce que tenu dans la mort. Quant à la deuxième
chose, l’apôtre ajoute : « afin
que la juste exigence de la loi fût accomplie en nous, qui ne marchons pas
selon la chair, mais selon l’Esprit
» (v. 4). Tout le bien que
demandait la loi, et beaucoup plus encore, est accompli en nous si nous
marchons selon l’Esprit. C’est-à-dire si nous nous laissons conduire par
l’Esprit qui habite en nous, si nous le laissons agir. Il produit alors ce
fruit magnifique de Galates 5:22,
que la loi ne peut qu’approuver. Mais ce n’est pas elle qui le produit !
« Car
ceux qui sont selon la chair ont leurs pensées aux choses de la chair ;
mais ceux qui sont selon l’Esprit, aux choses de l’Esprit ; car la pensée
de la chair est la mort ; mais la pensée de l’Esprit, vie et paix
» (v. 5, 6).
La chair a sa propre sphère de pensées, de désirs et d’intérêts ; l’aboutissement en est la mort. Mais il y a une autre sphère de pensées, de désirs et d’intérêts pour ceux qui sont nés de l’Esprit, parce que leur vie tire son caractère de la présence de l’Esprit en eux. Là tout tend à la vie et à la paix. Ces deux sphères sont celles des deux natures — chair et esprit — dont le Seigneur a parlé à Nicodème (Jean 3:6), et notre passage évoque leurs caractères et leurs fins.
« La
pensée de la chair est inimitié contre Dieu, car elle ne se soumet pas à la loi
de Dieu, car aussi elle ne le peut pas
» (v. 7). Il est remarquable de trouver cette déclaration dans ce contexte.
Il reste vrai, même pour le chrétien vivant pratiquement sa position
d’affranchissement, qu’il y a au-dedans de lui un ennemi redoutable et
sournois. Le caractère de la chair qui est particulièrement mis en évidence
ici, c’est l’insoumission, la propre volonté. Cette insoumission peut se
manifester sous des formes ouvertes, comme la désobéissance à la parole de
Dieu. Elle peut aussi avoir des formes plus subtiles, telles la liberté de
pensée ou l’indépendance d’esprit — que ce monde revendique et approuve — alors
que Dieu veut amener « toute pensée captive à l’obéissance du Christ » (2 Cor. 10:5).
Ce verset 7 jette encore de la lumière sur la dernière phrase du chapitre précédent : « Ainsi donc moi-même, de l’entendement je sers la loi de Dieu ; mais de la chair, la loi du péché » (7:25). Même s’il a saisi la plénitude de la délivrance que Christ lui a acquise, même s’il a expérimenté la puissance du Saint Esprit le conduisant dans une voie de sainteté et de justice, le croyant conserve en lui ces deux natures essentiellement différentes, prêtes à produire leurs fruits caractéristiques. Savoir que nous sommes exposés à servir la loi du péché — bien que nous ayons tout à disposition pour ne pas tomber — n’est en aucune façon une entrave à notre joie chrétienne ou à notre paix intérieure. Mais cela nous donne une crainte salutaire et nous rejette entièrement sur le Seigneur pour être gardés de chute. La crainte de glisser nous pousse à tenir la main de notre Sauveur ! Et tant que nous tenons cette main, nous marchons sans glisser.
« Et ceux qui sont
dans la chair ne peuvent plaire à Dieu. Or vous n’êtes pas dans la chair, mais
dans l’Esprit, si du moins l’Esprit de Dieu habite en vous ;
mais si quelqu’un n’a pas l’Esprit de Christ, celui-là n’est pas de lui
» (v. 8, 9). En contraste avec la fin
du verset 4, qui présente deux manières de marcher
— selon la chair ou
selon l’Esprit —, nous trouvons ici des expressions remarquables pour
distinguer deux états
, celui des chrétiens et celui des incrédules. Les
uns sont dans l’Esprit,
les autres dans la chair.
C’est leur position
devant Dieu. Ceux qui sont encore tels qu’ils étaient par nature sont dans
la chair,
l’expression se comprend facilement. Ceux qui sont nés de
l’Esprit, et qui ont été scellés du Saint Esprit, sont considérés comme étant dans
l’Esprit.
Ils sont dans une condition caractérisée par la présence et la
puissance de l’Esprit (*).
