Providence ou foi ?

William Kelly [ajouts bibliquest entre crochets]

Im Glauben leben, 2022-2 p.3

Table des matières :

1 - La chair - la vieille nature

2 - Le danger du légalisme

3 - Se diriger d’après les circonstances ?

4 - La foi de Moïse

5 - Conclusion


1 - La chair - la vieille nature

Il est triste de constater que les mêmes principes qui régissent la vie d’un non-croyant peuvent aussi agir chez un chrétien croyant. Ils affaiblissent ou entravent alors une vie conséquente à la suite de Christ. « Ce qui est né de la chair est chair » (Jean 3:6). Certes, le croyant n’est pas « dans la chair » et peut « plaire à Dieu » en vertu de la grâce (cf. Rom. 8:8,9), mais la chair, la nature pécheresse, se trouve encore en lui. Et tant que la chair n’est pas jugée, elle s’avérera toujours être un obstacle douloureux sur le chemin de la foi. C’est pourquoi un homme né de nouveau ne peut jamais faire la grimace sur le mal chez ses compagnons non-croyants. Car la même tendance au péché, ou plutôt les mêmes racines du mal, se trouvent aussi dans son propre cœur — bien que, d’un autre côté, en tant que baptisé pour la mort de Christ, il ait le droit de dire qu’il est crucifié avec Christ. Il a crucifié sa chair, avec toutes ses passions et ses convoitises (cf. Gal. 2:19 ; 5:24). C’est son « arme ». Il est mort et, comme tel, il est libéré (affranchi) du péché. Il est justifié. C’est le point de vue de Dieu, car Il considère le croyant comme mort et ressuscité avec Christ. Mais ce fait doit maintenant être réalisé pratiquement par la foi. « Nous qui sommes morts au péché, comment vivrons-nous encore dans le péché ? » (Rom. 6:2).

Dans la pratique, le croyant fait régulièrement la douloureuse expérience que la chair est vivante en lui. Elle travaille activement au mal et cherche toujours à prouver son inimitié contre Dieu, car « la pensée de la chair … ne se soumet pas à la loi de Dieu, car elle ne le peut même pas » (Rom. 8:7). Dois-je donc lutter contre la chair ? Non, je perdrai inéluctablement ce combat, car ce n’est pas le moyen ordonné par Dieu et par-là ce n’est pas non plus la source d’aide que la foi met à ma disposition. L’Esprit de Dieu par le moyen de l’apôtre, nous montre une autre manière de traiter cette question du péché. Il dit tout d’abord : « Tenez-vous vous-mêmes pour morts au péché, mais pour vivant à Dieu dans le Christ Jésus », puis : « Que le péché ne règne donc pas dans votre corps mortel pour que vous obéissiez à ses convoitises » (Rom. 6:11,12). Le jugement de Dieu sur le péché a été exécuté dans la mort de Christ, et maintenant, en tant que morts avec Lui, nous sommes morts au péché. La foi quant à ce fait est l’arme qui, dans la pratique quotidienne de la vie, nous donne la victoire sur les attaques du péché, de sorte qu’il ne règne pas sur nous.


2 - Le danger du légalisme

Mais celui qui ne connaît pas cette épée donnée par Dieu et qui tente de lutter contre la chair avec ses propres armes misérables, échouera lamentablement. Celui qui se place sous la loi dans sa vie comme chrétien, bien qu’il soit justifié par la foi, est-ce étonnant que ses transgressions le dépassent ? Est-ce étonnant que la corruption de la chair commence par en être activée ? - que la loi se révèle, une fois de plus, être un « ministère de condamnation » (cf. 2 Cor. 3.9) ? Non, ce qui nous rend capables de porter du fruit pour Dieu, c’est uniquement la conscience de Sa grâce. C’est la conscience de ce que Sa grâce a produit en nous unissant à Celui qui est ressuscité d’entre les morts. Cette grâce est au-dessus de toutes les exigences de la loi et de tous les effets du péché. Par cette grâce, Dieu nous a admis à Sa propre présence, sainte et bénie. C’est ce que le Saint-Esprit présente toujours à nos cœurs et dans nos cœurs, de manière claire et toujours renouvelée. « Car le péché », dit l’apôtre, « ne dominera pas sur vous, parce que vous n’êtes pas sous la loi, mais sous la grâce » (Rom. 6:14).