(*) Attirons ici l’attention sur deux importantes notes de la version J.N. Darby :
à Rom. 1:4 : « Esprit, et esprit, c’est-à-dire le Saint Esprit lui-même aussi bien que l’état de l’âme caractérisé par sa présence et sa puissance »
à Rom. 8:9 : « L’Esprit lui-même, et l’état du croyant sont souvent trop intimement liés dans ces versets 1 à 11, pour faire la différence entre Esprit et esprit, et les séparer l’un de l’autre »
« Mais
si Christ est en vous, le corps est bien mort à cause du péché, mais l’Esprit
est vie à cause de la justice
»
(v. 10). Le verset précédent vient de rappeler que l’Esprit, qui est « l’Esprit
de Christ », habite dans le croyant. Ainsi, Christ habite dans le croyant par
son Esprit. C’est ce que le Seigneur avait dit à ses disciples en les quittant,
lorsqu’il leur annonçait la venue du Consolateur : « Je ne vous laisserai
pas orphelins ; je viens à vous
» et « vous connaîtrez que moi je suis en mon Père, et vous en
moi et moi en vous
» (Jean 14:18,
20). Paul priait pour que les croyants soient fortifiés en puissance par
l’Esprit, de sorte que le Christ habite, par la foi, dans leurs coeurs (Éph. 3:16, 17). La puissance de l’Esprit
en nous, la vie de Jésus en nous, tient effectivement dans la mort ce qui a été
appelé un peu plus haut « ce corps de mort », — cette chair qui, lorsqu’elle
agit, ne produit que péché et mort. L’Esprit, au contraire, donne son propre
caractère à une vie qui se déploie dans le chemin de la justice.
« Et
si l’Esprit de celui qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous,
celui qui
a ressuscité le
Christ d’entre les morts vivifiera vos corps mortels aussi, à cause de son
Esprit qui habite en vous
»
(v. 11). La puissance de Dieu démontrée dans la résurrection de Christ a déjà
opéré dans nos âmes pour nous amener à la vie ; elle continue à y opérer
pour y produire une marche selon Dieu (Éph. 1:19) ; et au jour où Christ reviendra, elle opérera dans
nos corps mortels pour les vivifier.
« Ainsi donc,
frères, nous sommes débiteurs, non pas à la chair pour vivre selon la chair
» (v. 12). L’apôtre ne dit pas explicitement envers qui nous sommes
débiteurs. Néanmoins nous pouvons penser à l’immense dette de reconnaissance,
de louange et d’adoration que nous avons envers Dieu. Ce chapitre va continuer
à développer devant nous quelques-uns des merveilleux privilèges chrétiens, en
particulier :
— être « conduits par l’Esprit de Dieu » (v. 14),
— avoir été « adoptés » par Dieu et placés dans la position de fils, et même d’héritiers de Dieu, de cohéritiers de Christ (v. 14-17),
— être introduits dans une telle intimité avec Dieu que nous pouvons l’appeler « Abba, Père » (v. 15),
— avoir au-dedans de nous-mêmes le témoignage de l’Esprit de Dieu, confirmant celui de notre esprit, que « nous sommes enfants de Dieu » (v. 16).
Quelle sécurité ! Quelle gloire ! Quels sujets de joie !
L’apôtre écrit : « …nous sommes débiteurs, non pas à la chair pour vivre selon la chair ». Il est d’une grande importance pratique de savoir que nous ne sommes pas débiteurs à la chair. Nous ne lui devons rien. Elle n’a aucun droit à revendiquer. Nous tenir nous-mêmes pour morts, c’est justement lui refuser tout droit.
« Car
si vous vivez selon la chair, vous mourrez ; mais si par l’Esprit vous
faites mourir les actions du corps, vous vivrez
» (v. 13). Continuellement, ces chapitres nous
montrent que le résultat du péché, c’est la mort (5:12, 21 ; 6:16,
21, 23 ; 7:5, 9, 13 ;
8:2, 6, 10 ; cf. Jacq. 1:15 ; 5:20). Ce verset 13 nous montre l’aboutissement d’une marche
selon la chair et d’une marche par l’Esprit. Tout comme on indiquerait où
conduisent deux chemins. Prenons au sérieux les passages qui nous placent
devant notre responsabilité. Ils sont là pour que nous ne prenions pas le péché
à la légère. Mais cet avertissement, si solennel qu’il soit, ne saurait rien
enlever à la sécurité absolue de ceux qui sont « dans le Christ Jésus », pour
lesquels « il n’y a donc maintenant aucune condamnation » (v. 1), dans lesquels
l’Esprit de Dieu « habite » (v. 9), que Dieu a adoptés (v. 15), et que rien « ne
pourra… séparer de l’amour de Dieu » (v. 39).
Dans ce passage, la vie et les fruits qu’elle produit sont liés. Le Seigneur Jésus s’est parfois aussi exprimé de cette manière. Quand il parle de ceux qui, à sa voix, sortiront des sépulcres, il dit : « ceux qui auront pratiqué le bien, en résurrection de vie ; et ceux qui auront fait le mal, en résurrection de jugement » (Jean 5:29). Nous savons que notre salut dépend exclusivement de notre foi, aucunement de nos oeuvres ; une multitude de passages l’atteste (notamment Romains 4:5-8). Mais le Seigneur nous rend attentifs au fait que, selon sa pensée, un croyant est quelqu’un qui aura fait le bien, et un incrédule, quelqu’un qui aura fait le mal.
Dans ce verset 13, nous
sommes exhortés à faire mourir les actions du corps.
Le corps, ici,
désigne sans doute la chair. Faire mourir les actions du corps, c’est
l’application pratique, dans la vie journalière, de la grande vérité de notre
mort avec Christ. Cet enseignement correspond à celui de Colossiens 3:5, où nos « membres » — ceux du vieil
homme — doivent être mortifiés. Ce sont donc les manifestations pratiques du
vieil homme qu’il faut « faire mourir ». Nulle part nous ne sommes invités à
faire mourir le vieil homme, mais bien à nous tenir pour morts
(Rom. 6:11). De même, ceux qui sont du
Christ sont considérés comme ayant crucifié la chair,
et non comme
devant la crucifier (Gal. 5:24).
« Si par
l’Esprit vous
faites mourir les actions du corps… ». Nous sommes sans doute ici devant un
mystère. Il y a d’une part l’activité de l’Esprit en nous, et d’autre part
notre responsabilité. Il en est de même en Galates 5, quand il est dit : « Marchez par l’Esprit, et vous
n’accomplirez point la convoitise de la chair » (v. 16) et « Si nous vivons par
l’Esprit, marchons aussi par l’Esprit » (v. 25). L’Esprit est une personne
divine. Il ne saurait être question de le mettre en activité ou de le diriger.
Nous avons au contraire à être « conduits » par lui (Rom. 8:14 et Gal. 5:18).
Lui peut se servir de nous, pas nous de lui. Et pourtant nous avons la
responsabilité de marcher de manière qu’il puisse se servir de nous. Chaque
fois que nous nourrissons la chair, que nous prenons soin d’elle, que nous
sommes occupés de notre moi, nous entravons l’action de l’Esprit en nous. Quand
nous sommes remplis de Christ, quand notre volonté propre est brisée, l’Esprit
est libre d’agir en nous, et il agit. (Voir Éph. 4:30 et 5:18.)
Les Colossiens couraient le danger d’être détournés de leur attachement à Christ par les enseignements d’une sorte de philosophie religieuse. « Que personne ne vous séduise par des discours spécieux (*) » (2:4). « Que personne ne fasse de vous sa proie par la philosophie et par de vaines déceptions, selon l’enseignement des hommes, selon les éléments du monde, et non selon Christ » (v. 8). Une certaine forme de légalisme les menaçait. Le légalisme, chez les chrétiens, c’est le mélange de la loi et de la grâce. C’était ce mal qui avait contaminé les Galates, et qui avait conduit l’apôtre Paul à leur écrire, étant très en souci à leur sujet. Un mal plus ou moins similaire mettait en péril la foi des Colossiens.
(*) Spécieux
signifie : qui a une apparence de vérité, mais qui a pour effet d’induire
en erreur.
L’apôtre répond à leur besoin en leur présentant Christ, la gloire et la dignité de sa personne, comme aussi la valeur et la portée de son oeuvre. Dans les chapitres 2 et 3, il place devant eux la grande vérité de leur identification avec Christ dans sa mort et dans sa résurrection.
Il écrit : « … en qui aussi vous avez été circoncis
d’une circoncision qui n’a pas été faite de main, dans le dépouillement du
corps de la chair par la circoncision du Christ
» (Col. 2:11).
« La circoncision faite de main », ce coup de couteau sur la chair, était un signe de sa mise à mort. Dès le temps d’Abraham, la circoncision a été un des fondements — à côté du sang des sacrifices — des relations des patriarches et du peuple d’Israël avec Dieu. Quand Dieu entre en relation avec l’homme, il juge nécessairement la chair.