L’homme non converti — s’il se préoccupe un tant soit peu de Dieu et de sa propre âme — se place naturellement et nécessairement sous la loi et doit constater qu’elle est effectivement « un ministère de mort » (2 Cor. 3:7). Mais l’homme converti a lui aussi tendance à conformer sa vie à la loi, voire à fonder son salut sur elle. Et dans la mesure où il glisse dans le légalisme, il devient inutile pour Dieu et s’adapte très certainement au monde. C’est pourquoi, chers frères et sœurs, tenons ferme la grâce « par laquelle nous pouvons servir Dieu d’une manière qui Lui soit agréable avec révérence et crainte. Car aussi notre Dieu est un feu consumant » (Héb. 12:28,29). Il est vrai que la chair pourrait maintenant dire : « Demeurons dans le péché, afin que la grâce abonde ! » (cf. Rom. 6:1). Mais ce n’est pas une bonne recette. Allons-nous lancer un défi à la grâce alors qu’elle est le seul fondement de notre sainteté et de notre salut ? La grâce de Dieu ne nous a pas seulement sauvés, mais aussi elle nous instruit « afin que, reniant l’impiété et les convoitises mondaines, nous vivions dans le présent siècle, sobrement, justement et pieusement » (Tite 2:12).


3 - Se diriger d’après les circonstances ?

Mais tous les croyants ne sont pas enclins au légalisme. Certains tombent parce qu’ils n’ont pas reconnu l’action de Dieu ou qu’ils ne l’ont reconnue qu’imparfaitement. Satan en profite alors pour le rendre indifférent à la question de la volonté de Dieu. Un exemple largement répandu, mais condamné par l’Écriture, est l’habitude de tout attribuer à une certaine providence. On ne regarde que les circonstances au lieu de marcher dans la foi. Certains chrétiens défendraient même cette attitude. Mais le croyant est appelé à vivre « comme s’il voyait l’invisible » : « Vous servez le Seigneur Christ » (Héb. 11:27 ; Col. 3:24). Il est relativement facile de se comporter comme les circonstances le suggèrent. Et si nous élevons ensuite ces circonstances au rang de règle de conduite qu’on prétend divine, cela ne signifie rien d’autre que l’abandon du chemin de la foi au profit de la Providence. Dans combien de pièges ce guide aveugle n'a-t-il pas déjà conduit des chrétiens infidèles ou manquant de vigilance !

Même le pauvre monde incrédule parle volontiers d’« heureux hasard providentiel ». Une telle notion ne nécessite pas la foi, cela revient même à laisser de côté un Dieu qui agit présentement. Pour nous, il s’agit du Dieu qui condescend à guider Ses enfants de Ses yeux, que nous avons appris à connaître par Jésus Christ, qui s’est approché de nous pour nous rapprocher de Lui. Mais les hommes de ce monde préfèrent discuter de choses abstraites plutôt que de se laisser guider dans cette proximité du Dieu vivant. Les expressions « providence » et « heureux hasard » sont des expressions courantes et agréables, tandis que « Dieu s’est manifesté dans la chair » sonne plutôt étrange et indésirable. Il faut donc au fond un peu de discernement spirituel pour voir la main de Dieu dans les circonstances, mais il faut une grande force spirituelle pour en saisir les tenants et aboutissants et pour reconnaître la volonté du Seigneur au milieu des circonstances. Le croyant ne devrait pas être guidé par ce qu’il voit, mais par ce qu’il ne voit pas.