En contraste avec Israël, les
chrétiens ont été circoncis d’une circoncision spirituelle. Ils l’ont été « par
la circoncision du Christ ». Cette expression désigne symboliquement sa mort, et
non la circoncision qu’il a littéralement subie lorsqu’il était un petit
enfant. « Vous avez été circoncis… par la circoncision du Christ ». Dans sa mort,
les chrétiens ont été mis à mort. La signification de cette circoncision, c’est
« le dépouillement du corps de la chair », la mise de côté de la chair. Ce qui
est dit ici correspond au dépouillement du vieil homme,
dont nous avons
déjà parlé dans notre chapitre 4.
Après avoir pris l’image de
la circoncision, qui évoque la mort, l’apôtre parle du baptême chrétien, figure
de la mort et de la résurrection avec Christ : « …étant ensevelis avec lui dans le baptême, dans lequel aussi vous
avez été ressuscités ensemble par la foi en l’opération de Dieu qui l’a
ressuscité d’entre les morts
» (v. 12).
Ce n’est évidemment pas le baptême qui nous fait mourir et ressusciter avec Christ, pas plus qu’il ne nous sauve. Nous sommes sauvés par la foi.
Christ est mort et a été
ressuscité. Cela a eu lieu une fois pour Christ ; puis sa mort et sa
résurrection nous ont été appliquées lorsque nous avons cru. Elles sont
devenues vraies de nous. La cérémonie du baptême est en quelque sorte notre ensevelissement,
le constat officiel et public de notre mort avec Christ. Un enseignement
analogue est donné au début de Romains 6,
où il est précisé : « nous tous qui avons été baptisés pour le Christ
Jésus, nous avons été baptisés pour sa mort
» (v. 3).
Dans les versets 11 et 12 cités ci-dessus, l’apôtre a donc posé les bases de son enseignement au sujet de notre identification avec Christ dans sa mort et dans sa résurrection. Il en tire ensuite les conséquences pratiques : « Si vous êtes morts avec Christ… » (v. 20) et « Si donc vous avez été ressuscités avec le Christ… » (3:1). Il développe ces conséquences en rapport avec les besoins particuliers des Colossiens.
« Si vous êtes
morts avec Christ aux éléments du monde, pourquoi, comme si vous étiez encore
en vie dans le monde, établissez-vous des ordonnances, — ne prends pas, ne
goûte pas, ne touche pas ! — (…) selon les commandements et les
enseignements des hommes (…), pour la satisfaction de la chair ?
» (Col. 2:20-23).
Le reproche que fait ici l’apôtre est très fort. Il dit en substance : vous faites comme si vous étiez encore en vie dans ce monde, alors que vous êtes morts ! Par votre marche, vous contredisez ce que vous êtes en réalité, ce que Dieu a fait de vous ! Ne nous sentons-nous pas concernés ?
L’objet spécial du reproche
fait aux Colossiens était la tendance au légalisme. Ils instituaient des
ordonnances. Qu’elles soient juives ou autres, les ordonnances s’adressent à la
chair. Elles font partie des « éléments
du monde
» (2:8),
desquels la mort de Christ nous a séparés. Au verset 14, c’est « l’obligation »
consistant en ordonnances qui a été effacée, étant clouée à la croix. Ici, au
verset 20, c’est le croyant qui est mort à ces choses. La rupture est complète.
Dans son exposé, l’apôtre mentionne d’abord les ordonnances judaïques (v. 16, 17), dont l’origine était divine, mais qui s’appliquaient à l’homme dans la chair, à l’homme dans son état naturel, en le supposant capable de les respecter. Ensuite, l’apôtre passe aux ordonnances que l’on ajoutait à celles de la loi : des choses qui sont « selon les commandements et les enseignements des hommes » (v. 22). C’est l’une des tendances de l’homme d’ajouter des choses de sa propre invention à ce que Dieu a communiqué. Et la fin du verset 23 nous montre le but final de l’esprit légal. Sous de belles apparences, on recherche « la satisfaction de la chair », c’est-à-dire la satisfaction de soi-même.
« Si donc vous avez
été ressuscités avec le Christ, cherchez les choses qui sont en haut, où le
Christ est assis à la droite de Dieu ; pensez aux choses qui sont en haut,
non pas à celles qui sont sur la terre ; car vous êtes morts, et votre vie
est cachée avec le Christ en Dieu
» (Col. 3:1-3).
Après le côté négatif, voici le positif. Votre ancienne vie a pris fin à la croix de Christ. Il est ressuscité et vous participez de sa vie de résurrection. Lui est dans le ciel et, bien que vous soyez sur la terre quant à votre corps, votre vie est là-haut. Soyez donc occupés des choses qui sont en haut. Cherchez-les, pensez-y. C’est là que sont vos vrais intérêts. Tout ce qui le concerne vous concerne puisque vous êtes unis à lui. Apprenez donc à le connaître, lui, toujours davantage.
Il est maintenant caché à ce monde, et votre vraie vie l’est aussi. Un jour il sera manifesté en gloire, et vous avec lui : « Quand le Christ qui est notre vie, sera manifesté, alors vous aussi, vous serez manifestés avec lui en gloire » (v. 4).
Ensuite, l’apôtre rappelle aux chrétiens qu’ils sont sur la terre, en attirant leur attention sur les dangers auxquels ils sont toujours exposés, bien que Christ, qui est leur vie, soit dans le ciel.
« Mortifiez
donc vos membres qui sont sur la terre, la fornication, l’impureté, les
affections déréglées, la mauvaise convoitise, et la cupidité, qui est de
l’idolâtrie
» (Col. 3:5). Nos membres, ici, ce ne sont
pas les membres de nos corps physiques, comme en Romains 6:13, où il est dit : « Livrez…
vos membres à Dieu comme instruments de justice ». À nos corps créés par Dieu,
nous avons à « rendre un certain honneur » (Col. 2:23) ; ils sont « pour le Seigneur » (1 Cor. 6:13). Les membres que nous avons à
mortifier, la liste le montre, ce sont les membres du vieil homme.
Véritablement, le chrétien est un être complexe ! Sa vie est
indissolublement liée à Christ dans le ciel, et sur la terre, il a des membres
tels que ceux-là !
Mortifiez-les, dit l’apôtre, tenez-les dans la mort. N’en prenez pas soin, ne les nourrissez pas. Ce vieil homme, vous l’avez dépouillé, et vous avez revêtu le nouvel homme (v. 9, 10). Mettez votre vie pratique en harmonie avec ce que vous êtes véritablement devant Dieu.
« Ne mentez point
l’un à l’autre, ayant dépouillé le vieil homme avec ses actions et ayant revêtu
le nouvel homme qui est renouvelé en connaissance, selon l’image de celui qui
l’a créé
» (Col. 3:9,
10).
Nous nous sommes déjà arrêtés, dans notre chapitre 5, sur les termes « dépouillé » et « revêtu », relatifs au vieil homme et au nouvel homme.
Il est dit ici du nouvel
homme qu’il est « renouvelé en connaissance ». Dès la chute, dans le jardin
d’Eden, l’homme avait acquis une faculté d’origine divine : « la
connaissance du bien et du mal ». C’est la conscience.
Cette faculté l’a
plus ou moins guidé, dans la mesure où il l’a écoutée et a laissé la parole de
Dieu l’éclairer. Lors de la nouvelle naissance, il y a un renouvellement
merveilleux de cette connaissance, les instincts du nouvel homme, si nous
pouvons dire ainsi, étant en accord avec les pensées de Dieu.
En effet, le nouvel homme est
« selon l’image de celui qui l’a créé ». Faveur inestimable ! Il est vrai
que les termes utilisés ici sont inférieurs à ceux qui concernent Christ. Lui
est « l’image
du Dieu
invisible » (1:15), et « en lui
habite toute la plénitude de la déité corporellement » (2:9). Bien que nous soyons « accomplis en lui » (2:10), parfaits en lui, il garde sa
place de Créateur et nous, celle de créatures.
Les passages qui présentent les chrétiens comme
crucifiés avec Christ, ou identifiés avec Christ dans sa mort, supposent
qu’avant d’avoir reçu Jésus, ils étaient vivants.
Ils vivaient dans
leurs péchés. Par la mort de Christ, cette vie dans la chair a pris fin, et une
nouvelle vie a été donnée au croyant. Dans l’épître aux Colossiens, cette vie
est très distinctement la vie de Christ ressuscité.
L’épître aux Éphésiens
présente un autre point de départ : non des hommes vivant dans leurs péchés,
mais des hommes morts dans leurs péchés
(2:1). Par l’oeuvre de Christ, ces hommes sont vivifiés,
et rendus participants de sa vie de résurrection.
« Mais
Dieu, qui est riche en miséricorde, à cause de son grand amour dont il nous a
aimés, alors même que nous étions morts dans nos fautes, nous a vivifiés
ensemble avec le Christ, … et nous a ressuscités ensemble, et nous a fait
asseoir ensemble dans les lieux célestes dans le Christ Jésus
» (Éph. 2:4-6).