Il est donc particulièrement important d’avoir un cœur qui ne soit pas partagé et un œil simple. Ce n’est qu’alors que le corps tout entier sera plein de lumière (cf. Luc 11:34). Si notre œil est dirigé sur les circonstances plutôt que sur Christ, nous nous égarerons à coup sûr. Il ne s’agit pas ici de nier la providence de Dieu. Celui qui la néglige en tant que chrétien subit certainement une perte. Qu’il soit simplement bien établi qu’un chrétien ne doit jamais se laisser guider uniquement par les circonstances. Elles doivent toujours être jugées à la lumière de la Parole parfaite de Dieu. Toutefois, je crois que Dieu change souvent les circonstances en raison de notre manque de foi ou qu’Il les dispose de manière à mettre à l’épreuve notre fidélité. Autrement dit, un chrétien peut se retrouver dans une position qu’il n’a pas recherchée, mais qui a été provoquée par Dieu — et qu’il doit néanmoins abandonner par la foi ! Ainsi, même si la Providence divine l’a placé à une certaine place, il se peut qu’il ne doive pas y rester. L’histoire biblique de Moïse en fournit un exemple frappant.


4 - La foi de Moïse

Une foi forte caractérisait déjà les parents de Moïse, car ce n’est pas seulement l’amour parental qui les poussa à cacher leur enfant pendant trois mois. « Par la foi, Moïse, étant né, fut caché trois mois par ses parents, […] et ils ne craignirent pas l’ordre du roi » (Héb. 11:23). Mais ce n’est pas de cette foi qu’il va être ensuite question. Je ne fais pas non plus allusion à la main de Dieu qui alla au-devant de leur foi et qui orienta les événements de manière à favoriser l’accomplissement de Ses plans vis-à-vis de Moïse et du peuple. C’est plutôt le comportement de Moïse lui-même qui est plein d’instructions pour nous. Nous apprenons ici comment la foi gère les circonstances que Dieu a précédemment dirigées.

« Par la foi, Moïse, étant devenu grand, refusa d’être appelé fils de la fille de Pharaon, et choisit plutôt d’être dans l’affliction avec le peuple de Dieu plutôt que de jouir pour un temps des délices du péché, estimant l’opprobre de Christ comme un plus grand trésor que les richesse de l’Égypte, car il avait les yeux fixés sur la rémunération » (Héb. 11:24-26).

Comment Moïse était-il entré dans la maison du Pharaon ? C’était clairement la providence de Dieu ! Qu’est-ce qui l’en a fait sortir ? Ce n’a été rien d’autre que la foi ! Jamais les circonstances n’ont été aussi clairement marquées par le doigt de Dieu que dans l’histoire de l’enfant Moïse. Malgré l’ordre du roi, la fille du Pharaon a recueilli l’enfant voué à la mort et l’a élevé comme son propre fils. La providence de Dieu l’a placé dans une position brillante qu’il n’avait ni recherchée ni attendue. Il reçut une excellente éducation, fut « instruit dans toute la sagesse des Égyptiens » et devint « puissant dans ses paroles et dans ses actions » (Actes 7:22). Pourquoi ne pas tirer profit de ses compétences et de sa sagesse ? Pourquoi ne pas se servir de l’influence que lui conféraient sa position élevée et sa proximité avec les personnages les plus éminents du royaume ? Pourquoi ne pas mettre au service du peuple de Dieu, avec sagesse et reconnaissance, des dons manifestement si providentiels ? Quelle bénédiction s’il avait réussi à ce que « le Pharaon tyran » devienne « le Pharaon protecteur d’Israël » ! Tout cela n’aurait-il pas été la réaction digne d’un homme qui, sans ambition ni efforts personnels, avait été amené d’une manière si inhabituelle dans la proximité immédiate du trône de ce monde ? Ne devait-il pas rendre son bienfait à la femme généreuse qui l’avait comblé d’une telle bonté ? De plus, dans quel but Dieu avait-il si merveilleusement tout dirigé, si ce n’est de permettre à Moïse d’utiliser le sceptre de l’Égypte pour libérer le peuple de Dieu et agir en sa faveur ?