Comme on le voit, cette épître contient ici un élément de plus que celle aux Colossiens : les rachetés sont vus assis dans les lieux célestes. Par le fait de leur union avec Christ, et parce que Christ est dans le ciel, les croyants sont considérés maintenant comme déjà assis dans les lieux célestes. C’est là qu’ils sont bénis de toute bénédiction spirituelle en Christ (1:3). Et, chose merveilleuse, ils ont été « rendus agréables dans le Bien-aimé » (1:6).
Vivifiés, ressuscités, nous possédons la vie éternelle. Mais qu’est-ce que la vie éternelle ?
Premièrement, c’est une vie
qui dure toujours. « Si quelqu’un garde ma parole, il ne goûtera point la mort,
à jamais » (Jean 8:52). Et à
cela se rattache immédiatement le pardon des péchés, puisque « les gages du
péché, c’est la mort » (Rom. 6:23).
Ne pas mourir, c’est échapper aux conséquences du péché. Christ est mort pour
nous. La justice de Dieu a été accomplie à la croix. « Par une seule justice les
conséquences de cette justice furent envers tous les hommes en justification
de vie
» (Rom. 5:18).
Deuxièmement, plusieurs passages nous présentent Jésus lui-même comme étant la vie éternelle. « Moi, je suis le chemin, et la vérité, et la vie » (Jean 14:6). « Nous vous annonçons la vie éternelle, qui était auprès du Père et qui nous a été manifestée » (1 Jean 1:2). « Lui est le Dieu véritable et la vie éternelle » (1 Jean 5:20). Ce n’est pas seulement que le Fils de Dieu « a la vie en lui-même », tout comme le Père, et qu’il « vivifie ceux qu’il veut » ; ce n’est pas seulement qu’il « donne la vie éternelle » (Jean 5:26, 21 ; 10:28), mais il est lui-même la vie éternelle. Ainsi, « celui qui a le Fils a la vie, celui qui n’a pas le Fils de Dieu n’a pas la vie » (1 Jean 5:12).
Troisièmement — et ceci fait
le trait d’union entre les deux premiers aspects — la parole de Dieu nous
montre que la vie que nous avons reçue n’est aucunement indépendante de Celui
qui en est la source. Un enfant reçoit de sa mère une vie indépendante de
celle-ci ; dès qu’il est né, il n’est pas indispensable qu’elle vive pour
qu’il vive. Au contraire, la vie du croyant est absolument liée à celle de
Christ. Lui-même a dit : « Comme le Père qui est vivant m’a envoyé, et que
moi, je vis à cause du Père, de même celui qui me mangera, celui-là aussi vivra
à cause de moi » (*) (Jean 6:57). Il dit un peu plus loin, dans
le même évangile : « Parce que moi je vis, vous aussi vous vivrez » (14:19). L’apôtre Jean écrit : « Dieu nous a donné la vie éternelle, et
cette vie est dans son Fils
» (1 Jean 5:11).
(*) C’est-à-dire, selon la note : « je vis parce que le Père est et vit » et « celui qui me mangera vivra parce que je suis et vis »
Cet enseignement de Jean
rejoint celui de Paul dans l’épître aux Colossiens : « Car vous êtes morts,
et votre vie est cachée avec le Christ
en Dieu. Quand le Christ qui
est notre vie,
sera manifesté… » (3:3,
4).
Il est important de remarquer
que notre vie nouvelle est celle de Christ ressuscité. C’est pour cette raison
que nous sommes non seulement vivifiés,
mais ressuscités ensemble
avec Christ
(Éph. 2:6 ;
Col. 2:12). Le Seigneur Jésus
l’a enseigné à ses disciples par un acte symbolique, le soir même du jour de la
résurrection : « Il souffla en eux, et leur dit : Recevez l’Esprit
Saint » (Jean 20:23). Ce n’était
pas encore la venue du Saint Esprit sur la terre, qui n’a eu lieu que cinquante
jours plus tard. Cet acte du Seigneur rappelait ce que le Créateur avait fait
avec l’homme, lors de sa création, lorsqu’il avait soufflé dans ses narines une
respiration de vie (Gen. 2:7).
Nous vivons donc de la vie de Christ ressuscité.
Les passages que nous venons de citer ne sont pas des exhortations, ils nous décrivent un état de fait. Ils nous montrent la nature et le caractère de la vie nouvelle que nous avons reçue. Mais quelles conséquences pratiques ce lien vital entre Christ et nous ne devrait-il pas avoir ! Si notre vie est dans le ciel, où devraient être nos pensées, nos intérêts, nos biens, nos coeurs ? Et quels reflets de cette vie ne devrait-il pas y avoir en nous sur cette terre !
« Pour moi, vivre, c’est Christ », disait l’apôtre Paul (Phil. 1:21).
Selon le principe de la loi du Sinaï, il faut faire
pour être :
il faut accomplir
la loi pour être
juste devant Dieu. Au contraire, les exhortations du christianisme quant à
notre marche sont fondées sur ce que Dieu a fait
de nous, sur ce que
nous sommes
en Christ, sur notre position devant lui. Il s’agit de faire
parce que nous sommes.
L’épître aux Romains déploie d’abord, dans ses onze premiers chapitres, le plan merveilleux de Dieu pour le salut de l’homme, tout ce que Dieu a fait pour nous et en nous. Sur cette base, l’épître donne des exhortations pratiques, à partir du chapitre 12.
Dans l’épître aux Éphésiens, après la partie doctrinale, nous lisons : « Je vous exhorte donc, moi, le prisonnier dans le Seigneur, à marcher d’une manière digne de l’appel dont vous avez été appelés » (4:1).
Nous y trouvons aussi :
« Soyez bons les uns envers les autres, compatissants, vous pardonnant les uns
aux autres comme Dieu
aussi, en Christ, vous a pardonné. Soyez donc
imitateurs de Dieu comme de bien-aimés enfants, et marchez dans l’amour, comme
aussi le Christ
nous a aimés » (4:32 ; 5:1). Dieu vous a pardonné —
pardonnez ! Vous êtes des enfants bien-aimés — marchez dans l’amour.
« Vous étiez autrefois ténèbres, mais maintenant vous êtes lumière dans le Seigneur ; marchez comme des enfants de lumière » (Éph. 5:8). Marchez d’une manière conforme à ce que vous êtes !
Dans notre chapitre précédent, nous avons déjà souligné le lien étroit, dans l’épître aux Colossiens, entre les grands faits de notre mort et de notre résurrection avec Christ et les conséquences qui en découlent pour nos vies pratiques. Le verset suivant illustre aussi ce principe : « Revêtez-vous donc, comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, d’entrailles de miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de longanimité… » (Col. 3:12). Vous êtes des élus de Dieu, des saints, des bien-aimés de Dieu. Manifestez donc les caractères qui correspondent à ce que vous êtes.
Dans sa grâce merveilleuse,
Dieu « nous a rendus agréables
dans le Bien-aimé » (Éph. 1:6). Nous sommes
agréables à ses yeux parce que nous sommes en Christ et que Christ lui est
agréable. Et c’est un puissant motif pour que, dans notre vie de chaque jour,
nous nous appliquions « avec ardeur à lui être agréables
» (2 Cor. 5:9).
Marcher d’une manière qui soit en accord avec ce que Dieu a fait de nous, ce n’est pas simplement une obligation qui découle d’une dignité reçue — comme on dit dans ce monde : « noblesse oblige ». En fait, il s’agit de la puissance de la vérité elle-même sur nos âmes, lorsqu’elle est saisie par la foi. Elle produit cet effet en nous.
« En ceci est consommé
l’amour avec nous, afin que nous ayons toute assurance au jour du jugement,
c’est que, comme il est, lui, nous sommes, nous aussi, dans ce monde
» (1
Jean 4:17). Merveilleuse déclaration ! Déjà maintenant, tandis que nous
sommes dans ce monde, aux yeux de Dieu, nous sommes « comme » est son Fils, « comme
il est, lui
». Notre foi peut se saisir avec bonheur de ces paroles divines,
source de paix pour nos coeurs. Elles nous donnent toute assurance en vue du
jour du jugement, puisque nous serons dans la perfection même du Juge devant
lequel nous comparaîtrons. Non pas à cause de ce que nous aurons fait, mais
comme résultat de son oeuvre à lui.
Et en attendant ce jour,
quelle est la norme que Dieu attend de ses rachetés quant à leur marche sur la
terre ? « Celui qui dit demeurer en lui, doit lui-même aussi marcher
comme lui a marché
» (1 Jean 2:6). Pas moins que cela ! Pour l’Israélite,
la mesure était la loi ; pour le chrétien, c’est Christ.
Quatre passages de la seconde épître aux Corinthiens vont nous montrer comment la vie de Jésus peut être vue dans les siens. Car si, devant Dieu, ceux-ci ont l’immense privilège de vivre de la vie de Christ ressuscité, il faut aussi que cela soit vu devant le monde. Chacun de ces passages contient l’expression : « afin que ».