Tout cela aurait été des considérations naturelles basées simplement sur les circonstances conduites par Dieu — et pourtant Moïse en décida autrement. « Par la foi, Moïse, étant devenu grand, refusa d’être appelé fils de la fille de Pharaon ». Il se posa simplement la question suivante : Dieu prend-il plaisir à ce que je fais ici ? Où est le cœur de Dieu ? N’est-il pas avec Son peuple ?

Ce peuple était peut-être souffrant, misérable et indigne. Il pouvait ne pas comprendre grand-chose et n’apporter aucune résonance à l’amour et à la foi qui amenaient Moïse à être prêt à renoncer à tout. Le peuple pouvait penser que l’influence de Moïse à la cour de Pharaon aurait pu leur être plus utile que son dévouement jusqu’à se sacrifier. En tant que fils de la fille de Pharaon, n’aurait-il pas pu obtenir bien plus pour son peuple s’il était resté dans sa position au lieu d’aller souffrir avec son peuple ? Pourtant Moïse ne se soucia rien de tout cela, mais plutôt de ces pauvres prisonniers qu’était le peuple de Dieu ! C’était trop peu pour lui de se contenter d’être de cœur avec son peuple, tandis qu’il vivait loin d’eux dans le magnifique palais royal de l’Égypte. D’un coup d’œil clair, il évalua tout ce que la fille du Pharaon avait à lui offrir comme « délices temporaires du péché ». Il renonça délibérément aux honneurs prestigieux et à l’influence dans le monde dont la Providence l’avait comblé. Au lieu de cela, il estima « l’opprobre du Christ comme un plus grand trésor que les richesse de l’Égypte ». Avec quoi Dieu s’identifiait-Il : avec le palais du Pharaon ou avec Israël dans la fournaise de la souffrance ? Si Moïse avait suivi la Providence, il aurait essayé d’aider, de soulager et peut-être finalement de libérer Israël grâce aux privilèges que lui offrait sa position. Mais la foi l’a amené à rompre avec le monde et à s’identifier avec le peuple de Dieu. Le monde hait le peuple de Dieu, et il peut lui être permis de le réduire en esclavage. Mais le monde peut-il lui apporter une quelconque bénédiction ? Jamais, au grand jamais ! Moïse, en tant qu’homme de foi, aurait reculé devant l’idée de permettre au monde de faire quelque chose de ce genre. Cela aurait signifié que le monde était au-dessus du peuple, car « sans contredit, le moindre est béni par celui qui est plus excellent » (Héb. 7:7). C’est pourquoi Moïse a tout abandonné et s’est appuyé uniquement sur Dieu. Il ne voulut s’épargner ni perte, ni souffrance, ni opprobre, mais il choisit délibérément ce chemin parce que Dieu y était. Il désirait être là où Dieu était, et auprès de ceux que Dieu aimait. En Exode 3:7-9 Dieu dit : « J’ai vu l’affliction de mon peuple qui est en Égypte, et j’ai entendu ses cris à cause de ses oppresseurs, car je connais ses douleurs. Et je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens… Et maintenant, voici, le cri des fils d’Israël est venu jusqu’à moi ; et j’ai vu aussi l’oppression dont les Égyptiens les accablent ».


5 - Conclusion

Nous voyons donc que la Providence peut nous placer dans une position que, selon la volonté de Dieu, nous ne devrions pas utiliser mais plutôt abandonner. D’un point de vue purement extérieur, les meilleures opportunités peuvent certes s’y présenter, mais la foi porte un jugement différent. Elle ne cherche pas sa propre gloire, mais celle de Dieu ; elle ne cherche pas simplement à alléger la situation, mais selon Dieu elle vise la libération. La foi s’appuie sur les promesses de Dieu à Son peuple et regarde vers la rémunération future.