« Nous avions en nous-mêmes la sentence de
mort, afin que nous n’ayons pas confiance en nous-mêmes, mais en Dieu qui
ressuscite les morts
» (2 Cor. 1:9). L’apôtre Paul dit cela
relativement aux persécutions qu’il venait de traverser en Asie mineure, ayant
connu des souffrances telles qu’il avait « désespéré même de vivre » (v. 8). Cela
avait été l’occasion d’expérimenter les délivrances de Dieu (v. 10) et ses
consolations (v. 5). L’apôtre n’était nullement découragé, et il discernait
même le but qu’avait le Seigneur en lui envoyant ces épreuves. C’était pour
qu’il n’ait aucune confiance en lui-même, mais toute confiance en Dieu, en Dieu
qui ressuscite les morts. La confiance en nous-mêmes, en nos propres forces, en
notre propre sagesse, etc., est au fond une négation de la « sentence de mort »
prononcée par Dieu sur l’homme naturel. Paul connaissait la « sentence de mort »
que ses ennemis avaient prononcée sur lui et cela l’aidait à vivre en
conformité avec celle que Dieu avait prononcée. Cette expression — la sentence
de mort — paraît être une clé pour comprendre l’enseignement de l’apôtre Paul
sur l’ensemble du sujet dont nous nous sommes occupés. (*)
(*) La sentence est la déclaration que prononce le juge, à l’issue d’un procès, pour définir la peine à laquelle il condamne l’accusé. Dire qu’on a en soi-même « la sentence de mort », comme le fait Paul ici, c’est dire qu’on est un condamné à mort. À la croix, Dieu a prononcé la sentence de mort sur l’homme — sur l’homme en tant qu’enfant d’Adam — et sur le monde.
« Mais nous avons
ce trésor dans des vases de terre, afin que l’excellence de la puissance soit
de Dieu et non pas de nous
» (2 Cor. 4:7). Paul vient de parler de la
lumière que Dieu avait allumée dans son coeur, non seulement pour l’éclairer
lui, mais surtout pour faire luire dans ce monde la lumière de l’évangile. Dieu
voulait manifester sa puissance dans ce « vase d’élection », et il avait choisi
pour cela un vase de terre.
Bien fragile et de peu de valeur ! —
voilà comment l’apôtre s’estimait lui-même. Et c’est ce qui le rendait apte au
déploiement de la puissance de Dieu en lui. « Je me glorifierai donc très
volontiers plutôt dans mes infirmités, afin que la puissance du Christ demeure
sur moi », dit-il un peu plus loin (12:9).
« …portant toujours
partout dans le corps la mort de Jésus, afin que la vie aussi de Jésus soit
manifestée dans notre corps
» (2 Cor. 4:10). L’apôtre connaissait les
tribulations et les persécutions ; il pouvait être dans la perplexité et
même abattu, quoique jamais abandonné, jamais sans ressources. Mais Dieu se
servait de ces circonstances éprouvantes pour accomplir en lui un travail d’une
immense valeur : l’amener à reproduire quelque chose de la vie de Jésus.
Il est frappant de voir ici la liaison entre la mort et la vie. Il faut que la
mort de Jésus soit appliquée dans nos corps, concrètement et journellement,
pour que la vie de Jésus puisse y être manifestée. Il est vrai que cela ne
suffit pas, et que le lien de nos coeurs avec Jésus vivant dans le ciel est
tout aussi indispensable. C’est en « contemplant à face découverte la gloire du
Seigneur » que « nous sommes transformés en la même image, de gloire en gloire,
comme par le Seigneur en Esprit » (3:18).
Ce que Paul expérimente ici,
en suivant le Seigneur, c’est la réalisation concrète de ce que Jésus avait
demandé : « Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il se renonce soi-même,
et qu’il prenne sa croix,
et me suive » (Matt. 16:24).
« Car nous qui
vivons, nous sommes toujours livrés à la mort pour l’amour de Jésus, afin que
la vie aussi de Jésus soit manifestée dans notre chair mortelle
» (2 Cor. 4:11). Le verset
précédent nous montrait l’apôtre Paul dans un chemin où nous avons tous à le
suivre ; car, d’une manière ou d’une autre, il faut que tous nous portions
« toujours partout dans le corps la mort de Jésus ». Ce verset-ci nous présente
un martyr, quelqu’un de livré à la mort pour l’amour de Jésus. Les apôtres
étaient « comme des gens voués à la mort » (1 Cor. 4:9). Mais tandis que la « sentence de mort » était sur eux, Dieu
se glorifiait en reproduisant en eux les caractères de Jésus.
Chacun dans le chemin où Dieu nous a placés, ayons à coeur de manifester quelque chose de cette vie de Christ. C’est le fruit naturel de la nouvelle vie que nous avons reçue.